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Depuis des semaines, je n’avais plus goût au Metawl.

Non, pas vraiment : depuis des semaines, j’étais devenu un Boomer, un vieux con rouillé, coincé dans ses habitudes. Pourquoi porter aux nues un groupe comme Vitriol (qui fait pourtant du très bon taf sur To Bathe From The Throat of Cowardice) quand on peut se replonger avec délice dans les premiers méfaits d’Immolation ou de Dying Fetus ? Pourquoi accorder ne fût-ce que 20 minutes à Daemon, le dernier album de Mayhem en date, quand on peut se vautrer dans A Grand Declaration Of War ? Au lieu de faire son kéké en interview en mode « ouais mais non, j’étais prêt à buter Euronymous », Necrobutcher aurait pu demander à Attila de fermer sa gueule et d’arrêter de diluer le charme de Mayhem dans de nouvelles sorties à l’intérêt discutable.

Le point culminant ? Celui qui a suscité en moi une prise de conscience radicale de mon état ? Vendredi dernier. Veille d’un long week-end et jour de sortie de The Repentless Killogy, dernière offrande live de Slayer. 21 titres, 91 minutes : sur le papier, la garantie d’un bon moment avec mes idoles. J’étais prêt, la veineuse dans la main droite, le poing gauche fièrement dressé vers le ciel, prêt à reprendre en chœur les refrains tout en faisant abstraction de la lente agonie du groupe depuis le décès de Jeff.

Ha, Jeff… Je me souviens encore du jour de son décès comme si c’était hier. Assommé par le Jack ingurgité en after du Neurotic Deathfest, je m’étais endormi, écrasant une larme en pensant à ce fier héros de la gratte terrassé par les suites d’une nécrose due à la morsure d’une araignée. Plus tard, j’ai appris que c’est l’alcool qui l’a tué. Terrassé par la Keken. Voilà qui écorne le mythe…

Mais je m’égare. Ce live de Slayer, donc. Comment dire. Les cris de Tom sont devenus aussi crédibles que les menaces de Rose Hreidmarr quand on parle mal du dernier Baise Ma Hache. Mes derniers repères se sont écroulés. J’avais du mal à concevoir un monde sans Slayer. J’en venais soudain à souhaiter que ce live n’ait jamais existé. Certes, on n’est pas au niveau de médiocrité d’un Diabolus In Musica, mais quand même, c’est rude.

J’ai donc pris une décision radicale : m’ouvrir au monde, voir ce que d’autres personnes pensent ou recommandent.

Internet est un lieu terrifiant. Un lieu où des gens recommandent Deafheaven. « Nan, mais c’est de l’émotion pure. T’as jamais vraiment éprouvé de tristesse en écoutant de la musique si t’as pas écouté Sunbather de Deafheaven ».

ALORS excuse-moi Jean-PostBlack, mais toi, t’as jamais vu One Way Mirror en live pour oser dire une énormité comme ça.

Il est donc temps de se remettre en chasse. De sortir des sentiers battus. D’oser remettre en question des idées préconçues. Et cette rubrique sera l’occasion, dans les semaines à venir, de parler de Metawl, de chroniquer des albums en trois lignes, de me pencher sur d’éventuelles recommandations

 

 

Amon Amarth – Berserker

Même les meilleures lames s’émoussent. Et au final, même si nous n’assistons pas ici au naufrage du drakkar de la bande à Johan Hegg, il faut se rendre à l’évidence : tôt ou tard, les groupes arrivent à un tournant. Certains s’arrêtent alors au sommet de leur gloire (Emperor étant, à mes yeux, le meilleur exemple), tandis que d’autres s’engagent dans une spirale plus ou moins lente les conduisant sûrement vers une disparition bien moins glorieuse.

Dans le cas présent, il est compliqué d’identifier le point de rupture dans la discographie du groupe, tant Amon Amarth a toujours exploité le même filon et que, tout bien réfléchi, l’évolution stylistique du groupe est très limitée depuis maintenant plus de 10 ans (les mauvaises langues diront que le groupe sort le même album depuis 1998, avec plus ou moins de mélodie). Toujours est-il que Berserker, à mes yeux, est le premier album où le groupe semble réellement en quête d’un second souffle qui ne vient pas. Mis à part quelques petits sursauts d’orgueil, Berserker suscite en moi un sentiment de nostalgie, de l’époque où le groupe était encore une machine à tubes.

Le groupe a-t-il atteint son plafond ? Tout dépend de ce que l’on entend par plafond. Dans un certain sens, le groupe a déjà atteint son plafond il y a des années, et il se contentait de répéter avec succès une formule éprouvée. Ici, la machine a des ratés. « The Berserker at Stamford Bridge », par exemple, semble interminable, et ce n’est pas son final mélodique qui viendra sauver la mise. « Fafner’s Gold » est probablement l’opener le plus faible du groupe depuis Fate Of Norns. Faites le calcul, ça fait 15 ans que le groupe n’avait pas été aussi faiblard en matière de premier enfonçage de tympans.

Le cahier des charges du Petit Viking a beau être suivi à la lettre, on distingue ça et là les défauts dans la cuirasse. La corne à boire n’est plus en corne, mais en résine. Le drakkar est en carton. Les haches peineraient même à couper un saucisson. Le groupe pourra toujours se consoler sur scène en proposant un best of des compos qui ont fait la réputation des Vikings.

Mister Patate (5/10)

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Metal Blade Records / 2019
Tracklist (56:45) 1. Fafner’s Gold 2. Crack the Sky 3. Mjölner, Hammer of Thor 4. Shield Wall 5. Valkyria 6. Raven’s Flight 7. Ironside 8. The Berserker at Stamford Bridge 9. When Once Again We Can Set Our Sails 10. Skoll and Hati 11. Wings of Eagles 12. Into the Dark

Misþyrming – Algleymi

À l’époque de la sortie de leur premier effort (chroniqué ici), j’étais passé à côté de cette hype qui entourait non seulement Misþyrming, mais aussi toute cette scène BM islandaise qui semblait surgie de nulle part et prête à conquérir le monde. J’ai donc découvert le groupe sur le tard, par hasard, au fil de pérégrinations sur Youtube, et j’avais donc rejoint la cohorte grandissante de fans du groupe un peu tard. Cette fois, par contre, il était hors de question de rater la sortie d’Algleymi et de vérifier si le groupe serait capable de répondre aux attentes et de se démarquer dans une scène déjà extrêmement qualitative (je ne citerai que Svartidaudi et Sinmara qui ont aussi récemment un nouvel album).

Dès la première écoute d’« Orgia », mes espoirs se sont transformés en certitudes. Certains reprochent aux Islandais des mélodies trop faciles sur ce nouvel opus. À mes yeux, c’est justement grâce à cette évolution que le groupe gagne en efficacité sans pour autant renier son héritage extrême. Là où son prédécesseur exhalait une ambiance poisseuse et oppressante, Algleymi se montre plus lumineux, plus épique. Prenez « Orgia » et ses chœurs féminins, par exemple, ou « Ísland, steingelda krummaskuð » qui commence comme un titre de black’n’roll basique avant de gagner petit à petit en profondeur et en intensité avec l’ajout de guitares plus mélodiques. D’aucuns y voient des concessions, je vois plutôt un groupe qui a su négocier un virage et en pleine maîtrise de ses moyens.

La concurrence s’annonçait rude, vu le nombre d’albums de qualité sortis ces derniers mois, ainsi que ceux annoncés dans les semaines à venir, mais nous tenons ici un solide prétendant au titre d’album de l’année. En Black Metal, du moins, personne ne semble en mesure de rivaliser. Fer de lance d’une des scènes BM les plus prolifiques du moment, Misþyrming serait-il en train de devenir un des leaders d’une nouvelle vague du Black Metal européen ? La question mérite d’être posée.

Mister Patate (9,5/10)

Facebook officiel 

Norma Evangelium Diaboli / 2019
Tracklist (46:16) 1. Orgia 2. Með svipur á lofti 3. Ísland, steingelda krummaskuð 4. Hælið 5. Og er haustið líður undir lok 6. Allt sem eitt sinn blómstraði 7. Alsæla
8. Algleymi