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One Desire – One Desire

One Desire fait partie de ces groupes qui n’inventent rien mais qui arrivent à fournir un plaisir aux auditeurs un tant soit peu intéressés par leur démarche. Cette dernière est simple : dans le sillage d’une bonne moitié des productions du label napolitain Frontiers, il s’agit de proposer de l’AOR comme on on l’appréciait il y a trente ans de cela. De l’AOR à la Europe (période The Final Countdown) ou à la Foreigner, mais avec une touche au niveau de modernité pour attirer les jeunes oreilles qui viendraient à croiser par hasard la route de ce premier disque de One Desire.

Cette touche de modernité ne se trouve pas au niveau des compositions. Certes ces dernières ne sont jamais des copiés-collés des œuvres des grands anciens de l’AOR et ont toute une personnalité. Mais il faut aussi bien admettre qu’elles ne révolutionnent en rien le genre. Des groupes œuvrant dans ce style comme Work Of Art ou un WET s’avèrent beaucoup plus personnels quant à leur optique musicale. La modernité se trouve ici surtout au niveau de la production qui a à défaut d’être dépouillée ou brute, est puissante et claire. Certes la compression est très prégnante et le son de batterie bien synthétique, mais il s’agit aussi des lois du genre. Globalement la dynamique sonore retranscrite est pour beaucoup dans la fière allure de ce premier disque.

Les Finlandais emmenés par l’excellent chanteur Andre Linman proposent donc un cocktail musical dans la lignée de la meilleure AOR européenne : mélodique, accrocheuse et nerveuse, la musique de One Desire ne souffre pas trop d’influences pop envahissantes. Portés par une entame disque assez irrésistible dans le genre, les musiciens de One Desire ont par ailleurs l’idée judicieuse de se conformer au format des LP des années 80 et de ne pas s’éterniser trop longtemps. 44 minutes de musique suffisent à leur propos et c’est très bien ainsi.

Des titres qui auraient bien pu être des tubes à la grande époque de MTV se succèdent sans coup férir : « Hurt », « Apologize », « Love Injection »… il y a bien peu à jeter ici. Et ce d’autant plus que les Finlandais ont la bonne idée de varier les tempos : du puissant et franchement hard rock comme « Buried Alive » au plus dansant sur « Love Injection » jusqu’aux moments les plus mélodiques (l’inévitable ballade pourtant réussie « This Is Where The Heartbreak Begins »)… la variété exclut avantageusement l’ennui. Et à chaque fois Andre Linman s’avère impeccable : il s’agit assurément d’un chanteur à suivre dans le genre et ce d’autant plus qu’il semble assez jeune.

Ce premier disque de One Desire ne semble pas avoir grand chose pour lui : une présentation kitsch au possible, un son que n’aurait pas renié Mutt Lange en 1988, une orientation musicale totalement passéiste… et pourtant ce fut assurément ma bonne surprise de l’été. Le groupe ne semble pas vouloir se résoudre à un ce des projets éphémères qu’affectionne tant Frontiers et défend son disque sur scène. Tout ceci est de bonne augure pour One Desire et pour le genre.

Baptiste (7,5/10)

 

Frontiers / 2017

Tracklist : 1. Hurt 2. Apologize 3. Love Injection 4. Turn Back Time 5. Falling Apart 6. Straight Through The Heart 7. Whenever I’m Dreaming 8. Do You Believe 9. Buried Alive 10. This Is Where The Heartbreak Begins

Quel paradoxe que voilà ! Les musiciens de The Night Flight Orchestra sont de grands amateurs de science-fiction – comme en témoigne leur phénoménal dernier clip « Gemini » – alors que leur démarche est totalement rétro. Si on met de côté la qualité de la production toujours aussi claire, chaleureuse et dynamique, la musique de ce qui est bien plus que le side-project de membres d'Arch Enemy est toujours un somptueux et authentique hommage au classic rock américain de la fin des années 70 et des années 80. Une époque et un genre haïs par les rock critics pontifiants mais qui est révérée par une foule d'aficionados que drainent encore les concerts de Styx, de Kiss et de Foreigner. 

Avec ce Amber Galatic, the Night Flight Orchestra va encore aggraver son cas auprès des rock critics en poursuivant dans sa remontée du temps : plus encore que ses deux précédents opus, le groupe plonge franchement dans l'AOR et la West Coast qui monopolisaient le box office à la sortie d'Escape de Journey ou de IV de Foreigner. La mise de côté revendiquée de l'orgue hammond pour des synthétiseurs et des claviers « modernes » vont totalement dans ce sens. 

En route… vers 1981

Pourtant le brûlant « Midnight Flyer » qui ouvre le bal et que n'aurait renié le Deep Purple de Burn sonne encore assez seventies avec notamment ses duels de guitare et de claviers et de haute tenue. Puis « Star Of Rio » nous renvoie à l'époque du Kiss de Love Gun. Dans les deux cas de figure la qualité est totale et l'on ne peut regimber. « Gemini » forme lui un forme de speed rock disco totalement improbable et… irrésistible. Voilà encore une grande réussite du groupe qui témoigne de sa capacité à mêler les éléments les plus irréconciliables et d'en faire un recette savoureuse. 

Puis nous rentrons dans les années 80 : « Sad State Of Affairs », « Jennie », « Domino », « Josephine » ou « Something Mysterious » auraient parfaitement trouvé leur place sur les magnum opus de Toto, de Journey ou de Surivor. Et en conservant le meilleur : le groove de folie sur « Domino », l'entremêlement des guitares et des claviers sur « Josephine », le brio épique sur « Something Mysterious ». Le tout se mêle d'influences plus pop comme Supertramp ou Santana (le langoureux solo de « Domino »). Le dernier titre du disque est lui par contre totalement inclassable : « Saturn Velvet » est de facture ambitieuse du haut de ses sept minutes, et on pourrait y voir une ambition « progressive » s'il n'y avait un refrain totalement orienté radio, voire l'influence d'Abba ! D'où l'art de fouler des sentiers déjà battus en en sortant régulièrement.   

Tirer son chapeau à Björn Strid

Nous parlons beaucoup musique et tirons un chapeau aux cinq musiciens, mais il faut quand même s'attarder sur la star du groupe. Certes, les crédits de composition sont partagés, la section rythmique fait un très beau travail et les solos de David Andersson et de Richard Larsson de haute tenue, mais  c'est bien Björn Strid qui est l'astre musical sur Amber Galactic. Technique, versatile, inspiré voire transcendé, il est simplement parfait. Et ce dans tous les registres, sur ses couplets ou ses refrains, que ce soit en optant pour un falsetto sur « Just Another Night » ou pour la sensualité sur une semi-ballade comme sur « Jennie ». Bravo à lui. Il s'impose assurément comme un des meilleurs chanteurs de sa génération. Je dirais même qu'il est finalement plus convaincant que dans Soilwork, « son » groupe par excellence. C'est dire.

Finalement l'effet « The Night Flight Orchestra » s'est fait assez sentir pour que Nuclear Blast signe enfin ce bijou et que de vrais moyens lui soient accessibles. Espérons que le groupe puisse enfin jouer ailleurs qu'en Suède dans de toutes petites salles et puisse enfin soulever les foules au quatre coins de l'Europe et des États-Unis. Je serai là !

Baptiste (8,5/10)

 

Nuclear Blast / 2017

Tracklist (56:00) : 1. Midnight Flyer 2. Star Of Rio 3. Gemini 4. Sad State Of Affair 5. Jenny 6. Domino 7. Josephine 8. Space Whisperer 9. Something Mysterious 10. Saturn In Velvet 11. Just Another Night (bonus track)

Deep Purple – Infinite

Il semblerait bien que cela soit le dernier cette fois-ci. Infinite serait peut-être donc le dernier disque de Deep Purple, après une carrière de bientôt cinquante ans ! Avec ses hauts, ses bas, ses déchirements et ses réconciliations… et finalement un vrai apaisement depuis que Steve Morse est dans le groupe, soit une une vingtaine d'années maintenant. Il y a quatre ans, Now What ?! avait fait une grosse impression : soutenue par Bob Ezrin à la production, la bande à Gillan avait retrouvé une inspiration et une créativité inattendue pour un groupe qualifié hâtivement de « dinosaure » du hard rock. Car autant les dinosaures sont bel et bien morts et enterrés, autant Deep Purple propose toujours du neuf et souvent du bon, voire de l'excellent. 

Ici la démarche « décontractée » adoptée par le groupe est assez proche de celle du si réussi Now What ?! Et Bob Ezrin est toujours aux commandes de telle sorte que la texture sonore est assez proche de celle de son prédécesseur fameux. On nuancera toutefois un peu : Infinite est un peu moins ambitieux et un peu moins inspiré. Les titres sont d'ailleurs moins nombreux surtout si l'on tient compte du fait qu'une reprise des Doors, « Roadhouse Blues », pas indispensable, est intégrée. Par ailleurs, les touches « progressives » sont moins présentes et les développement instrumentaux plus concis. On remarquera aussi que le tempo s'est lentement mais sûrement ralenti depuis plusieurs années : à soixante-dix ans passés pour la moitié du groupe, la chose était sans doute inévitable. Le hard rock du Pourpre Profond est devenu surtout plus groovy, progressif et bluesy que fougueux. 

Cela donne à ce disque un calme et une sérénité qui éclate lors des moments les plus calmes comme sur le superbe « All I Got Is You » sur lequel Ian Gillan se retrouve particulièrement à l'aise. La première partie de « The Surprising » se place dans la même ambiance avant que le morceau ne se change en une pièce épique aux longs développements instrumentaux somptueux. Steve Morse et Don Airey s'avèrent totalement dans leur élément et l'on pensera parfois à ce que pouvait proposer Tony Banks avant que Genesis ne vire à la pop, durant les années 80. 

Les mauvaises langues diront que c'est largement le début d'Infinite qui porte le disque : « Time For Bedlam » et son vocodeur, « Hip Boots » au rythme délicieusement chaloupé et « All I Got Is You » constituent une ouverture de disque imparable. Et certes, on perd un peu en qualité sur la fin de disque (« On The Top Of The World », toutefois très honorable), mais il n'y a jamais de vraie panne d'inspiration. Par ailleurs Ian Gillan arrive souvent à transcender n'importe quel matériau musical : « Birds Of Prey » est là pour en témoigner. Le fait de « trafiquer » sa voix pour créer un effet vocal est d'ailleurs assez courageux quand on est une légende du rock comme lui. Et comme les tempos ne sont pas particulièrement enlevés sur le disque, la tendance à nasaliser son chant, est assez peu présente ; on ne peut que s'en réjouir. 

On ne peut être totalement sûr qu'Infinite soit le dernier disque de Deep Purple bien qu'à soixante-dix ans passés pour trois musiciens du groupe sur cinq, on puisse supputer que le Pourpre Profond clora sa tumultueuse carrière après une tournée appelée « The Long Goodbye ». Mais après un tel disque on se dit qu'un dernier tour de piste n'est pas superfétatoire, loin de là. Bravo messieurs !

Baptiste (8/10)

 

Verycords – 2017

Tracklist : 1. Time For Bedlam 2. Hip Boops 3. All I Got Is You 4. One Night In Vegas 5. Get Me Outta Here 6. The Surprising 7. Johnny's Band 8. On The Top Of The World 9. Birds Of Prey 10. Roadhouse Blues