Accept nouvelle formule fait partie des groupes qui font mentir les sombres prophéties des déclinologues professionnels : au bout de trente ans de carrière et après avoir perdu son chanteur emblématique, Udo Dirkschneider, on peut toujours proposer des disques de haute tenue. À l'annonce du refus d'Udo de rejoindre le groupe pour une nouvelle reformation, on avait pourtant tout lieu d'être inquiet et d'envisager à l'avance une décapilotade pathétique. Il n'en fut rien. Et l'on pouvait s'en douter en fait.

Car les bons connaisseurs du groupe savaient déjà que le groupe délesté d'Udo pouvait déjà proposer de très bonnes choses, comme en témoignait un Eat The Heat (1989) sous-estimé car trop américain. Pourtant, bien qu'un peu aseptisé, ce disque de très bonne qualité démontrait bien que les capitaines à bord d'Accept étaient Wolf Hoffmann à la guitare et Peter Baltes à la basse (et au chant sur quelques ballades) et que les capacités de composition reposaient uniquement sur eux. Pour l'Accept reformé en 2009, il suffisait juste de trouver le bon chanteur ; ce fut fait avec la découverte de l'excellent Mark Tornillo. La qualité de Blood Of The Nations en surprit plus d'un mais elle n'avait rien d'invraisemblable. 

Peu de surprises

Ce Stalingrad surprendra moins donc évidemment, et ce d'autant plus que l'on retrouve toujours à la production l'excellent Andy Sneap qui a encore effectué un travail remarquable au niveau du son. La qualité musicale est ainsi globament au rendez-vous bien qu'elle soit légèrement en-deça de celle de Blood Of The Nations. La faute peut-être à une certaine précipitation rare de nos jours puisque seuls deux ans séparent les deux disques d'Accept. Il est parfois bon de battre le fer quand il est chaud, mais il est aussi nécessaire de le laisser reposer un petit peu. Malgré des atouts réels qui le rendent ponctuellement supérieur à son prédécesseur, ce Stalingrad recèle en fait quelques titres un peu faciles tels « Twist Of Fate » ou « Against The World ». Les facilités peuvent même être dénichées au sein d'un titre globalement de qualité comme ce « Hung, Drawn And Quartered », effectivement très puissant mais souffrant d'un refrain un peu banal. 

Toutefois les points forts du disque sont indiscutables. En tout premier lieu, le titre éponyme « Stalingrad » qui deviendra assurément un futur classique tant pour ses parties solos que pour ses riffs entêtants. Le clou de ce morceau traitant de la fameuse bataille qui fit basculer l'issue de la Deuxième guerre mondiale est évidemment la reprise de l'hymne soviétique qui – j'en suis sûr et certain – non seulement deviendra un must en concert, notamment en Russie, mais incitera le Hamster a fait frombir de nouveau le vieux T34 qu'il garde dans son garage. Cependant ce Stalingrad ne se résume pas à ce titre mais contient un certain nombre de brûlots mémorables comme « Hellfire » et son break qui dévoile une partie des capacités vocales de Mark Tornillo que l'on ne pouvait que deviner jusqu'ici.

Un aspect parfois plus mélodique

Explorer les perspectives d'un chant à certains moments plus mélodique pourrait d'ailleurs être une piste pour une nouvel album, tant Tornillo semble capable de varier sa voix bien plus que ne le pouvait le brave Udo. « Shadow Soldiers » est justement une chanson nettement plus mélodique que ce à quoi nous avait habitué le groupe dernièrement et sa qualité est elle aussi indéniable. Revoir Accept se réimprégner de l'atmosphère d'un Metal Heart ou d'un Balls To The Walls et non plus exclusivement des moments les plus rapides de Restless And Wild est très plaisant. C'est cette double facette du groupe qui m'a toujours plu et que l'on retrouve donc ici mieux représentée.

Cet aspect plus mélodique explique peut-être l'inspiration de Wolf Hoffmann sur l'entièreté du disque : chacune de ses interventions est un régal, tant en rythmique que lors de thèmes mélodiques du meilleur effet (« Stalingrad », « The Galley ») ou lors de solos imparables. On ne l'avait pas entendu aussi bien jouer depuis Metal Heart. Et comme il a ici beaucoup d'espace pour s'exprimer, glissant même un final instrumental et mélodique sur « The Galley », il n'y a qu'à se réjouir. Espérons que cela incitera à reconnaître ses qualités de solistes car l'homme est selon moi très largement sous-estimé. Rien que pour écouter Hoffmann jouer de la sorte, ce Stalingrad mérite le détour. Mais il y a bien d'autres raisons de ne pas faire l'impasse sur un disque de très bonne tenue. 

Baptiste (7,5/10)

 

Site officiel

Nuclear Blast / 2012

Tracklist : (56:29) 1. Hung, Drawn and Quartered (4:35) 2. Stalingrad (5:59) 3. Hellfire (6:07) 4. Flash to Bang Time (4:06) 5. Shadow Soldiers (5:47) 6. Revolution (4:08) 7. Against the World (3:36) 8. Twist of Fate (5:30) 9. The Quick and the Dead (4:25) 10. Never Forget (4:52) 11. The Galley (7:21)