La drogue et les ruptures amoureuses sont deux bons engrais pour la création. D’ailleurs vous avez certainement remarqué que les gens qui ne se droguent pas, ou qui ne se font jamais larguer sont chiants comme la mort… Et justement Emmanuel, l'âme de Wormfood, n'est pas vraiment quelqu'un de chiant. Il n'y a qu'à en juger par la qualité de son dernier rejeton : Posthume.
Depuis 2005 et son album « France », Wormfood était en état de mort cérébrale. Fort d'un nouveau line-up le groupe a décidé de reprendre un bail avec la vie, pour nous offrir encore plus de désespoir… Cette fois le registre est différent… Fini le grand guignol… On laisse le monde et son mégadéconophone… La décadence baroque de « France » est au passé, ici, on est dans le domaine des (contre) addictions, de la mort, de la solitude… Cet album nous rappelle à quel point dans nos carcasses nous sommes seuls, terriblement… À l'intérieur on est TOUJOURS seul. C'est pour ça qu'en dedans tout est permis… Avec « Posthume » on est en plein excès d'atrabile. Marqué par les expériences de son meneur le groupe nous conduit, sans babillages, à travers un mauvais rêve… Comme un jour sans alprazolam…
L'album s'ouvre sur « Les noces sans retour » et on constate immédiatement la grande importance accordée au chant. Totalement en Français… Un très gros travail d'écriture a été fournis et on ne sombre pas dans le vaticinage ou les tournures atoniques… C'est déjà un explois en soit… La langue de Molière étant particulièrement capricieuse lorsqu'il s'agit de la mettre en musique… Emmanuel sévit dans des registres assez variés, avec des passages clairs hypnotisant, et de pures moments de désespoirs hurlés. On descend vers les enfers avec lui… Une descente joliment accompagnée par des passages de sitar et de tanpura jouées par Paul Bento (Carnivore, Type O Negative).
« La vanité des amants » qui est la seconde piste est dans la même veine, on à l'impression que les malheurs accumulés rejaillissent… la bile se déverse encore… S'enculant en partouze de vanité…
« Troubles alimentaires » noircit encore un peu plus le tableau… L'anorexie dévorante… La négation suprême de soi… L’ignominie, la bassesse alimentaire, la goujaterie de tout ce monde… Les guitares alternes entre rythme lents, soutenues par quelques nappes de pianos, et riffs ravageurs appuyés par une batterie hystérique. On nage dans la schizophrénie… La maladie… On miragine à tour de bras… Suit un « Passage à vide », avec des choeurs, faisant pensé à Type O Negative. À aucun moment on ne se sent trop proche du style propre au groupe du défunt Peter Steel mais l'influence est indéniable. Que ce soit sur ce morceau ou sur « Salope ». Morceau très intime. Un exutoire plein d'émotion. Ici, chacun pense à sa SALOPE. Mille et mille incendies se déclenchent dans le coeur, à comburer la terre entière, qu’il n’en restera plus que scories innommables. À nos amours déçu ! Santé ! Après un tel monument vient une reprise « Des hauts, des bas », malgré l'exercice délicat que cela représente, le morceau ne dénote pas avec le reste de l'album. En fait il s'insère parfaitement dans la dynamique sombre de Posthume, seul sa structure plus pop que le reste du cd trahit son origine. Avant-dernier morceau de Posthume « Le seul amour » fait qu'on trébuche, culbute au gouffre. Sans raccrochage possible. Et c’est bien fait. La fin approche Écrabouillerie définitive… Marmelade dans l’Aventure grotesque de la vie.
Le dernier morceau « EWB28IF » est une outro instrumentale,magnifique, qui m'amène à conclure. Candeur ou la mort.
Ymishima (07/10)
MalaFortuna / 2011
Tracklist (54:10)
1. Les Noces Sans Retour 2. Vanité Des Amants 3. Troubles Alimentaires 4. Passage A Vide 5. Salope 6. Des Hauts Et Des Bas (Stephan Eicher cover) 7. Le Seul Amour 8. EWB28IF