Contre
Trivium, un des groupes « bankables » du moment, nous propose cette année In Waves, son cinquième album en 11 ans d’existence. Bien entendu, comme tout bon groupe qui se respecte et qui maîtrise les ficelles de la communication, cet album est « leur plus abouti et contient quelques-uns des passages les plus brutaux de leur histoire ». Voyez-vous donc, on se doutait bien que Matt et ses potes n’allaient pas nous sortir un discours promo dont le message serait « bon beh, on a fait du mieux qu’on pouvait, mais on s’est vautrés comme des quiches et notre dernier album est mollasson si vous le comparez avec Shogun ». Ajoutez cela un label qui pousse derrière pour faire monter un des canassons les plus vendeurs de son écurie et un statut à tenir, à savoir celui des « futurs Metallica » (1) et vous comprendrez que tout jeune fan en mal de sensations fortes s’apprête à sauter sur cet album comme un enfant afghan sur une mine. Mais cet album en vaut-il vraiment la peine, en fin de compte ?
Le problème ne réside pas au niveau des capacités des membres du groupe, bien au contraire : ces gars sont outrageusement doués sur un point de vue musical, il suffit d’écouter leurs albums ou de les voir en live pour comprendre à quel point ces gars sont des pointures dans ce qu’ils font. Non, le problème est que ce talent est à mes yeux gaspillé, galvaudé et que ce qu’ils nous proposent n’est qu’une version light de ce qu’ils pourraient vraiment nous coller dans les dents. S’ils avaient une paire de couilles bien accrochée, je suis persuadé qu’ils zapperaient tous ces passages « chant clair – émotions – larme à l’œil » et qu’ils mériteraient déjà davantage leur statut de « futurs Metallica »… Il ne leur resterait alors plus qu’à se décrocher du sein nourricier des Mets et à se forger un style propre plutôt que de s’en inspirer (quand Matt se décidera-t-il enfin à arrêter de singer James Hetfield ? Et pour les sceptiques ou les fanboys baignant dans leur mauvaise foi comme un cochon dans une flaque de boue : écoutez le début « A Grey So Dark », l’exemple le plus flagrant de ce nouvel album).
In Waves trustera certainement, dans une certaine frange de notre univers, les premières places dans le classement du meilleur album de l’année 2011. À défaut d’être réellement bonnes, ces nouvelles compos sont catchys en diable, et c’est certainement ce qui explique le succès du groupe : Trivium est peut-être tout simplement ce que l’on pourrait considérer comme un pont entre la Pop et le Metal, une union entre l’énergie de notre genre favori et le côté accrocheur de la Pop, une fois écouté, immédiatement enregistré. Malheureusement, à mes yeux, Trivium manque de punch et bouffe à tous les râteliers pour toucher un public aussi large que possible. Dans un sens, c’est compréhensible, mais j’ai l’impression que tous ces « nouveaux » groupes se contentent de recycler des sonorités existantes tout en les édulcorant, peut-être pour être sûr que leur album trouve un public et leur permette de récupérer leur mise… et au vu de la situation de l’industrie musicale, je crains que cette tendance n’ira qu’en s’empirant.
À noter que la version spéciale de cet album contiendra 5 morceaux, dont une reprise de « Slave New World » de Sepultura. Le résultat de cet exercice périlleux ? Un gros bof, Matt manque terriblement d’énergie pour pouvoir oser rivaliser avec l’interprétation d’un Max Cavalera qui, tout bouffi qu’il est, a encore aujourd’hui plus de talent (2) dans sa rasta en queue de raton-laveur que la « relève du Metal »… Je ne sais pas si je dois m'en réjouir ou m'en inquiéter…
[] un sage chinois a dit : « ne frappe pas un homme à terre ». Je crois que la chronique se suffit à elle-même, non ?
Patate
(1) Les futurs Metallica ? Par pitié, ne vous avisez pas d’encore souiller le nom des Mets en l’associant avec ces jeunes minets… d’autant plus que Metallica n’a pas besoin d’aide pour souiller son nom, James et sa bande le font déjà très bien eux-mêmes depuis Load.
(2) au niveau du recyclage d’idées, bien entendu : il nous ressert la même soupe chaque année et les fans en redemandent encore et encore avec le même sourire béat… Quel commercial, ce Maxou, il arriverait à vendre du sable à Dubai !
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Pour
En réponse à la prose et à l'excellente chronique de notre bon ami Mister Patate, je vous propose ma propre version de la chose.
Dans un premier temps, je vais juste me permettre d'enfoncer quelques portes ouvertes. Alors, oui, Trivium est un groupe de « posers ». Oui, Trivium n'est pas la huitième merveille du monde. Oui, Trivium aurait tendance à bouffer à tous les râteliers. Et enfin, oui, il est de bon ton, dans certains milieux autorisés, de ne pas prendre Trivium au sérieux.
Pourtant, le groupe de Matt Heafy possèdes quelques circonstances atténuantes et « In Waves » en fait immanquablement partie. Ce cinquième effort est tout simplement bluffant. Trivium ne fait pas que ressasser inlassablement la même formule, et l'évolution est encore plus importante que sur les précédents albums.
Techniquement (et on ne parlera uniquement de technique dans ce paragraphe), on sait que ces quatre gus savent jouer. Il ne faut pas nier l'évidence, on peut entendre cela dans quasiment chaque morceaux de ce dernier opus. Entre le morceau éponyme qui laisse sur le cul et un « Ensnare the sun », interlude acoustique, on ne peut qu'être agréablement surpris. Les musiciens devraient apprécier.
Maintenant, au niveau des chansons, on a le droit à une série de tubes imparables. C'est bien simple, depuis l'album The Crusade et « Anthem (We are the fire) », les Floridiens nous pondent des petits hymnes qui restent dans les têtes. Jetez une oreille attentive sur « Watch the world burn » et « Off all these Yesterdays ». Elles vous resterons en tête pendant un pas mal de temps. Et même si une chanson comme « Caustic Are The Ties That Bind » pourra paraître trop « pop » pour certains, elle restera quand même une bonne chanson.
Enfin, niveau énergie, on n'est pas en reste parce que les Trivium savant faire parler la poudre. « In waves » fout une sacrée claque à son auditeur. Et quand la bande décide de s'aventurer vers des contrées à la limite du death metal (les vocaux d'écorchés de « Shattering the skies above »), on ne peut qu'être satisfait.
Pour conclure, faisons les comptes. On a affaire ici à un album plutôt bien branlé avec des compos facilement assimilables par le péquin moyen. Et niveau brutalité, le groupe donne ce qu'il faut. Le résultat est donc plus que positif et prouve une fois de plus que Trivium n'est pas le vilain petit canard du genre (l'époque des abominations comme « Ascendancy »est bien loin). Il s'agit juste d'un bon groupe qui fait le job. Rien de plus, rien de moins.
Nico (07.5/10)
Site Officiel: www.trivium.org
MySpace Officiel: www.myspace.com/trivium
FaceBook Officiel: www.facebook.com/TriviumOfficial
Roadrunner Records / 2011
Tracklist (67:34)
01. Capsizing The Sea 02. In Waves 03. Inception Of The End 04. Dusk Dismantled 05. Watch The World Burn 06. Black 07. A Skyline's Severance 08. Ensnare The Sun* 09. Built To Fall 10. Caustic Are The Ties That Bind 11. Forsake Not The Dream 12. Drowning In Slow Motion* 13. A Grey So Dark* 14. Chaos Reigns 15. Of All These Yesterdays 16. Leaving This World Behind 17. Shattering The Skies Above* 18. Slave New World*
*Bonus tracks