Le groupe a pris une telle dimension que la sortie d’un nouvel album reste un événement majeur dans le petit monde musical occidental mais pas seulement. Sur les cinq continents, les fans de douceurs industrielles sauce teutonne frétillent d’excitation. Mais cette attente cache toujours une pointe d’angoisse, la peur de l’album de trop, de la tâche indélébile sur une discographie sans sortie de route jusqu’à présent (oui même Rosenrot, réessayez, vous verrez…).

Notons d’abord que contrairement au précédent, nous n’avons pas eu dix ans à patienter pour écouter de nouvelles chansons. Trois ans séparent les deux sorties, il est aisé de penser que la crise sanitaire a beaucoup joué. En effet, empêché de faire des tournées, en solo ou en groupe, le sextet a dû vite se rendre à l’évidence et décider de se remettre au travail collectivement.

C’est dans les vieux pots…

Avec ce huitième album, RAMMSTEIN continue d’appliquer consciencieusement la recette qui fait son succès et sa marque de fabrique depuis le début. C’est direct, efficace et très calibré avec onze nouvelles chansons d’une durée comprise entre trois et quatre minutes. Cependant, les premières écoutes sont décevantes et laissent un goût d’inachevé dans la bouche. Cela reste très présentable et jamais désagréable à écouter mais il manque un feu sacré qui emporterait tout et créerait une adhésion immédiate. Beaucoup peuvent penser revivre la période entre Mutter et Rosenrot, le sentiment d’avoir un album vite fait, construit à partir des chutes des sessions précédentes (effectivement en interview le groupe avait annoncé avoir mis de côté cinq titres car ils se limitent à onze titres par disque).

Contrairement à son prédécesseur, Zeit ne possède pas de tube à la « Deustchland », une composition fabuleuse, ébouriffante, qui rassurait sur le talent toujours intact des allemands. Zeit nécessite de prendre son temps pour apprivoiser ses meilleures chansons. Avec le temps (ou la méthode Coué c’est selon) des titres comme « Armee der Tristen », « Zeit » ou « Angst » s’avèrent être de petites pépites qui n’attendent qu’à être lentement polies pour faire apparaître leur éclat. Cette dernière chanson, en particulier, par son clip et l’intelligence de ses paroles fait mouche.

Zeit renferme ensuite les catégories ‘rammsteiniennes’ habituelles entre titres efficaces mais faciles comme « Giftig » ou encore « Ok » et les chansons un peu débiles, « Zick Zack » et « Dicke Titten » en tête. C’est idiot, inutile mais cela fait aussi partie de l’identité de RAMMSTEIN. Emballé c’est pesé et voici un huitième album tout frais tout chaud.

Bon alors, chef d’œuvre ou album de trop ?

Eh bien ni l’un ni l’autre mon capitaine. Zeit remplit son contrat en ajoutant quelques brûlots capables de faire un malheur sur scène (la tournée des stades 2022 peut aisément le confirmer). Ce n’est pas un disque qui jurera négativement parmi les autres albums. Après presque trente ans de carrière, l’âge d’or de RAMMSTEIN est forcément derrière lui et ils ne peuvent plus nous offrir des pépites du calibre de Mutter ou Sehnsucht. Faites-vous une raison, Cela va sembler cynique et beaucoup me trouveront des contre-exemples mais c’est le destin normal de tous les groupes après une si longue carrière.

Les allemands sont toujours là, fidèles au poste, avec les mêmes musiciens depuis les origines et ils continuent de proposer de bonnes chansons à défaut de tubes intemporels. Ils tabassent sur scène (comme à Lyon récemment, quel show !) et répondent ainsi à l’attente du public. Ceux qui aimaient aimeront, les autres ont de toute façon abandonné depuis longtemps.

Oshyrya (06/10)

 

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Universal Music / 2022
Tracklist (44:06 mn) 01. Armee der Tristen 02. Zeit 03. Schwarz 04. Giftig 05. Zick Zack 06. OK 07. Meine Tränen 08. Angst 09. Dicke Titten 10. Lügen 11. Adieu