C'est bien de temps en temps d'écouter un disque en ne connaissant que très vaguement le groupe (je savais qu'ils sont français) et un rapide coup d'œil sur l'artwork (sobre et très réussi) me fait dire qu'on aura à faire à de la musique qui tire nettement sur le sombre. Gagné ! Premier constat, le son est énorme ! Ce premier morceau, " Empty ", déboule avec un riff de guitare bien pesant dans le genre power-metal dans des passages plus lents avec un grain de guitare définitivement death-metal. Tiens, le clavier fait son apparition, et du coup on a une couleur goth qui s'ajoute. Et puis, oh surprise, le chant arrive à son tour et c'est une chanteuse à la voix douce et mélodique qui s'impose à notre champs auditif. Premier réflexe du chroniqueur de base : un nouveau groupe de goth'metal à chanteuse ! Râté, la suite de l'album démentira cette première conclusion hâtive, car on peut essayer de cadrer, de donner des points de repères pour définir la musique de Leiden, mais certainement pas lui mettre une étiquette. Pour sa promo, Leiden se présente comme un groupe de Nu-dark. Si cela est vrai en un sens, l'appellation " nu " risque de faire fuir une partie d'amateurs potentiels de cette jeune et si talentueuse formation. A mon sens, la musique de Leiden n'a rien de " nu ". Certes, il y'a des parties de guitares plombés, jamais rapides, mais il faut plus chercher du côté du power-metal de formations comme Meshuggah, avec la déconstruction rythmique en moins. La richesse musicale de cet album l'éloigne aussi de la moyenne de ce qu'on peut écouter en matière de néo-metal.

Et puis le chant dominant est féminin et ne verse pas du tout dans le " nu ", la seconde voix est masculine et sonne totalement death-metal. Pour en revenir à ce morceau d'ouverture, la première référence qui me vient à l'esprit est Artrosis, pour le chant en particulier. Une couleur goth est bien présente sur l'ensemble de cet album, surtout due à l'utilisation marquante et experte du clavier. De nombreuses parties de guitares en clair sont disséminées tout au long de ces 11 titres, toutes brillantes de créativité et ne sombrant jamais dans la facilité d'idées trop souvent recyclées et trop évidentes (à titre d'exemple, on peut citer l'intermède instrumental qu'est " La brèche ", tout en guitare acoustique avec des relents " Opethien ". L'ensemble de la musique est vraiment sombre, le clavier, omniprésent, contribue pour beaucoup à ces atmosphères. Mais dans toute cette noirceur, la voix de Bérangère apporte une lumière qu'on pourrait qualifier de salvatrice.

Toutes les lignes de chant de cet album sont absolument superbes, toujours brillantes de créativité. On pourrait comparer sa voix à celle de Medeah de Artrosis, comme je l'ai déjà cité, mais aussi un peu sur certaines intonations à Jenni de Dying Tears. Et il y'a de superbes envolées vocales, je pourrais citer le refrain de " A new place " qui apporte comme un souffle d'air par rapport à l'ambiance oppressante du clavier avec cette ambiance de film d'horreur (son de jouet d'enfant avec une mélodie glaçante) que ne dédaignera pas Morgul ou Gloomy Grim. Je pourrais aussi citer le refrain de " Entlarvt " qui vous rentre dans la tête et qui ne vous quitte plus ou le chant envoûtant de " Spirale " (une des morceaux phare de cet album) ou bien encore " Gangrène " dont le chant me donne des frissons (et qui est mon morceau préféré de l'album). Bref, je pourrais citer tout l'album. Il est intéressant, arrivé à ce stade de dire que le chant est chanté aussi bien en anglais qu'en français ainsi qu'en allemand., et parfois la langue change au sein même d'un morceau.

Au delà de la curiosité, cela renforce encore la couleur très personnelle de la musique de Leiden et ajoute par la sonorité de la langue choisie une nouvelle dimension aux mélodies. Musicalement, l'album est merveilleusement construits, les morceaux sont variés bien que le tempo n'accélère jamais, mais Leiden est très doué pour jouer sur les contrastes grâce à un talent de composition indéniable. L'album s'écoule d'une seule traite et les quelques beats électroniques épars s'intègrent de manière très naturelle à la musique Alors Leiden est-il un nouveau groupe de metal'goth à chanteuse ? Non, ils ont bien plus que cela car Bérangère n'est qu'un élément (et quel élément !) d'un groupe pétri de talent qui ne se repose pas que sur la très belle voix de sa front-woman, au style original, et sans qu'on puisse vraiment les comparer à qui que ce soit. C'est surtout un jeune groupe qui pose la barre vraiment haut pour un premier album, une grande révélation du metal hexagonal.

Vik (09/10)

Adipocere / 2003

Track listing (..:..) 1. Empty 2. A new place 3. Les maux 4. Entlarvt 5. Das wort vom zur-tiefe-gehen 6. Spirale 7. Cry 8. Le possédé 9. La brèche 10. Gangrène 11. Vibrations