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Pendant une décennie, Severe Torture nous avait proposé un flux assez constant de sorties avec un dénominateur commun : un Death bourrin et efficace en diable. Puis, soudain, après un Slaughtered solide, plus rien, si ce n’est des apparitions en live ici et là. Il aura donc fallu 14 ans pour que la bande à Dennis revienne avec un vrai album.

Et sans surprise, le groupe n’a pas changé malgré ces longues années de pause (uniquement entrecoupées par un petit EP en 2022, le bien nommé Fisting The Sockets). La recette n’a pas changé, la seule différence notable réside dans le personnel : Seth a en effet laissé sa place derrière les fûts à Damiën Karpentier, mais ce changement de batteur n’a aucune influence sur le son. Pour être honnête, si je n’avais pas vu une vidéo du nouveau batteur sur la page Facebook du groupe, je n’aurais même pas remarqué la moindre différence.

Deux écoles s’affrontent à l’écoute de cet album. Les plus optimistes verront le verre à moitié plein : le « meilleur » groupe de Death à tendance brutale des Pays-Bas est de retour avec un album qui s’inscrit dans la lignée de ses prédécesseurs. Ni trop court, ni trop long, il propose ce bon équilibre entre charges DM bien burnées et passages plus lents et pesants, histoire de reprendre son souffle. Les plus chagrins, quant à eux, verront le verre à moitié vide : 14 ans d’attente pour ça ? Aucune audace, aucune évolution, simplement un album qui conserve un pied dans le passé alors que la scène a évolué depuis lors.

Perso, j’ai choisi mon camp : je vide mon verre et m’en ressers un tout en me remettant, une nouvelle fois, un album qui n’apporte certes rien à l’édifice du death metal batave mais qui a le mérite de s’écouter sans trop de réflexion et avec un plaisir non feint.

8/10

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(Season Of Mist / 2024)
Tracklist (38:33) 1. The Death of Everything 2. Marked by Blood and Darkness 3. Hogtied in Rope 4. Torn from the Jaws of Death 5. Christ Immersion 6. Putrid Remains 7. The Pinnacle of Suffering 8. Through Pain and Emptiness 9. Those Who Wished Me Dead 10. Tear All the Flesh off the Earth

Benighted – Ekbom

Avec l’âge, le temps passe de plus en plus vite. Les goûts changent. Les gens évoluent. En un claquement de doigts, 10 années ont passé et tu redécouvres, presque stupéfait, un groupe dont tu croisais la route (presque trop) souvent. 10 ans, putain. En 2014, je tannais tout le monde avec Carnivore Sublime. Et puis, un peu par hasard, Benighted est passé au second plan de mes écoutes, à tel point que je n’ai suivi leurs exploits discographiques que de très loin, d’une oreille distraite. Jusqu’à cette nouvelle offrande débordant de joie, de bonheur et de bien trop d’insectes pour les plus sensibles d’entre nous.

La recette Benighted a-t-elle changé ? Non, pas vraiment. La bande à Julien creuse toujours le même sillon brutal/grindcore qui me séduisait déjà à l’époque. Benighted tabasse, Benighted éructe, Benighted en met plein les esgourdes. À la limite, on pourrait lui reprocher qu’il en devient presque trop simple, trop prévisible, 36 minutes menées tambour battant sans remise en question. Mais une remise en question est-elle vraiment nécessaire ? Depuis maintenant 5 ou 6 albums, Benighted a SA formule, un son propre, une identité inimitable. Il y a quelque temps, lorsque j’avais eu l’occasion d’entendre un premier single d’Aborted bien avant sa sortie, j’avais immédiatement tiqué en mode « mais attends, c’est Julien, ça ? ». Et quand on arrive à un point où on devient identifiable en à peine quelques lignes de chant ou avec cette combinaison de blast et de riffs acérés, il ne reste qu’une chose à faire : conserver ce cap.

Plongée dans un esprit malade avec la vermine pour tout compagnon, Ekbom s’intègre avec aisance dans l’excellente discographie de Benighted. Aucune surprise au rendez-vous, simplement le niveau de qualité auquel Julien et ses comparses nous ont habitués depuis bien longtemps.

8,5/10

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(Season Of Mist / 2024)
Tracklist (36:39) 1. Prodome 2. Scars 3. Morgue 4. Le vice des entrailles 5. Nothing Left to Fear 6. Ekbom 7. Metastasis 8. A Reason for Treason 9. Fame of the Grotesque 10. Scapegoat 11. Flesh Against Flesh 12. Mother Earth, Mother Whore

Eihwar – Ragnarök

Putaing cong, ils ont définitivement pété un boulard chez Season Of Mist. À croire que vivre à Marseille est devenu tellement déprimant qu’ils se sont mis à rêver du Nord. Et au lieu de simplement se faire une coloc’ avec Listenable dans le 5-9 (ou le 62, c’est pareil), ils ont signé Eihwar.

Eih-qui ? Eihwar, par Thor, straight outta Toulouse, la plus scandinave des villes françaises. Le Heilung low-cost du Puy du Fou, un duo dont la musique est pompeusement estampillée « Viking War Trance » alors que son énergie ferait passer Amon Amarth pour du Agoraphobic Nosebleed.

Odin, que c’est pauvre ! Les compos sont aussi lisses que l’armure de cosplay du Jean-Leif qui leur sert de grogneur, n’en déplaise au chargé de comm’ du Hellfest qui nous annonce « un mélange hybride pour une transe chamanique muant la Temple en dancefloor ». Le seul truc un tant soit peu subversif de ce projet, c’est le blackface de la chanteuse attifée en Bullerskydd (59,99 EUR au rayon couvertures d’Ikea, plaid effet fourrure garanti 100 % polyester sans souffrance animale). Elle va être belle, la Temple en plein aprèm, avec une horde de wannabe Ragnar qui ondulent du kilt en lampant de la Kro tiède dans leur corne en résine made in China pour séduire une Valkyrie (et comme le dit le proverbe : « Valkyrie, à moitié dans ton lit »). Le genre de spectacle à vouloir se faire crever les yeux par Hugin et Munin (les corbeaux d’Odin pour les non-initiés, histoire de rester dans le thème).

Ragnarök fait l’effet d’un spectacle cheapos dans un parc d’attractions pseudo-médiéval : on voit toutes les ficelles, on sent l’odeur plastique du « vrai cuir » des armures, les épées et les haches sont aussi émoussées que les compos poussives.

Season Of Mist avait déjà « l’original » dans ses artistes avec Heilung, les Phocéens viennent ajouter une pâle doublure qu’on nous survendra à gogo dans les fests comme « la sensation Viking » de 2024. Une belle leçon de marketing cynique de la part d’un label qui nous avait habitués à tellement mieux (et à Gronibard) par le passé. Ni énergique, ni dansant, Ragnarök est une musique d’ascenseur vers le Valhalla pour des cosplayers du froid transis depuis la fin de Vikings.

(skål/10)

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(Season Of Mist / 2023)
Tracklist (45:36) 1. Berserk 2. Fenrir 3. Ragnar’s Last Raid 4. Ragnarök 5. Skjaldmö 6. The Feast of Thor 7. The Forge 8. The New Vikings 9. Valhalla 10. Yggdrasil’s Renewal