Archive for juin, 2012

Gojira – L’Enfant Sauvage

Un soir de répétition chez Gojira, il y a quelque temps déjà…

– (Joe) Bon, les gars, on vient de signer chez Roadrunner Records, il est temps de frapper un grand coup, histoire de percer pour de bon. Faudrait donc qu’on leur en colle plein les oreilles. Des suggestions ?
– (les autres)
– (Joe) Oh putain, les gars, merde quoi, un peu d’enthousiasme ! Bon, je vais téléphoner à Maxou, j’ai fait l’intérim sur le premier album de Cavalera Conspiracy, il pourrait nous renvoyer l’ascenseur et nous conseiller un peu. Vu sa carrière, il doit avoir de bonnes idées. Mario, file-moi le téléphone… Allo, Maxou ? Ca roule, ma poulette, toujours au soleil ? Et ta rasta en queue de raton-laveur, elle pousse ? Dis, on voudrait que tu nous conseilles : à ton avis, on devrait faire quoi pour vraiment marquer un grand coup avec Gojira ?
– (Max Cavalera, aka le Steven Seagal du Tribe Metal) Facile, mon grand : tu reprends ton album précédent, tu dilues un peu, histoire que ça bourrine pas trop tout en restant reconnaissable, et t’as ton nouvel album, ni vu ni connu ! Je fais ça depuis 10 ans déjà, et tout le monde n’y voit que du feu ! Pourquoi se casser le fion quand on peut faire simple, hein, ma couille ? Bon, je te laisse, j’ai trois heures d’entretien capillaire avant l’enregistrement de Conquer 4… heu, le prochain Soulfly, je voulais dire. Ciao, respect, my tribe your tribe, toussa…
– (Joe) Mmmh. Ca se tient, mais c’est risqué, les gars… Et si on demandait l’avis de James ?
– (Mario) James ? On connaît un James ?
– (Joe) grmbl ces batteurs, j’vous jure. James Hetfield, tu sais, le frontman des Mets, on a tourné avec eux. Repasse-moi le phone, j’appelle les States, j’espère qu’ils soient pas en train de bouffer, j’voudrais pas les déranger en plein repas de midi…
– (Mario) Il est 18h, ils bouffent vachement tard, leur repas de midi aux States !
– (Joe) pfffffffffffffff donne ce téléphone et trouve-toi une cymbale. Sérieux. Allo James ? How are you, guy ? You remember, Joe, from Gojira, ze French opening band of your band ? Je te derange pas, t’étais pas en train de bouffer ?
– (James) M’en parle pas, pas moyen de préparer la bouffe, Lars a encore piqué les casseroles pour les utiliser comme caisses claires. Les batteurs, j’te jure !
– (Joe) Si tu savais… Dis, je voulais te demander un truc : de toi à moi, comment vous avez fait pour devenir aussi énorme avec Metallica ? C’est quoi, ta recette du succès ?
– (James) Les Teletubbies ! Tu sais, cette émission pour les mouflets, ça m’a ouvert les yeux. En fait, pour que quelque chose fasse rire un gosse, il faut que ce soit répétitif. Alors, la première fois, mouais, ça marche. La deuxième fois, le chiard, il sourit déjà un peu plus. Et la troisième alors, alors là, mon vieux, il se tord de rire, alors que c’est trois fois la même chose. Beh le fan de Metal, c’est pareil. C’est con comme une table, un fan… T’as écouté Death Magnetic ? Dans chaque morceau, tu doubles certains patterns, certains passages, pour asséner le message. À force, ça rentre, le Metalleux dodeline de la tête, il est content, il met la main à la poche, et ding ding, en avant la caillasse dans nos poches !
– (Joe) Con comme une table ?
– (James) Ha ouais, vraiment. Sinon, tu expliquerais comment les chiffres de vente de Death Magnetic et tous nos concerts sold out alors que Lars… LARS, BORDEL DÉPOSE CETTE COCOTTE MINUTE ! J’te laisse, ce con de Lars va réussir à me faire replonger dans l’alcool. Tuut tuut tuut ».

Aujourd’hui, 16/05/2012…
Le constat est amer : Gojira a perdu de son charme… Envolée, la maestria qui faisait le charme du groupe ! Nous avons droit ici à une parodie de Gojira, balourde, maladroite et qui, à aucun moment, n’arrive à nous transporter comme sur un From Mars To Sirius, par exemple. Le plus frustrant ? Gojira a encore ce feu sacré et nous le prouve, ici et là sur cet album. Pris de manière isolée, certains morceaux restent bougrement efficaces, mais l’album, dans son ensemble, tient plus de la baleine échouée que du cétacé évoluant librement dans son environnement marin. On retiendra donc quelques morceaux plus inspirés (ou inspirants ?), tels qu’un « Planned Obsolence » à la brutalité salvatrice ou le single éponyme déjà éprouvé sur scène, mais ils sont noyés dans un océan de lourdeur qui freine l’essor de l’album. Trop long, trop redondant, L’Enfant Sauvage aurait pu gagner en efficacité s’il avait été plus épuré, moins répétitif. Il n’en est rien, et nous sommes en présence de la déception de l’année. Ni plus, ni moins.

« The Whale has landed ».

Mass et Mister Patate[5/10] (pour les chroniques respectives des deux chroniqueurs, voir les commentaires dès ce soir)

Site officiel : www.gojira-music.com
Myspace officiel : www.myspace.com/gojira

Roadrunner Records – 2012
Tracklist 1. Explode 2. L’enfant Sauvage 3. The Axe 4. Liquid Fire 5. The Wild Healer 6. Planned Obsolescence 7. Mouth of Kala 8. The Gift of Guilt 9. Pain is a Master 10. Born in Winter 11. The Fall

Wig Wam – Wall Street

Derrière leur attitude de joyeux drilles un peu défraîchis et bedonnants, Wig Wam cache une bande de musiciens somme toute très compétents. Et malgré leur succès réel en Norvège – leur terre d'origine –, on ne peut que regretter que leur notoriété n'explose pas vraiment. La faute peut-être à un excellent premier album, Hard To Be A Rock'n' Roller in Kiev clairement supérieur à ses deux successeurs, Wig Wamania et Don't Stop Rock'n' Roll, malgré les qualités reconnues de ces derniers.  

J'ai bien peur qu'il en soit encore de même avec ce nouveau venu, judicieusement intitulé Wall Street. À l'heure de l'effondrement du capitalisme financiarisé, il est plaisant de constater que quelques groupes s'intéressent à autres choses qu'aux mensurations de leurs groupies. Le fait que Wig Wam œuvre toujours dans un style réputé « léger » – un Hard FM fortement teinté de glam rock – n'empêche pas d'avoir une conscience sociale donc. Wig Wam n'a pas pour autant alourdi sa musique ni opté vers le « tout dépressif » et l'ambiance reste quand même globalement à la fête. Voilà un bon point. 

L'autre bon point sera pour la musique : elle toujours aussi bien composée et orchestrée. Le savoir-faire à la guitare de Teeny nous garantie une pléiade de bons riffs qu'il serait long d'énumérer tous. On remarquera évidemment les rythmiques sur le puissant « OGM (I Wish I Had A Gun) », l'utilisation intelligente de parties acoustiques sur « Wrong Can Feel So Right » et des solos brûlants un peu partout. Le fort joli instrumental qui clot le disque « Things Money Can't Buy » nous ramène toujours à la conclusion suivante : quand le métier et l'inspiration sont là, tout va. 

Au chant, Glam fait toujours preuve d'une pêche et d'un professionnalisme très efficace et accrocheur. S'il propose parfois des choses un peu convenues comme la ballade, jolie mais trop calibrée, qu'est « Tides Will Turn », l'album regorge de refrains fédérateurs presque immédiats :  le groovy et pop « Wrong Can Feel So Right », « Wall Street » ou « Natural High » sont à citer en bon exemple. 

La créativité indéniable se combine donc très bien au classicisme et les fans ne seront pas échaudés, loin de là, puisque Wall Street reste fidèle aux sonorités musicales des premiers disques. On remarquera toutefois une variété plus nette : les titres franchement hard (« Wall Street », « One Million Enemies, « The Bigger, The Better » très « Deflepardien ») sont certes en majorité mais on retrouve parfois du plus nuancé (« Bleeding The Daylight » qui est construit sur un crescendo), du calme,  voire de l'inattendu (« Victory Is Sweet » tout en finesse jusqu'à un refrain truffé de chœurs majestueux). Il arrive ainsi à Wig Wam, sur ce Wall Street, de lorgner vers un pomp hard rock de bon acabit ou vers un rock plus léger (« Natural High »). Et c'est très bien ainsi au final. 

Il serait temps que Wig Wam soit reconnu à sa juste valeur : celle d'un groupe poursuivant avec beaucoup de talent une lignée musicale qu'il arrive non seulement à faire survivre mais à « actualiser ». Ce n'est pas rien. Une question reste toutefois en suspens : à quand en France ? 

Baptiste [8/10]

 

Site Officiel

Frontiers / 2012

Tracklist (40:40) : 01. Wall Street 02. OMG! (Wish I Had A Gun) 03. Victory Is Sweet 04. The Bigger The Better 05. Bleeding Daylight 06. Tides Will Turn 07. Wrong Can Feel So Right 08. One Million Enemies 09. Try My Body On 10. Natural High 11. Things Money Can’t Buy

Fear Factory – The Industrialist

Mechanize avait marqué le retour de la « bonne entente » entre Dino Cazares et Burton C. Bell. Flanqués de la section rythmique de Strapping Young Lad, ils nous avaient livré un album plus que correct, qui venait effacer la déception engendrée par Transgression. Toutefois, ce nouveau line-up n’aura pas vécu longtemps, Byron Stroud et Gene Hoglan ne faisant désormais plus partie du groupe. Nos deux compères se sont donc retrouvés en tête à tête en studio pour composer un digne successeur à leur dernier effort. Et pour la batterie ? Un ordinateur ! L’usine de la peur s’industrialise… mais est-ce pour autant une bonne chose ?

Un premier constat s’impose dès le premier morceau : Fear Factory ne renie rien de son passé. Le son Fear Factory, si caractéristique, est à nouveau présent tout au long de l’album. Pourtant, ce qui peut sembler, à première vue, une bonne nouvelle est aussi, en quelque sorte, problématique. The Industrialist est, en effet, une copie presque conforme de son prédécesseur qui n’était, en somme, qu’une resucée légèrement diluée des meilleurs albums du groupe. Pour l’originalité, on repassera donc ! Toutefois, et c’est rassurant, Fear Factory conserve également une efficacité certaine et nous propose de morceaux qui cognent correctement, « Difference Engine » en tête.

Alors, le verdict ? Personnellement, je n’aurais pas acheté cet album sans l’avoir écouté au préalable… et après de nombreuses écoutes, j’hésite encore. Certes, la qualité est au rendez-vous, et on est désormais loin de l’échec qu’était Transgression… Mais quitte à mettre 15 EUR sur la table pour acheter un album de Fear Factory, autant les consacrer à un Demanufacture ou un Obsolete qui, tout en étant sensiblement comparables, restent toujours un cran au-dessus.

[7/10] Mister Patate

Site officiel : www.fearfactory.com
Myspace officiel : www.myspace.com/fearfactoryofficial

AFM Records – 2012
Tracklist 1. The Industrialist 2. Recharger 3. New Messiah 4. God Eater 5. Depraved Mind Murder 6. Virus Of Faith 7. Difference Engine 8. Dissemble 9. Religion Is Flawed Because Man Is Flawed 10. Human Augmentation