Sarke a toujours été pour moi synonyme de force tranquille, de régularité et d’efficacité. Fondé en 2008 par le bassiste de Khold / Tulus Mr Thomas Berglie alias Sarke et épaulé dès le départ dans son entreprise par Nocturno Culto de Darkthrone, cette formation norvégienne se fixe pour bute de faire une musique sonnant vraie, brute et meut par deux vecteurs : des racines Black Metal du genre canal historique et un rock vintage arrengé à la mode 70s. Il faut dire que Thomas est doué pour ce qui est de la composition quand il s’agit de faire des chansons (oui je dis bien des chansons) sobres et âpres mais bourrées d’un feeling nostalgique. Une sorte de Dark Metal mélancolique drapé de discrets arrangements progressifs mais  n’hésitant pas à bomber le torse quand il le faut afin de faire groover ses riffs. Le tout opère irrémédiablement sur moi et on peut dire que je suis un habitué de sa musique. On peut aussi dire que Sarke n’a pas choisi la facilité puisque son Dark Metal (on va l’appeler ainsi) ne drague pas les pies metalheads attirées par les strasses des sur-productions Metal en tocs (cf : la fin d’une de mes précédentes chroniques ici) et cultive un son brute avec de sobres arrangements vintages. C’est une démarche qui le met forcément dans la marginalité et j’apprécie énormément ce côté têtes dures !  

En sept années d’existence et ce malgré l’agenda chargé de ses instigateurs, Sarke a sorti avec régularité et cohérence quatre albums tous taillés dans un même granite : Vorunah (2009), Oldarhian (2011), Aruagint (2013) ainsi que le petit dernier qui nous concerne aujourd’hui Bogefod. Ils ont même trouvé le temps d’effectuer des concerts et des participations à des festoches européens afin d’insister sur le fait que Sarke  fait avant tout du Rock et que forcément ça se joue live ! Jusqu’à présent tous ses albums sont sortis via Indie Recordings, le petit denier Bogefod ne déroge pas à la règle et est disponible depuis le 11 mars. Comme pour les albums précédents Lars-Erik Westby s’est chargé de l’enregistrement et du mixage au studio H-10 Productrions (Facebook ici). On peut dire qu’il est très impliqué dans le concept de Sarke vu qu’il a même participé à la composition d’un titre de l’album. Le mixage a lui été assuré par Thomas Eberger au Stockholm Mastering. Le son est fidèle à l’emprunte sonore des albums précédents à savoir ce son brute et légèrement arrangé apportant ce côté vintage 70s. Comme d’habitude j’ai adoré ! 

L’artwork de Bogefod est fascinant ! Il est l’œuvre de Terje Johnsen qui a façonné une iconographie morbide et très intrigante ! Une autre chose est à signaler il s’agit de l’apport non négligeable des textes de Hilde Nymoen qui sont inspirés de l' « Eyrbyggja Saga » une saga à propos de familles noroises lors de la colonisation de l’Islande (874 – 930), cette saga a la particularité d’être notamment axée sur le folklore, le culte païen et les superstitions d’alors. Plus on avance dans la découverte de ce quatrième album et plus on réalise qu’on a à faire à un réel travail collectif qui déborde largement du cadre strict du line-up officiel du groupe. Nous retrouvons bien évidemment Thomas "Sarke" Bergli à la basse et Steinar Gundersen (ICS Vortex, Satyricon (live), Spiral Architect) à la guitare qui avec l’aide extérieure de Stian Kråbøl se sont chargés de 88% de la composition musicale de l’album. Nocturno Culto s’est quant à lui chargé de la quasi intégralité du chant en apportant sa voix rocailleuse si particulière. Il faut noter d’ailleurs la surprenante participation sur « Dawning », un titre entièrement acoustique avec piano, guitare classique ainsi que quelques arrangements symphoniques comme des cordes, de Beate Amundsen qui fait une prestation lyrique de très haute volée !

Il y a beaucoup de chose à dire sur ce nouvel album en fait. J’ai adoré la marche fatale de « Evil Heir », une composition aux tonalités Doom Metal aérée de passages midtempo orientés sur ce riffig minimaliste aux sonorités Black Metal que l’on retrouve souvent chez Sarke. Sur un morceau comme « Taken » on retrouve ce riffing minimaliste mais dans une dynamique foncièrement plus Black Metal. C’est un peu pareil sur « Alternation », « Sunken » ou « The Wickeds Transient Sleep », ce dernier faisant un peu la place à des contorsions Doom Metal et d’autres intonations progressives. Avec « Blood Of Men » là encore on retrouve une composition avec ce riffing minimaliste mais ici entrecoupé de tournures Heavy Metal. C’est toujours simple et très bien fait. Sur « Burn » Sarke nous rappelle ce qu’il avait très bien su faire dès son premier album avec une superbe composition comme « Frost Junkie » où les ambiances prennent le pas sur le reste.  Il fait de même sur « Barrow Of Torolv » mais la rend légèrement plus complexe en y injectant une bonne dose de Doom Metal et des arrangements tels que des cordes symphoniques, de la guitare acoustique ou des claviers. J’ai plus particulièrement apprécié ces deux compositions mais j'ai également apprécié le reste. 

A l’arrivé on a un très bon album avec Bogefod qui est un peu plus complexe et contrasté que ces prédécesseurs et avec une imagerie très forte. De la production à la composition en passant par la thématique de ses textes, Sarke a fourni une fois de plus un bel effort ! Je ne sais pas pourquoi mais d’écouter Sarke ces derniers temps m’a redonné envie d’écouter du Alastis. C’est certainement dû à cette voix rocailleuse ainsi qu'aux nombreuses intonations Doom ou aux ambiances mélancoliques qui lui confère cette couleur Dark Metal bien prononcée. Enfin passons, jetez-vous sur cet album qui musicalement est assez différent de ce que fait Darkthrone mais qui a en commun un réel savoir faire en matière de riffs et cette marginalité dans la couleur raw du son. Je ne m’aventurerai pas à affirmer «  que les aficionados de Darkthrone devraient apprécier » vu qu’on a à faire à d’autres têtes dures et que ce sont des bestioles bien difficile à mener dans le genre bec à foins. 

FalculA (8,5/10)


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Indie Recordings / 2016
Traklist (34:23) : 01. Taken 02. Blood Of Men 03. Barrow Of Torolv 04. Alternation 05. The Wickeds Transient Sleep 06. Burn 07. Dawning 08. Evil Heir 09. Sunken.