Author Archive

Gotthard – Silver

Gotthard aura donc bel et bien survécu à la mort dramatique de Steve Lee. Renforcés par l'excellent Nic Maeder depuis Firebirth, les Suisses ont atteint un beau rythme de croisière musical et restent une valeur sûre du rock dans leur pays natal. Plus de deux ans après la parution d'un Bang ! de bon acabit, la route se poursuit avec ce Silver… qui ne révolutionnera pas franchement la carrière du groupe. Gotthard est en terrain connu et l'auditeur ne risque pas d'être déboussolé par ce qu'il va entendre.

Allez, chipotons : peut-être que Silver est-il un peu plus soft et un poil moins novateur que Bang !. La power ballade, efficace mais convenu, qu'est « Stay With Me » est sur ce point assez significative. Ainsi, la balance penche-t-elle peut-être un plus du côté « rock pop » du groupe que de son côté « hard rock ». Le titre « Beautiful », assez dans la lignée du Bon Jovi actuel, appuie bien ce sentiment tout comme « Reason For This » assez irrésistible il faut l'admettre. On remarquera un Nic Maeder toujours aussi à l'aise au micro, même s'il ne fera jamais oublier Steve Lee, ce à quoi il ne s'efforce pas puisqu'il ne singe jamais son prédécesseur. On l'appréciera tout particulièrement sur la ballade « Not Fooling Anyone » même s'il l'on pourra reprocher aux orchestrations de quelque peu plomber cette chanson par une certaine maladresse.

Toutefois, il y a du musclé aussi sur Silver. Étrangement, ce n'est pas le morceau d'ouverture, « Silver River », qui apparait comme le meilleur dans le genre. On lui préférera « Electrified » ou « Everything Inside », « My Oh My » dans le genre hard seventies puissant dans lequel l'orgue hammond fait partie intégrante de la texture sonore. On ne pourra que se féliciter de la chose tant l'instrument enrichit nettement ce Silver. La production de Charlie Baeurfind s'adapte bien au propos, même si on l'aurait plus appréciée en tranchant qu'en rondeur. 

Au delà de la question de l'équilibre entre titres soft et hard, le principal problème de Silver réside dans un certain côté convenu : l'audace n'est pas présente franchement ici, alors qu'elle avait sa place, bien que discrète, sur Bang !. Par ailleurs, malgré le grand plaisir qu'on peut avoir à écouter Silver, jamais aucun titre ne semble pourvoir jouir du statut à venir de « classique » du groupe. Rien ne décolle franchement : pas « Moutain Mama » ou de « Anytime, Anywhere » à l'horizon. Peut-être faudrait-il donner un coup de pied dans la fourmilière plus nettement pour obtenir un surcroit d'inspiration ?

Baptiste (7/10)

 

G Records / 2017

Tracklist : 01. Silver River 02. Electrified 03. Stay With Me 04. Beautiful 05. Everything Inside 06. Reason For This 07. Not Fooling Anyone 08. Miss Me 09. Tequila Symphony No. 5 10. Why 11. Only Love Is Real 12. My Oh My 13. Blame On Me 

Kreator – Gods Of Violence

La carrière de Kreator prend de plus en plus un tour exemplaire. N'en déplaise aux réfractaires à Edorama ou à Outcast, il n'y a en fait vraiment que Cause For Conflict (1995) qui soit un disque réellement raté par le groupe de Mille Petrozza. Et ce disque remonte à plus de vingt ans… Quant aux autres disques, ils sont au moins bons voire excellent ou brillants. 

Ce qui est aussi sûr c'est que depuis Violent Revolution (2001), Kreator a adopté une recette qui a lui a octroyé un important gain de popularité en se réconciliant les vieux fans hostiles au tournant que constituait Renewal, mais aussi en gagnant un public plus jeune. Et l'on sait que Mille Petrozza n'a pas envie de réentamer une nouvelle traversée du désert et qu'il ne cherche pas à perdre le public (re)trouvé à partir en 2001.

Refuser la stagnation totale

Pourtant le leader du groupe d'Essen se refuse à une stagnation totale et les disques parus depuis cette date, s'ils conservent tous les fondamentaux de l'identité de Kreator, intègrent un certain nombre de variations bienvenues. Peut-être est-ce ceci qui a permis au groupe de Mille Petrozza de conserver une créativité musicale impressionnante pour une formation ayant trente ans de carrière derrière elle. Et Gods Of Violence ne dérogera pas à la règle. Certes, il peut sembler au premier abord très convenu : avec son titre plus qu'éculé et un artwork d'un classicisme étouffant, Gods Of Violence ne me disait rien qui vaille. En y ajoutant les paroles de Mille Petrozza qui tournent sacrément en rond (la guerre, la religion et le fanatisme, la violence… mais toujours in abstracto), cela fait partie des points faibles du disque. 

Mais sur ce point, on en restera là. Car Gods Of Violence est encore une fois une énorme réussite, du calibre d'un Phantom Antichrist dont il semble être quasiment le descendant direct. Il n'est pas surprenant que Kreator ait de nouveau fait appel à l'excellent Jens Bogren qui une fois de plus n'a pas démérité et semble avoir été associé à un processus créatif qui s'est étalé sur trois années. Mais quel résultat ! Poussant encore plus loin les volontés mélodiques déjà bien présentes sur Phantom Antichrist, les chœurs accrocheurs, les guitares à l'unisson et les solos mélodiques abondent sur le disque.

Même si certains titres sont clairement plus agressifs que d'autres (« World War Now », « Totalitarian Terror » qui sont les plus proches des classiques de Kreator), un moment mélodique est toujours présent. De même on remarquera, que le chant de Petrozza est un poil moins hargneux que de coutumes, lorgnant parfois même vers un Udo Dirkschneider. Mais il faut rappeler ce tournant mélodique était déjà présent sur Phantom Antichrist et sa généalogie pouvait en être faite jusqu'à Coma Of Souls, voire certains passages d'Extreme Agression. Lorgner vers la NWOBHM, vers Iron Maiden ou Accept, n'est pas si neuf pour Kreator tout comme le choix de travailler ses refrains (« Side By Side » ou le remarquable titre épique « Death Becomes My Light »). 

Déflagration sonore impressionnante

Ce qui est ici plus inattendu, ce sont certaines influences disposées parcimonieusement : des touches de Rammstein sur « Fallen Brother », un riff à la In Extremo sur « Hail To The Hordes »… voilà qui peut étonner. Tout comme d'entendre de discrètes touches de claviers sur « War World Now ». Ce sera par ailleurs une surprise plaisante d'entendre Mille Petrozza s'essayer au chant parlé sur l'impressionnant « Death Becomes My Light » ou, en allemand cette fois, sur « Fallen Brother » dédié à ses amis décédés. De même la présence d'une harpe et d'une cithare à l'ouverture d'un phénoménal « Gods Of Violence » surprendra. Tout ceci est cependant prudent et dispersé : aucun titre ne sort totalement du thrash metal ; nous ne sommes pas du tout dans l'optique d'un Endorama. L'on est ainsi face à une paradoxe : aucune chanson de Gods Of Violence n'est totalement du thrash metal, mais aucune ne relève pour autant d'un autre style musical. 

Et d'une certaine manière, le résultat musical valide cette orientation ambiguë : Gods Of Violence est un énorme disque de Kreator qui accouche encore de futurs classiques pour les concerts comme « World War Now » ou « Gods Of Violence ». Que le tempo soit supersonique, comme sur « Totalitarian Terror » ou plus mesuré, comme sur « Satan Is Real » Mille Petrozza et les siens font systématiquement mouche sans aucune panne d'inspiration. Petrozza est incontestablement un des meilleurs riffeurs en activité mais aussi un compositeur au sens large, capable de varier les introductions, les refrains et la structure des titres avec un talent jamais pris en défaut. Et quant il est épaulé par un Sami Yli-Sirniö à son meilleur et un Ventor toujours aussi imposant, on tient une déflagration sonore impressionnante. Bravo à eux.

Baptiste (9/10)

 

Nuclear Blast / 2017

Tracklist (52:00) : 1. Apocalypticon (intro) 02. World War Now 03. Satan Is Real 04. Totalitarian Terror 05. Gods Of Violence 06. Army Of Storms 07. Hail To The Hordes 08. Lion With Eagle Wings 09. Fallen Brother 10. Side By Side 11. Death Becomes My Light

Graham Bonnet est en route vers les soixante-dix ans et poursuit toutefois son bonhomme de chemin envers et contre tout. Évidemment tout est devenu plus confidentiel depuis les années 80 et les succès de Rainbow, MSG et Alcatrazz, mais son obstination force le respect. Si l'heure de la retraite n'a pas sonné pour le chanteur britannique à la voix si délicieusement éraillée, la question est de savoir ce qu'il peut bien proposer à ses fans. L'homme n'a produit aucun disque marquant depuis Stand In Line d'Impellitteri (1988) même si on a pu l'apprécier au sein du Taz Taylor Band et on pouvait s'interroger sur sa capacité à encore produire une musique de qualité sous son nom.

La réponse sera assez vite immédiate : elle est positive. Définitivement. D'abord car, malgré les excès de boisson, Graham Bonnet a miraculeusement conservé sa voix si particulière. Mais aussi du fait du très bon line-up qui l'accompagne : Beth-Ami Heavenstone à la basse, Conrado Pesinato aux guitares, l'ex-Alcatrazz Jimmy Waldo aux claviers, et Mark Zonder (Fates Warning) à la batterie jouent parfaitement leur rôle. On remarquera évidemment le retour de Jimmy Waldo avec Graham Bonnet tant il évoque l'époque bénie d'Alcatrazz mais il faut surtout insister sur les superbes parties du nouveau venu Conrado Pesinato aux guitares : grosse technique, très bon touché… il n'y a rien à remettre en cause là. 

Le tout pour des compositions inattendues de qualité ici. Les chansons de The Book sont des brulots de hard rock classique, racé et mélodique, à la croisée évidemment de Rainbow et d'Alcatrazz. Il y a ici de l'énergie mais de la mélodie et de la mélodie et jamais du sirupeux. On remarquera tout particulièrment les titres les plus accrocheurs : « Earth's Child (I Am Your Son) » ou « Rider » au refrain énorme, mais le niveau est globalement soutenu. Certes les clin d'œil musicaux ne sont pas absents tel le début de « Dead Man Walking » qui suggère nettement MSG. Mais The Book se voulant dans le sillage des disques de la période dorée de Graham Bonnet, lorsque Richie Blackmore ou Michael Schender faisait appel à lui, il n'y avait aucune raison d'exclure toute référence. 

Ces références seront d'autant plus évidentes que Graham Bonnet enfonce le clou sur le CD bonus de The Book. Il y a là une bonne partie des hits du Down To Earth de Rainbow, d'Assault Attack de MSG et d'Alcatrazz voire de son premier album solo, Line Up (1981), réinterprétés. L'excercice est devenu banal de nos jours mais il n'est pas du tout désagréable et sera une porte d'entrée intéressante pour beaucoup de néophytes. En tant que bonus à ne pas comparer aux nouveaux titres, qui leur inférieurs, ils sont tout à fait appréciables et ce d'autant plus que les nouvelles chansons de Graham Bonnet ne déméritent pas, loin de là. 

Baptiste (7/10)

 

Frontiers / 2016

Tracklist CD1 : 01. Into The Night 02. Welcome To My Home 03. Earth's Child (I Am Your Son) 04. Rider 05. Dead Man Walking 06. Strangest Day 07. The Dance 08. Where Were You ? 09. The Book 10. Everybody Wants To Go There 11. California Air 

CD 2 (Re-recorded classics) : 01. Eyes Of The World 02. All Night Long 03. Lost In Hollywood 04. Since You Been Gone 05. Night Games 06. S.O.S. 07. Assault Attack 08. Dancer 09. Desert Song 10. Island In The Sun 11. Hiroshima Mon Amour 12. God Blessed Video 13. Will You Be Home Tonight 14. Witchwood 15. Stand In Line 16. Here Comes The Night (Down Without A Fight)