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Mother Road – Drive

1400780000_500La pochette du premier album de Mother Road, Drive, n'est pas à la pointe du modernisme : ce montage photo aux couleurs sepia figurant une bicyclette bondissant au dessus d'un train nous indique que Mother Road ne fait pas dans le metalcore destiné au marché ricain. Et pour cause, le groupe lancé par le guitariste Chris Lyne (Soul Doctor) ne vise en rien à épouser les (fluctuants) courants de la mode. Dans le sillage de Soul Doctor, Mother Road propose un hard bluesy à la manière des tout premiers Whitesnake ou de Mountain voire d'une certaine facette de  Deep Purple ou de Led Zeppelin.

Chris Lyne a eu la bonne idée de faire appel au chanteur Keith Slack, vieux baroudeur de la scène hard mélodique (MSG, Steelhouse Lane), très à l'aise pour casser et voiler sa voix, histoire de la gorger d'émotion bluesy. Et il s'exprime parfaitement sur la majorité des morceaux d'ailleurs très réussis, à la manière d'un Coverdale en forme (la très belle entame « The Sun Will Shine Again » ou la ballade superbe « These Shoes »).  

Aux claviers, on retrouve l'inattendu Alessandro Del Vecchio, marathonien des productions Hard FM de Frontiers et qui joue ici de… l'orgue hammond. Peut-être que l'homme est un mercenaire, mais c'est un mercenaire compétent qui a l'intelligence de parfaitement se couler dans le schéma musical proposé. Sa prestation est bluffante de qualité. Sur l'intro de « Dangerous Highway » il invoque les mânes de Jon Lord avec une aisance assez stupéfiante.

Mother Road accouche ici d'un très bon disque de hard seventies et bluesy : les nostalgiques de Lovehunter ou de Who Do You Think You Are pourront se jeter dessus allegro.

Baptiste (7/10)

 

AOR Heaven / 2014

Tracklist (52:00) : 01. The Sun Will Shine Again 02. Feather In Your Hat 03. Drive Me Crazy 04. Out Of My Mind 05. These Shoes 06. Dangerous Highway 07. Poor Boy (Long Way Out) 08. Dirty Little Secret 09. Blue Eyes 10. Still Rainin 11. On My Way

 

 

Yes – Heaven & Earth

yes_heavearOn sait que le rock rime peu avec l'âge et la vieillesse : un bon rockeur est jeune et fougueux. Et il a le bon goût de mourir vite pour ne pas souffrir des affres du temps. Or, il s'avère qu'après de très nombreuses péripéties – dont une des plus loufoques fut sans doute la période des deux Yes jusqu'à Union (1991) –, Yes est toujours en activité et qu'il s'agit du dernier géant du progressif qui tourne et enregistre régulièrement des disques. Alors que Genesis est en stand by et que le dernier avatar de King Crimson est plus que jamais un projet de Robert Fripp, les cinq musiciens de Yes sont là. Étant donné que le groupe a dépassé la quarantaine et ses musiciens la soixantaine, il serait facile de tomber à bras raccourcis sur les vétérans du rock progressif et de le railler copieusement. Toutefois, ça ne sera pas la démarche adoptée ici pour parler d'un disque auquel je ne croyais pas : Heaven And Earth. La mansuétude est donc de mise.

Un nouveau chanteur à l'aise

Mettons-nous d'accord d'emblée : oui, Heaven & Earth est a des années lumières de Fragile et Close To The Edge. Oui, l'inspiration n'est plus ce qu'elle était et les moments de bravoures sont rarissimes sur ce nouvel opus. Oui, le nouveau chanteur Jon Davidson n'est qu'un clone compétent de Jon Anderson. Oui, il n'y a aucune adace présente. Oui, Heaven And Earth est moins bon que son prédécesseur, le surprenant de par sa qualité Fly From Here. Mais le disque du retour de l'inattendu Geoff Downes avait un atout pour emporter la conviction : l'exhumation d'un long morceau très réussi, datant de plus de trente ans. Cette fois les membres de Yes ont dû composer entièrement cinquante-deux minutes de musique. Et le résultat n'est pas si mal. 

De manière paradoxale, ce résultat tient surtout à la prestation de Jon Davidson. Cette prestation est très bonne. Si on admet son mimétisme avec Jon Anderson qui s'étend même jusqu'aux paroles mystico-philosophiques, on peut apprécier ses mélodies vocales et ses parties chantées qui tombent toujours très juste. « The Game », la très jolie ballade « To Ascend », ou « It Was All We Knew » sont des morceaux totalement portés par le chant de Davidson qui n'ennuie jamais. Le bonhomme est crédité sur quasiment tous les titres, ce qui démontre une créativité réelle.

Dur constat

Et heureusement que cette créativité est là, car du côté des quatres vieux briscards, Steve Howe, Chris Squire, Geoff Downes et Alan White, le bilan est bien plus sombre. Il y a très peu de parties musicales mémorables : un comble pour Yes… On retiendra le break bienvenu sur « Believe Again », mais qui aurait pu être tout de même développé plus. On remarquera l'introduction planante et agréable de « Light Of The Ages ». On s'attardera aussi sur la pièce la plus progressive qui clot le disque, « Subway Walls », où un peu d'ambition s'exprime là. Pour le reste du temps, les guitares se contentent de quelques mélodies, généralement plaisantes, sur les couplets et de quelques solos (« Step Beyond »). Les claviers de Downes restent eux d'un grand minimalisme, ce qui n'est pas surprenant si l'on suit aussi ce qu'il compose pour Asia. Quand à la section rythmique, elle n'est pas indigente mais on peut quand même attendre mieux de White et Squire au jeu bien linéaire souvent.

Sur Heaven & Earth, la durée plutôt longue des morceaux est surtout due à la lenteur des tempos : pas de folie à l'horizon donc. De telle sorte, qu'en fait la musique sonne plutôt comme de la pop un chouïa ambitieuse que comme celle d'un groupe qui a produit jadis des choses aussi monumentales que Relayer (1974). On ne peut que le déplorer et j'en suis un peu triste personnellement. Mais il faut reconnaître que le groupe ne peut, sans doute, viser autre chose à ce jour, sans se planter complètement. Dur et réaliste constat, mais relevons aussi que la musique du groupe s'écoute agréablement et qu'il n'en a pas sur le fond à rougir.  

Baptiste (6/10)

 

Site officiel

Frontiers / 2014

Tracklist (52:00) : 1. Believe Again 2. The Game 3. Step Beyond 4. To Ascend 5. In A World Of Our Own 6. Light Of The Ages 7. It Was All We Knew 8. Subway Walls

Cage The Gods – Badlands

CAGETHEGODS-BadlandsVoici une phénoménale entrée en matière pour Cage The Gods, un jeune groupe britannique formé en 2012. Emmené par le charismatique Peter Comerford (chant et guitare) les quatre jeunes musiciens frappent très fort avec ce Badlands, succédant à un EP, Favourite Sin, déjà très prometteur. Malgré la pochette quelque peu lugudre, le propos n'est pas du tout sombre : Cage The Gods produit un hard mélodique et bluesy de haute volée. Le premier single, l'exceptionnel « Favourite Sin » fait un peu figure de manifeste musical pour le reste du disque : enlevé, mélodique et accrocheur, il a un effet immédiat. On y décèle évidemment les influences que l'on retrouvera sur le reste du disque : les grands anciens des années 70, mais aussi des touches des années 80 (un peu de Guns 'n' Roses et de Bon Jovi époque Keep The Faith, notamment sur « Falling »). 

Le tout est porté d'abord par une production impeccable. De manière paradoxale, alors que l'orientation musicale est clairement « rétro », le son est tout à fait moderne, ce qui fait qu'on rapprocher plus facilement Cage The Gods d'un The Answer, que d'un Graveyard ou d'un Horizont, qui eux recherchent un mimétisme sonore plus net. La puissance sonore et la clarté de l'ensemble servent cependant nettement la musique, et tout particulièrement sur les nombreux moments forts du disque, « Badlands », « Sacrifice », « Falling » et bien d'autres.

En outre la production met particulièrement en valeur la voix puissante et chaleureuse de Peter Comerford. Outre son aisance naturelle, on retrouve chez Peter Cornerford une implication personnelle très forte, de telle sorte que l'émotion traverse chacune de ses interventions, notamment sur les chansons les plus douces (« Falling », la ballade « What's Left Of Me »). Assurément son talent fait beaucoup pour la qualité de Badlands, dont il est la cheville ouvrière. 

Il serait injuste de ne pas signaler les qualités du guitariste soliste Jam : les parties tirées de sa Les Paul sont de haute tenue. Extrêmement varié, son jeu regorge d'idées et surtout d'un feeling assuré par une réelle technique, qui sait quand elle doit s'exposer ou se montrer plus discrète. Le bonus track « Wake Up » à écouter absolument témoigne de cet ensemble de qualités : plans en guitare claire, gros riff accrocheur, harmonisations subtiles, solo brûlant.

On aura compris que Badlands m'a totalement conquis et que je vois Cage The Gods comme un futur grand, dans un style (le hard rock classique rétro) qui connait une seconde jeunesse, de manière totalement inattendue.

Baptiste (8/10)

 

Site officiel

The End Records / 2014

Tracklist (52:59) : 01. Favourite Sin 02. The Ending 03. Sacrifice 04. Badlands 05. Trouble Reigns 06. Bruce Willis 07. Fallin 08. A Thousand Times 09. One More Taste 10. What's Left Of Me 11. Promises 12. Sacrifice (acoustic) 13. Wake Up (bonus track)