« Il faut battre le fer quand il est chaud » ou selon le délicat aphorisme de Sting « secouer l'arbre à pognon quand les fruits sont mûrs ». C'est sans doute le raisonnement du label Frontiers, trop content de pouvoir faire fructifier la signature de Yes en publiant rapidement un concert de la tournée du groupe qui précéda la publication du globalement réussi Fly From Here. Car on ne peut pas dire que les live du groupe manquent à l'appel : entre les officiels, les semi-officiels et les bootlegs, le fan a tout pour être rassasié.

Il est vrai qu'il n'a pas toujours le droit à un très joli pochette de Roger Dean comme ici (même cette dernière ressemble étrangement à celles de Keys To Ascension), ni à un son de qualité comme c'est aussi le cas ici, bien que les interventions en direction du public aient été coupées. Cette absence s'associe d'ailleurs à une autre absence : celle d'un public qu'on n'entend que bien peu (il frappe un peu des mains sur « I've Seen Good People »). En outre malgré la qualité du son, on constate un certain manque de dynamique découlant sans doute plus du groupe que la production. Car, malgré la qualité du solo de Steve Howe, on remarquera bien vite que « Siberian Khatru » se montre bien poussif et  que « I've Seen All Good People » ne passe pas non plus vraiment le turbo. Les tréfonds en terme de poussivité seront sans doute atteint avec « Owner Of A Lonely Heart », transformé en bleuette pop sans saveur. Les choses vont s'améliorer sensiblement par la suite, en partie du fait des qualités de White et Squire à la section rythmique, mais aussi d'un certain entrain du public sur « Roundabout » ou « Heart Of The Sunrise ».

Ce n'est pas tant l'énergie fluctuante du groupe qui rendra ce live intéressant aux amateurs mais deux autres atouts : le chant de Benoit David et le choix des titres.

Passons vite sur le premier : son chant est évidemment très mimétique par rapport à celui de Jon Anderson, sans doute plus que sur Fly From Here. On ne le lui reprochera pas car il est quasiment impossible de désolidariser la musique de Yes et la voix de son chanteur. Globalement Benoit David fait une très bonne prestation.

Quant à la setlist, je la trouve très intéressante bien qu'un peu frustrante. L'intérêt est évidemment d'écouter deux titres de Drama, un disque dont Anderson ne voulait jamais chanter de morceaux en live : « Tempus Fugit » et « Machine Messiah ». Il est aussi agréable d'entendre un inattendu « Astral Traveller » issu de Time and  Word, bien que le titre soit surtout le prétexte à un solo d'Alan White. Par ailleurs, la réapparition d'« Onward » me comble personnellement. Par contre, ces quatre morceaux mis à part, la setlist reste très très classique et l'on déplorera encore une fois que Relayer ou Tales From Topographic Oceans soient de nouveau complètement mis de côté au profit du Yes Album, de Fragile et Close To The Edge, dont les classiques sont archi connus. L'audace a ses limites.

Au final, In The Present, plus qu'être très réussi, s'avère intéressant, voire indispensable – pour toutes les raisons évoquées – pour de nombreux afficionados. J'en suis.

Baptiste [7/10]

Frontiers / 2011

CD 1:
01. Siberian Khatru 02. I've Seen all Good People 03. Tempus fugit 04. Onward 05. Astral Traveller 06. And You and I 07. Corkscrew (Acoustic solo)

CD 2:
01. Owner of a lonely heart 02. Southside of the sky 03. Machine messiah 04. Heart of the sunrise 05. Roundabout 06. Starship trooper