Vinnie Moore mène donc ses deux carrières de front : celle de guitariste d’UFO et celle de guitariste solo, dont la musique complait surtout les amateurs de guitare. On sait que Vinnie Moore – un individu extrêmement créatif et talentueux – est devenu quasiment le principal compositeur d’UFO, Phil Mogg se contentant de donner les grandes lignes musicales de chaque album. A priori les ressources créatives du guitariste musicien sont loin d’être taries puisque celui-ci continue de composer des albums solos de qualité.
Certes le niveau des premiers disques de Vinnie Moore n’est sans doute plus atteint depuis The Maze (1999). Depuis ce dernier album, Vinnie Moore n’a plus enchaîné de grands disques instrumentaux, même si To The Core ou Defying Gravity restent incontestablement de très bons disques. On rangera Aerial Visions dans cette seconde division (de luxe !) des disques de Vinnie Moore. Du très bon Vinnie Moore donc, mais nullement du très grand.
Aerial Vision intéressera tout particulièrement car sa structure est spécifique : on trouvera dans une première partie du disque un grosse influence boogie et blues. Du groovy « Mustang’s Shuffle » jusqu’à la reprise de « La Grange » de ZZ top, Vinnie Moore défriche des terres qu’il n’avait qu’arpentées que sur Out Of Nowhere. La guitare de Moore se fait ici feulante ou grinçante, tout en conservant un sens mélodique constitutif de sa personnalité. Rien de bien néo-classique donc, mais une musique qui déborde d’une chaleur presque incandescente.
La deuxième partie s’ouvre par le lent et mélodique « Looking Back » avant de nous emmener vers des titres plus inspirés du hard rock progressif et subtilement néoclassique de l’époque de The Maze et Defying Gravity. Les compositions sont plus variées, intégrant plus de ruptures et s’étirent sur des durées plus longues notamment la très riche « The Dark Dream » et surtout, en clôture « A Million Miles Gone ». Le son de la guitare de Vinnie Moore est toujours aussi superbe et chaque partie – qu’il s’agisse des thèmes ou des solos – est lumineuse. Si l’on retrouve bien quelques moments très techniques, comme toujours chez Moore, il sont parfaitement intégrés dans la trame musicale globale. Le point d’orgue est évidemment le long crescendo structurant « A Million Miles Gones » avec ses parties en legato de folies puis en aller-retour pour le final.
À la clôture d’un disque qui mérite plusieurs écoutes évidemment et dont la deuxième partie n’est pas immédiate, on se dira que si Aerial Visions n’est pas du niveau d’un Mind’s Eyes ou d’un Meltdown, bien des musiciens aimeraient pouvoir accoucher d’une musique d’une qualité telle. En solo et en groupe, la carrière de Vinnie Moore reste donc encore et toujours un sans-faute. Espérons que cela continue ainsi.
Baptiste (8/10)
Mind’s Eye Music / 2015
Tracklist : 1. Mustang Shuffle 2. Now’s the Time 3. Faith 4. Slam 5. La Grange 6. Looking Back 7. Aerial Vision 8. The Dark Dream 9. Calling Out 10. A Million Miles Gone
Ce disque de Last In Line est chroniqué ici sous le signe d'un double deuil. Celui tout à fait évident de Ronnie James Dio, auteur du fameux Last In Line dont s'inspire évidemment le nouveau groupe de Vivian Cambell. Mais celui plus récent du bassiste Jimmy Bain lors d'une croisière musicale organisée par Def Leppard, l'autre groupe de Vivian Cambell. Figure reconnue du milieu musical, Jimmy Bain était aussi un des membres du line-up originel du groupe de Dio avec Vivian Cambell et Vinny Appice que l'on retrouvent sur ce Last In Line, groupe hommage envers les premiers disques de Dio. Il en sera d'autant plus regretté que ce Last In Line est non seulement un hommage mais l'hommage que l'on n'attendait plus.
Selon les dires des musiciens, le groupe a commencé de la manière la plus simple possible : par le désir de jouer les chansons des trois premiers disques de Dio sur scène. Avec une setlist de seize titres jouée par les musiciens originels avec un nouveau venu au chant : Andrew Freeman. Et des concerts qui donnèrent assez de plaisir au quatuor et au public présent affermirent le projet. Finalement, l'idée a doucement émergé de la réalisation d'un disque contenant une musique totalement nouvelle.
La nouveauté réside évidemment dans les douze nouveaux titres composés par le combo : il n'y a pas de reprises de Dio à l'horizon. Mais elle réside aussi dans le fait que, malgré une parenté évidente avec la musique de Ronnie James Dio, le style de Last In Line n'en est pas un simple décalque. Certes, Vivian Cambdell riffe ici de manière beaucoup plus agressive que dans Def Leppart et il est bien plus bavard en solo. Et c'est un plaisir d'entendre cet excellent guitariste trouver bien plus d'espace pour s'exprimer (même s'il semble content de sa place au sein de Def Leppard, il n'a jamais obtenu un poids identique à celui de Phil Collen). Mais le tout ne sonne pas du tout comme les trop fameux tribute bands.
Peut-être parce qu'Andrew Freeman n'est pas un simple clone loin de là. Évidemment l'homme a dû beaucoup écouter les disques de Ronnie J. Dio mais ses influences sont assez diverses et il ne le singe jamais. C'est d'ailleurs peut-être pour cela qu'il effectue une prestation aussi convaincante : franchement ses vocalises sur « Burn This House Down » ou « Starmaker » sont excellentes.
Gardons-nous de trop d'enthousiasme : Heavy Crown n'est en rien révolutionnaire ni génialissime. C'est un bon disque qui ravira logiquement les fans de Dio et autres. C'est surtout un disque qui permet de réentendre Vivian Cambell dans un registre heavy qu'il avait quasiment renié durant des années, du fait de son limogeage inélégant par Dio à la suite de Sacred Heart. Il est bien qu'il ait réussi à se débarasser de son aigreur et qu'il ait réempoigné sa Les Paul pour un tel résultat.
Baptiste (7/10)
Frontiers / 2016
Tracklist : 1. Devil In Me 2. Martyr 3. Starmaker 04. Burn This House Down 05. I Am Revolution 06. Blame It On Me 07. In Flames (bonus track sur l'édition de luxe) 08. Already Dead 09. Curse The Day 10. Orange Glow 11. Heavy Crown 12. The Sickness
Eclipse n'est sans doute pas suffisant pour contenir toute la créativité d'Eric Martesson, son guitariste, chanteur et leader. Et l'on retrouve donc l'homme dans un certain nombre de projets souvent de qualité (W.E.T. par exemple). En voici un nouveau nommé Nordic Union et lancé évidemment par Frontiers, le label spécialiste des groupes montés de toute pièce dans un bureau de Naples. Ici le gros argument a pour nom Ronnie Atkins, le légendaire chanteur de Pretty Maids qui semble avoir un peu de temps libre entre les enregistrements du groupe dannois.
Personnellement, je trouve l'idée assez bonne : Ronnie Atkins n'est pas un vieux canasson fourbu mais un chanteur encore très en forme malgré les années. Et même s'il œuvre dans un registre vocal plus heavy que celui que propose généralement Eric Martesson, il a parfaitement la capacité de moduler sa voix de manière plus mélodique comme il l'a d'ailleurs démontré plusieurs fois dans Pretty Maids sur les titres les plus abordables des Dannois.
Et lui donner comme collaborateur Eric Martesson est loin d'être sot. D'abord car le hard mélodique que compose Eric Martesson est loin d'être mollasson ou fade : moderne et puissante, la musique de Martesson est une excellente mise à jour d'un style ayant son heure de gloire dans les années 80. Il est d'ailleurs significatif que l'album s'ouvre sur un venimeux « The War Has Begun » ; nous ne sommes pas dans la ritournelle sirupeuse. Le single « Hypocrisy » est son gros riff plombé poursuit dans un sillage réellement vigoureux et il n'y a bien que son refrain qui sonnera hard FM aux oreilles des auditeurs.
Eric Martesson est aussi connu pour la qualité qu'il apporte aux disques qu'il mène à bout : son excellent, production impeccable, équilibre parfait entre les instruments… tout est bel et bien là ici sur Nordic Union. Au point d'ailleurs que l'on se prend à penser à Eclipse à l'écoute des pourtants très réussis « Wide Awake » ou « Go ». Il est vrai qu'Eric Martesson a pris en charge tous les instruments sauf la batterie et quelques solos, ce qui en dit long sur sa marque sur ce disque, certes de qualité, mais manquant quand même d'un vrai grain de folie.
Baptiste (7,5/10)
Frontiers / 2016
Tracklist : 1. The War Has Begun 2. Hypocrisy 3. Wide Awake 4. Every Heartbeat 5. When Death Is Calling 6. 21 Guns 7. Falling 8. The Other Side 9. Point Of No Return 10. True Love Awaits You 11. Go