Décidément motivés à fêter leur vingtième anniversaire dignement, les finlandais d’Amorphis s’apprêtent à lâcher dans les bacs une seconde offrande à leurs fans les plus fidèles. Et après un premier dvd live dans la carrière du groupe sous la forme du magistral « Forging The Land of Thousand Lakes » c’est maintenant au tour d’une compilation un peu spéciale de nous être proposée.
« Magic & Mayhem » n’est pas en effet un simple best of, mais un moyen pour le groupe de faire découvrir (aux plus jeunes) ou redécouvrir (pour les autres) les titres de leurs trois premiers albums sous une forme réenregistrée avec le line-up actuel et forcément de meilleurs moyens de production que pour les enregistrements originaux. Reste à savoir si le fait de proposer des titres maintenant devenus cultes sous une forme complètement nouvelle n’est pas une sorte de fausse bonne idée. Pour cela il faut écouter ce nouveau disque sous plusieurs de ses aspects. Il faut savoir faire abstraction des antécédents plus que riches de ces compositions pour les écouter comme des nouveaux titres, puis il faudra réécouter ces titres déjà très connus pour ce qu’ils sont, c’est à dire une nouvelle facette de compositions déjà cultes.
Et si il faut bien dire que Tomi Joutsen fait presque l’unanimité depuis son arrivée dans le groupe au niveau du studio et de ses prestations live, il faut avouer que ce n’était pas la plus simple des tâches que de passer derrière ses prédécesseurs.
Soyons clair ici, si vous êtes un fan de la première heure et que vous considérez « Black Winter Day » comme parfaite dans sa version originelle, ce n’est pas vers ce nouveau disque qu’il faut vous tourner mais plutôt vers le live mentionné ci-dessus. Si dans le cas contraire vous considérez que le line-up actuel du groupe enterre tout ce qui se faisait avant chez les finlandais, alors vous écouterez avec satisfaction des versions beaucoup plus propres de ce que vous avez déjà pu voir en concert au niveau des anciens titres.
Tirés des trois premiers albums du groupe, ces titres réenregistrés passent au final, il faut le reconnaître, plutôt bien. Et aussi attaché qu’on puisse l’être à la version originelle de « My Kantele », il faudra bien se faire une raison face à la qualité de cette nouvelle mouture. Si l’un et l’autre ne sont pas comparables et ne doivent surtout pas être vus comme en position de duel, c’est car il faut plutôt ici voir de la complémentarité, et sans remplacer leurs ancêtres, ces versions offriront aux jeunes fans un moyen de découvrir en douceur la riche histoire du groupe, pendant que les plus anciens s’amuseront au jeu des sept différences à chaque nouveau titre.
Après plusieurs écoutes, on se rend bien compte que ce sont au final les titres de « The Karelian Isthmus » qui bénéficient le moins de ce dépoussiérage. En effet, à part pour le plutôt mélodique « Exile of The Sons », les titres les plus violents comme « Sign From The North » et la reprise de Abhorrence « Vulgar Necrolatry » ont du mal à être digérés. Soyons clair, les compositions tiennent la route et n’ont rien à envier à certaines productions actuelles, mais tout comme les titres « Magic and Mayhem » et « Song of The Troubled », c’est avec le son des premiers enregistrements que ce genre de morceau prend toute sa splendeur, et c’est bien la version originelle de ces titres qui sert le mieux la violence de ces classiques.
Les plus grands tubes du groupe ne sont pas vraiment une découverte, et l’on a déjà bien assez souvent entendu « Black Winter Day », « The Castaway » ou « My Kantele » en live pour savoir que ces titres n’ont pas pris une ride en vieillissant et que Tomi sait leur rendre hommage à sa façon, c’est ainsi avec plaisir mais sans réelle surprise que l’ont entend ces nouvelles versions très léchées qui manquent peut être tout de même de l’énergie du live à laquelle on s’était habitué.
Au final, ce seront bien les titres moins joués en concert de « Tales From The Thousand Lakes » et « Elegy » qui prennent toute leur ampleur dans ces nouvelles versions. Des titres épiques comme « Drowned Maid », « On Rich and Poor » ou « Against Widows » développent ainsi leurs mélodies sur un nouveau niveau et avec une production comparable à celle présentée sur les albums « Skyforger » et « Eclipse » on a l’impression de redécouvrir de vieux amis qui auraient rajeunis plutôt que vieillis. Les lignes de guitare sont un pur bonheur et c’est certainement vers ces titres que l’on reviendra le plus souvent, alors que l’on écoutera les plus grands classiques sur le nouveau dvd fraîchement arrivé sur nos étagères et que l’on continuera de sortir notre vieille version poussiéreuse du premier album lorsque la nostalgie nous y poussera.
Un album à ne pas forcément mettre entre toutes les mains donc, mais on pouvait bien s’en douter que quoi qu’il arrive avec ce genre de produit, vieux fans et jeunes fans confondus se diviseront en deux groupe pour accueillir ce nouveau disque avec soit un regard méfiant, soit un grand sourire chaleureux. Dans tous les cas, le groupe nous fait ici une offrande valable à l’existence tout à fait justifiée.
Necrotaupeslinger (07.5/10)
Nuclear Blast / 2010
Tracklist (60:34) : 01. Magic and Mayhem 02. Vulgar Necrolatry 03. Into Hiding 04. Black Winter Day 05. On Rich and Poor 06. Exile of The Sons 07. The Castaway 08. Song of The Troubled 09. Sign From The North 10.Drowned Maid 11. Against Widows 12. My Kantele 13. Light My Fire