Archive for décembre, 2012

griefVingt ans de carrière, trois changements de nom et une discographie assez touffue : on peut dire que les Suédois de Grief Of Emerald n’ont pas vraiment chômé depuis le début des nineties… Et pourtant, il aura fallu ce jour de fin du monde (ou pas, pour le moment, à part une fine pluie, rien de terrible à l’horizon) pour que je les découvre. Et ça ne va pas bouleverser mon existence.

Pas que leurs efforts ne méritent pas la moindre attention, certainement pas. D’un point de vue musical, Grief Of Emerald évolue en effet sur les plates-bandes de formations telles que Dimmu Borgir, Dark Funeral ou Naglfar, tout en y ajoutant un petit feeling Death Metal. On a donc déjà vu pire en termes d’influences et d’inspirations. Le problème réside davantage au niveau du manque de personnalité du groupe. Grief Of Emerald est un patchwork : un riffing à la Dark Funeral, des intrusions symphoniques à la Dimmu… tous les éléments se reconnaissent très (trop) rapidement. On peut sincèrement en attendre plus d’un groupe qui n’en est pas à son premier essai, loin de là.

Si vous aimez tous les groupes cités dans cette chronique, Grief Of Emerald devrait vous convenir à merveille… à condition bien entendu que vous ne soyez pas trop regardants au niveau de l’originalité. Pour les autres, circulez, il n’y a rien (de neuf) à entendre ici.

Jäkelunge (5/10)

Site officiel
Myspace officiel

Non Serviam Records – 2012
Tracklist (40:31) 1. And Yes It Moves 2. God of Carnage 3. Where Tears Are Born 4. It All Turns to Ashes 5. Cage of Pain 6. When Silence Became Eternal 7. Warstorms 8. Stormlegion (Warstorms Part II) 9. The Third Eclipse

Phonema – Tides of Illusion

oshy_21122012_PhonemLa ville de Béziers dans l’Hérault recèle bien des richesses. En plus de la viticulture, du rugby à XV ou encore de la feria, cette bourgade accueille PHONEMA, un groupe de métal iconoclaste et franchement difficile à classer. Nos compatriotes parlent eux-mêmes de groupe concept « surfant sur une vague Progressive Death Metal, et basé sur un univers qui n’a qu’une seule dimension: un son ». Le programme s’annonce ambitieux et ils s’adressent à la frange la plus ouverte et aventureuse du public métal.

A la fois technique et bien barrée, la musique de PHONEMA nécessite de s’ouvrir bien grand l’esprit et de faire abstraction des étiquettes. Assez égoïstement (et ils ont bien raison), nos amis se font d’abord plaisir et tant mieux si d’autres apprécient la démarche. Histoire de donner quelques repères, on dira que PHONEMA évolue dans la sphère du métal progressif avec des touches extrêmes ici et là. Pour résumer, cela donnerait un DREAM THEATER forniquant joyeusement avec un MESHUGGAH. Les Biterrois multiplient les couches musicales et ne cessent de changer de direction, de thèmes mélodiques et de rythmiques. Difficile parfois de s’y retrouver et de ne pas se sentir perdu. Cet effet gloubi-boulga risque d’en refroidir certains.

Le chant clair et le chant extrême sont alternés au sein d’une même composition pour correspondre aux atmosphères et favoriser le partage des émotions. Le chant clair est assez décevant, il sonne fragile et pas complètement maîtrisé. Les parties growlées ou susurrées passent par contre bien mieux et d’adaptent mieux à la musique développée tout au long de ces 3 compositions. Dommage. Musicalement, le pari est osé tant il nécessite de pouvoir faire preuve d’un bon niveau technique tout en maintenant un fil conducteur, même ténu. De ce côté-là, PHONEMA assure et fait preuve d’une belle maturité. Autant j’ai toujours beaucoup de mal à plonger dans un « The Second War » qui m’apparait comme trop brouillon autant les sonorités entre gothique et indus de « The New Beginning » et les subtiles ambiances de « A Storm of Feelings » m’ont touché. La production est franchement pas mal et tient bien la route.

Le potentiel de PHONEMA est énorme mais le chemin reste encore long pour canaliser et rendre encore plus cohérent le foisonnement d’idées affiché sur Tides of Illusion. Souhaitons que 2013 puisse permettre au groupe de concrétiser ses projets à travers un véritable premier album. Vous pouvez télécharger Tides of Illusion et October Artifacts, son prédécesseur, pour le prix que vous voulez sur le site BandCamp du groupe en lien ci-dessous.

Oshyrya (7,5/10)

BandCamp
FaceBook Officiel

Autoproduction / 2012
Tracklist (23:33 mn) 01. The Second War 02. The New Beginning 03. A Storm of Feelings

Helloween – Master Of The Rings

HelloweenAprès la ruine, la reconstruction ? Quand sort en 1994 ce Master Of The Rings, Helloween est en lambeau, venant d’encaisser à la suite deux gros échecs avec Pink Bubbles Go Ape (1991) et surtout Chameleon (1993). Les dissensions au sein du groupe et les problèmes comportementaux d’Ingo Schwichtenberg ont poussé Michael Weikath à évincer sans ménagement Michael Kiske et le malheureux batteur schizophrène. À partir de ce moment Michael Weikath tiendra fermement les rênes d’Helloween se permettant un autre limogeage peu élégant après la sortie de The Dark Ride. D’une certaine manière, cette recomposition du groupe semblait inévitable et à l’époque elle ne m’a ni surpris ni choqué. Le choc va venir des remplaçants…

Un line up bouleversé

Passons sur le remplacement posant le moins de problème : à la batterie nous retrouvons Uli Kusch ex-Gamma Ray (le monde du métal allemand est petit). Même si son jeu est un peu moins fin que celui d’Ingo Schwichtenberg, sa très bonne maîtrise technique alliée à une grosse énergie font beaucoup du bien à ce Master of The Rings qui fera ainsi preuve d’une puissance inimaginable quelques temps plus tôt. Le gros point noir est ailleurs.

Il est dans le choix comme remplaçant de Michael Kiske d’Andi Deris issu du groupe typé « Hard US », Pink Cream 69. Voilà un choix qui m’a semblé alors et qui me semble toujours totalement incongru. Autant Andi Deris est à l’aise dans un registre de hard à la fois mélodique et gouailleur, autant sa voix criarde et très limitée dénote avec l’univers musical d’Helloween, longtemps porte-drapeau du speed mélodique. De facto, les hambourgeois vont devoir adapter leur musique à un chanteur très loin derrière Michael Kiske en terme de capacités vocales. Le fond sera touché en live, lorsque le pauvre Deris s’égosillera sur les titres de l’époque Kiske pour un résultat totalement pathétique.

Ce qui a incité Weikath a effectué ce choix à  mon sens calamiteux est la dimension personnelle : Deris était un ami de longue date du guitariste et par ailleurs un grand amateur d’Helloween. De facto, Deris ne remettra jamais en cause le leadership de Weikath et se montrera très dévoué envers le groupe et les fans. Cela changeait du comportement égocentrique à l’époque de Michael Kiske.

L’album du réveil et d’une nouvelle ère

Malgré ces réserves, l’album sera pourtant très bien accueilli par les fans et Deris finalement accepté par une majorité d’entre eux. Pourquoi ? Car il retrouvait d’une certaine manière l’orientation des deux Keepers Of The Seven Keys. Le titre du disque lui-même est une évocation d’un imaginaire d’heroic fantasy  justifié par une longue introduction écrite dans le livret, narrant les aventures du Gardien des clés faisant de lui le « Maître des anneaux ». Pour marquer encore plus la continuité, le disque s’ouvre sur une introduction symphonico-synthétique, « Irritation », clin d’œil aux « Initiation » et « Invitation » de jadis. La vitesse est très vite enclenchée avec les très bons « Sole Survivor » et « Where The Rain Grows ». La guitare de Weikath rugit de nouveau et la double grosse caisse de Kusch affolera les sens des amateurs de speed mélodique. La très bonne production de Tommy Hansen retranscrit parfaitement cette réorientation musicale. La prestation de Deris n’est pas mauvaise sur ces titres bien que le bonhomme soit assez sous-mixé et qu’il manque totalement de génie. Dans tous les cas, le retour aux racines musicales est patent ici et c’est ce qui comblera les fans du groupe

Tout n’est pourtant pas rose sur ce Master of Rings, ce qui fait qu’au final, le disque n’est qu’« honnête ». D’abord car certains titres sont franchement dignes de la face B de single : l’inepte « The Game Is On » et ses sonorités de jeu vidéos ou la sirupeuse « In The Middle Of A Heartbeat » sont à classer ainsi. On trouve par ailleurs des titres pas forcément mauvais mais renvoyant plus à l’univers de Pink Cream 69 qu’à celui d’Helloween : le mélodique « Why ? » à l’excellent refrain ou « Perfect Gentleman ». De la même manière, « Take Me Home » aurait plutôt eu sa place sur un disque de Van Halen. On remarquera  au passage que Deris est fort à l’aise dans ce registre. On déplorera surtout que le retour au heavy ne soit pas allé de pair avec un retour à un souffle plus épique : il n’y a bien ici que « Mr Ego » qui dépasse les sept minutes. La chanson est assez bonne mais l’attaque contre Kiske à laquelle elle donne lieu n’est pas du meilleur esprit. L’esprit « happy metal » ne souffle donc pas partout.

Plus donc ce que ses qualités intrinsèques (réelles mais mesurées), ce Master Of The Ring est le disque du réveil musical. C’est aussi et surtout un disque qui ouvre une nouvelle époque pour Helloween. Car Andi Deris n’est pas resté qu’un simple remplaçant : composant de plus en plus et s’impliquant fortement dans la vie du groupe, il a, volontairement ou non, changé l’identité du groupe. La musique d’Helloween s’est musclée dans cette nouvelle ère, de telle sorte que l’on parle de plus en plus souvent de « Power Metal » pour la qualifier. Il s’agissait sans doute d’une nécessité tant la voix éraillée de Deris ne correspond pas du tout au propos musical de l’époque des Keepers. Mais, personnellement, je regrette franchement ce tournant, car Helloween est devenu bien plus banal.

Le disque est aussi significatif sur un autre point : ce sera le dernier disque sur lequel Weikath est le principal compositeur. Weikath jouera dorénavant le rôle de « roi fainéant » : « roi » car il reste bien le leader en dernier recours, mais « fainéant » car ne proposant que trois ou quatre compositions par opus. Le rôle de principal compositeur va vite échoir à Andi Deris. Même si ce dernier est loin d’être incompétent sur ce point, il est quand même loin d’être aussi brillant que Weikath, lorsque ce dernier se mobilise réellement. D’où aussi une qualité globale des productions du groupe qui fleurera dorénavant le métal de « série B ». De la bonne « série B » mais de la « série B » quand même.

Baptiste (6,5/10)

Castle Communication (réédition Sancturay) / 1994

Tracklist (50:29) : 1.  Irritation 2. Sole Survivor 3. Where the Rain Grows4. Why ? 5. Mr. Ego (Take Me Down) 6. Perfect Gentleman 7. The Game Is On 8. Secret Alibi 9. Take Me Home 10. In The Middle Of The Heartbeat 11. Still We Go