Après tant d’années d’attente, Eaglevision a enfin satisfait les amateurs (nostalgiques) de Rainbow et de Ritchie Blackmore. Le label commercialise le concert du groupe de Blackmore enregistré au Rockpalast et filmé pour la télévision allemande. On trouvait pas mal de pirates de cet enregistrement de qualité, tout comme de nombreux extraits sur Youtube. L’édition enfin officielle de ce live de la dernière (dans les deux sens du terme) époque de Rainbow permettra surtout aux fans de se mettre dans la légalité.
Indispensable malgré tout
Car il faut reconnaître qu’Eaglevision n’a pas fait de miracles : l’image est un peu améliorée même si les choix de prise de vue sont dans l’ensemble bons (on voit beaucoup Blackmore notamment durant ses solos). Le son reste lui tel quel. Il était, il faut le dire, assez bon avec une belle mise en valeur de Blackmore et de Doogie White ; la section rythmique demeure par contre trop en retrait et c’est bien fâcheux. Et il n’y a aucun bonus rajouté au concert. Le service minimum a été effectué en quelque sorte. Il n’en reste pas moins que ce Black Masquerade est indispensable.
Indispensable car Rainbow est bel et bien mort et enterré, ne serait-ce que parce que Blackmore, qui approche les 68 ans quand même, a tourné la page du hard rock se consacrant avec un certain bonheur à Blackmore’s Night et à la paternité. Nous avons donc un ultime témoignage de ce groupe majeur (presque autant que Deep Purple) dans l’histoire du hard rock. Et nous avons aussi un aperçu de la dernière formation de Rainbow et un bon rappel des qualités de Stranger In Us All (1995), un album qui en aurait sans doute appelé un autre, tant il vieillit bien. Et sur scène les « Too Late For Tears » ou « Black Masquerade » passent parfaitement la rampe du live, prenant même souvent une nouvelle tournure. Comme il y a beaucoup d’extraits (7 !) de cet album sur Black Masquerade, on a tous les éléments pour s’en rendre compte.
Parlons setlist
Cela se fait au détriment des classiques de Rainbow. Et on ne peut déplorer que l’absence de « Stargazer », « Kill The King » ou « Surrender ». L’époque de Turner est quasiment totalement passé à la trappe si ce n’est la présence de « Spotlight Kid ». C’est d’autant plus triste que durant la longue tournée qui s’est ensuivie, la setlist de Rainbow a évolué, intégrant notamment « Stone Cold » ou « Street Of Dreams ». Tant pis. Et c’est aussi dommage que le tube « Since You’ve Been Gone » soit tronçonné. Les voies de Blackmore sont parfois impénétrables…
Ce qui n’est pas consacré à Stranger In Us All est constitué surtout de titres du premier et très bon disque de Rainbow représenté par un très beau « Temple of The King », par « Greensleeves » et par l’incontournable « Man On A Silver Mountain ». La voix de White se place très facilement dans le sillage de celle de Dio et toutes ces interprétations sont très réussies. Il faut souligner la qualité de la prestation d’un chanteur, passant facilement de morceaux chantés par Turner, par Bonnet, par Dio, par Gillan, par Coverdale. Il fallait le faire. Doogie White n’est sans doute pas un chanteur de la carrure de ceux sus-cités mais il se tire fort bien d’affaire.
Mais le vrai héros du concert est évidemment un Blackmore très habité et très en forme. Il délivre de nombreux solos absolument superbes dont on ne se lassera pas. Personnellement, observer les articulations de sa main gauche et son attaque très spécifique à la main droite me fascine toujours autant. Surtout on le sent très concerné par la musique du groupe. Comment est-il passé de Rainbow à la sa musique de troubadours pour un voyage manifestement sans retour ? Mystère…
Black Masquerade a sans doute quelques défauts mais le pire est celui là : nous faire encore et toujours regretter que Blackmore ait troqué la stratocaster pour la mandoline.
Baptiste (8,5/10 pour la qualité du show, 7,5/10 pour cette édition)
Eaglevision / 2013
Tracklist : 01. Introduction 02. Spotlight kid 03. Too Late For Tears 04. Long Live Rock ‘n’ Roll / Black Night (extrait) 05. Hunting Humans 06. Wolf To The Moon / Difficult To Cure 07. Keyboard Solo 08. Still I’m Sad 09. Man On The Silver Mountain 10. Temple Of The King 11. Black Masquerade 12. Ariel 13. Since You’ve Been Gone (extrait) 14. Perfect Strangers 15. Greensleeves 16. Hall Of The Mountain King 17. Burn 18. Smoke On The Water