oshy_22112010_tripti« Plût au ciel que l’auditeur, enhardi et devenu momentanément féroce comme ce qu’il écoute, trouve sans se désorienter son chemin abrupt et sauvage à travers les morceaux de cet album sombre et plein de poisons ; car à moins qu’il n’apporte dans son écoute une logique rigoureuse et une tension d’esprit au moins égale à sa défiance, les émanations mortelles de ce disque imbiberont son âme comme l’eau le sucre… ».

Une fois de plus, un écrivain génial que j’admire depuis mon adolescence vient à mon secours, comme il l’avait fait pour ma chronique de l’immense Monotheist de feu Celtic Frost en 2006… Et ne croyez pas que je cherche à m’approprier ces lignes parfaites issues des Chants de Maldoror, il me semble simplement que la verve intemporelle de Lautréamont peut être tirée de son carcan littéraire pour s’appliquer à une autre forme d’art, en l’occurrence la musique. Et pas n’importe quelle musique : celle qui prend aux tripes, qui est profonde, qui vous retourne et vous hypnotise, celle qui est selon moi tout aussi intemporelle que certains écrits.

Mais revenons en au début de Triptykon, né sur les cendres encore fumantes de Celtic Frost, sans qui il n’aurait jamais vu le jour. Car Eparistera Daimones est bel et bien le frérot puissant et viril de Monotheist, il est sa continuité, sa suite logique, et se place à ses côtés sur la même marche. Avec Triptykon, Fisher a continué son œuvre, a parachevé ce qu’il n’avait pas pu finir avec Celtic Frost. Mais finalement, bien fou celui qui osera s’en plaindre, car ce premier acte de Triptykon n’est pas un simple Monotheist bis, non. Il le prolonge, il le complète, et il forme désormais avec lui un duo imparable, nécessaire, marquant. A quoi bon tenter de décrire cet album ? Il fait partie des œuvres qui se vivent de l’intérieur, qui se ressentent, et qui entrent en cohésion avec vous… ou non.

Ceux qui n’ont pas aimé Monotheist peuvent passer leur chemin et aller voir ailleurs, car ils n’aimeront pas Eparistera Daimones. Ceux qui l’ont aimé par contre, ceux qui ont vibré en l’écoutant savent de quoi je parle : d’un foutu poison qui s’infiltre en vous en vous procurant tant de plaisir que vous vous en délectez, d’une œuvre écrasante en phase avec son époque, qui vous rend dépendant et dont vous ne vous lassez pas, d’un syncrétisme imparable et intemporel des styles extrêmes parmi lesquels le Doom, le Thrash, le Black et le Death, tous unis en une même vision après avoir été passés au filtre de Tom G. Fisher, qui réussit le pari de sortir à quatre années d’intervalle et avec deux groupes différents deux albums qui feront date et qui marqueront le Metal de leurs empreintes. 

Oui, vous avez bien compris ou je veux en venir, je veux simplement dire que l’Eparistera Daimones de Triptykon rejoint le Monotheist de Celtic Frost au Panthéon du Metal. Cet album est indispensable. Ces albums sont indispensables, et ils ne vieilliront pas au même rythme que les autres, et c’est une chose rare. Dans dix ans, dans quinze ans, Celtic Frost et maintenant Triptykon feront encore parler d’eux, croyez moi. Pourvu que Fisher continu à nous abreuver de cette façon encore longtemps, nous autres, amateurs d’œuvres obscures.

Sheol (10/10)

 

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Century Media records / 2010

Tracklist (72:42 mn) : 1. Goetia 2. Abyss Within My Soul 3. In Shrouds Decayed 4. Shrine 5. A Thousand Lies 6. Descendant 7. Myopic Empire 8. My Pain 9. The Prolonging