Arthemesia-2009Arthemesia n’est pas le genre de groupe à sortir des albums à la chaine, et on ne lui en tiendra pas rigueur, car à l’écoute de cet album, on ne pourra qu’apprécier qu’ils aient mis autant de temps à le peaufiner. Formés en 1994, « A.Ω.A » n’est en effet que leur second full length, huit ans après leur premier « Drevs-Iratvs ». Huit ans c’est long, mais quand le résultat est aussi appréciable, on oublie vite l’attente qu’une telle galette aura pu susciter.
Il faudra bien plus d’une écoute avant de pouvoir affirmer avoir cerné toutes les subtilités mises en place sur cet album. Subtilités amenées en majeure partie par un clavier qui donne de la profondeur aux compositions, à la façon d’un effet de perspective sur un tableau, mais qui ne se limite pas à ça et qui joue aussi le rôle du cadre doré et finement sculpté qui entoure le tout et l’embelli. Enlevez le clavier, l’album perdra une grande partie de son intérêt et de son originalité. Cela dit, le clavier peut certes être loué pour sa qualité et son inventivité, mais il se place en mesure des autres instruments dont les parties sont tout aussi bien exécutées.

Arthemesia fait du Black certes, mais du Black nuancé, qui ne peut être identifié qu’approximativement : parlons de Dark/ Black mélodique progressif ou d’autre chose, peu importe l’étiquette finalement, Arthemesia fait du Black dans un sens large, ratisse le style sans se limiter, et le fait bien, puisant ici et là les éléments qui pourront servir son style, sa vision propre d’un Black ouvert et versatile. Passant d’un Black rageur et un peu fou dans les vocaux, à des passages d’accalmie frôlant l’ambiant, avec des chœurs lointains et quelques passages en chant clair (Cf. le morceau éponyme), cet album tient la route et illumine l’écoute par son atmosphère qui touche l’onirisme grâce à ces claviers venus d’ailleurs. Du Black « reposant », paradoxale vous en conviendrez, et pourtant comment qualifier autrement ces passages qui tissent des atmosphères colorées et douces, juste avant que ne vienne la tempête et qu’explose cette identité foncièrement Black dans le fond ?? Prenons par exemple le morceau « Patheme » avec ses 13minutes, qui dans un autre contexte aurait pu paraître long et ennuyeux, voire soporifique, mais qui, pris dans l’ensemble de l’album  devient tout simplement envoutant et délicieux.  Le gros morceau de l’album ce « Patheme », qui contient en lui seul tous les atouts d’un tel album : cette propension à doser avec une grande justesse la recherche de la mélodie et des ambiances, avec des arrangements très travaillés et une pléthore de détails inattendus (bruits naturels, chants d’oiseaux etc.) qui ressortent aisément grâce à une production en tout point excellente, un son clair et chaud. Ajoutons à cela des soli de guitare progressif  simple et efficaces, ainsi que d’excellentes lignes de batterie, variées et foutrement bien senties. Une écoute au casque est vivement conseillée pour pouvoir apprécier la richesse d’« A.Ω.A » sans en louper une miette.

L’album en son entier forme un tout homogène et cohérent, qui surprendra jusqu’à la dernière seconde, avec par exemple ce dernier titre, « Liber Omega », qui débute sur un arpège doux avant d’enchainer sur un riff saccadé à la Enslaved, qui se développe, se nuance durant de longues minutes, progressivement et enchaine tout naturellement sur un solo de saxo à la Pink Floyd, puis sur un solo de guitare…avant finir sur des samples  guerriers brutaux digne d’un « Panzer Division Marduk ». Une fois de plus cette douceur vicieuse qui peut se muer en l’espace de quelques instants seulement en une bouffée de rage et de folie, le tout s’enchainant avec un naturel déconcertant.
Du tout bon ce groupe finlandais, a mille lieu de se limiter, très loin d’être sclérosé, proposant au contraire une approche originale, ouverte, et fraiche de la chose. Je le dis et le répète, à ceux qui doutent et critiquent, que le Black est une matière malléable et fertile quand il tombe en des mains intelligentes, il est un style ouvert qui peut prendre des visages bien lumineux. (Nachtmystium ne me contredira pas !). 

Soyons honnête, qui aurais misé sur Arthemesia ? Pas moi en tout cas. Et pourtant, quelle bonne surprise. Après tout, c’est encore meilleur quand on ne s’y attend pas.

Sheol (09/10)

myspace.com/patheme

Spikefarm Records / 2009

Tracklist (51:44 mn) : 1.Of the owls, of the wolves and of the nature; revisiting the microcosm part.I 2. Valkoinen Susi 3. Patheme 4. A. Ω .A 5. The noble elements 6. Liber omega (and the macrocosm manifest III)