Le black-metal est un terrain d’expérimentation musical passionnant. N’en déplaise aux puristes « trve ». Au fil des années, cette musique abrasive n’a cessé de muter pour donner naissance à des variantes intéressantes. Ici, nous vous parlerons du « blackgaze », savant mélange de black et de shoegaze (courant essentiellement britannique dont les figures de proue sont My Bloody Valentine, Lush, Ride et Jesus & Mary Chain).
A l’image de Deafheaven (référence quasi obligatoire), Nature Morte n’a pas de limites. Oddity, troisième album du trio francilien, confirme une ligne directrice amorcée sur ses deux premiers essais : une savante tambouille de post-rock, metal noir et parsemée d’autres influences (post-punk, pop…), prompte à toucher différents publics bien au-delà de la sphère « metal ». Les titres s’enchaînent avec fluidité pour former un tout cohérent. Si la violence vocale est évidemment prégnante, le groupe sait aussi se faire plus « solaire » (« Here comes the rain »).
Et c’est toute la force du groupe. De par cette diversité et son talent naturel, Nature Morte suscite l’émotion… Qui ne vous lâche plus par la suite. Ce qui est rare et l’apanage des plus grands.
Treponem Pal est un groupe qui bourlingue depuis le milieu des années 80. Premier groupe français signé sur le label Roadrunner, Treponem a roulé ensuite sa bosse un peu partout dans le monde (dont un Lollapaloza avec Ministry dans les nineties). Suite à son dernier album Screamers, le groupe de Marco Neves a repris la route pour s’arrêter ce soir au Ferrailleur à Nantes.
Treponem Pal entame son set avec « The fall ». Babylone brûle et le public du Ferrailleur entre dans la transe. « Badass sound system » enchaîne le pas et prouve que ces nouveaux morceaux tiennent bien la route en concert, à l’image de « Earthquake » et du titre « Screamers ».
La machine s’emballe avec « Planet crash ». Les classiques s’enchaînent ; les vibrations industrielles résonnent : l’hypnotique « Pushing you too far », « Funk me » et « Excess and overdrive » traversent les âges sans encombre. Le dub indus de « Panorama » invite à la danse et rappelle la richesse musicale de Treponem Pal. Les reprises (« Planet Claire » des B’52 et « Funky Town » de Lipps Inc) sont redoutables. Le groupe sait y faire.
La formation actuelle est à son meilleur. Marco reste le grand organisateur chamanique de l’affaire. Il est débordant de charisme. Laurent B, de retour depuis peu, et Polak assurent riffs et rythmiques avec efficacité. Quant à la session rythmique, elle impressionne. Nicky Tchernenko insuffle un groove crasseux et métallique à la basse. Très post punk dans l’esprit. Bastien Amy, son binôme à la batterie, frappe ses fûts avec conviction.
Le concert passe à grande vitesse et il faut se résoudre : la fin approche. Par bonheur, le quartet nous offre un bonus, « In/Out » exhumé de son premier album. Point final d’un show parfait d’un bout à l’autre.
Depuis quelques temps, Cannibal Corpse a de nouveau le vent en poupe : une tournée triomphale avec Dark Funeral et Whitechapel ; l’intégration d’Erik Rutan (ex Morbid Angel, Ripping Corpse) aux guitares et un excellent Violence unimagined couronné de succès. Un tableau idyllique qui promettait une suite toute aussi conséquente. Alors, lorsqu’a été annoncé Chaos horrific, nous nous pourléchions d’avance les babines.
Ce seizième (!) album ne s’embarrasse pas de subtilités. « Overlords of violence » commence à toute berzingue cette nouvelle collection d’horreurs ; annonçant clairement que quoiqu’il arrive, Cannibal Corpse reste fixé son crédo : le death-metal gore. Ouf ! Chaos horrific se situe donc dans la continuité de cette foisonnante et brutale discographie. Il ne varie guère hormis sur les puissants « Summoned for sacrifice » et « Blood blind » que le public ne manquera pas de célébrer sur scène. Pour le reste, Cannibal Corpse se contente de dupliquer ses recettes qui ont largement fait leur preuves .
Si malgré tout, Alex Webster et ses comparses continuent d’impressionner, de par une maîtrise technique toujours impressionnante, Chaos horrific reste une relative déception qui peine à retrouver la folie et l’urgence de son prédécesseur. Au final, rien de honteux, mais nous attendions tout de même un petit peu plus de la part de ces précurseurs du death-metal.