Seuls les plus expérimentés (les plus vieux quoi) parmi nous vous pouvoir se rendre compte du soi-disant événement que constitue pour la scène rock progressif le retour sur le devant de la scène de MABEL GREER’S TOYSHOP. A l’occasion de cette chronique, j’ai appris que le groupe s’avère être, en réalité, le précurseur des légendaires YES. MABEL GREER’S TOYSHOP a été fondé en 1966 par Clive Bayley et Bob Hagger. Le groupe comptait alors dans ses rangs Chris Squire, Peter Banks, Tony Kaye, Jon Anderson et Bill Bruford, soit des artistes qui feront ensuite une superbe carrière au sein de YES. Le groupe change finalement de nom en août 1968 pour devenir YES. En 2014, Bayley et Hagger se retrouvent et remettent le couvert après 45 ans de silence. Ils s’entourent d’une belle équipe fleurant bon la nostalgie pour mener à bien cette renaissance : ex-MABEL GREER’S TOYSHOP et YES Tony Kaye, l’ex-YES Billy Sherwood ainsi qu’un bassiste classique, Hugo Barré. Leur nouvel opus s’appelle New Way Of Life.
Les fans de rock progressif britannique pouvaient s’attendre au meilleur et pourtant la première écoute de ce disque se transforme rapidement en douche froide. Vous remarquerez que même à l’époque, en 1966, il manquait deux éléments importants au sein de MABEL GREER’S TOYSHOP. YES commença à avoir du succès après la sortie du Yes Album (1971) avec l'arrivée de Steve Howe et de Fragile (1971), qui marquait les débuts avec le groupe de l'ex-STRAWBS, Rick Wakeman. Et à l’écoute de ce disque, on se désole de constater que le duo Bayley et Hagger soient restés sclérosé dans les années 70. Les plus nostalgiques pourront trouver leur compte mais vu de ma fenêtre, en 2015, ces chansons sonnent quand même bien datées et peinent à créer l’enthousiasme chez l’auditeur. La magie des vieux albums de YES, la maestria et le feeling presque inégalé des britanniques à l’époque sont désespérément absents ici. Tout cela sonne bien mou, déjà entendu des centaines de fois, en retard de quatre décennies en résumé. Les musiciens ne déméritent pas, ils y a quand une sacrée expérience concentrée ici mais tout le monde joue gentiment, la sécurité et l’ennui monte alors très vite. Aucune des chansons présentes ici ne démontrent un joli caractère, et difficile de mémoriser tel mélodie ou tel refrain. Pour un petit groupe local, cela serait tout à fait respectable mais vu le pedigree des membres de MABEL GREER’S TOYSHOP, nous étions enclin à en demander beaucoup plus.
Avec le recul, ce retour sur le devant de la scène des britanniques semblent un coup marketing destiné à voir si les vieux fans seraient prêts à tomber dans le panneau. Pour faire bonne mesure, on va chercher deux anciens YES pour bien rappeler le lien historique entre les deux formations. Mais si Bayley et Hagger n’ont pas fait de vœux os au sein de ce qui allait devenir YES, il y avait peut-être une raison déjà en 1968. Avec New Way Of Life, la déception est au rendez-vous, avec une musique passéiste et nostalgique dans le mauvais sens du terme. Les classiques cités ci-dessus restent de bien meilleurs choix.
Tracklist (53:39 mn) 01. Electric Funeral 02. Get Yourself Together 03. New Way of Life 04. Beyond and Before 05. Sweetness 06. Images of You and Me 07. My Only Light 08. King and Country 09. Oceans 10. Singing To Your Heart 11. Jeanetta
Publié en même temps que son grand frère, la seconde partie du concept que voici ne génère pas en nous un fol espoir après la déception Juggernaut: Alpha (chronique ici). Il devient fatiguant de se voir ainsi éconduit par un groupe qui mélange allégrement vitesse et précipitation. Reconnaissons au moins que la continuité avec Alpha est totale et que l’auditeur ne devrait rapidement retrouver ses petits si le premier volet a été à son goût.
Après un petit moment d’accalmie sous la forme d’une petite mise en bouche sympathique, « Reprise », PERIPHERY relance la machine, à mon grand désespoir, avec un « The Bad Thing » djent et technique. Il n’aura pas fallu longtemps pour que les américains retombent ainsi dans leurs travers mais après tout ils sont cohérents avec eux-mêmes. Et c’est bien pareil pour moi, cette approche me déplait souverainement et me laisse de marbre. Entre les virtuosités sympathiques sans doute mais pas vraiment du goût de mes oreilles et les passages plus calmes limite guimauve et gnangnan faites votre choix. Et la voix aigüe et fluette de Spencer Sotelo en chant clair n’aide vraiment pas. On dirait un ado, le frontman de tous ces groupes à la mode outre-Atlantique. Il reste autrement plus convaincant quand il adopte un chant extrême et qu’il se voit habilement soutenu par une grosse section rythmique basse/batterie et la guitare agressive de Misha Mansoor. A trop vouloir bouffer à tous les râteliers entre rock sucré et djent bourrin, PERIPHERY se perd et nous auditeurs avec. Les directs et agressifs « Graveless » et « Hell Below » restent les deux meilleurs moments de ce disque sans toutefois atteindre des sommets. Faute de grives on mange des merles, comme le dit si bien le dicton populaire.
Le plat de résistance de ce deuxième chapitre est constitué par « Omega » une composition à tiroir de plus de onze minutes. Comme d’habitude vous trouverez ici à boire et à manger, avec quelques passages assez intéressants noyés dans un maelström hétérogène et assez indigeste. PERIPHERY ne sait décidemment pas faire dans la sobriété et semble ne permanence être en train de se justifier et de prouver sa maîtrise technique. Dans l’ensemble nous ne crierons pas au génie tout en reconnaissant qu’Omega apporte un peu plus de satisfaction qu’Alpha. J’espère un jour parvenir à comprendre et aimer ce groupe qui ne manque vraiment pas de qualité. Je me dis que le problème est peut-être générationnel. Je suis peut-être trop vieux pour comprendre. Pourtant le bonheur ne tient parfois pas à grand-chose. La prochaine fois sera peut-être la bonne.
Barren Earth a toujours suscité chez moi un grand intérêt qui s’est peu à peu transformé en un réel enthousiasme et ce dès sa formation avec l’annonce de son premier EP dans le courant des années 2008 / 2009. Ce groupe avait démarré alors comme un projet mené sous l’impulsion d’Olli-Pekka Laine plus connu pour avoir tenu la basse pendant de nombreuses années dans Amorphis. Il faut savoir qu’il ne tenait pas qu’un second rôle au sein de cette première et illustre formation puisque qu’on le retrouvait à l’origine de la composition de nombreux titres d’Amorphis sur les albums cultes que sont The Karelian Isthmus, Tales From The Thousand Lakes et Elegy. Très peu de temps après sa création le projet s’est muté en une sorte de dream team du Metal finlandais pour en faire un groupe à part entière dès la sortie du premier EP Our Twilight en 2009 (chronique ici).
Regardez-moi un peu ce line-up assez hallucinant : Kasper Mårtenson (Turisas (live)) aux claviers qui a été compagnon de route d’Olli-Pekka au sein d’ Amorphis sur le mythique Tales from the Thousand Lakes où il a lui aussi composé pour cet allbum, Marko Tarvonen (Moonsorrow, October Falls, Thy Serpent, Lakupaavi) à la batterie, Sami Yli-Sirniö (Kreator, Waltari) aux guitares, Janne Perttilä (Põhjast, Rytmihäiriö, Moonsorrow (live)) aux guitares et Mikko Kotamäki de Swallow the Sun au chant. Ce Line-up restera inchangé et accouchera de deux albums Curse of the Red River en 2010 et The Devil's Resolve en 2012 qui étaient assez colossaux dans un genre Doom Death Metal Progressif. Le groupe assura aussi bon nombres de concerts en soutiens de ses albums et évacua ainsi l’idée que l’on se faisait de lui à savoir une affaire de musiciens aux vues de sessions en studio. On peut d’ailleurs aussi remarquer et saluer l’implication notable de Sami Yli-Sirniö dans le processus de composition qui apporte une touche de folie et de virtuosité au tout déjà très carré et séduisant.
Comme vous l’aurez compris aux vues du background de ses musiciens le groupe reprenait dans sa musique les choses là où Amorphis les avait laissés en 94/96 à savoir un Death Metal de type Oldschool et finnois assaisonné d’éléments issus du Rock Progressif des 70s souvent Folk et qui ne rechignait pas non plus à ralentir le tempo et à donner dans le Doom Death Metal. Je me rappelle que les critiques d’alors n’avaient pas trainées à tomber dans une fainéantise intellectuelle et qui de manière assez injuste avaient souvent taxé Barren Earth de sous Opeth, sous Amorphis ou sous Swallow The Sun. Pour ma part j’ai toujours vu ce groupe de manière très particulière et lui prêtait des intentions bien plus audacieuses. J’ai toujours trouvé leurs compositions bien supérieures à celle d’un Opeth qui sombrait à mon gout trop souvent dans la complexité et la démonstration stérile ou à un Amorphis qui lui se vautrait dans la guimauve et la mièvrerie d’un easy listening Metal grand publique. Quant à la comparaison avec Swallow The Sun je n’en parle même pas car il faut vraiment être paresseux ou avoir de la merde dans les esgourdes tant les deux groupes ne jouent pas avec les même codes musicaux !
L’annonce est tombée il y a quelques mois d’un léger changement au sein du line-up avec l’arrivée au chant pour remplacer Mikko Kotamäki de Jón Aldará qui officie également dans le groupe de Doom Death Metal Atmosphérique Clouds. Dans un premier temps cela m’a laissé circonspect mais quand j’ai pu écouter le résultat lorsque le groupe a dévoilé sur le net via Youtube le titre éponyme qui figure sur ce On Lonely Towers, j’ai littéralement été emballé et conquis (news dans Metalchroniques ici) ! Le groupe a définitivement balayé le peu de matière pop/rock catchy qui lui valaient les éternels rapprochements avec ses compatriotes d’Amorphis. Attention je parle ici du Amorphis contemporain (de Eclipse à maintenant) car pour ce qui est de l’ancien Amorphis à savoir ce Doom Death Metal Progressif, leur musique y fait toujours allusion. C’est tant mieux et ce n’est certainement pas le fan absolu du old Amorphis qu’est votre humble serviteur qui s’en plaindra vu que le dit Amorphis a une fâcheuse tendance à être peu inspiré voire très putassier sur ces cinq dernières réalisations ! Ça c’est dit !
Cependant Barren Earth prend un peu tout le monde à contrepied puisqu’il a opté pour un chant clair dans une veine Heavy Doom Melal très lyrique pour contrebalancer ses coups de boutoirs Doom Death Metal. On peut tous crier «BINGO » car ce chant est absolument somptueux entre celui d’un Messiah Marcolin (Candlemass) et celui plus théâtral d’un ICS Vortex (Arcturus). Il apporte à la musique de Barren Earth une sacrée emphase épique et rompt de manière brutale avec celui de son prédécesseur ! Un coup de poker gagnant !
Je vous recommande grandement l’écoute de morceaux comme « A Shapeless Derelict » « Howl », « Set Alight », « Chaos The Song Within » ou « The Vault » pour vous faire une idée de la musique pratiquée. En plus d’être des réussites totales ils dressent un éventail stylistique des plus représentatifs : arpèges de guitare acoustique ou de piano classique, Deathgrowls ravageur et ultra caverneux, pesanteurs mélancoliques Doom Metal, errances progressives et folkloriques voire psychédéliques, envolées lyriques qui donnent la chair de poule, éruptions de blastbeats ou de up-tempo tonitruants et bon nombres de passage Heavy Metal tous plus remarquables les uns que les autres. Je peux vous dire que tout le reste de l’album est du même acabit ! Sans compter que la production est sobre, juste comme il faut mais polyvalente et très efficace. Elle traite de manière habile les moments de saturation et les passages plus instrumentaux ou autres arrangements progressifs toujours avec cette même justesse. Enfin pour une fois l’artwork est pas mal quand on le compare à celui de l’album précédant qu’il faut bien dire était vraiment à chier !
Si vous avez bien suivi, vous aurez alors compris que je trouve On Lonely Towers brillant et ultime sur toute sa longueur ! Barren Earth se paie le luxe de moucher tous ses détracteurs un par un et balaye toute tentative de comparaison avec les autres groupes auxquels la critique avait trop souvent et de manière abusive tendance à le comparer. Il s’émancipe en ouvrant un vaste champ Heavy Doom Metal à sa musique là où elle avait un peu trop tendance à rester coincée entre les deux albums de Amorphis que sont Elegy et Tales From The Thousand Lakes et les références issues du Folk Rock Progressif 70s chères à notre autiste de Mikael Åkerfeldt. Un album ultime qui va marquer mon année 2015 car je peux déjà vous assurer que cet album figurera dans mes tops en fin d’année ! Du tout bon en somme !
Century Media / 2015
Tracklist (64:44) 1. From the Depths of Spring 2. Howl 3. Frozen Processions 4. A Shapeless Derelict 5. Set Alight 6. On Lonely Towers 7. Chaos the Songs Within 8. Sirens of Oblivion 9. The Vault