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FM – Synchronized

FM n’a sans doute plus rien à prouver : après 30 ans de carrière, Steve Overland et les siens arpentent les sentiers du rock mélodique avec une classe et une maitrise indéniables. En outre, le groupe a su avec intelligence saisir un certain « air du temps » pour éviter de sombrer dans la ringardise. Faire de l’AOR qui ne paraisse pas trop datée sans pour autant sombrer dans la surenchère du « rentre-dedans » par une modernisation outrée, ce n’est pas si simple. De telle sorte que FM reste tout à fait crédible et a réussi à enchainer depuis sa reformation les bons albums comme par exemple avec le diptyque Rockville I et II.

Parlons franchement : Synchronized s’inscrit grosso modo dans la même optique. Rien de nouveau sous le soleil des Britanniques puisque ce Synchronized aurait tout à fait pu prendre la place de Heroes and Villains par exemple. Les mélodies sont toujours aussi chaleureuses et l’élégance naturelle de Steve Overland fait que l’on évite toujours le racoleur. Ainsi un « Broken » ou un « Best Of Times » auraient pu être pénibles de mièvrerie mais ce n’est pas le cas ; tout juste reprochera-t-on des claviers quelque peu datés.

Et le titre éponyme de l’album permet de ressusciter avec bonheur l’inspiration de Tough It Out : un rock hard qui sait se faire parfaitement fédérateur. « Superstar » sait lui emprunter une voie plus mélancolique pour atteindre son but mais reste du même standard de qualité notamment par une construction à tiroir à laquelle FM ne vous avait pas franchement habitués jusqu’alors. À vrai dire, la première entame du disque est de très bonne tenue.

La seconde partie du disque ne démérite pas mais on perçoit une certaine baisse de régime : « Pray » malgré ses bonnes intentions méritait sans doute un refrain plus inspiré et « Hell of High Water » apparait comme trop convenu. Plus généralement, on peut constater certaines limites dans le jeu de Jim Kirkpatrick qui manque de folie et de vélocité et ce alors que les claviers restent assez minimalistes. « Angels Cried » est une ballade que n’aurait pas désavouée le dernier Michael Bolton : c’est dire. De la sorte que la fin du disque donne quelque peu l’impression d’un groupe ne quittant pas trop sa zone de confort. Certes, la soixantaine atteinte, on peut difficilement se renouveler, mais l’impression de convenue est un peu trop présente. Peut-être le groupe devrait-il espacer un peu plus ses productions ? FM avait trop souvent atteint l’excellence pour que l’on soit totalement satisfait.

Baptiste (7/10)

 

Frontiers / 2020

Tracklist : 1. Synchronized 2. Superstar 3. Best of Times 4. Ghost of You and I 5. Broken 6. Change For The Better 7. End Of Days 8. Pray 9. Walk Through Fire 10. Hell Or High Water 11. Angels Cried 12. Ready For Me

Sweet Oblivion – S/t

Cela fait bien longtemps que Geoff Tate ne fait plus rien de bon. Des décennies même et il a fallu pour les autres membres de Queensrÿche se séparer de lui et de son égo envahissant pour refaire de bons disques. Depuis Tate a lancé, « en représaille », son super groupe Operation mindcrime qui accumule les sorties médiocres. Peut-être que Tate a compris qu’il sombrait dans un ornière ou tout simplement qu’on lui a fait une proposition qu’« on ne peut refuser », mais son nouveau disque n’est pas estampillé « Operation mindcrime » mais Sweet Oblivion. Il s’agit plutôt d’un projet tel que Frontiers sait si bien les concocter : un nom de groupe qui sert surtout de paravent à un projet mené par le poly-instrumentiste, compositeur et producteur, Simone Mularoni, pour mettre en valeur la voix de Geoff Tate. La musique est donc extrêmement standardisée : un heavy mélodique et moderne plutôt technique… dans la lignée de ce produit le Queensrÿche actuel en fait. Intéressant paradoxe.

L’important c’est que Tate ne touche pas à la composition ici, ce qu’on ne peut que saluer tant ses dernières réalisations étaient médiocres. Par ailleurs, Mularoni est peut-être un mercenaire musical, mais il fait partie du haut du panier chez Frontiers : excellent guitariste et bon producteur, il sait produire des compositions qui font que plus tenir la route. Et comme Tate chante malgré tout encore fort bien, c’est un vrai plaisir de l’entendre sur « True Colours » ou sur le superbe « Behind Your Eyes ». On a beaucoup glosé sur sa perte de tessiture vocale avec les années (il atteint la soixantaine) et notamment son incapacité à atteindre certaines notes aiguës. C’est vrai, mais il conserve quand même de très beaux restes et, en studio, on n’y voit (ou n’y entend) que du feu. Et l’homme a assez de savoir-faire pour éviter les parties vocales qui ne lui vont plus.

Que peut-on reprocher à ce Sweet Oblivion ? D’être du faux Queensrÿche ? Non, pas vraiment : les compositions de Mularoni ne sont nullement des plagiats du Queensrÿche de la grande époque, même si toute influence ne peut être exclue. Oui, « Sweet Oblivion » aurait pu être écrite par DeGarmo, mais c’est sans doute du fait de la voix très identifiable de Tate que d’une volonté de plagiat. On peut toutefois déplorer que le format des morceaux soit un peu trop calibré : on ne dépasse jamais vraiment les cinq minutes, ce qui réduit l’ambition musicale du propos. Et ce alors que Mularoni a quand même quelques arguments à faire valoir derrière son instrument, comme l’écoute de ses solos fins et techniques le confirmera d’emblée.

En fait, un des atouts de ce Sweet Oblivion est, d’une certaine manière, donner envie d’en écouter plus de ce projet. Espérons qu’il ne soit pas donc uniquement mort-né.

Baptiste (7/10)

 

Frontiers / 2019

Tracklist : 01. True Colors 02. Sweet Oblivion 03. Behind Your Eyes 04. Hide Away 05. My Last Story 06. A Recess From My Fate 07. Transition 08. Disconnect 09. The Deceiver 10. Seek The Light

Whitesnake – Flesh & Blood

67 ans. C’est l’âge de David Coverdale. 42 ans. C’est la durée d’activité impressionnante de Whitesnake. Activité dont témoigne encore la sortie de ce Flesh & Blood qui porte extrêmement bien son nom : quoi de mieux comme témoignage de vitalité malgré les années que ce nouvel opus ? Certes, les esprits chagrins diront que de nos jours, les grands groupes jouent les prolongations depuis quelque temps déjà, que Deep Purple est toujours en activité, qu’Ozzy Osbourne se refuse toujours à la pension pour personne âgée et que Richie Blackmore a même remonté son vénérable Rainbow. Toutefois Coverdale a d’autres arguments que le refus de la retraite et du repos mérité.

Tout simplement car il ne semble pas porter le poids des ans : si Coverdale a perdu quelque peu de sa puissance au fil des années, il faut bien dire que sa voix est toujours superbe. Elle constitue un parfait exemple de la manière dont le savoir-faire et l’expérience permettent de compenser les quelques pertes de puissance imposées par les ans. Il faut bien dire que dans la catégorie qui est la sienne, il n’y a bien que Glenn Hughes qui semble plus fringant au micro. C’est dire.

Une mécanique très bien huilée

En plus d’être un grand chanteur, il faut dire que Coverdale est aussi un homme de flair : il a toujours su s’entourer pour le mieux. De Mick Moody jusqu’à Adrian Vanderberg en passant par John Sykes, il a toujours sur choisir, voire dénicher des guitaristes parfaits pour l’épauler. Si l’homme peut parfaitement composer seul, il aime bien avoir un complice de composition. Jusqu’à il y a peu c’était Doug Aldrich qui jouait ce rôle de partenaire de composition sur deux disques de bon aloi (Good to Be Bad et surtout Forevermore). C’est Joel Hoeskra qui l’a remplacé aux côtés de l’inamovible Reb Beach. L’ensemble allait-il fonctionner sur un nouveau disque de compositions originales ? Si le Purple Album (2015) était de bonne facture il ne s’agissait que de reprises. Avec ce Flesh & Blood, l’on rentre nécessairement dans le neuf.

Et bien le tout fonctionne très bien dès un « Good To See You Again » puissant en diable. Les écailles du Serpent Blanc scintillent comme jamais et ne se terniront pas sur les morceaux suivants : l’entraînant « Shut Up & Kiss », « Hey You (Make Me Rock ) » etc. Le point d’orgue est peut-être constitué de « Flesh & Blood », puissant hymne doté d’excellents solos. Mais il est difficile de dégager un titre plus qu’un autre : « Well I Never » et ses airs de tubes typé Arena rock pourrait aussi aussi être désigné comme tel. Joel Hoeskra a donc été parfaitement intégré dans le groupe mais il ne vole pas la vedettes à Reb Beach qui trouve d’autant plus sa place ici, qu’il a enfin participé à la composition de plusieurs morceaux. Il n’est donc plus un franc-tireur de luxe venant avant tout poser des solos de haut vol, ce qu’il fait par ailleurs toujours (« Get Up » ou surtout celui de « Shut Up & Kiss Me »).

Pas de retour aux origines

Y a-t-il des raisons d’être déçu de ce Flesh & Blood ? Plutôt que de déceptions, nous parlerons de déçus. Il y en aura : ceux qui sont les amateurs de la première période du Serpent Blanc, période qui s’est arrêté au milieu des années 80 avec la sortie de Slide It In (1984). En effet, Coverdale n’a pas renoué avec le hard bluesy des premiers temps de son groupe. Ce Flesh & Blood est avant tout un héritier lointain du multi-platine 1987. La production est sur ce point éloquente : puissante et survitaminée, mettant en avant les deux guitares et la batterie d’un Tommy Aldridge toujours aussi vert, elle manque quelque peu de chaleur et spontanéité. Les amateurs de plus d’émotion pourront toujours rabattre sur quelques titres plus subtils comme la belle ballade « When I Think Of You » ou l’épique « Heart Of Sone » qui varie parfaitement les ambiances. Entendre Coverdale chanter de manière plus posée est toujours un ravissement. Mais manifestement échaudé par l’échec de Restless Heart il y a bientôt vingt ans de cela, il ne souhaite pas tenter le diable d’une musique plus posée et intimiste. Plus « authentique » diront les plus méchantes langues. Il faut admettre cela pour apprécier à sa juste valeur ce Flesh & Blood dont la qualité musicale reste indéniable, surtout eu égard aux années de bons et loyaux services.

Baptiste (8/10)

 

Frontiers / 2019

Tracklist (59:22) : 1. Good To See You Again 2. Gonna Be Alright 3. Shut Up & Kiss Me 4. Hey You (Make Me Rock) 5. Always & Forever 6. When I Think Of You (Color Me Blue) 7. Trouble Is You Middle Name 8. Flesh & Blood 9. Well I Never 10. Heart Of Stone 11. Get Up 12. After All 13. Sands Of Time