Dans le registre des « comebacks qu’on attend depuis longtemps, mais pas trop non plus parce qu’on a peur d’être déçu », Gorguts a fait fort, très fort. Après 12 ans sans le moindre album (et près de 5 ans après son comeback en live), les Canadiens, épaulés maintenant par John Longstreth (le cogneur d’Origin), nous livrent un album tout en richesse et en détails qui, s’il ne sera pas à la portée de tout auditeur, risque malgré tout de faire parler de lui.
À une époque où la musique est devenu un consommable qui doit séduire à la première écoute, où les morceaux doivent être pour ainsi dire prémâchés, prédigérés pour être savourés immédiatement, Gorguts n’a pas dérogé d’un iota à ses habitudes et nous livre un album monolithique et de prime abord imperméable. « Le Toit du Monde » ouvre les hostilités brutalement, 6 minutes et 33 secondes de pur Death technique implacable aux rythmiques compliquées (il a combien de bras, Longstreth ?). On en ressort étourdi, sonné par une telle avalanche, mais ce n’est que le début d’une bonne heure de montagnes russes à la sauce death technique canadien. Chaque écoute dévoile de nouveaux détails, de nouveaux éléments, ce qui augmente radicalement la durée de vie de cet album par rapport à celle d’un Facebreaker ou d’un Ulcer qui dévoilent leurs atouts d’une traite. Ici, l’écoute au casque est de rigueur, sous peine de passer à côté de ces petits trucs qui font la différence.
Par ailleurs – et c’est là qu’on reconnaît la maîtrise du groupe –, le tout bénéficie d’un son et d’une production parfaits : tout est clair, précis, chaque élément ressort parfaitement. Tout le contraire d’un Fleshgod Apocalyse sur Labyrinth, quoi. Au niveau de la précision du mix, je pense qu’un des rares groupes en mesure de rivaliser avec Gorguts est Meshuggah (autre amateur de rythmiques déstructurées et de musique monolithique, d’ailleurs).
Au petit jeu de « qui sortira l’album technique de l’année ? », Gorguts a abattu ses cartes et présente de nombreux atouts. Reste à voir ce que les Néo-Zélandais d’Ulcerate nous ont réservés. Le combat entre ces deux poids lourds du Death technique risque d’être passionnant.
Mister Patate (9/10)
Season Of Mist Records / 2013
Tracklist (62:49) 1. Le Toit du Monde 2. An Ocean of Wisdom 3. Forgotten Arrows 4. Colored Sands 5. The Battle of Chamdo 6. Enemies of Compassion 7. Ember's Voice 8. Absconders 9. Reduced to Silence