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Behemoth – Opvs Contra Natvram

Depuis maintenant 8 ans et un The Satanist loin de faire l’unanimité, même au sein de la rédaction, Nergal s’est engouffré dans une direction artistique que bien peu de personnes auraient pu anticiper au vu de ses albums précédents. Après la fuite en avant amorcée dès Satanica en 99 et le pinacle de brutalité qu’était Evangelion en 2009, le groupe avait radicalement changé de ton, et bien malin aurait été celui qui aurait pu prédire la teneur de ce 12e album des Polonais.

Il y a quatre ans, je concluais ma chronique de I Loved You At Your Darkest par ces mots : Sans parvenir à s’affranchir de ses origines, Behemoth livre un album plutôt décousu et faussement brutal. (…) Espérons que le groupe parviendra un jour à vraiment franchir le pas et à redevenir une entité cohérente… Hélas, force est de constater que le patchwork proposé ici est, une fois de plus, loin d’être cohérent, et les quelques fulgurances rappelant l’époque où Behemoth était une machine de guerre bien huilée côtoient d’autres morceaux bien moins efficaces, où le groupe peine à poser ses ambiances.

Ici et là, Opvs Contra Natvram propose quelques clins d’œil au passé, des easter eggs en quelque sorte : une ligne de guitare qui n’aurait pas dénoté sur Evangelion (au début de « The Deathless Sun »), une rythmique tout droit recyclée de The Satanist (l’intro de « Neo-Spartacvs » qui reprend un pattern de « O Father, O Satan, O Sun »)… Et c’est peut-être justement cela qui rend cette impression de patchwork encore plus marquée que sur la galette précédente. Pour un groupe toujours en recherche d’évolution, Behemoth reste maladroitement accroché à son passé.

Est-ce que tout est autant à jeter ? Non, pas vraiment. L’espace de quelques morceaux (je pense surtout à « Malaria Vvlgata » et à « Disinheritance », qui font paradoxalement partie des morceaux les moins mis en avant depuis la sortie de l’album), Nergal et ses comparses nous rappellent que Behemoth n’a pas toujours été la bête de foire que le groupe est devenu aujourd’hui. À vouloir trop en faire, le groupe semble se dissiper. À quoi bon sortir un clip pour presque chaque morceau si la musique (ce qui devrait être l’élément central) en est réduite à devenir une bande-son pour un court métrage ?

De fer de lance d’un genre, Behemoth est devenu une machine qui, grâce à toute la structure qui l’entoure et une tonne de paillettes et d’artifices, domine artificiellement la scène Metal, un colosse aux pieds d’argile.

3/10

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Nuclear Blast – 2022
Tracklist (43:15) 1. Post-God Nirvana 2. Malaria Vvlgata 3. The Deathless Sun 4. Ov My Herculean Exile 5. Neo-Spartacvs 6. Disinheritance 7. Off to War! 8. Once upon a Pale Horse 9. Thy Becoming Eternal 10. Versvs Christvs

Bloodbath – Survival Of The Sickest

Mine de rien, ça fait 8 ans que Bloodbath est revenu aux affaires avec un Nick Holmes qui semble avoir retrouvé une seconde jeunesse en se (re)mettant au Death Metal et au growl. Mieux encore : avec ce troisième album, Holmes devient le frontman ayant enregistré le plus d’albums au sein du groupe. Alors, après deux galettes de qualité chez Peaceville Records, Bloodbath est-il parvenu à faire la passe de trois en rejoignant Napalm Records ?

Eh bien oui. À l’heure actuelle, Bloodbath est même probablement le groupe qui a su le mieux gérer son comeback tout en digérant un changement de frontman. Là où des groupes comme At The Gates ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes, les Suédois affichent une forme insolente. J’irais même jusqu’à dire qu’avec le recul, les trois albums post-split sont au-dessus de The Fathomless Mastery et sa prod’ moins organique, moins sale.

Au menu de ce Survival Of The Sickest : du gras. Double tartine de saindoux, 11 titres, 45 minutes de tronçonnage en règle. La recette est éprouvée et pas forcément recherchée, mais à quoi bon se racler le pot de rillettes ? Certes, on ne retiendra pas forcément un titre-phare en particulier, mais cette absence de « hit » est compensée par un niveau de qualité constant et élevé, avec ici et là quelques invités de marque (comme si le line-up n’était pas encore assez composé de grands noms) : Luc Lemay (Gorguts), Barney (Napalm Death) et Marc Grewe (ex-Morgoth, Insidious Disease).

Si vous avez aimé les albums précédents avec Papy Holmes au chant, vous aimerez Survival Of The Sickest. Il n’y a rien d’extraordinaire, mais ça reste cohérent et efficace. Un album « paquet de frites », en gros, sans raffinement mais qui passe très bien.

7,5/10

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Napalm Records / 2022
Tracklist (44:49) 1. Zombie Inferno 2. Putrefying Corpse 3. Dead Parade 4. Malignant Maggot Therapy 5. Carved 6. Born Infernal 7. To Die 8. Affliction of Extinction 9. Tales of Melting Flesh 10. Environcide 11. No God Before Me

Electric Callboy – Tekkno

À moins d’avoir passé les deux dernières années dans une grotte, il est pour ainsi dire impossible d’avoir échappé au phénomène Electric Callboy. Depuis le single « Hypa Hypa », les Allemands ont su entretenir la hype, tout d’abord en collaborant avec des artistes variés pour des versions et des clips toujours plus déjantés de « Hypa Hypa » (ma reprise préférée étant celle des rappeurs de 257ers), puis en sortant quelques morceaux imparables.

« We Got The Moves », « Pump It », « Spaceman », « Fuckboi » et, il y a quelques semaines, « Hurrikan » : le groupe est très présent et entretient ce buzz depuis maintenant de longs mois. Ajoutez à cela une candidature à l’Eurovision, une tournée avec de nombreux concerts sold out et des prestations très énergiques et fun et vous avez le groupe le plus bankable depuis Ghost, les masques en moins, la dérision et les paillettes en plus. Et pourtant, on oublie un peu vite que le groupe fête déjà ses 12 ans et en est à son 6e album. Alors, Tekkno marquera enfin le moment de la consécration pour Electric Callboy ?

En fait, cet album est, paradoxalement, presque inutile. Parce que tout le monde en connaît déjà la « meilleure » moitié si on fait abstraction de « Fuckboi » qui est, à mes yeux, le morceau le plus faible de l’album. Dans le meilleur des mondes, il aurait pu être remplacé par « Castrop x Spandau » (qui est en fait un morceau de Kalle Koschinsky avec EC en guest). Et le reste, me direz-vous ? Mis à part « Tekkno Train » et son tchou tchou tchou qui apporte cette petite étincelle de folie, les 4 morceaux restants sont plus proches des morceaux traditionnels d’Electric Callboy (du temps où le groupe s’appelait encore Eskimo Callboy). Ils ne sont pas mauvais, loin de là, mais ils n’ont pas le même potentiel tubesque que les morceaux sortis jusqu’à présent.

Cet album a beau être un peu inutile à mes yeux, il n’en est pas moins très bon. Depuis l’arrivée de Nico au chant à la place de Sebastian, le groupe est entré dans une nouvelle ère. Il ose (encore) plus et maîtrise ces expérimentations. La première partie de « Hurrikan », par exemple, reprend parfaitement tous les codes du Schlager allemand, jusque dans l’imagerie du clip, à tel point que je suis persuadé qu’EC pourrait sortir un album entier de Schlager et le vendre par palettes entières auprès d’un public germanophone averti.

Electric Callboy a parfaitement compris comment composer des morceaux accrocheurs et, surtout, comment les vendre, comment les rendre visibles, comment attirer l’attention via les réseaux sociaux. Ce qui ressemble à première vue à une succession de blagues potaches est en fait une stratégie bien huilée. Et vu la rapidité à laquelle le groupe parvient désormais à remplir de grandes salles en Europe et pas uniquement à la maison, l’avenir s’annonce radieux pour eux.

8/10

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Tracklist (30:30) 1. Pump It 2. We Got The Moves 3. Fuckboi (feat. Conquer Divide) 4. Spaceman (feat. Finch) 5. Mindreader 6. Arrow Of Love 7. Parasite 8. Tekkno Train 9. Hurrikan 10. Neon