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Venturia – Charly Sahona (2012)

Venturia sort tout juste son troisième album, Dawn Of A New Era, beaucoup plus « catchy » que les précédents, où le côté prog était vraiment très présent. L'occasion de discuter avec leur chanteur/guitariste des implications de ces changements musicaux, mais aussi dans le line-up du groupe depuis l'album précédent… et forcément quelques digressions.

MetalChroniques : Pour commencer, peux-tu nous présenter le groupe en quelques mots ?
Charly Sahona : Bien sûr, je suis donc Charly Sahona, leader du groupe Venturia. Et pour décrire le groupe à ma façon, même si d’autres le feraient d’une autre, je dirais : metal, mélodique, et pour ce troisième album nous sommes à tendances progressives, sachant que pour les deux autres nous étions plus « metal progressif ». A ce jour, je pense que nous nous situons plus du côté de Within Temptation, Lacuna Coil et compagnie que de Dream Theater, alors que c’était plus proche de Dream Theater, je pense, pour A New Kingdom.
Après c’est à toi de me dire, parce que c’est souvent difficile de décrire sa propre musique… il y a tellement de sous-genres dans le metal ! Ou alors prog-heavy, peut-être… je ne sais pas, dites-nous !

M.C. : Nous allons en discuter en détails un peu après, mais ma question portait plutôt sur « qui êtes-vous, d’où venez-vous », et toute cette sorte de choses…
C.S. : Aujourd’hui, les trois-quarts du line-up sont de Montpellier et Lydie, la chanteuse, est aussi du sud de la France, dans le Lubéron. Le groupe s’est fait à mon initiative : j’avais mes propres compos, et plutôt que faire ça tout seul j’avais envie de fonder un groupe ; comme je suis musicien professionnel je rencontre beaucoup de gens, et petit à petit j’ai rencontré des gens qui sont devenus des amis, en plus d’être de très bons musiciens, si bien que les choses se sont faites naturellement.

M.C. : Depuis le dernier album, vous perdu un batteur…
C.S. : …et gagné un autre !
M.C. : exactement ; et aussi un chanteur, qui a été remplacé…
C.S. : Concernant le chanteur, Marc, c’était difficile comme il habite à New-York. Après, ça serait peut-être plus simple si Venturia générait des millions, vendait des millions d’albums, là peut-être qu’il pourrait se consacrer à -un- projet. Mais ça n’est pas du tout le cas, n’est-ce-pas ! Donc voilà, organiser des déplacements était très difficile, ça coûte très cher : on ne pouvait pas continuer comme ça, tout simplement (et il était complètement d’accord).
Pour le batteur par contre c’était une véritable surprise : je suis ami avec lui et j’ai composé avec lui depuis des années, et fin 2010, en septembre je crois, alors qu’on avait déjà planifié d’enregistrer cet album-là avec lui, il nous annoncé qu’il ne le sentait plus. Je pense que la raison principale est qu’il a intégré un autre groupe à ce moment-là, en Suisse, et comme il est suisse c’était plus simple aussi. Je n’ai pas insisté, lui répondant simplement que si le cœur n’y est plus autant arrêter là. D’autant que j’ai besoin de cet engouement, de cette envie commune de réaliser les choses : j’adore ce mec, c’est un batteur extraordinaire, je m’entends super bien avec lui mais voilà… nous nous sommes séparés en bons termes.

M.C. : Et les « remplaçants » ? Pour le chanteur je me doute que vous n’êtes pas allés cherché bien loin (Charly est maintenant guitariste et chanteur du groupe), mais pour le batteur ? comment l’avez-vous trouvé, choisi, et toutes ces choses ?
C.S. : C’était assez évident, dans le sens où Fred, notre nouveau batteur, est un ami à nous, de Montpellier et… [n’arrive plus à tourner sa phrase correctement, autour d’un « avec lequel… il joue… »]

M.C. : Qui joue avec qui…
C.S. : Thomas, notre bassiste, est ami avec Fred depuis très longtemps : ils ont enregistré beaucoup d’albums ensemble, fait beaucoup de dates ensemble. Moi aussi je connaissais déjà Fred, puisqu’on jouait tous les trois dans un groupe de reprises et on s’entend super bien. Comme c’est un très bon batteur, quand il a fallu chercher à remplacer Diego forcément je n’ai pensé qu’à lui. Lui-même était enchanté de nous rejoindre, la musique lui a plu, et quand nous avons commencé à répéter et à enregistrer c’était vraiment évident et ça a totalement collé, alors qu’il ne connaissait pratiquement pas notre musique avant. Il joue comme un batteur de metal confirmé, avec sa technique de double grosse caisse très rapide, alors qu’il n’est pas issu de ce milieu-là du tout… c’est vraiment très curieux.
M.C. : Ca apporte quelque chose de nouveau comme ça, au contraire, c’est bien !
C.S. : Tout à fait, il correspond en plus totalement au style donc c’est une très bonne chose. Et on se voit très souvent, on travaille souvent ensemble, on s’entend très bien… ça ne pouvait pas être mieux en fait.
M.C. : La vie est magnifique.

M.C. : Et quite à remplacer un chanteur par soi-même, pourquoi ne pas commencer directement au chant ?
C.S. : Tous les dix ans, je change de discipline, en fait. J’ai commencé par faire douze ans de piano classique, j’ai fait de la guitare et ensuite du chant. A l’époque, je n’étais pas du tout chanteur ; je faisais des chœurs mais je ne me sentais pas du tout l’âme d’un chanteur principal, c’est pour ça que nous avons voulu en prendre un. Et puis ce que je jouais à la guitare sur les deux premiers albums était déjà tellement compliqué que je m’imaginais mal en train chanter en même temps… mais par la force des choses j’ai été obligé de le faire ! Si bien que quand est venu le moment de dire à Marc que nous ne travaillerions plus avec lui, je me suis dit que l’on pourrait aussi bien faire chanter Lydie sur la totalité de l’album. J’en ai parlé avec des amis proches et au groupe, et tout le monde me disait de continuer le duo, que c’était une bonne formule. D’un autre côté, pour engager quelqu’un, il allait falloir organiser des auditions. De mon côté, ça faisait quand même quelque temps que je faisais des chœurs, j’avais acquis l’expérience du chant principal dans un autre projet, j’avais sorti un album solo en 2010 pour lequel je faisais le chant principal : au final, je me suis dit que ça serait plus final si je me chargeais du chant. Par contre j’ai quand même tenu à mettre Lydie en avant sur cet album, parce que je suis vraiment fan de sa voix.

M.C. : D’ailleurs, souvent dans un groupe où il y a un chanteur et une chanteuse, le chanteur fait la grosse voix pas contente, et la chanteuse fait les belles vocalises aériennes etc.
C.S. : Oui, et nous, nous faisons tous les deux cui-cui-les-petits-oiseaux-la-vie-est-belle, oui, je sais…
M.C. : Nan, pas forcément, c’est juste que vous avez tous les deux des voix claires ! Par contre, qu’est-ce qui vous a donné envie de faire autre chose que la dichotomie typique de base ?
C.S. : Je ne sais pas faire [tentative de chant vilain-pas-beau], déjà.
M.C. : Oui, c’est une bonne raison !
C.S. : Voilà, alors je me suis dit qu’il valait mieux rester nous-mêmes, et puis nous nous entendons tellement bien avec Lydie.
M.C. : D’un autre côté, quite à avoir deux voix claires, pourquoi pas une seule voix claire ?
C.S. : Ben voilà, je te dis, c’était prévu. Finalement Marc, notre chanteur précédent, faisait des voix rock, c'est-à-dire entre les deux, et je me suis dit que je pouvais essayer de m’en approcher. Et puis ça permet de faire des jolis chœurs, des harmonies de voix claires, angéliques… je me suis dit que ça ferait très bien !

M.C. : Votre nouvel album est beaucoup moins « cérébral » que le précédent : pourquoi ce changement de style ?
C.S. : Oui, même au niveau des textes [il semble le réaliser pendant l’interview]. Tiens ! C’est très juste ce que tu viens de dire, j’ai été cohérent dans ma démarche alors. Nous sommes influencés par beaucoup de choses différentes, et dans le second album c’est sûr qu’il y a ce côté metal progressif, le côté symphonique aussi, même s’il est moins présent, un côté électronique aussi, un peu trip-hop, du piano : il s’est passé plein de choses. Au bout du compte, je me suis rendu compte que c’était peut-être un peu trop varié. A rendre aussi sur scène c’était difficile : parce qu’il y avait autant de variations, tout ne sonnait pas bien sur scène. Ca pourrait le faire, je pense, si nous avions beaucoup plus d’expérience, un ingénieur du son qui nous connaisse parfaitement, mais c’est rarement le cas. C’est pour ça que nous avons eu une envie commune de recentrer Venturia pour faire des titres un peu plus homogènes. Il y a toujours cette recherche, ce côté cérébral que je mets surtout dans les mélodies de Lydie ou dans les arrangements de claviers, mais c’est vrai qu’ils apparaissent plus au second plan. Alors que de temps en temps sur Hybrid on les mettait tout d’un coup bien devant. Mais là j’ai voulu quelque chose de plus homogène dans les titres, pour privilégier la dynamique des guitares, les belles mélodies et le groove.
M.C. : Mais même en dehors de ça, j’ai l’impression qu’il y avait plus de variations dans la rythmique, pas simplement des mélodies.
C.S. : Oui, c’était dû à tout le travail que nous faisions avec Diego, l’ancien batteur, qui est très branché polyrythmie. C’était génial, je me régalais à faire des trucs comme ça avec lui. Mais nous nous sommes dit que ce côté très intello, mathématiques de la musique pouvait dissuader certaines personnes, que ça s’adressait un peu à un public élitiste. Nous trouvions ça dommage, alors pour ça aussi nous avons essayé de faire quelque chose de plus homogène pour cet album, de plus groovy. Ou moins « prise de tête »… il y en a encore un peu de temps en temps, mais c’est sûr que nous avons levé le pied, volontairement. 

M.C. : J’ai aussi l’impression que ce nouvel album repose plus sur des mélodies, alors que sur les précédents c’était plus les « riffs » qui étaient mis en avant, la rythmique parfois, et moins le travail mélodique ?
C.S. : Sans doute, j’ai vraiment voulu mettre la voix au premier plan.
M.C. : Je parle même des mélodies des instruments, par exemple ce que joue une guitare ou un clavier semble plus reposer sur un travail d’harmonies, alors que sur les précédents albums ça donnait plus l’impression d’être avant tout destiné à « produire un son » ?
C.S. : Tout à fait, il y a les deux en fait, mais si tu l’as ressenti comme ça c’est que là aussi la démarche a été cohérente. Mais j’aime les deux : les belles mélodies, faire en sorte que les instruments et les voix fassent de jolies choses, mais j’aime beaucoup l’aspect technique et sportif aussi, et la texture des sons. Si tu l’as ressenti comme ça pourquoi pas, je n’y avait pas réfléchi mais oui, sûrement.

M.C. : Mes excuses par avance pour la musicologie de pacotille à deux francs six sous, mais au final ça simplifie la musique du groupe…
C.S. : …oui, absolument.
M.C. : Et à autant la simplifier, est-ce que tu n’as pas peur qu’il perde un peu son âme là-dedans ?
C.S. : Si. C’est un risque, je suis tout à fait d’accord avec toi. Je ne voulais pas que ça ruine l’identité du groupe, je suis quand même content du résultat mais nous sommes déjà en train de réfléchir au quatrième, puisque les compos du troisième sont déjà assez anciennes, et… disons que ce que nous avons laissé tomber sur cet album va quand même revenir un peu. Mais ! Nous allons garder l’efficacité de celui-là. Je suis content que nous ayons réussi à faire quelque chose d’entraînant, de bien, mais oui, je suis d’accord : nous n’irons pas plus loin ! En fait ça sera le challenge du prochain album : retrouver l’aspect varié tout en gardant l’efficacité de celui-là !
M.C. : Bon courage !

M.C. : De manière générale, quelles sont vos influences, musicales ou non, et dans le metal ou non ?
C.S. : [Attrape son iPod histoire de ne pas en oublier en chemin] Déjà j’ai fait du classique pendant 12 ans, comme je te l’ai dit : c’est des influences qui sont toujours là, même si ça se ressent peut-être moins sur ce dernier album.
M.C. : Et par exemple, au piano, est-ce qu’il y a des compositeurs que tu aimais particulièrement jouer ?
C.S. : Ceux que j’aime encore jouer aujourd’hui, et curieusement, sans vouloir faire de chauvinisme, j’aime beaucoup les compositeurs français… Debussy, surtout Ravel. Rachmaninov j’adore, même s’il n’est pas français. Oui, ce sont les trois principaux. Bartok aussi. J’aime beaucoup le classique, mais du XIXe – XXe siècle, en fait.
M.C. : A t’entendre, j’ai l’impression qu’il y a une « école du sud », pour ne pas dire du « sud-est », parce que Stéfan Forté cite toujours à peu près les mêmes… [sérieusement, au fur et à mesure que Charly citait ces compositeurs, je jouais presque au bingo dans ma tête, cochant au fur et à mesure les noms sur ma petite grille…]
C.S. : Mais tu sais quoi, Stéfan Forté c’est mon ami d’enfance. [ah ben voilà, bingo ! C’est une secte, en fait…]
M.C. : Oui, et puis j’avais remarqué un certain Kevin Codfert à la production de ce troisième album [Kevin étant également claviériste d’Adagio, où officie le dit Stéfan].
C.S. : C’est la même famille. Nous nous sommes rencontrés à l’école de guitare, nous étions tous les deux des apprentis guitaristes « oh salut ! eh toi, c’que tu joues c’est cool ! he he, ha ha ! » [Charly imite trop bien l’adolescent boutonneux qui découvre la vie, sérieusement] Nous étions très proches quand il habitait Montpellier, et en effet nos amis communs c’est Kevin, et Franck (bassiste d’Adagio), et compagnie. Avec Stéfan on s’échangeait des cds des derniers guitaristes à la mode, les disques de classique, parce que nous avons toujours été intéressés par ça aussi : nous avons grandi ensemble musicalement, nous avons construit nos identités musicales ensemble. Nous sommes dans le même univers mais nous avons des styles différents après tout… et oui, c’est Stéfan, donc c’est tout à fait normal !
M.C. : Et donc voilà pour le classique, mais en dehors du classique ?
C.S. : Très juste, c’est pour ça que j’ai sorti mon iPod ! Tu veux savoir pour cet album ou en général ?
M.C. : En général.
C.S. : Alors je vais être vaste et j’oublierai sûrement plein de trucs. Après la musique classique, j’ai découvert la musique qui passe à la radio : je ne connaissais pas, et j’ai trouvé ça fantastique. Des instruments, du chant !
M.C. : A quelle époque ?
C.S. : Fin des années 80, quelque chose comme ça ? J’ai aimé les belles mélodies qu’il y avait dans certains groupes de pop, le travail des sons électroniques, même si c’était cheap à l’époque, et les groupes de rock progressif de l’époque. Il y avait Dire Straits, Pink Floyd j’aimais bien sans être hyper fan, Rush, et après… après j’ai eu un voisin, qui n’écoutait que du metal, des shredders qui jouaient à fond la caisse, et là, ce fut une deuxième révélation ! Il m’a fait découvrir Mr. Big, Yngwie Malmsteen, et tout ça ; ça coïncidait avec l’arrivée du grunge, dont tout le monde disait que c’était pourri donc je me réfugiais dans ce style de musique-là. Après j’ai découvert Dream Theater et c’était fantastique parce que ça correspondait exactement à ce que j’avais envie de faire : il y avait ce côté intello, il y avait ce côté performance, le côté belles mélodies, le côté recherche que j’aimais moins dans certains groupes de heavy mélodique que je trouvais un peu trop simplistes. A côté de ça j’aime énormément des chanteuses de pop comme Kate Bush, si on peut la qualifier de « chanteuse de pop », la musique électronique, la world music, le trip-hop comme Massive Attack…
[A court d’idées, il sort son iPod]
Frost ! J’adore ce groupe-là. Du rock progressif, un groupe anglais : au niveau de la composition, des arrangements, chapeau bas. Korn aussi, j’aime beaucoup, même si je sais que beaucoup de metalleux n’aiment pas. Lamb Of God que j’ai découvert il y a 3-4 ans, pas mal. Muse ! Mon groupe préféré, j’adore. Ah, j’ai acheté le dernier Nightwish, j’ai été étonné, franchement pas mal.

M.C. : Et au sein du groupe, est-ce que vous avez grosso modo les mêmes influences ?
C.S. : Non, du tout !
M.C. : Alors, qui écoute quoi ?
C.S. : Je suis le metalleux du groupe, les autres c’est pas des metalleux du tout. Lydie écoute de tout, mais elle est surtout branchée world music, jazz aussi, soul ; elle n’y connaissait rien en metal mais elle a aimé le projet, la musique, et s’y est totalement retrouvée. Et puis je lui ai fait découvrir en douceur, avec Within Temptation, Delain et compagnie : elle a trouvé ça très bien, finalement, et maintenant elle s’y connaît un petit peu plus ! Thomas et Fred sont très branchés jazz aussi, ils ont ce côté rock qui s’entend très bien sur nos albums, ils sont très world music aussi, ils font des trucs expérimentaux, plein de choses différentes : ce sont des musiciens très riches, qui arrangent les chansons de Venturia avec leur langage et leurs connaissances. Tout ça fait un très beau mélange, nous nous entendons très bien, et au final nous n’avons pas l’impression de venir à d’univers différents, alors que pourtant c’est le cas.

M.C. : Normalement, une pochette d’album sert à introduire « l’univers » d’un groupe, à mettre en images ce qu’il a voulu mettre en musique (dans l’idéal). Pourtant, les vôtres brillent par leur simplicité et leur côté « Photoshop à la dernière minute » : comment se fait-ce ?
C.S. : Pour être honnête, je ne suis pas infographiste, et je n’ai pas, j’avoue, le don de la créativité graphique. Je sais la reconnaître mais c’est tout. Alors j’ai demandé, qui pourrait nous faire un truc parmi nos amis, plutôt que demander à un grand nom que je devrais payer cher, au risque de ne pas aimer la pochette. J’ai donc décrit la musique que l’on fait, et Perrine Perez Fuentes, l’infographiste qui a fait la pochette de cet album, a essayé de retranscrire ce que je lui ai raconté.
M.C. : Ca reste très, très sobre quand même, ça n’introduit pas à grand-chose…
C.S. : Si tu as des noms, des liens, je suis preneur !

M.C. : Une question un peu idiote, mais j’y tiens : « être musicien » aujourd’hui relève d’un sacerdoce, il faut bien le dire. Et je ne doute pas que vous en soyez conscients, depuis le temps que Venturia existe et avec vos divers projets parallèles. Donc, qu’est-ce qui vous donne envie… de ne pas baisser les bras, en fait ?
C.S. : De temps en temps, je me demande pourquoi on continue, pourquoi je suis aussi joyeux, rayonnant, alors que c’est ma ruine ! Mais il faut quand même réaliser que nous vivons de « la musique », pas de « ma musique ». J’ai un privilège incroyable, à savoir que je donne des cours, je joue, je fais des reprises, certes, je suis loué de temps en temps en studio pour faire des trucs, je rencontre des gens super, parmi les fans aussi même si c’est autre chose… Il y a de belles connexions humaines qui se font, j’aime bien travailler avec les artistes et ça me fait gagner ma vie. J’évite de trop en faire pour pouvoir garder du temps libre pour pouvoir composer, pour pouvoir arranger, pour pouvoir faire le plus gros du travail dans le groupe et pour mon projet solo aussi.
Mais c’est la passion qui nous porte, c’est sûr : pourquoi être si joyeux, rayonnant, alors que pour Venturia je suis à moins je ne sais pas combien (dans le sens où j’ai dépensé beaucoup plus que ça ne me rapporte, même si je ne me mets pas en danger financièrement avec ça non plus, quand même). Mais il y a tellement d’avantages, je suis tellement heureux, tellement épanoui… certes il y a des frustrations, il faut en prendre conscience.
Et puis en France on peut quand même vivre de la musique, grâce au statut d’intermittent du spectacle. Il est difficile à obtenir, certes, mais il permet de répéter et de créer : c’est un luxe incroyable que très peu de pays ont, je crois même qu’on est le seul. Par exemple j’en parlais avec Marc, qui vit toujours aux Etats-Unis, et il me disait qu’il joue pour 20$ dans des pubs, et c’est tout ! Ca l’oblige à jouer tous les jours, tous les jours pour gagner des misères, et au bout du compte il ne lui reste rien. Alors qu’en France nous sommes mieux payés grâce à ce système d’indemnités, et nous avons une qualité de vie vraiment correcte. Je jouais justement il y a deux semaines avec un batteur qui revenait de New York, et tous les new-yorkais lui disaient : « ah bon, c’est comme ça en France ? Mais alors, pourquoi est-ce que tu viens à New York ? » Les choses là-bas sont peut-être super quand on est une superstar, mais pour les musiciens qui…
M.C. : …vivotent, de leur musique.
C.S. : Voilà. En France, nous sommes quand même pas mal.

M.C. : L’heure avançant, un dernier mot pour les lecteurs, ou quelque chose que tu voulais dire mais que je n’ai pas pensé à demander ?
C.S. : Oh je trouve qu’on a parlé de plein de choses, donc je vais faire comme d’habitude, à savoir que je te remercie pour ces questions, pour chercher à faire découvrir les groupes que tu estimes avoir un intérêt quelconque pour le lecteur, et merci aux lecteurs de s’intéresser à cette musique, à la musique en général… et continuez d’être passionnés.

-Propos recueillis par Polochon-
[Chronique de Dawn Of A New Era (Venturia).]

Affluence : Dans les 500-550? Honnêtement ça m’a presque énervée de voir des gens aussi peu respecteux de leur public que Sonata Arctica remplir correctement le Bataclan, alors qu’un groupe qui a réellement progressé avec les années, énormément, comme « ce » Rhapsody, peine à remplir un simple Trabendo. Et pourtant j’adore les deux groupes.
Ambiance : Excellente.
Son: Très bon, évidemment « il manquait un guitariste » pendant Rhapsody, mais c’est parce que le guitariste était absent pour cause de maladie. Ils ont très bien su se débrouiller malgré tout (merci Mikko aux claviers!). Même pas de « fausse bande » pour passer ce que Dominique Leurquin aurait dû jouer… mais nous y reviendrons plus tard.
Lumières : Plutôt bonnes… mais trop saturées pour Rhapsody, surtout pendant les premières chansons, ce qui est fréquent avec eux… à croire qu’ils ne veulent pas que de bonnes photos d’eux soient prises?
Moment fort : « The Village Of Dwarves » et son grand n’importe quoi généralisé dans la salle.

Rhapsody a toujours aimé faire dans l’originalité: ils sont le premier groupe, à ma connaissance, à se séparer en deux entités indépendantes, gardant toutes les deux le même nom (un dérivé pour chacune) et le même concept (« metal pour le cinéma », ou « Holywood Metal »). Nous en avions un peu discuté avec Luca Turilli (guitariste et co-fondateur du Rhapsody d’origine), vu ce que donnait le nouveau « Rhapsody Of Fire » sur scène: après un premier album de « Luca Turilli’s Rhapsody » très prometteur, notamment pour la performance du chanteur (pas facile de succéder à Fabio Lione), restait à voir ce que ça allait donner sur scène.

La soirée commence avec Vexillum, mais je ne peux pas vous en parler puisque je suis arrivée en retard. Apparemment c’était bien, je veux bien le croire puisque nous les avions déjà vus en premier partie de Rhapsody (avant « la séparation ») et que si ça n’avait pas été la folie furieuse, c’était quand même tout à fait convenable pour une première partie.

Suit ORDEN OGAN :

En toute honnêteté, je ne m’attendais pas à pareille fête. Quelques passages un peu longuets, mais dans l’ensemble c’était très bien (avec mention spéciale au chanteur, c’est rare de voir des chanteurs-guitaristes qui se débrouillent aussi bien vocalement -sur scène inclus-). Il faut également saluer l’effort sur les costumes… c’est quand même rare de voir débouler quelqu’un sur scène avec un reste de pneu découpé sur l’épaule! Une fois repartie en arrière, après la fameuse série des « trois chansons pour les photographes », j’admire deux tous fous absolument grandioses, dont un nous faisait presque des chorégraphies avec son verre en plastique « TRABENDO » pour marquer la mélodie des chansons… des types exceptionnels! Non, vraiment, l’ambiance était excellente, l’accueil est excellent, et je crois que tout le monde aurait été d’accord pour les voir un peu plus longtemps si ça avait été possible.

Set-list d’Orden Ogan :
To New Shores of Sadness
We Are Pirates
The Things We Believe In
Masks
To the End
Angels War

FREEDOM CALL enchaîne très rapidement sur scène (rarement vu une phase « changement de matériel » aussi rapide):

En général ils m’ennuient au plus haut point, mais ce soir je dois admettre qu’ils me distraient agréablement, avec quelques titres qui passent vraiment bien et une très bonne ambiance dans le public (bizarrement moins festive que pour Orden Ogan, par contre très « massive »). Une set-list bien équilibrée, plusieurs moments d’amusement de bons coeur avec le public: un bon concert. Même si Chris Bay (chanteur/guitariste) prenait parfois peur face au manque de réactivité immédiate du public parisien… mais ils sont comme ça les metalleux parisiens, ils aiment cultiver leur côté imprévisible! Ah et aussi un grand moment de solitude, quand Chris nous annonce « tel fan » leur a demandé il y a quelques jours, après un concert aux Pays-Bas je crois, de passer le bonjour à deux personnes qui devaient normalement être là ce soir dans la salle… sauf que personne ne se manifeste quand Chris cite leur nom en leur demandant de lever la main… il s’est visiblement senti un peu mal sur le moment, mais heureusement il en faut plus pour le faire paniquer! J’ai quand même préféré Orden Ogan, mais c’est juste qu’ils sont plus dans « mes goûts naturels »: en soit, Freedom Call a proposé un de leurs très bons concerts ce soir.
(Par contre: Chris, tu mets certes beaucoup de volonté et de joie de vivre dans ton blablatage entre les morceaux… mais parfois tu parles trop longtemps! Je te promets!)
Petit moment comique, enfin, quand des membres des deux groupes précédents viennent faire les pitres sur scène pendant que Freedom Call joue (c’est la dernière date de la tournée), pendant un refrain (ils seront même épaulés par Alessandro Conti au deuxième refrain… pas le troisième cependant, Luca avait dû l’intercepter entre-temps, meuh si meuh si.)

Set-list de Freedom Call :
Freedom Call
The Eyes of the World
Rockstars
Tears of Babylon
The Quest
Power & Glory
Warriors
Land of Light

Direction « la fosse aux photographes » dès la fin de Freedom Call : c’était déjà bien bondé pour Freedom Call, à tel point que je n’avais plus pu bénéficier de la bonne place que je m’étais dégôtée pendant Orden Ogan, alors jouons la prudence. Ca discute entre photographes, les plus anciens font baver les plus jeunes, ça se chambre gentiment: l’ambiance est bon enfant, on pourrait tout à fait croire que les choses vont continuer dans la meilleure des ambiances (« de travail inclus ») comme c’est le cas depuis le début de la soirée…

RHAPSODY:
…alors qu’en fait pas du tout. La scène du Trabendo est plutôt basse: si on reste debout pour prendre des photos (même en étant petit), on peut être sûr de faire des trucs plutôt basiques, sans grand intérêt, parce que l’on est trop proche et trop à la hauteur des musiciens. Résultat, depuis le début de la soirée, il y avait un rang de photographes assis sur les marchepieds des barrières, un autre rang accroupi devant la scène. Mais la plupart des « anciens » n’était pas encore arrivée, et ils allaient douloureusement me rappeler pourquoi, fut une époque, ils se faisaient prodigieusement incendier par les plus jeunes (du fait de leur attitude): ils se collent à la scène, ne se préocupent pas une seconde de savoir s’ils gênent derrière ou non, gardent leur emplacement jusqu’à la fin, et évidemment restent debouts. Impossible donc d’avoir le moindre angle correct (vas t’agenouiller derrière un type debout: quelle belle vue!). Ajoutez à ça des lumières misérables (non mais sans rire, on a eu des lumières tout à fait correctes pour les photos sur les premières parties, et là pour la tête d’affiche c’est tellement saturé qu’il est proprement impossible de faire le moindre cliché correct? Enfin, quand on cherche à faire des photos « naturelles » du moins, et c’est mon cas), et vous comprendrez:
1) pourquoi mes photos de Rhapsody sont loin de casser trois pattes à un canard,
2) mon humeur massacrante pendant le début de leur concert.

Sans rire, constater qu’il me serait impossible de prendre le moindre cliché un tant soit peu « ambiancé » m’a mise d’humeur massacrante. J’adore « Tormento E Passione », ils l’ont jouée en troisième et c’est normalement exactement le type-même de chanson où je ne peux pas m’empêcher de fredonner les paroles même si je suis sous le nez des musiciens à prendre des photos… sauf que là je n’arrive même pas à l’apprécier. Il est vrai, aussi, qu’Alessandro (Conti, chanteur) me paraît très fermé au début du concert, alors qu’à la base si je l’apprécie c’est non seulement pour ses qualités vocales mais aussi pour sa bonne humeur : je me vois déjà en train d’écrire un compte-rendu avec une partie incendiaire où je reprocherais à Luca de trop museler son nouveau chanteur, chanter (et mener un groupe sur scène) ça n’est pas seulement avoir une bonne voix, et tutti quanti (si je puis me permettre). Au final, c’est peut-être la première fois que j’attends avec impatience la fin de ces trois chansons qui nous sont octroyées devant: une fois repartie derrière, je ne pourrai sans doute pas prendre de photos correctes (la scène est trop basse pour ça vu ma taille), mais au moins j’apprécierai l’ambiance, et idéalement une vue potable.

[Fuyons, vite, fuyons!]
Les rangs se sont beaucoup remplis, et évidemment resserrés, par rapport aux premières parties: il sera impossible de prendre des photos correctes, c’est confirmé… alors autant s’amuser, surtout que les gens autour ont l’air tout à fait dans l’ambiance! Pour vous donner une idée: « The Village Of Dwarves » est leur cinquième chanson de la soirée, soit le deuxième morceau « réellement ressenti comme tel » pour moi + en temps normal, ça me saoule de sauter, je boycotte les sauts, ranafaire si des centaines (ou milliers) de personnes autour de moi le font. Alors que là… je fais partie de ceux qui lancent le « sautons comme des cabris », avant même que les messieurs sur scène nous demandent de le faire, c’était juste… impossible de faire autrement! Ceci-dit c’est aussi que j’ai eu la chance de tomber rapidement sur « le coin à fous »: quand j’aurai l’occasion d’aller sur les marches pour les derniers morceaux, ça sera beaucoup plus calme… m’enfin, ça permet de se reposer un peu, et puis il y avait encore quelques fous derrière, juste pas à gauche ou à droite. Vous aurez donc compris que l’ambiance est très, très bonne (et surtout très sonore… enfin, sauf sur certains morceaux que beaucoup ont oublié, comme « Forest Of Unicorns », que je considère comme une de leurs meilleures même si peu de monde semble s’en souvenir).

L’ambiance finit également par se détendre sur scène, déjà après le premier mini-discours d’Alessandro (il nous apprend notamment qu’il a promis de ne pas plaisanter sur Carla Bruni ce soir… on se demande bien pourquoi!), et puis… peut-être en réaction à la bonne humeur dans la salle, je ne sais pas, mais pour vous donner une idée Luca (Turilli, guitariste) finira même par faire le lion en allant au-dessus du public (et pas le lionceau hein: le lion). En fait, je ne l’ai jamais vu aussi « déchainé » sur une scène le Luca: il s’est certes beaucoup décontracté avec les années, mais là… il ne se contente pas de courir à droite à gauche, il finit en haranguant le public, de manière presque « agressive » (pas dans la méchanceté, quand même, mais dans l’énergie), enfin il est à fond dans le truc quoi. Patrice (Guers, bassiste) est moins « dans son coin » que d’habitude, un batteur très souriant, un claviériste plutôt calme… ça n’est pas forcément dans ses habitudes (même si j’admets ne l’avoir vu qu’avec Sonata Arctica jusque là, et ça doit faire 10 ans qu’il les a quittés), mais le connaissant c’est juste qu’il « reste à sa place » dans un groupe où il exécute plus qu’autre chose. (Et puis les partitions de Rhapsody c’est une autre paire de manches de Sonata Arctica, aussi, quand même.) Quant à Alessandro… « chassez le naturel et il revient au galop, c’est bien connu : il n’aura pas réussi à garder son sérieux jusqu’à la fin. Par exemple, pendant que Luca jouait son solo sur la dernière chanson, Alessandro est allé derrière lui et a fait une imitation de guitariste en train de poser/gober des mouches… on pourrait certes se dire que c’était prévu à l’avance, mais sa manière de s’arrêter toutes les deux secondes pour s’assurer que Luca ne le regarde pas me fait douter. Ou encore ce moment grandiose où il nous fait chanter, normal, finit par une note aiguë, qu’une fille dans la salle prolonge : il lui dit « Très bien! Encore mieux que le chanteur de Rhapsody! »… et se met immédiatement la main devant la bouche, en regardant un Luca Turilli explosé de rire, avec un regard de chien battu type enfant qui vient de se faire prendre la main dans le sac (« mince! je disais ça avec Trick Or Treat, mais… mais c’était pas méchant hein, hein? »), devenant rouge écrevisse… C’est que c’est lui maintenant, « le chanteur de Rhapsody ». Donc sa super vanne… devient toute mignone, vive les automatismes sur scène.

Il y avait de la mise en scène, avec des petits films en introduction de certaines chansons (voire pendant), deux chorégraphies et peut-être quelques broutilles oubliées au moment où j’écris ces lignes, mais dans l’ensemble ça allait: rien d’affreusement kitsch, ou qui prenne particulièrement de la place (par rapport à la musique à proprement parler). Enfin, en dehors du solo de batterie: ça faisait longtemps que je n’en avais pas entendu un aussi soporifique (et assez long, en plus). Il me semble que Patrice Guers n’a pas changé son solo de basse (il me rappelait étrangement quelque chose), mais au moins il est agréable/intéressant à écouter. La deuxième chorégraphie n’était pas mal du tout, peut-être un peu répétitive mais bien pensée (et beau costume) avec un éventail dans chaque main (haut du corps plus statique que les hanches aussi, mais je suis une infâme perfectionniste), un peu frustrée par la première par contre: l’idée est très bonne (des espèces de néons, ou bandes lumineuses, sur un tissu que la damoiselle fait onduler), mais les mouvements ne changent quasiment pas et s’adaptent en fait très peu à la musique! D’où un effet « soufflé trop cuit » assez désagréable… Enfin, j’arrivais juste à l’arrière du public quand la madame est arrivée: je ne voyais que le haut du corps… m’enfin, justement, dans ce genre d’exercice c’est ça qui doit évoluer! Mais bon, nous verrons bien s’ils réutilisent cette idée à l’avenir: ça peut bien rendre, c’est juste que ça mérite du peaufinage. En dehors de ça, et de manière beaucoup plus secondaire, on ressentait parfois l’absence de seconde guitare: Mikko jouait une sorte de mélange entre la partie orchestrale « normale » et la mélodie de la seconde guitare, mais le son, et l’énergie liée, n’étaient évidemment pas les mêmes et… de temps en temps, je ne pouvais pas m’empêcher de penser: « ah! avec une deuxième guitare ça serait tellement mieux pour la mélodie! » Mais bon, comme Dominique Leurquin sera rétabli pour la prochaine tournée, ce problème se réglera très facilement tout seul.

D’ailleurs, ça montre aussi que, a priori, il y avait quand même pas mal de choses jouées « sans bandes » ce soir. Ou sinon ils sont devenus de vrais pros de la bande de faux live: Luca a parfois hésité un peu trop longtemps sur sa note et raté un enchainement, et quand on le regardait on voyait l’hésitation sur le manche comme sur son visage. Un peu la même chose pour Mikko qui a joué des trucs un peu bizarres parfois (et le connaissant ça n’est pas normal/dans ses habitudes), etc. Il est probable que ça a beaucoup contribué à donner autant d’énergie à leurs chansons malgré l’absence de second guitariste, soit dit en passant. Et ça me donne l’occasion de parler du chant d’Alessandro, que j’oubliais (mal): il a été excellent ce soir, même en s’en tenant à la voix. Pour résumer, quand je l’avais vu avec Secret Sphere, il m’avait marquée parce qu’un italien qui chante vraiment juste ça reste rare, c’est d’ailleurs ce qui m’a permis de le reconnaître quand je l’ai vu avec Trick Or Treat… mais je trouvais quand même tout ça assez faible pour prétendre chanter du Rhapsody? Jusqu’à ce que j’écoute l’album sorti il y a peu (et ce niveau de chant est d’ailleurs confirmé par le dernier Trick Or Treat, sorti fin novembre); d’un autre côté, il est facile de trafiquer(/renforcer une voix avec les moyens modernes en studio. Conclusion ce soir: il a vraiment énormément progressé, et est devenu excellent vocalement. Parce que très juste, capable d’énormément de nuances, voix bien puissante quand il faut: un très bon chanteur, tout simplement.

Petit bonus « âneries de fin de tournée », pour ceux qui lisent encore: pendant « Forest Of The Unicorns », les membres de Vexillum (ou un mélange avec des membres d’Orden Ogan? Oublié, je dois le confesser) arrivent sur scène « façon ballerine metalleuse ». A savoir sans kilt (qu’ils portent normalement sur scène), torse nu, une grande serviette autour de la taille, mains « en fausse corolle au-dessus de la tête » (= coudes bien saillants puisque la pointe des doigts touche le crâne), et ils font une espèce de chorégraphie ridicule depuis le fond de la scène, chacun tournant sur lui-même etc. Ca sent le briefing en coulisses par Luca tellement ils restent derrière (ça s’est d’ailleurs passé en son absence, comme que de par hasard!), mais comme ça se fait dans la bonne humeur généralisée… eh ben ils en remettent une couche un peu plus tard, sur je ne sais plus quelle chanson, où ils font « les hommes piston » pendant les refrains! (oublié sur quelle chanson, mais une des toutes dernières) Même Luca en rit de bon coeur… c’est peut-être ça qui a inspiré Alessandro dans son imitation « restons prudent / sur la pointe des pieds » à la toute fin, en fait.

Set-list de Rhapsody :
Riding the Winds of Eternity (Rhapsody)
Clash of the Titans
Tormento E Passione
Demonheart (Luca Turilli)
The Village of Dwarves (Rhapsody)
Excalibur
(solo de batterie)
Forest of Unicorns (Rhapsody)
Warrior’s Pride (Luca Turilli)
The Ancient Forest Of Elves (Luca Turilli)
(solo de basse)
Of Michael the Archangel and Lucifer’s Fall (version courte)
Son of Pain (Rhapsody of Fire)
Dawn of Victory (Rhapsody)
– Rappel –
Dark Fate of Atlantis
Emerald Sword (Rhapsody)
Warrior of Ice (? A en croire ce qu’en dit Internet, mais je n’ai pas du tout souvenir qu’ils l’aient jouée? Et c’est une de leurs chansons que j’adore (+ je passe mon temps à me plaindre parce que 
Legendary Tales est toujours oublié): ça m’aurait marquée… j’ai eu l’impression pendant toute la soirée (= tous les groupes) qu’ils étaient pressés par le temps, si on ajoute à ça les musiciens des autres groupes à droite de la scène qui semblaient se chauffer pour faire une dernière ânerie de fin de tournée, et… peut-être nous a-t-on sucré une chanson? Une très bonne en plus… pas cool pas cool! Ou mon cerveau était déjà en mode surchauffe et j’ai zappé qu’ils jouaient cette chanson-là… bien possible aussi.)

Un très bon concert, vous l’aurez compris, avec quelques réserves très mineures (et là au moins je reconnaissais les chansons à la mélodie, pas aux paroles, malgré un instrument en moins…). Après avoir mis mes affaires et papoté 30 secondes avec quelques personnes, je me dirige rapidement vers la sortie (le concert s’est terminé à 23h20 et j’habite à l’autre bout de Paris: je préfère être sûre de ne pas rater une correspondance pour cause d’horaire!), pour m’apercevoir qu’Alessandro est devant l’entrée de scène, en train de signer des trucs pour des gens et poser pour des photos. Décidément il est bien ce petit! Je m’arrête quelques minutes pour faire gribouiller un truc… et assiste à une scène un peu étrange: après avoir beaucoup hésité et quelques bafouilles, une jeune fille explique que ce concert représente énormément pour elle, elle en a pleuré etc., c’était tout mignon et elle était visiblement honnêtement en pleine émotion, importante. Sauf que vu sa manière insistante de remercier -Alessandro Conti- (un type recruté il y a quelques mois), je ne suis pas sûre qu’elle ait compris (ou réalisé) qu’elle n’avait pas le chanteur « historique » de Rhapsody sous les yeux. D’ailleurs, au début, Alessandro a demandé: « mais est-ce qu’elle sait que…? » (en italien, puisque quelqu’un s’était proposé de traduire ce que disait la damoiselle en italien). Or, dans ce qu’elle disait à ce moment-là, on pouvait croire qu’elle en était consciente, « le traducteur » lui a donc juste dit « oui, oui, t’en fais, pas »… sauf que, justement, vu l’évolution que ça a pris… tout le monde s’est mis à douter fortement, Alessandro a fini assez gêné, et en même temps elle était dans une émotion tellement intense/extrême que personne n’a osé lui faire remarquer que… (moi la première d’ailleurs… difficile de prévoir sa réaction après tout). Donc voilà, c’était à la fois assez gênant, et plein d’émotion(s)… d’où assez étrange. Après coup je regrette de ne pas avoir essayé de « tâter le terrain » diplomatiquement, histoire d’éviter de lui briser son rêve trop rapidement, mais sur le moment je n’arrivais pas à trouver un « angle d’attaque » convenable; une prochaine fois peut-être. J’espère qu’elle a pu voir Luca après par contre, parce que lui serait très heureux de voir un tel afflux d’émotions provoqué par sa musique.

J’attends que quelques autres se fassent signer des broutilles, interpelle Alessandro avant que les vigiles (qui deviennent insistants) ne nous virent, lui confirme que « une quatrième fois? Quand tu veux coco! », et zou vers le métro: j’attrape l’avant-dernier « pour mon dernier changement », et pourtant on ne peut pas dire que j’aie traîné… en temps normal, après un concert qui m’a autant « emmenée ailleurs » je serais restée pour « la petite signature de tout le monde », mais là c’était matériellement trop risqué!

-Polochon-
[Photos de Luca Turilli’s Rhapsody / Freedom Call / Orden Ogan.]

Tout bien réfléchi, je crois que le problème avec André Matos depuis qu'il est en solo est qu'on ne voit pas (ou plus) où il souhaite aller, musicalement parlant. Vous pourriez me dire que justement, c'est l'avantage d'une carrière solo, on peut aller à peu près là où l'on veut. Et avec André, quand on achète un nouvel album, on ne sait pas trop à quelle sauce on va être mangé, alors quand vous y ajoutez les menus problèmes des derniers albums… la critique devient plus facile. Alors quand on vous propose un album possiblement bien pensé mais manquant cruellement d'envie, vous avez de grandes chances de vous retrouver frustré. Et quand on a le passé musical d'un André Matos, ça n'est jamais bon de frustrer son public (qui a justement des attentes – énormes)…

J'admets que l'absence de Casagrande à la batterie, parti rejoindre Sepultura entre-temps, se fait particulièrement sentir : à la place de son jeu « bourrin tout en finesse », on se retrouve avec une rythmique simpliste qui alourdit les morceaux du début à la fin. Peut-être que le nouveau batteur est arrivé « en urgence », n'ayant pas le temps de peaufiner son jeu comme il se doit, mais c'est flagrant. Quand en plus il manque Luis Mariutti et ses « tougoudoum » sautilleurs… ça manque d'amusement tout ça, c'est trop direct, peut-être un manque de finesse en fait, tout simplement. « Course Of Life » en est un très bon exemple: en soit elle est bien, bien composée, plusieurs phases et tout le tralala… mais que cette double grosse caisse est saoulante à la longue! Et c'est un peu le même problème pour « The Turn Of The Lights ». Tout n'est pas noir non plus, j'aime beaucoup « Unreplaceable » par exemple (encore qu'à chaque écoute je préfère une chanson différente), mais ça reste un album moyen, et de la part d'André Matos… un album « moyen » est forcément décevant.

En fait, le défaut principal d'André Matos en solo est peut-être qu'il réfléchit trop à sa musique. Ou bien que parfois, à trop revendiquer sa liberté, à ne plus avoir(/garder) grand monde autour de nous pour nous aider à nous recentrer, nous finissons par nous perdre nous-même. Tout simplement.

Polochon (6,5/10)

 

Site officiel : http://www.andrematos.net/

MySpace officiel : http://www.myspace.com/andrematossolo

Ear Music / Replica – 2012

Tracklist : 01. Liberty 02. Course Of Life 03. The Turn Of The Lights 04. Gaza 05. Stop! 06. On Your Own 07. Unreplaceable 08. Oversoul 09. White Summit 10. Light-Years 11. Sometimes 12. Fake Plastic Trees