Operation Mindcrime – The Key

OperationmindcrimeIl semble donc que l'imbroglio juridique entre Geoff Tate et ses anciens comparses de Queensrÿche ait débouché sur un accord juridique : Wilton, Jackson et Rockenfileld conservent avec La Torre et Lundgren l'usage du nom du groupe et Tate le droit de jouer en entier les deux concepts albums Operation Mindcrime I et II. Il n'y aura pas « deux » Queensrÿche en activité comme ce fut le cas durant un an, à la sortie de Frequency Unknown et de Queensrÿche. Histoire de capitaliser sur le passé prestigieux de Queensrÿche et de son disque culte, Tate a donc choisi d'intituler son projet musical Operation Mindcrime. « Projet » car il ne s'agit en rien d'un groupe mais d'un projet personnel pour lequel Tate a fait appel à quelques pointures de la scène métal anglo-saxonne (Dave Ellefson, Simon Wright) ainsi qu'à ses collaborateurs habituels, comme Kelly Gray – son inévitable gendre – aux guitares. 

Disons-le d'emblée : il y a tromperie sur la marchandise. Car Operation Mindcrime, sur ce premier album, ne marche absolument sur les traces du joyau de métal progressif qu'était Operation Mindcrime. Certes on trouve bien un certain concept album autour de personnages se posant la question de changer le monde. Et on remarque trois introductions qui posent une ambiance d'ailleurs plutôt plaisante sur « Discussion In A Smoked Fill Room » ou « An Ambush Of Sadness ». Pour le reste The Key s'inscrit plutôt dans le sillage des derniers disques solo de Tate et des disques de Queensrÿche comme Dedicated To Chaos ou le médiocre Frequency Unknow. Il s'agit au moins d'une preuve de courage : Tate ne braconne pas sur ses vieilles terres. La question est de savoir si « aller de l'avant » coûte que coûte est si recommandable.

Car, excepté quelques moments d'inspiration réelle comme le single pour une fois « queenrsychien » qu'est « Re-Inventing The Future » ou le duo vocal inattendu avec Mark Daly (The Voodoos) sur « Life Or Death » voire la ballade atmosphérique « Kicking In The Door », le tout n'est pas passionnant. Peut-être que je n'arrive pas à m'habituer aux volontés modernisatrices de Tate (son de guitare très grave, riffs syncopés faisant métal moderne, passages presques « rapés ») et il y a tout à gager que je ne serai pas le seul. Il est vrai que la production pataude du disque ne le bonifie pas. Les refrains pèchent par manque d'inspiration aussi. 

The Key n'est en rien une réussite musical, mais au moins dénote-t-il une vraie sincérité chez le chanteur. Et peut-être quelques progrès musicaux par rapport à Frequency Unknown. Il est difficile d'en dire plus de bien.

Baptiste (5,5/10)

 

Frontiers / 2015

Tracklist : 1. Choices (intro) 2. Burn 3. Re-Inventing The Future 4. Ready To Fly 5. Discussions In A Smoke Filled Room 6. Life or Death? 7. The Stranger 8. Hearing Voice 9.  On Queue 10. An Ambush Of Sadness 11. Kicking In The Door 12. The Fall

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L’annonce de l’élaboration d’une suite au fondamental Operation Mindcrime par Queensrÿche m’avait laissé très dubitatif. Alors que le groupe, en l’absence de son principal compositeur, Chris de Garmo, peinait à trouver une inspiration correcte, notamment sur Tribe, comment pouvait-il se porter au niveau d’excellence de son œuvre majeure ? À l’écoute de cette suite si hasardeuse, il s’avérait d’emblée tentant de procéder à une comparaison systématique entre les deux disques. En effet, la comparaison – il suffit de renvoyer le titre d’ouverture « I’m American » au précédent « Revolution Calling » pour le constater – ne se révélerait que trop systématiquement désavantageuse pour ce nouvel opus, tant la première partie est considérée unanimement comme intouchable.

Même si les deux récits s’enchaînent nettement – ce nouveau disque narre la libération de Nikki et sa soif de vengeance contre le Docteur X –, il est plus prudent, pour lui rendre justice, de traiter cette suite comme musicalement indépendante de sa première partie. Et un premier constat s’impose : si le propos construit autour des impasses et des implications dramatiques de l’application du principe de vengeance s’avère très pertinent, surtout au regard des idiosyncrasies de la politique actuelle du pays de Geoff Tate, le contenu musical est, lui, moins cohérent.

En effet, Queensryche peine depuis quelque temps à maintenir un standard de qualité continu sur ses productions : touchant souvent au bon, voire à l’excellent, le groupe vacille très facilement au niveau de son inspiration et ceci parfois à l’intérieur d’un morceau même. La piètre qualité du refrain d’« I’m American », au milieu d’une chanson assez enlevée, témoigne parfaitement de ce travers. Et cela est d’autant plus fâcheux, que manifestement le groupe a beaucoup travaillé : les fines harmonisations de guitare, le travail sur les claviers (écouter le couplet transcendé de la sorte sur « Re-Arrange You ») ou l’appel à plusieurs chanteurs dont Ronnie James Dio pour le duo dramatique de « The Chase »… tout cela relève du meilleur Queensrÿche. Ce travail porte ses fruits sur un bouquet de titres réussis : citons « Hostage », « The Chase » ou le superbe « The Hands » sur lequel Tate élance sa voix presque comme jadis.

Cependant, les défaillances apparaissent vite : outre quelques refrains franchement peu inspirés (« Signs Say Go » est indigne de Tate), la fin du disque souffre d’une vraie poussivité, entraînant le décrochage de l’auditeur et ce d’autant plus que la production est loin d’égaler celle de la première partie. Un album plus ramassé, homogène et dense aurait été donc souhaitable, mais il ne pouvait alors s’agir de créer une suite au plus grand concept album de l’histoire du métal.

Sur ce dernier disque, Queensrÿche se débat donc plus que jamais au milieu de ses contradictions.

Baptiste (6/10)

Addendum : Depuis la rupture entre Geoff Tate et le reste du groupe, les membres restants du groupe ont révélé beaucoup de choses sur les conditions de composition et d’enregistrement de cet Operation Mindcrime II. Hostiles d’emblée au projet, les membres de Queensrÿche en sont quasiment absents, Wilton n’eut son mot à dire et beaucoup de parties musicales furent enregistrées par des musiciens de studio. Operation Mindcrime II doit être donc être pris comme un projet personnel de Geoff Tate épaulé par le producteur et multi-instrumentiste Jason Slater. Tout est plus clair.

Rhino / 2006

Tracklist : 1. Freiheit Ouverture 2. Convict 3. I’m American 4. One Foot In Hell 5. Hostage 6. The Hands 7. Speed Of Light 8. Signs Say Go 9. Re-Arrange You 10. The Chase 11. Murderer ? 12. Circles 13. If I Could Change It 14. An Intentional Confrontation 15. A Junkie’s Blues 16. Fear City Slide 17. All The Promises

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La réédition en format blueray de ce DVD de Queensrÿche, intitulé Mindcrime At The Moore, est une occasion de revenir sur ce concert enregistré en octobre 2006 à Seattle pour la tournée Operation Mindcrime II, un album très contesté – comme la plupart de ce qu'a fait le groupe depuis Promised Land, à l'exception d'Americain Soldier –, mais toutefois intéressant. Ce DVD est d'autant plus intéressant que le groupe a choisi de marquer le coup en interprétant les deux parties d'Operation Mindcrime à la suite, ce qui fait que ce DVD est bel et bien double. Par aileurs, Queensrÿche a joué le grand jeu avec un décor très réussi, en faisant intervenir plusieurs comédiens pour jouer les personnages de l'histoire, Geoff Tate se réservant le rôle de Nikki, le toxicomane manipulé par le dangereux Docteur X. Pamela Moore dans le rôle de Sœur Mary est présente en chair et en os durant tout le concert ce qui donne lieu à quelques duos de toute beauté, notamment sur le final « All The Promises », durant lequel les deux personnages, devenus alors des spectres, s'interpellent mutuellement. On est ainsi tout près d'un opera rock d'excellente tenue et on remarquera que Geoff Tate est très à l'aise dans ce double rôle de comédien/chanteur ; le chanteur semble réellement possédé par ce qu'il chante au point de transcender fréquemment des compositions d'une valeur inégale lors de le l'interprétation de la deuxième partie. 

Dans une précédente chronique, j'avais fait remarquer que le deuxième opus d'Operation Mindcrime pâtissait énormément de la comparaison avec sa première partie, un disque qui reste vingt ans après un des plus grands disques de métal des années 80. Sur le fond les choses ne sont pas très différentes sur ce Mindcrime At The Moore, et cela sautera aux yeux de l'amateur qui enchaînera les deux DVD à la suite. Toutefois, ce constat est atténué par deux remarques. La première tient à l'interprétation et à l'énergie déployée lors de la deuxième partie d'Operation Mindcrime : le groupe semble très investi et la dimension visuelle permet d'atténuer les quelques longueurs musicales que comportait la suite.

La deuxième remarque tient à l'interprétation de la première partie d'Operation MIndcrime, interprétation qui est inférieure à celle de la fabuleuse tournée de 1988, immortalisée en DVD d'ailleurs. La faute n'en revient sans doute pas à la section rythmique, toujours excellente, ni à Wilton, impeccable mais à Geoff Tate et au second guitariste, depuis limogé, Mike Stone. 

Si l'investissement de Tate et son charisme sont indéniables, il faut reconnaître qu'il a perdu des capacités dans les aigus, ce qui pose peu de problème dans son registre actuel, sur les nouvelles composions d'Operation Mindcrime II, mais ce qui s'avère fâcheux sur un « Breaking The Silence » ou « I Don't Believe In Love ». Il faut être juste : il était quasiment impossible qu'il en soit autrement et Tate conserve de très très beaux restes (écouter le rappel « Jet City Woman » reprise en chœur par le public où son interprétation est de haute tenue surtout pour une fin de concert). Non, la vraie plaie de ce live est Mike Stone. Et je pèse mes mots : avec son toucher répugnant, son son de guitare sale et inintéressant et son look de punk attardé, ce type n'avait rien à faire dans Queensrÿche. Il gâche régulièrement les parties de Chris De Garmo, ce qui n'incitera qu'un peu plus les fans à la nostalgie.

Voici dont le gros point noir d'un DVD d'excellente qualité et qui confirmera l'idée que Queensrÿche conserve quand même pas mal de chose à dire, encore dans le nouveau millénaire. Il permettra peut-être de réhabiliter un disque, Operation Mindcrime II, qui vieillit plutôt bien.

Baptiste [8/10]

 

Eagle Visions / 2011

Tracklist : 

DVD 1 : Operation Mindcrime I en entier

DVD 2 : Operation Mindcrime II en entier et en rappel « Walk In The Shadows » et « Jet City Woman ».

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