En faisant récemment une interview je n’en étais pas conscient mais j’allais alors faire face à l’un des représentants majeurs de la scène punk outre-Atlantique. Ayant eu une jeunesse et une adolescence calme, l’esprit de rébellion punk ne m’avait à l’époque qu’à peine effleuré à travers les groupes les plus commerciaux (on ne va citer personne histoire de ne pas se fâcher). Donc si vous êtes comme moi, après recherche, je peux vous apprendre qu’ANTI-FLAG est un groupe de punk américain formé à Pittsburgh en 1988. Ah oui, la colère et la rébellion sociale, ça conserve ! Il est remarquable de constater que contre vents et marées, le quatuor est resté fidèle à ses principes, exprimant année après année ses idées libertaires, anti-fasciste, anti-religieux et anti-nationaliste. Et dans l’Amérique de Georges W. Bush post-11 septembre, ce n’était franchement pas simple. American Spring est leur dixième album et suit de trois ans The General Strike, son prédécesseur.
Malgré le poids des années, ANTI-FLAG reste droit dans ses bottes après vingt-sept années de carrières. Les ingrédients de la recette n’est pas changé, des rythmes rapides, des riffs directs et tranchants, le tout complété d’un chant hargneux et sans fioriture de Justin Sane et Chris#2. En quelques minutes la messe est dite, les chansons dépassant rarement les trois minutes. Cette débauche d’énergie n’empêche pas ANTI-FLAG de souvent faire mouche avec des mélodies et des refrains accrocheurs. L’envie de taper du pied et de secouer la tête s’imposent assez naturellement à l’auditeur et le totrticoli est (presque) garanti. American Spring frappe d’entrée un grand coup avec un « Fabled World » enthousiasmant. Les compositions s’avèrent être du même tonneau et il est agréable de constater que les américains ont su recharger leurs batterie depuis The General Strike et n’ont rien perdu de leur vista. Ce disque contient un grand nombre de hit potentiels qui pourraient faire un malheur sur les radios rock outre-Atlantique. Les américains savent ralentir le rythme quand cela s’avère nécessaire. Cet album voit la cohabitation entre des pépites punk rapides, lumineuses et des titres plus posés. Cet équilibre offre à l’auditeur l’opportunité de reprendre son souffle entre les salves les plus directes. Une certaine lassitude finira par pointer le bout de son nez mais cela ne gâche vraiment pas le plaisir.
Intelligence et finesse sur la forme et sur le fond, difficile d’en demander plus à ANTI-FLAG. Les américains continuent de faire ce qu’ils font le mieux depuis vingt-sept ans, diffuser leurs idées et leurs valeurs à travers des chansons plaisantes et accrocheuses. Sans doute moins connu que GREEN DAY (période Dookie) dans nos contrées, le groupe soutient pourtant largement la comparaison. Alors que ces derniers se sont apparemment assagis, ANTI-FLAG continue de se battre contre l’ordre établi.
Oshyrya (7,5/10)
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Spinefarm Records / 2015
Tracklist (40:32 mn) 01. Fabled World 02. The Great Divide 03. Brandenburg Gate 04. Sky is Falling 05. Walk Away 06. Song For Your Enemy 07. Set Yourself on Fire 08. All of the Poison, All of the Pain 09. Break Something 10. Without End 11. Believer 12. To Hell With Boredom 13. Low Expectations 14. The Debate is Over (If You Want It)
Dix albums, cela semble naturel mais finalement peu de groupes parviennent à atteindre ce chiffre symbolique. Ce n’est bien sûr pas une fin en soi mais simplement une sacrée réalisation, le résultat d’une longue carrière. Les britanniques de THUNDER viennent d’atteindre ce palier avec leur nouvel album, Wonder Days. Le groupe est forcément très familier des amateurs tant il a su imprimer sa patte depuis plus de vingt-cinq ans via de multiples succès (18 singles ont atteint les sommets des charts outre-Manche) et des disques d’or et de platine. Mais tout cela appartient à un passé révolu et THUNDER n’avait pas proposé de nouveauté depuis près de six ans (Bang! en 2008). Il était temps qu’ils se rappellent ainsi à notre bon souvenir après un split annoncé en 2009. Une réunion a lieu au High Voltage Festival en 2011 avant que les britanniques n’annoncent en Mai 2014 travailler sur un nouvel album.
Afin de mettre tous les atouts de leur côté, les britanniques ont su s’entourer d’une belle équipe. Wonder Days ainsi été enregistré aux Rockfield Studios avec Luke Morley (guitares) comme producteur. Le mixage a été confié à Mike Fraser qui a travaillé avec THUNDER au début de sa carrière sur Back Street Symphony par exemple et ensuite avec des grands noms comme AC/DC et METALLICA. Tout cela c’est bien beau mais encore fallait-il avoir onze chansons de qualité à proposer. Et de ce côté-là, THUNDER fait la preuve d’un savoir-faire et d’un talent assez évident. Cet album s’ouvre avec la chanson éponyme, rapide et épique à souhait. Les racines de THUNDER plongent évidemment dans les années 70 et cette identité-là perdure. Le label parle d’un titre Led-Zepelinesque, pas sûr que je les suive complétement sur ce chemin. Surtout que la suite comme « The Thing I Want » est beaucoup plus direct, presque pop et dansant. Cette variété est loin de me déplaire et apporte un joli vent de fraicheur sur ce disque. Le groupe alterne intelligemment les rythmes et les atmosphères pour éviter de lasser. Le pari est réussi. La base rock n’roll se voit ici et là enrichie de touches blues et soul du meilleur effet.
Après bien des péripéties à partir de 2008, THUNDER revient en grande forme avec un Wonder Days de qualité. Les britanniques rassurent ainsi leurs fans, ils n’ont rien perdu de leur talent et démontrent qu’ils ont en ont encore sous la capot. Entre de solides nouvelles chansons et une longue liste de classiques, les futures apparitions scéniques des londoniens devraient valoir le détour.
Oshyrya (07/10)
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earMUSIC / 2015
Tracklist 01. Wonder Days 02. The Thing I Want 03. The Rain 04. Black Water 05. The Prophet 06. Resurrection Day 07. Chasing Shadows 08. Broken 09. When The Music Played 10. Serpentine 11. I Love The Weekend
Reconnaissons à nos compatriotes français de WILD DAWN la volonté et la motivation d’aller de l’avant malgré les difficultés et les obstacles. Avec ce nouveau disque, ils inaugurent une nouvelle stratégie artistique, proposer des EPs très régulièrement au lieu de favoriser l’enregistrement d’albums complets forcément plus longs à composer et enregistrer. Votre serviteur n’est pas complétement convaincu après en avoir discuté avec eux, mais l’audace est à saluer.
Originaire d’Orléans, WILD DAWN évolue depuis 2008 dans une veine Rock n’Roll aux fortes influences Heavy/Stoner. C’est en forgeant que l’on apprend à forger et le quatuor a bien compris que c’est la scène qui allait leur apporter rigueur et légitimité. Ils n’économisent pas leur peine et foulent toutes les planches de l’hexagone profitant de chaque opportunité, en festival ou sur les scènes des grandes villes, en première partie ou en tête d’affiche. Tout au long de ces années, les français ont su se constituer un joli tableau de chasse avec un EP en 2009 (Old School Machine) et deux albums les années suivantes (Double Sided en 2011 et Pay your Dues and 2013). Avec régularité, les voici de retour avec l’EP Bloody Jane’s Shore.
Je parle d’un EP mais WILD DAWN ne se moque pas de ses fans avec quand même six nouvelles compositions mais surtout plus de quarante minutes de musique au compteur. En effet, les nouvelles compositions se voient ici complétée de trois titres en version unplugged extrait de l’opus précédent Pay your Dues. D’autres groupes n’ont pas honte de proposer un album qui dépasse avec difficulté la demi-heure. WILD DAWN poursuit sur sa lancée et cet EP s’inscrit dans la continuité de ses prédécesseurs. Amateurs de beautés rock couillues et directes, vous devriez sérieusement vous intéresser à ce disque. La très jolie pochette signée Pierre Lazarevic donne d’entrée le ton et évoque les grands espaces désertiques américains. La guitare donne le ton à coup de riffs à la fois épais et mélodique, bien secondée par une section rythmique basse/batterie (Morgan et Alex) au diapason. Les chansons vont à l’essentiel en trois ou quatre minutes et évitent ainsi de se perdre dans des digressions stériles. Belle mention pour Greg qui en plus de la guitare (avec Romain) tire son épingle du jeu au chant. Son énergie et sa conviction s’avèrent communicatives. Les titres tiennent tous la route avec une préférence pour un « Smite » endiablé et dont le refrain fait particulièrement mouche.
En interview deux des membres du groupe s’amusait de mes comparaisons avec QOTSA. Mais j’ai beau écouter encore et encore cet EP, même si ce n’est pas forcément évident, il me semble que l’ombre de Josh Homme & co plane quand même sur cet EP. Les racines de ces deux groupes puisent au sein de la même source même si les interprétations diffèrent ensuite. Et puis, vous m’accorderez qu’il a pire comme référence… Dans la foulée de Pay Your Dues, WILD DAWN enfonce encore le clou avec un Bloody Jane’s Shore réussi. Espérons maintenant que leur stratégie fonctionne car ils méritent de trouver une plus large reconnaissante auprès du public vu la qualité du travail proposé.
Oshyrya (08/10)
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Autoproduction / 2015
Tracklist (42 mn) 01. Decay 02. Smite 03. Bloody Jane's Shore 04. The End Of Everything 05. King Of An Empty Castle 06. War 07. S.A.D 08. Stone Cold Motherfucker 09. Better Days