Combien y a-t-il de petits groupes dans le monde qui proposent une musique digne des plus grands ? Voir meilleure ? Et quand je vous parle de musique, je parle de l'ensemble du packaging offert. Un son à la hauteur, un artwork travaillé, des musiciens qui savent y faire et une volonté manifeste de bien faire les choses, pas simplement de meilleures compos.

Je ne sais pas combien ils sont mais ce que je sais aujourd'hui, c'est que Nevercold est l'un d'entre eux. Voilà un groupe sans label qui prend la peine d'envoyer un vrai CD et non quelques MP3 à la qualité médiocre dans une archive par e-mail. J'estime en tant que chroniqueur que c'est une preuve de respect. Il y a encore quelques années, et je parle d'un temps que les moins de 20 ans ont connu (du moins certains), on recevait des packs promos en bonne et due forme. Aujourd'hui, sous couvert de la lutte contre le piratage, que du MP3, voir pire, du streaming. Allez chroniquer un album en MP3 ! Les ingénieurs du son ne doivent plus en dormir de la nuit. Leur travail compte visiblement si peu pour les labels … Oui, messieurs, comme chroniqueurs, comme musiciens, comme passionnés de musique, nous sommes très tatillons sur le son. Surtout que chroniqueur, ce n'est pas de tout repos. Si c'est toujours un plaisir de faire partie du mouvement Heavy Metal, de faire bouger sa musique, de découvrir un tas de groupe, de rencontrer des gens, bref, de vivre d'une manière spécifique sa passion, c'est aussi un investissement en temps et en argent. On a pas toujours envie de se coltiner des heures d'écoutes de groupes qu'on déteste, on a pas toujours envie après une journée de boulot de se forcer à écouter des trucs quand on a une myriade de choses à faire, on se creuse parfois des heures le ciboulot pour trouver quoi dire d'un album mauvais, moyen ou même bon. On se casse la nénette pour trouver le vocabulaire adéquat, le terme qui va bien aller, on se met des groupes à dos pour avoir descendu un album, parfois le label et le reste des sorties vous passent sous le nez, et après avoir envoyé des chèques pour payer le serveur de votre webzine, la seule récompense que vous attendez, c'est avoir quelques exemplaires des albums que vous avez préférés A une époque, c'était (presque) systématique. Aujourd'hui, il faut faire la pute auprès des labels, courir après les interviews, noter tout le monde avec un truc positif et peut-être – peut-être ! -, si il en reste, vous aurez un CD original. Maigre récompense matérielle, heureusement que la satisfaction est ailleurs…

Bref, à ce stade, tu dois te demander, cher lecteur, quel est l’intérêt pour toi de lire ceci ? Premièrement, le coup de gueule devait sortir, bien que ça ne soit pas la première fois que je l'exprime. Deuxièmement, c'est ma façon de dire « merci » à Nervecold. Merci de prendre le temps de bien faire les choses. En tant que musicien moi aussi, j'ai parfaitement conscience du temps et de l'investissement (physique, moral, financier) que demande la sortie d'un tel album. Alors, oui, merci, d'avoir partagé ça avec nous et de ne pas nous prendre, nous chroniqueurs de webzine, pour de simple communicants gratuits.
Pourquoi je parle d'investissement ? L'album Demenphobia présenté ici, le premier du groupe après une démo qui avait marqué les esprits, est sans label pour pousser derrière et à été enregistré en France, puis mixé et masterisé aux USA sous la houlette de Zack Ohren et Alan Douches (All Shall Perish, Chimaira, Unearth…). Le son est puissant et très moderne, très « américain » j'ai envie de dire. Les compos étant formatées dans un mode « avec des couilles », il fallait bien ça pour transmettre l'énergie des Savoyards sur une galette physique. En plus du son, les compos sont elles aussi modernes, ou plutôt, contemporaines : un bon gros Metalcore qui tache. Mais, là ou beaucoup aujourd'hui se contentent d'avoiner dans tous les sens et jouer au kikimeter de la violence façon « vas-y que je te fais juste du bourrin », Nevercold à ainsi plus d'un tour dans son sac. A la fois puissant et brutal (« Demenphobia », « Mind Control »), il peut aussi se la jouer plus mélodique (« Surrender », « The Quickening »), et de toute façon, est toujours très technique. On sent que les références sont multiples, du Messhugah à Killswitch Engage.

Le chant très brutal, rugeux, sait cependant se montrer assez varié et accompagne les guitares à merveille, guitares qui, il faut le dire, jouent dans tous les registres : mélo, rythmiques saccadées, soli, … La batterie est surpuissante, surtout au niveau des pieds (l'essentiel de l'effort se situe d'ailleurs au niveau des pédales). La basse est un peu la grande absente. On sent bien qu'elle travaille sur certains passages, mais elle est bien trop discrète à mon gout (avec exception pour un très court passage sur « Shed A Light »).
 
Cet album à la patate, il est hargneux du début à la fin et pourtant laisse quelques moments de répi, toujours les bienvenu. La prod est très bonne et rend justice aux compos qui ne laissent pas indifférentes, les musicos sont très bons. Bref, pour chercher des défauts à Demenphobia, il va falloir chercher des les recoins et être tatillon car ils sont peu nombreux et relèvent plus d'un certain gout ou d'une certaine subjectivité personnelle. Ce qui est clair, c'est que les amateurs du genre l'apprécieront, et d'autres aussi, j'en suis la preuve, n'était pas à la base un grand fan du Metalcore. La raison est sans doute à chercher du côté du fait que, malgré ce que j'ai pu dire, Nervercold ne se limite pas à un simple Metalcore comme, je l'ai déjà dit, on l'entend trop souvent. Tant un peu Thrash, tantôt plus Death, Demenphobia est avant tout un putain de bon album.
 
[8/10] Poney
 
 
 

Autopromo / 2011

01. Demenphobia 02. Mind Control 03. No Windows Barred 04. The Quickening 05. Fight For Life 06. Surrender 07. The Day Of Heroes 08. She A Light 09. Silent Screaming