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La bande à Herr Morbid nous aura fait attendre ce cinquième album quatre longues années. Quatre années qui séparent donc Under Saturn Retrograde de l’excellent Negative Megalomania qui avait amené le groupe vers une énorme évolution, au grand regret des fans du Black Metal suicidaire des débuts, mais une évolution nécessaire selon moi qui aura permis au groupe de ne pas stagner et de se réinventer presque totalement. Exit donc, le Forgotten Tomb des débuts, Under Saturn Retrograde confirme la direction prise par le groupe avec Negative Megalomania : ce qui pouvait encore être considéré comme une sorte de Blackened Rock il y a quatre ans s’est encore affiné en mettant un peu plus de côté le côté Blackened pour donner dans une sorte de Dark/Rock presque progressif par moments.

Néanmoins, je dois avouer que ma déception a été grande lors de la première écoute, et que, même si les écoutes suivantes l’atténuent et m’obligent à nuancer quelque peu cette première impression, elle reste tenace… L’impression de me retrouver face à un ensemble manquant presque totalement de surprise et étant par bien des aspects prévisible et répétitif m’a très vite filé une demi molle. Dès les premières secondes de « Reject Existence » la griffe Forgotten Tomb est certes reconnaissable et restera présente durant tout l’album, mais je ne peux m’empêcher de penser que le groupe ne s’est pas vraiment foulé sur ce coup là…Ou alors que la direction prise par la bande du sieur Morbid ne me sied guère.
Pourtant, Under Saturn Retrograde plaira sans aucun doute à ceux qui ont connu le groupe sur le tard ; son côté légèrement easy listening va en tout cas dans ce sens. Mais aux fans qui connaissent Forgotten Tomb depuis sa création, j’en doute. Je fais pourtant partie de ceux qui ont adoré Negative Megalomania et qui ont adhéré à l’évolution du groupe. Mais ce cinquième album est, à mon goût, clairement moins prenant en ce qui concerne les ambiances, et il est aussi largement moins nuancé et moins varié. Il est certain que l’homogénéité et la cohérence sont bien souvent des atouts, mais ici elles amènent un côté linéaire et presque répétitif assez décevant particulièrement sur certains morceaux qui se ressemblent trop (« Reject existence » et « Downlift » par exemple) alors que d’autres combinent le bon et le moins bon (« Joyless »). Et que dire, du choix étonnant qu’à fait le groupe de placer en plein milieu de l’album une reprise du fameux « I wanna be your dog » des Stooges ?? Voilà un choix plutôt incongru, car même si la reprise en elle-même n’est pas mauvaise, elle est dispensable et brise un peu la dynamique de l’album. Etrange décision.

Certains morceaux, comme l’excellent « Shutter », ou l’éponyme en deux parties valent toutefois le détour, et créent l’ambiance qui fait défaut par ailleurs. Cela suffira t-il à faire d’Under Saturn Retrograde un album bon et prenant ? Non. Forgotten Tomb se montre bien trop sage, et me déçoit pour la première fois. Ce cinquième album manque cruellement de folie et de nuances, et donc d’impact. Mon verdict final est donc très contrasté car il y a tout de même du bon dans cet ensemble, mais trop peu…Je penche donc clairement vers la déception.

Sheol (06/10)

www.myspace.com/darknessinstereo

Agonia Records / 2011
Tracklist (50:45min) 1. Reject Existence 2. Shutter 3. Downlift 4. I Wanna Be Your Dog 5. Joyless 6. Under Saturn Retrograde Part I 7. Under Saturn Retrograde Part II 8. You Can't Kill Whos Already Dead 9. Spectres Over Venice

 

Aosoth – III

Cradingue et foutrement malsain, Aosoth l’est depuis sa création. Mais il me semble qu’avec ce troisième album le groupe place la barre un cran au dessus en nous livrant son œuvre la plus noire et la moins accessible.

Ne serait-ce qu’au niveau de la production, le changement est indéniable : III est calibré pour un rendu d’une noirceur sans pareil et pour un son d’une violence insidieuse. Un cran dessus, disais-je. Aosoth nous propose là son œuvre la plus froide et la plus menaçante, un pavé monolithique implacable dont s’échappe invariablement une matière noire et visqueuse, sombre sudation d’un ensemble qui évoque l’abyme. Extrême, avec ce timbre de voix inimitable de MkM, qui enfonce encore le clou et qui renforce le malaise, avec ses vocaux d’une profondeur inhumaine, dégoulinant de haine et de mépris. Monstrueux.

La violence est ici palpable à tous les niveaux, et quand elle ne s’exprime pas par le biais de blast beats et de riffs véloces, elle le fait à l’aide de mid tempos vicieux et de riffs presque dissonants. L’ensemble est hermétique, cela va sans dire, et s’adresse avant tout aux initiés, à ceux qui connaissent déjà la bête, qui l’aiment, ou à ceux qui sont à la recherche d’œuvres d’une noirceur sans pareil. Il ne fait pas bon être pur et innocent quand on s’approche d’un tel album, auquel cas le poison serait insupportable. Non, il faut l’avoir déjà goûté, de façon à y être réceptif et préparé. Même le piano, qui est d’ordinaire un instrument noble et d’une beauté rare, prend ici un visage menaçant et lugubre (III)…Non décidemment, il n’y a rien dans cet album qui vous aidera, tout y est d’une froideur et d’un vice exceptionnel, tout y est fait dans le but de provoquer un sentiment de répulsion intense, auquel sera lié à chaque écoute, un sentiment d’attraction tout aussi intense, irrémédiablement. Si vous recherchez de la chaleur, des mélodies et des refrains fédérateurs, passez votre chemin, vous vous êtes égaré…Cet album s’adresse aux avides d’extrême.

Les ténèbres poisseuses vous tendent la main. Acceptez ce voyage, et laissez la noirceur s’insinuer en vous, aussi facilement qu’un scalpel dans votre chair.

Sheol (08/10)

Site officiel: http://www.myspace.com/aosoth616

2011, Agonia Records
Tracklist (45:54min) 1. I 2. II 3. III 4. IV 5. V 6. VI

Amplifier – The Octopus

oshy_19062011_AmplifiCinq ans après Insider, les mancuniens d’Amplifier sont de retour avec non pas un, mais deux albums d’un coup, pour plus de deux heures de musique ! The Octopus est en effet un projet un peu fou mené à bien par la bande de Sel Balamir, qui a choisi la voie de la totale indépendance pour venir à bout de ses ambitions et nous proposer un double album comme on en voit que trop rarement. Une prise de risque majeure dans la carrière du groupe, qui a tout assuré de a à z, de l’autoproduction à l’auto -distribution en passant par l’auto- gestion (Sel Balamir allant apparemment jusqu’à prendre lui-même les commandes d’album par e-mail).

Le travail effectué par le groupe avec The Octopus est tout bonnement impressionnant. C’est un long voyage que nous propose Amplifier, un voyage de plus de deux heures, surprenant, complexe et intriguant à la fois. Un voyage qui peut sembler un vrai labeur lors des premiers passages, difficile à assimiler, mais qui se dévoile peu à peu, que l’on découvre un peu plus à chaque écoute. Comment ensuite, ne pas rester coi par la prise de risque, par le courage, mais surtout par le talent de ces gars là ! Le travail de composition, la maitrise, et l’honnêteté qui se dégagent de l’ensemble forcent le respect. The Octopus demande certes du temps pour être assimilé (nombreux sont ceux qui lâcheront l’affaire après une première écoute laborieuse, fous, ils ne savent pas ce qu’ils loupent !) mais impressionne de plus en plus au fur et à mesure des écoutes, et se révèle être une œuvre indéniablement réussie de bout en bout. Du groove qui fait le lien avec le premier album éponyme de 2004 (« Interglacial Spell »), des ambiances travaillées -et réussies !- aux morceaux semblant plus expérimentaux, tout porte la griffe d’Amplifier, infalsifiable, originale, talentueuse.

The Octopus se démarque clairement des sorties actuelles non seulement par sa forme mais aussi par son fond, en nous proposant seize compositions d’une maturité et d’une richesse que l’on ne peut que respecter. Chaque titre possède sa propre identité, mais forme pourtant un ensemble homogène et indubitablement cohérent, mais en contrepartie complexe et subtil. C’est un Rock progressif pas si évident que ça à cerner dont il s’agit, qui lorgne constamment vers le Metal avec ces guitares lourdes et ce son massif qui sont la marque de fabrique du groupe. Pour enfoncer encore le clou de la complexité, Amplifier s’installe bien solidement à cheval entre modernité et héritage des seventies. Entre passages Pink Floydiens ou Post Rock bruitistes, les groupe balance, joue, et étire son registre, plus fort et plus addictif qu’il ne l’a jamais été. Qui d’entre vous peut prétendre avoir entendu un tel album récemment ? La réponse est évidente : The Octopus fait partie d’une espèce en voie de disparition, comme on en voit presque plus depuis les années 1970, justement. Une œuvre aboutie, qui fait le lien entre différents styles. Une œuvre jusqu’au-boutiste, qui aura nécessité cinq années de travail et trois phases d’enregistrement. La liberté, choisie à raison par Sel Balamir à bien évidemment un prix à payer : la patience. Mais le jeu en vaut la chandelle, ca valait la peine d’attendre. Aucune maison de disque n’aurait soutenue un tel projet, pas assez « bankable » voyez vous, il est donc heureux que le trio mancunien ai opté pour l’indépendance totale, au risque de porter toutes les casquettes nécessaires pour voir son œuvre se concrétiser.

J’ai envie de dire un grand bravo à Amplifier pour sa démarche et son courage, et surtout pour avoir sorti une œuvre comme on en trouve que trop rarement, dans cette époque ou le pognon est maitre et où les artistes voient souvent leurs inspirations jugulées faute de moyens. Chapeau bas, Sel Balamir and co. , vous avez sorti là une œuvre magistrale !

Sheol (09/10)

www.amplifiertheband.com 

amplifier.bandcamp.com/album/the-octopus-2

myspace.com/amplifiertheband

Replica Records / 2011

Tracklist (123:33 mn)
CD1: 58:31 1.The Runner  2. Minions Song  3. Interglacial Spell  4. The Wave  5. The Octopus  6. Planet Of Insects  7. White Horses At Sea // Utopian Daydream  8. Trading Dark Matter On The Stock Exchange 
CD2: 65:02 1. The Sick Rose  2. Interstellar  3. The Emperor  4. Golden Ratio  5. Fall Of The Empire  6. Bloodtest  7. Oscar Night // Embryo  8. Forever And More