Shining – 8 1⁄2 Feberdrömmar I Vaket Tillstånd
Posted by ymishimaSep 16
Avec Redefining Darkness, un pâle halo de lumière s'était levé sur la Suède. Il a permis de découvrir les ténèbres sous un nouveau jour. Loin d'être contradictoire, cet album a porté à un degré de tourment inouï la musique du all star band nordique. Une finesse intéressante s'en dégageait, en est il autant de ce Feberdrommar ? Pas exactement…
Niklas n'a jamais rien fait comme les autres, et c'est encore le cas avec ce nouvel « album ». Il est composé de démos issues de Livets Ändhållplats et de Angst, qui datent respectivement de 2001 et 2002. Plus de dix ans déjà… Mais il ne s'agit en aucun cas d'un « worst of ». Ces chansons étaient déjà disponibles sur la compilation The Darkroom Sessions. Plutôt que de les sortir brutalement de lu formol, quelques ajouts ont été réalisés. Et rarement des mortes se sont montrées aussi attirantes. De nouvelles pistes de basses et de guitares sont présentes, Lars Fredrik Frøislie se charge des claviers. Et surtout, 6 vocalistes différents se partagent le chant. Les morceaux sont retravaillés, non pas dans leurs structures, mais dans les détails – avec la précision d'un scalpel. Pendant que certains se demandent très sérieusement comment voyager avec un saumon, Shining cherche à savoir comment faire du neuf avec du vieux.
Pour être franc, ma première inquiétude est aussi ma première source d’excitation: la répartition du chant. Je redoutais une production estampillée « Niklas & Friends, Suicidal Guignol's Band ». Un peu comme quand j'écoute un album de Hip Hop, et que la moitié des morceaux sont des featurings tout à fait dispensables.
Mais c'était sans compter sur la qualité des guests. Sont à l'œuvre dans cette danse macabre: Famine, Attila Csihar, Pehr Larsson, Gaahl, Maniac et Niklas Kvarforth himself. Du TRÈS beau monde donc. Surtout que certains sévissent dans leur langue maternelle. C'est le cas par exemple, de Mc Famine, qui ouvre le bal par "Terre des anonymes". J'en attendais beaucoup, trop peu être. Il devait abattre des forêts, le premier taillis le fout à genoux. Peu con.
À défaut de brûler des voitures, Famine brûle d'envie de faire du rap. Soit, l'idée ne me dérange pas. Au contraire c'est même plutôt rock'n'roll – et tout ce qui peut faire gueuler les metalheads me fait plaisir. Mais putain, ces paroles… J'ai l'impression que dès qu'il ne parle plus des juifs il n'a plus rien à raconter. Et il est capable de dire que c'est de leur faute… Elles sont d'une lourdeur qui rend le morceau infirme, c'est terriblement dommage car il pouvait faire mieux. Le phrasé est bon, le travail autours de l'ambiance musicale aussi… mais merde, ça ne prend pas.
Dans un registre différent, Pehr Larsson livre une prestation beaucoup plus posée. Sa voix est très en retrait, pour n'être que nappe de brouillard au milieux des riffs lancinants. Le mixage met beaucoup en valeur les nouveaux éléments apportés aux chansons; le fait d'avoir un chanteur qui se place en retrait permet de donner un autre point de vue à l'exercice de style.
La performance de Gaahl, entre hurlement et voix parlée, est également très convaincante. Accompagné par des guitares acérées, qui distribuent des arpèges en pluies acides, « Selvdestruktivitetens Emissarie » est la preuve que l'idée de réenregistrer ces morceaux est séduisante. Maniac transcende aussi "Black Industrial Misery" (originellement Svart Industrial Olycka). Le riff du début tranche dans le vif, et l'ancien vocaliste de Mayhem remue le couteau dans la plaie.
On se prend alors au jeu et on compare les différentes versions. Le travail exécuté sur les arrangements est très précis et vraiment prenant. Ré-insuffler de la vie dans ces morceaux cultes, et nous entraîner toujours plus bas, est le véritable exploit de cet album. Pour une rétrospective c'est une réussite. Et c'est comme cela qu'il faut voir Feberdrömmar I Vaket Tillstånd. Bel et bien comme un album « 8 1/2 ». Un exercice de style. Techniquement imparable, même si la magie n'opère pas de la même façon.
Il ne reste plus qu'à espérer que le prochain album sorte vite. La durée de vie d'une rétrospective est toujours courte. Clairement, si ce recueil avait été présenté comme le neuvième album du groupe cela aurait été une franche déception. Comme je le disais, il faut plus le voir comme du bonus, un privilège. La présence de Niklas est palpable, mais rien n'égale ses prestations sur son propre territoire. Kvarforth fait au passage un admirable « fuck » à l'auditeur. Il semble qu'avec un sourire en coin il ait décidé de laisser « Through Corridors Of Oppression » telle qu'on la connait. Ce n'est pas pour me déplaire, elle est tellement parfaite.
Ymishima (7/10)
Dark Essence Records / Karisma Records / 2013
Tracklist (48:07) 1.Terres Des Anonymes 2.Szabadulj Meg Önmagatól 3.Ett Liv Utan Mening 4.Selvdestruktivitetens Emissarie 5.Black Industrial Misery 6.Through Corridors Of Oppression
8 comments
Commentaire by S.B.P. on 28/09/2013 at 5:56
Concernant le premier morceau “Terre des Anonymes” et des paroles, il s’agit en fait d’une traduction en français de l’original “Fields of Faceless”:
To walk the fields of faceless
To carry the burden of knowlegde
To sail the seas of unbearable negativity
Must walk these fields…
Must carry these burdens…
Must sail these seas…
Alors effectivement, les paroles francisées sont à chier, et Famine les braille à peu près n’importe comment en les répétant avec lourdeur et bouffonnerie, mais au moins à sa décharge, ce n’est pas lui qui les a écrites. (On peut supposer qu’il a traduit le texte en français car il était incapable de le chanter en anglais, bref mauvais choix)
En tout cas ce morceau, si l’on omet la prestation vocale, est franchement excellent et prenant.
La batterie est assurée par une boîte à rythme, je peux le certifier. Signe caractéristique: la double pédale hache le souffle de la guitare électrique.
Pas écouté le reste du disque.
Commentaire by ymishima on 10/10/2013 at 11:41
Je savais pour les paroles de “Terre des Anonymes”, je parlais surtout de l’intro du morceau qui est assez hum… kitsch. Après la reste n’est qu’une traduction, qui est plutôt juste.
Pour la boite à rythme, je confirme, en fait c’est la même que dans les demos.
J’en profite pour donner une gommette aux chroniqueurs qui voient des changements sur “Through Corridors Of Oppression”…. C’est bel et bien la même qu’avant.
Commentaire by Tar on 06/12/2013 at 17:44
C’est pour “SISI LA FAMINE JE VIENS DE DÉGUEULER MON PUTAIN DE FROMAGE” que tu n’aimes pas ce morceau ?
Mais c’est jubilatoire cet intro .
Commentaire by S.B.P. on 06/12/2013 at 21:57
C’est complètement ridicule (or l’ambiance du morceau ne se prête pas à la bouffonnerie) et ça me fait penser au freestyle de Kickback sur “Ruining the Show”. Si tous les clones de Peste Noire se mettent à introduire leur morceau façon “ouech gros Brutal Forest dans la place poto!” le niveau de honte va encore monter d’un cran.
Parfois un peu d’auto-censure en art ne fait pas de mal.
Commentaire by Zozo on 08/12/2013 at 10:33
Le dit-morceau en live : https://www.youtube.com/watch?v=H24KwUjiR2w
Commentaire by misterpatate on 08/12/2013 at 10:39
Merci Zozo de nous montrer un exemple de ce qu’il ne faut PAS faire en concert, à savoir filmer 50 secondes d’un morceau avec une image perrave et un son tout aussi perrave. Il existe un enfer réservé aux personnes comme celle qui a filmé ça. Juste à côté de celui des slammeurs.
Commentaire by Charly on 10/08/2014 at 21:21
@Misterpatate
C’est famine lui-même qui a mis cette vidéo en ligne, donc pour les cours de techniques vidéo on repassera.
Sinon cette intro en français c’est vraiment une énigme, est-ce de l’ironie au 5ème degré, ou juste de la vulgarité. En tout cas j’accroche vraiment pas au délire de Peste Noire, y a aucune beauté dans cette musique, c’est tellement loin de Shining que j’ai du mal à comprendre.
Commentaire by S.B.P. on 11/08/2014 at 18:57
Je pense que c’est juste de la vulgarité, de la beauferie comme Fam’pine en déverse à longueur de morceaux en essayant de la faire passer pour de l’audace et de l’originalité.
Par contre je ne nie pas la qualité de la musique de Peste Noire, sans la surestimer non plus. C’est juste le narcissisme de Fam’pine qui gâte un peu le tout (par excès de frime).
Objectivement ‘L’ordure à l’état pur’ est un mauvais album, tandis que ‘Peste Noire’ est un bon, voire très bon album.
En revanche, en terme d’attitude extra-musicale, Fam’pine incarne parfaitement tout ce qu’il prétend dénoncer: le mec qui trahit pour réussir, qui cherche les formules à succès, qui fréquente le gratin pour décrocher des invitations… Il cache ses contradictions sous des provocations et des revendications, mais il faut vraiment être pas très finaud pour croire à son “authenticité”.
Quant à Shining, qui se ressemble s’assemble. Kvarforth est aussi là pour faire parler de lui et attirer l’attention avec des histoires extra-musicales (prostitution, drogue, faux suicide etc). Ce genre de type est assez malin pour connaître les stratégies qui mènent au succès (vu que la qualité musicale ne suffit plus depuis que le marché est saturé).