Les parisiens de THE MORGANATICS se présentent à nous avec un deuxième album sous le bras, We Come From the Stars qui suit d’à peine un an et demi son prédécesseur, Never Be Part of Your World. Ce premier chapitre publié en octobre 2013 en avait déjà intrigué plus d’un ne serait-ce que par sa pochette, référence moderne et presque perverse à Hamlet. Pour être complet, un EP était également sorti en avril 2012.
Il n’y a pas que le visuel de ce deuxième album qui s’avère être énigmatique. Les détails fourmillent et certains clés sont fournies afin d’éclairer l’auditeur. Le groupe semble prendre un malin plaisir à jouer sur les étiquettes, ils qualifient eux-mêmes leur musique de Spleen Rock ce qui vous me l’accorderez ne veut pas dire grand-chose. La brève description publiée sur leur page Facebook s’avère plus savoureuse et surtout éclaire un peu plus la démarche artistique à l’œuvre ici : « quand la voix de LINKIN PARK rencontre l’atmosphère d’ARCHIVE et les guitares de PORCUPINE TREE ». L’écoute de We Come from the Stars leur donne raison sur ce point, ils brassent de nouvelles influences et se plaisent à brouiller les pistes.
Le disque débute sous les meilleurs auspices possibles avec un « I’m a Mess (but I’m Free) », un titre bourré d’énergie très accrocheur, immédiatement accessible et au refrain imparable. Les deux chanteurs Seb et Chris portent un lourd fardeau sur leurs épaules et s’en tirent très bien, la guitare se fait virevoltante et la batterie enchaine les coups pour notre plus grand plaisir. Difficile de se débarrasser de ce refrain une fois que vous l’avez dans la tête. Toutes les caractéristiques du THE MORGANATICS cuvée 2015 apparaissent dès ce premier morceau : des jeux entre les chants féminins et masculins, des refrains qui font mouche, un mariage intéressant entre guitares, souvent rapides et très tranchantes avec des nappes de claviers, des boucles électro… Dans l’ensemble, l’album est mené pied au plancher, sans temps mort. Il faut attendre « Cycy Stardust » pour reprendre son souffle et voguer sur une composition plus calme et atmosphérique. « Interstellar » est un court interlude dans lequel nous pouvons entendre Bruce Soord (THE PINEAPPLE THIEF) réciter les premiers vers de la villanelle de Dylan Thomas « Do not go gentle into that good night » (que les acteurs du film en question reprennent à plusieurs reprises).
Autre particularité, la chanson « As Blackbirds Say », une composition fleuve de plus de douze minutes. Exercice difficile dans lequel THE MORGANATICS est loin d’être ici ridicule. Très protéiforme, le groupe y tisse une trame complexe, liant tour à tour différentes émotions à travers de multiples rythmes et atmosphères. On passe ainsi de chansons facile d’accès à un plat de résistance bien plus épais et chargé de sens. Comme sur Never Be Part of Your World, les parisiens continuent d’aborder des sujets lourds et difficiles laissant transparaître une grande mélancolie en filigrane. Le terme se Spleen Rock s’éclaire alors… Le feu continue de couver mais l’apparence est plus douce et accessible, presque pop parfois. Ils font la preuve que l’on peut aborder les sujets les plus tragiques sans tomber dans une musique lugubre et dépressive.
Beaucoup avait été un peu déçu d’un manque de maturité et de caractère à travers un Never Be Part of Your World un peu trop lisse et convenu. Autant la pochette frappait l’imagination, autant la musique peinait à susciter l’enthousiasme. Tel n’est pas le cas ici, THE MORGANATICS impressionnent aussi bien dans le tube court et accrocheur que dans le long développement plus profond et posé. We Come From the Stars est un disque très riche et il faudra bien des écoutes pour en percer tous les mystères. Du beau travail !
Oshyrya (08/10)
Autoproduction – Dooweet Records / 2015
Tracklist (63:40 mn) 01. I'm a Mess (but I'm Free) 02. We Come From the Stars 03. Even Terminators Can Cry 04. CyCy Stardust 05. Fucked Serendipity 06. Interstellar (Interlude) 07. My Uncomforter 08. I Just Want Something To Happen Tonight 09. As Blackbirds Say 10. Blue Diamond 11. What Remains