La valse des chanteurs a t-elle trouvé un terme au sein de Journey ? Alors que jadis, le groupe avait comme cheville ouvrière Steve Perry, il semble que Journey, privé de son plus grand vocaliste, n'arrive plus à se structurer autour d'un chanteur incontestable. Après Steve Augeri, victime de problèmes récurrents de cordes vocales et Jeff Scott Soto, n'ayant eu l'heur de plaire à une partie du public américain, Journey a jeté son dévolu sur un jeune philippin, Arnel Pineda, découvert sur… YouTube. Les rencontres musicales, à l'instar des rencontres amoureuses, se font donc aussi via internet.

À l'écoute de ce nouvel opus, on croit vite comprendre les raisons du choix de Schon et de Cain en faveur de Pineda : dès l'entame de l'excellent single « Never Walk Away », le mimétisme de chant avec celui de Perry est plus flagrant que tout. En fait, ni Augeri et encore moins Soto n'auraient pu atteindre une telle ressemblance. Au demeurent Pineda est un clone de qualité, plein de chaleur et d'énergie : il n'est pas à Steve Perry ce que fut par exemple Tim Owens pour Rob Halford. Dont acte.

Le choix de se doter d'une chanteur apte à dupliquer les particularités du chant de Perry s'explique par une orientation musicale générale : autant Generations s'était essayé à quelques variations, en faisant appel notamment aux contributions vocales de chacun des membres, autant ce Revelation nous renvoie à la période la plus faste du groupe : entre Escape et Frontiers. L'orientation vers un classicisme affiché semble avoir été plutôt payante puisque l'album a commencé sa carrière à la cinquième place du Billboard US. Au niveau strictement musical, je ne suis pas sûr que l'optique soit si payante : un certain nombre de titres semble trop « calibré » pour être franchement satisfaisant. Ainsi si « Like A Sunshower » ou « Wildest Dreams » sont du pur Journey, ils manquent d'allant et de créativité. Même un titre plus brûlant comme « Change For The Better » n'arrive pas à surprendre malgré la qualité de ses backing vocals

Ce Revelation porterait fort mal son nom, s'il ne recelait quelques perles : on a déjà évoqué le titre d'ouverture mais il faut admettre que d'autres titres forts marquent le disque. Par exemple la ballade raffiné « After All These Years » qui voit Pineda s'émanciper de la tutelle de Perry. Ou aussi un titre puissant comme « Where Did I Lose Your Love » qui n'aurait pas dépareillé sur Frontiers par exemple. Quant à la nouvelle version de « Faith In The Heartland », enrichie et gagnant en légèreté, elle s'avère supérieure à l'originale. Pour finir, les amateurs goûteront le bel instrumental « The Journey (Revelation) » où encore une fois la guitare de Neal Schon se montre magique. 

Malgré l'hétérogénéité de l'ensemble, ce Revelation fait indéniablement partie des disques incontournables pour tout amateur de rock mélodique. Toutefois, on perçoit un certain tarissement de l'inspiration qui ne laissera pas d'inquiéter les plus perspicaces.
 
Baptiste (7,5/10)

 

Frontiers / 2008

Tracklist :  1. Never Walk Away 2. Like A Sunshower 3. Change For The Better 4. Wildest Dreams 5. Faith In The Heartland 6. After All These Years 7. Where Did I Lose Your Love 8. What I Needed 9. What It Takes To Win 10. Turn Down The World Tonight 11. The Journey (Revelation) 12. Let It Take You Back (bonus track)