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Electric Callboy – Tekkno

À moins d’avoir passé les deux dernières années dans une grotte, il est pour ainsi dire impossible d’avoir échappé au phénomène Electric Callboy. Depuis le single « Hypa Hypa », les Allemands ont su entretenir la hype, tout d’abord en collaborant avec des artistes variés pour des versions et des clips toujours plus déjantés de « Hypa Hypa » (ma reprise préférée étant celle des rappeurs de 257ers), puis en sortant quelques morceaux imparables.

« We Got The Moves », « Pump It », « Spaceman », « Fuckboi » et, il y a quelques semaines, « Hurrikan » : le groupe est très présent et entretient ce buzz depuis maintenant de longs mois. Ajoutez à cela une candidature à l’Eurovision, une tournée avec de nombreux concerts sold out et des prestations très énergiques et fun et vous avez le groupe le plus bankable depuis Ghost, les masques en moins, la dérision et les paillettes en plus. Et pourtant, on oublie un peu vite que le groupe fête déjà ses 12 ans et en est à son 6e album. Alors, Tekkno marquera enfin le moment de la consécration pour Electric Callboy ?

En fait, cet album est, paradoxalement, presque inutile. Parce que tout le monde en connaît déjà la « meilleure » moitié si on fait abstraction de « Fuckboi » qui est, à mes yeux, le morceau le plus faible de l’album. Dans le meilleur des mondes, il aurait pu être remplacé par « Castrop x Spandau » (qui est en fait un morceau de Kalle Koschinsky avec EC en guest). Et le reste, me direz-vous ? Mis à part « Tekkno Train » et son tchou tchou tchou qui apporte cette petite étincelle de folie, les 4 morceaux restants sont plus proches des morceaux traditionnels d’Electric Callboy (du temps où le groupe s’appelait encore Eskimo Callboy). Ils ne sont pas mauvais, loin de là, mais ils n’ont pas le même potentiel tubesque que les morceaux sortis jusqu’à présent.

Cet album a beau être un peu inutile à mes yeux, il n’en est pas moins très bon. Depuis l’arrivée de Nico au chant à la place de Sebastian, le groupe est entré dans une nouvelle ère. Il ose (encore) plus et maîtrise ces expérimentations. La première partie de « Hurrikan », par exemple, reprend parfaitement tous les codes du Schlager allemand, jusque dans l’imagerie du clip, à tel point que je suis persuadé qu’EC pourrait sortir un album entier de Schlager et le vendre par palettes entières auprès d’un public germanophone averti.

Electric Callboy a parfaitement compris comment composer des morceaux accrocheurs et, surtout, comment les vendre, comment les rendre visibles, comment attirer l’attention via les réseaux sociaux. Ce qui ressemble à première vue à une succession de blagues potaches est en fait une stratégie bien huilée. Et vu la rapidité à laquelle le groupe parvient désormais à remplir de grandes salles en Europe et pas uniquement à la maison, l’avenir s’annonce radieux pour eux.

8/10

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Tracklist (30:30) 1. Pump It 2. We Got The Moves 3. Fuckboi (feat. Conquer Divide) 4. Spaceman (feat. Finch) 5. Mindreader 6. Arrow Of Love 7. Parasite 8. Tekkno Train 9. Hurrikan 10. Neon

La crise sanitaire s’avère être une sacrée catastrophe mais elle aura au moins eu une vertu. Incapables de donner des concerts pendant de longs mois, les groupes ont dû se creuser les méninges pour entretenir la flamme et proposer des nouveautés aux fans. Beaucoup en ont profité pour composer de nouvelles chansons et sortir un nouvel opus. D’autres initiatives ont également émergé pour fournir aux amateurs leur dose de live sans sortir de chez soi.

… and Business Is Good!

NIGHTWISH, pour ne citer qu’un exemple, a mis les petits plats dans les grands pour proposer un show en streaming contre monnaie sonnante et trébuchante. De même, fin 2021, les allemands de POWERWOLF ont mené une démarche similaire en mettant au point un concert spectaculaire, The Monumental Mass: A Cinematic Metal Event. Son label, Napalm Records, le propose désormais pour tous avec une sortie DVD et BluRay.

POWERWOLF cartonne depuis quelques années, ce sont les HAMMERFALL ou SABATON des années 2011/2022: de très bons professionnels, ils proposent une recette solide et efficace recyclée album après album. Les tubes sont nombreux et font un malheur sur scène. Le public adhère jusqu’à présent vu le succès des dernières tournées.

Pour ce spectacle le quintet a vu les choses en grand et propose un spectacle qu’ils ne pourront sans doute jamais se payer tout au long d’une tournée. Le décor se veut très élaboré, les figurants nombreux et les effets scéniques omniprésents. Un gros travail a été abattu pour proposer une ambiance indus / gothique cohérente avec l’univers visuel du groupe. A l’image d’un GHOST, tous les clichés y passent avec des flammes, des nonnes, des ghoules, des loups bien sûr et des images liturgiques. Le claviériste s’amuse avec son orgue pyrotechnique, Attila Dorn en fait des tonnes et de la neige tombe pendant “Where The Wild Wolves Have Gone”…

Faute de grives on mange des merles

Le spectacle a été divisé en quatre chapitres : Temptation, Sin, Confession et Forgiveness permettant de passer en revue toute la riche discographie des teutons. Chaque fan aura sa setlist favorite mais il n’y a là pas de quoi se plaindre. Votre serviteur regrettera l’absence de « Ira Sancti (When The Saints Are Going Wild) » tiré de l’album Blood of the Saints mais nous ne vivons pas dans un monde parfait. Techniquement rien à redire, tous les musiciens sont bien en place et Attila Dorn ne s’économise pas derrière son micro. Quelques faiblesses émergent ici et là au niveau de la voix mais difficile de le lui reprocher vue l’ampleur de la tâche.

Après des mois de vaches maigres, POWERWOLF pouvaient difficilement faire mieux que ce The Monumental Mass: A Cinematic Metal Event pour se rappeler au bon souvenir de ses fans et entretenir la passion. Bien sûr tout est calibré, très produit et rien ne dépasse. Si vous voulez du vrai, du naturel et imparfait, les allemands ont multipliés les shows pendant les festivals d’été (dont le Motocultor en France). Ils se lanceront à partir de novembre dans une large tournée européenne (Wolfnächte 2022).

Oshyrya (08/10)

 

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Napalm Records / 2022
Tracklist (80:00 mn) 01 Prologue – Monumental Mass Theme 02 Faster Than the Flame 03 Venom Of Venus 04 Stossgebet 05 Demons Are A Girl’s Best Friend 06 Monumental Mass Theme – Sin 07 Dancing with the Dead 08 Cardinal Sin 09 Resurrection By Erection 10 We Drink Your Blood 11 Glaubenskraft 12 Monumental Mass Theme – Confession 13 Fire and Forgive 14 Beast of Gevaudan 15 Incense & Iron 16 Where The Wild Wolves Have Gone 17 Monumental Mass Theme – Forgiveness 18 Amen & Attack 19 Army of the Night 20 Blood for Blood (Faoladh) 21 Armata Strigoi 22 Epilogue – Monumental Mass Theme

 

Rammstein – Zeit

Le groupe a pris une telle dimension que la sortie d’un nouvel album reste un événement majeur dans le petit monde musical occidental mais pas seulement. Sur les cinq continents, les fans de douceurs industrielles sauce teutonne frétillent d’excitation. Mais cette attente cache toujours une pointe d’angoisse, la peur de l’album de trop, de la tâche indélébile sur une discographie sans sortie de route jusqu’à présent (oui même Rosenrot, réessayez, vous verrez…).

Notons d’abord que contrairement au précédent, nous n’avons pas eu dix ans à patienter pour écouter de nouvelles chansons. Trois ans séparent les deux sorties, il est aisé de penser que la crise sanitaire a beaucoup joué. En effet, empêché de faire des tournées, en solo ou en groupe, le sextet a dû vite se rendre à l’évidence et décider de se remettre au travail collectivement.

C’est dans les vieux pots…

Avec ce huitième album, RAMMSTEIN continue d’appliquer consciencieusement la recette qui fait son succès et sa marque de fabrique depuis le début. C’est direct, efficace et très calibré avec onze nouvelles chansons d’une durée comprise entre trois et quatre minutes. Cependant, les premières écoutes sont décevantes et laissent un goût d’inachevé dans la bouche. Cela reste très présentable et jamais désagréable à écouter mais il manque un feu sacré qui emporterait tout et créerait une adhésion immédiate. Beaucoup peuvent penser revivre la période entre Mutter et Rosenrot, le sentiment d’avoir un album vite fait, construit à partir des chutes des sessions précédentes (effectivement en interview le groupe avait annoncé avoir mis de côté cinq titres car ils se limitent à onze titres par disque).

Contrairement à son prédécesseur, Zeit ne possède pas de tube à la « Deustchland », une composition fabuleuse, ébouriffante, qui rassurait sur le talent toujours intact des allemands. Zeit nécessite de prendre son temps pour apprivoiser ses meilleures chansons. Avec le temps (ou la méthode Coué c’est selon) des titres comme « Armee der Tristen », « Zeit » ou « Angst » s’avèrent être de petites pépites qui n’attendent qu’à être lentement polies pour faire apparaître leur éclat. Cette dernière chanson, en particulier, par son clip et l’intelligence de ses paroles fait mouche.

Zeit renferme ensuite les catégories ‘rammsteiniennes’ habituelles entre titres efficaces mais faciles comme « Giftig » ou encore « Ok » et les chansons un peu débiles, « Zick Zack » et « Dicke Titten » en tête. C’est idiot, inutile mais cela fait aussi partie de l’identité de RAMMSTEIN. Emballé c’est pesé et voici un huitième album tout frais tout chaud.

Bon alors, chef d’œuvre ou album de trop ?

Eh bien ni l’un ni l’autre mon capitaine. Zeit remplit son contrat en ajoutant quelques brûlots capables de faire un malheur sur scène (la tournée des stades 2022 peut aisément le confirmer). Ce n’est pas un disque qui jurera négativement parmi les autres albums. Après presque trente ans de carrière, l’âge d’or de RAMMSTEIN est forcément derrière lui et ils ne peuvent plus nous offrir des pépites du calibre de Mutter ou Sehnsucht. Faites-vous une raison, Cela va sembler cynique et beaucoup me trouveront des contre-exemples mais c’est le destin normal de tous les groupes après une si longue carrière.

Les allemands sont toujours là, fidèles au poste, avec les mêmes musiciens depuis les origines et ils continuent de proposer de bonnes chansons à défaut de tubes intemporels. Ils tabassent sur scène (comme à Lyon récemment, quel show !) et répondent ainsi à l’attente du public. Ceux qui aimaient aimeront, les autres ont de toute façon abandonné depuis longtemps.

Oshyrya (06/10)

 

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Universal Music / 2022
Tracklist (44:06 mn) 01. Armee der Tristen 02. Zeit 03. Schwarz 04. Giftig 05. Zick Zack 06. OK 07. Meine Tränen 08. Angst 09. Dicke Titten 10. Lügen 11. Adieu