Le groupe disait être très inspiré – implicitement bien plus que sur son disque précédent, Somewhere Else –, au point de proposer un double album de compositions. Or, de Brave à l'illustre Marbles, les album double ont toujours eu excellente réputation chez Marillion… et souvent à raison d'ailleurs. Il faut bien admettre d'emblée que ce double Happiness Is The Road, se situe dans la partie la plus lumineuse de la carrière du groupe. Le regain de créativité musicale entamée depuis Marbles est donc entièrement confirmé ici. Plus ambitieux que Somewhere Else, ce Happiness Is The Road s'inspire plus d'un Marbles dont il n'est cependant en rien le décalque, loin de là. La faute peut-être à une structuration en deux disques à l'origine très cohérente mais au résultat paradoxalement un peu bancal. 

Le premier disque, Essence, est d'un raffinement de toute beauté. C'est là que Hogarth se montre le plus à l'aise et le plus impérial, la sensibilité et l'emphase de sa voix ciselant des bijoux mélodiques très logiquement enchâssés : « Essence » et sa structure en crescendo, les perles « Trap The Spark » ou « State Of Mind » ou le rock un peu sixties « Nothing Fills The Hole » constituent un panorama musical qui nous renvoie aux meilleures heures du groupe. Seule la longue plage éponyme à vocation progressive dénote légèrement au sein de l'ensemble.  

The Hard Shoulder s'avère lui beaucoup plus hétérogène, comprenant des titres plus nettement progressifs (le superbe « Asylum Satellite #1 » et son long final instrumental), quelques chansons pop assez prenantes (« Older Than Me », très joli) mais aussi des morceaux rock plus enlevées (« Thunder Fly » dont la structure est toutefois plus complexe qu'on ne l'imagine au premier abord, ou le plus simple mais en fait plus poignant « Real Tears For Sale »). Si la qualité est globalement au rendez-vous, elle se situe un cran au-dessous de celle proposée sur Essence. Cependant il est vraisemblable que, proposé séparément, The Hard Shoulder, aurait satisfait pleinement les fans. Ce n'est que mis en miroir face à au premier volume de Happiness…, qu'il perd un peu d'éclat. 

Mais ce constat est aussi un aveu : la qualité musicale qu'arrive à maintenir Marillion après tant d'années est proprement sidérante et l'inspiration, la musicalité, la fraîcheur se maintiennent avec une persistance assez effarante. J'en suis personnellement toujours aussi surpris et émerveillé.

Baptiste (9/10 pour Essence, 8/10 pour The Hard Soulder)

 

Racket Records / 2009

Tracklist :  Volume I : Essence 1. Dreamy Street 2. This Train Is My Life 3. Essence 4. Wrapped In Time 5. Liquidity (instrumental) 6. Nothing Fills The Hole 7. Woke Up 8. Trap The Spark 9. State Of Mind 10. Happiness Is The Road 11. Half Full Jam (ghost track)

Volume II : The Hard Soulder 1. Thunder Fly 2. The Man From Planet Marzipan 3. Asylum Satellite # 1 4. Older Than Me 5. Throw Me Out 6. Half The World 7. Whatever Is Wrong With You 8. Especially True 9. Real Tears For Sale