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Après avoir fait un peu parler d'eux en Allemagne (UDO avait produit leur album précédent, par exemple), ces jeunes allemands essayent de s'exporter avec leur nouvel album, Money, Sex & Power. Ils changent un peu de style au passage, ou plutôt affirment encore plus leur côté « sleaze ». Il faut dire que, même s'ils apprécient certainement ce qu'ils font, ils ont l'air d'avoir un plan marketing bien cadré dont nous parlent Johannes Braun (chanteur) et Jim Müller (guitariste).

MetalChroniques: Vous avez commencé ce groupe très jeunes [ils avaient dans les 11 ans de mémoire], et il y a de nombreuses anneés [depuis 2002]: qu'est-ce qui vous a fait commencer si tôt… et ne pas abandonner en chemin?
Jim Müller: En réalité, tout a commencé avec AC/DC. En ce qui me concerne, j'ai vu un dvd live, pour Johannes [Braun] il est allé à un de leurs concerts, quand il avait 7 ans. J'étais absolument fasciné par cette énergie, d'un groupe de rock'n'roll. Donc j'ai commencé à écouter beaucoup d'AC/DC et à jouer de la guitare, parce que je voulais faire comme Angus! J'ai écouté AC/DC pendant 3 ans, et puis j'ai découvert qu'il y a en fait d'autres groupes: je m'étais mis en tête qu'AC/DC était le seul. C'est comme ça que j'ai découvert Iron Maiden et plein d'autres. J'écoutais tous les vinyles de mon père à vrai dire, dont des trucs allemands comme Accept ou Scorpion.
Johannes Braun: Et nous nous sommes rencontrés à l'école, en primaire, nous étions très jeunes… à 9 ans peut-être? Et la base du groupe est toujours la même: c'était moi, mon frère Ande et Steffen Haile à la basse. Au début nous faisions du blues-rock, en instrumental, d'ailleurs le groupe s'appelait Blues Kids. Puis ça a évolué vers le rock, le hard-rock, et enfin le metal: c'est bien là que nous nous sentons « chez nous ». Après tout, comme l'a dit Jim, nous avons grandi avec tous ces héros de la scène rock et metal: pour nous, c'est un peu notre mission de garder cette musique vivante. Parce qu'AC/DC arrêtera dans 10 ans ou peut-être 5, ils s'arrêteront de toute manière, c'est pareil pour Iron Maiden et tous les autres. Il faut donc des groupes pour continuer à brandir le drapeau,
M.: D'accord, donc vous voulez être un de ces groupes?
J. B.: Oui, nous voulons être les nouveaux dinosaures dans 30 ou 40 ans!

M.: Money, Sex & Power est votre troisième album. Les précédents étaient beaucoup plus dans le « power-metal », alors que celui-ci est vraiment beaucoup plus dans le sleaze: qu'est-ce qui vous a donné envie de bifurquer à ce point??
J. M.: Il y avait déjà ce côté sleaze dans les albums précédents, un peu. Mais à chaque fois, quand nous discutions de ce que nous voulions faire, ça finissait en: « Ah, cette fois faisons une chanson à la AC/DC! Cette fois une chanson à la Judas Priest! » Cette fois nous avons réfléchi à ce que nous sommes et vers où nous allons, qu'est-ce qu'est Kissin Dynamite au bout du compte? Et nous avons décidé d'appeler ça « sleaze-metal », un mélange entre le sleaze et le heavy-metal, une sorte de rencontre entre Mötley [Crüe] et Accept. Je pense que c'est quelque chose d'assez nouveau?
J. B.: Tu as dit que les albums étaient plus power-metal, ou chaotiques, avec des riffs rock à la AC/DC. Nous ne faisons plus de power-metal à proprement parler, par contre nous le mélangeons à autre chose. Nous avons les influences du metal allemand traditionnel, comme Accept ou Scorpion évidemment, et celles du sleaze américain et nous mettons tout ça ensemble. Ca fait un peu comme un « melting-pot » où nous avons réuni toutes nos influences, et le résultat est une musique assez nouvelle, je pense: personne avant n'a mélangé le heavy-metal traditionnel, sérieux, avec du sleaze marrant, divertissant. D'ailleurs, nous avons l'air plus « glamouses » que nous ne le sommes en fait! Ca nous permet d'attirer plus de gens comme ça, comme Skid Row: ils avaient les fans de metal et les fans de glam parce qu'ils proposaient un mélange intéressant, et c'est aussi ce que nous essayons de faire aujourd'hui.

M.: Vous n'étiez même pas encore nés quand le sleaze a connu ses heures de gloire… ni même quand il a commencé à disparaître des classements: comment avez-vous plongé dedans?
J. B.: Bien sûr c'était à travers nos parents, qui avaient les albums de Mötley Crüe, Guns'n'Roses, Aerosmith, Bon Jovi… tous ces groupes. Je prenais les vinyles dans la bibliothèque de mon père pour les écouter, il ne le savait pas au début, c'était top-secret. Mais quand il l'a découvert il était ravi, parce que j'aimais la même musique que lui! Et quand il a découvert que j'allais faire de la musique, que je voulais en faire, il nous a vraiment soutenus. Et le sleaze s'est imposé naturellement, il nous en fallait toujours un peu plus: quand tu es vraiment jeune, tu n'as pas encore assez confiance en toi pour te coiffer en montant tes cheveux ou mettre du maquillage, mais ça vient avec le temps, au fur et à mesure que tu découvres qui tu es vraiment. Et au final, je crois que je suis ce à quoi je ressemble!
M.: [me tournant vers Jim] Et en ce qui te concerne?
J. M.: Pareil, la même histoire, je suis complètement d'accord!

M.: Etant donné que vous êtes si jeunes, on pourrait croire que vous avez une culture musicale assez limitée, surtout dans ce style. Pourtant, à vous écouter jouer, on comprend vite que ça n'est pas le cas… et/ou est-ce que vous avez de très gentilles personnes autour de vous pour vous souffler des idées?
J. B.: Eh bien, nous avons eu notre premier contrat avec une maison de disques à 15 ou 16 ans. C'était une chance fantastique et nous en avons un excellent souvenir, mais nous avons acquis beaucoup d'expérience à l'époque… nous avons pris beaucoup de coups, comme quelqu'un qui promet de faire quelque chose pour nous mais finalement nous ne voyons rien venir: c'est arrivé très souvent! C'est pour ça qu'aujourd'hui nous réfléchissons beaucoup à ce que nous faisons. Nous ne faisons pas ça juste parce que c'est marrant, nous sommes vraiment sérieux avec ça, le groupe. Même si nous nous amusons de nous-mêmes, bien sûr! Vous pouvez le voir dans les vidéos par exemple.
J. M.: Il ne faut pas oublier que le groupe lui-même existe depuis plus de 10 ans aujourd'hui, ce qui est évidemment très long: bien sûr nous avons acquis de l'expérience en 10 ans. Nous ne sommes pas tombés du ciel tout à coup pour apparaître devant vous, « les nouveaux rois du sleaze » ou quoi que ce soit! Tout ça vient d'une évolution, grâce à laquelle nous nous y connaissons vraiment bien en musique, tout comme nous connaissons très bien « le business de la musique » aujourd'hui. On nous a un peu jetés dans l'eau froide quand on a eu 15 ou 16 ans, nous étions jeunes et pouvions vraiment croire tout ce que les gens nous disaient. Mais nous avons très vite réalisé que les choses ne sont pas si roses, que la théorie ne peut pas être comparée à la réalité. Donc je dirais que c'était une bonne chose d'avoir eu ces expériences, quelque chose de très sain, parce que sans ça tu ne peux pas comprendre comme « le cirque de la musique » fonctionne. Tu ne peux pas avoir de succès si tu ne sais pas ce que tu fais.

M.: Si vous pouviez ramener à la vie un de ces musiciens décédés avant leurs 27 ans [que l’on aime rassembler dans le « Club 27 », vive les expressions, qui a donné son titre à une des chansons de Money, Sex & Power], qui choisiriez-vous?
J. B. et M. [en choeur]: Ronnie James Dio.
M.: Il est mort bien après ses 27 ans! [puisqu’un cancer l’a emporté en 2010 juste peu avant ses 68 ans]
J. B.: C'est vrai… mais aussi Steve Lee [mort en 2010 aussi… à 47 ans], pour moi c'est le meilleur chanteur qu'il y ait jamais eu. Pour en nommer des plus jeunes, il y a Jimmy Hendrix [en effet décédé alors qu’il allait sur ses 28 ans, en 1970], parce que je pense que ça serait très intéressant de voir ce qu'il ferait comme musique aujourd'hui, avec toutes ces nouvelles technologies.
M.: [vers Jim] Même chose?
J. M.: Oui, pour moi ça serait absolument Ronnie James Dio, et je suis d'accord pour Steve Lee. Pour moi en tant que chanteurs ce sont de vrais dieux, des héros. J'adore la voix de Dio, j'écoute encore ses albums. D'ailleurs pour moi Jorn Lande [ancienne chez Ark, maintenant chez Masterplan] est un peu son successeur: il a un peu la même couleur dans sa voix. Mais voilà, Dio est tranquille dans le Paradis du Rock'n'Roll, même si j'aimerais bien qu'il revienne sur Terre pour faire de la bonne musique!

M.: Vous vous êtes amusés sur le dernier titre de l'album, une chanson acoustique avec un rythme marrant… et des paroles très amères? C'est très différent du reste de l'album!
J. M.: Je pense que c'était juste une manière sympa de finir l'album. Normalement c'est là que l'on trouve « la grande ballade » de l'album, avec son côté un peu kitsch et pompeux. Nous ne voulions pas faire ça, nous voulions plutôt faire quelque chose comme « Dreamer » d'Ozzy Osbourne [sur l’album Down To Earth], où vous pouvez vous asseoir derrière un feu, faire un barbecue… ce genre de choses.
J. B.: Oui, nous voulions amener quelque chose qui rappelle une chanson de western.
J. M.: Et elle a été faite pendant la fête que nous avions organisée parce que l'enregistrement studio était en train de se terminer, nous allions partir le lendemain.
J. B.: J'ai la voix explosée parce que nous avions fait la fête la veille! C'était vraiment le dernier jour d'enregistrement. J'étais saoul et vraiment pas en bon état, c'est pour ça que je me disais: « oh non, je préfèrerais encore être mort que supporter ça, etc. » [les paroles de la chansons sont en effet grosso modo sur ce thème.] Comme nous avions l'idée de cette chanson « Six Feet Under » [soit « six pieds sous terre »… enterré mortibus si vous préférez]
J. M.: Il n'y a plus de mal de crâne là-dessous!
J. B.: Oui, c'est ça! Cette chanson n'est pas une ballade, ou une prière par peur de la mort, c'est vraiment le contraire. Un peu comme: Enfin, tu arrives à la fin de ta vie, tu es allongé là, personne ne peut plus te déranger, il fait chaud, c'est cosy, tu peux être heureux, t'amuser de toi-même, repenser au bon vieux temps, etc. C'est de ça dont il s'agit, un divertissement, et une ballade pompeuse n'est pas divertissante: les temps ont changé! J'adore des chansons comme « Don't Want To Miss A Thing » d'Aerosmith ou « Wind Of Change » de Scorpion, et à l'époque en effet elles étaient brillantes. Tout le monde les aimait, on pouvait les entendre à la radio ou à la télé, mais ça ne marcherait plus aussi bien aujourd'hui. Parce que les temps changent, et je pense que les gens aujourd'hui veulent entendre des chansons « easy, sleazy, smoothy, bluesy » [en gros: « bluesy, onctueuses, sleazy, tranquilles ».]
J. M.: Et puis c'est une manière sympa de terminer l'album, ça ne passerait pas aussi bien si c'était au milieu!

M.: Il y a aussi une chanson au titre merveilleux sur cet album: « Sex Is War » [soit: « le sexe c’est la guerre »], vraiment? Comment ça?
J. M.: Pour ça! [il me montre des cicatrices « point par point » sur son avant-bras… mouais!]
J. B.: Au sujet de cette chanson, je dis toujours qu'il faut comparer les deux choses: le sexe, et la guerre. A savoir que tu vises, tu tires, et tu cours!
M.: Bien sûr!
J. B.: Je tiens ça d'une chanson d'Aerosmith, je crois que c'est « Shut Up And Dance » [vérification faite c’est le cas, sauf que chez Aerosmith c’est « sex is like a gun », soit « comme un pistolet » (à bas les anglicismes types « revolver »)]. J'aime beaucoup faire cette chanson, et on pensait faire une chanson sur le sexe… à nouveau? Même si c'est d'une manière inconventionnelle, la comparaison de la guerre et du sexe… ça marche, c'est brillant.

M.: De manière générale, comment composez-vous une chanson?
J. B.: Nous écrivons des chansons partout. Ca peut être des idées de refrain, un riff de guitare, tu peux nous trouver dans les toilettes en train d'enregistrer sur un téléphone. C'est plutôt sympa d'ailleurs d'aller dans les toilettes pour enregistrer quelque chose! Dès qu'il y a suffisamment d'idées, nous réunissons tout ça dans notre « melting-pot », nous gardons les meilleures idées. Nous y réfléchissons et nous les développons avec notre producteur.
J. M.: Nous fonctionnons comme ça depuis… 6 ans, je crois.
M.: Et est-ce qu'il y a une personne en particulier qui compose, ou tout le monde s'y colle?
J. B.: Pour la musique c'est surtout notre producteur [dont je n’arrive pas à retrouver le nom] et toutes les paroles sont écrites par notre batteur [Andi Schnitzer], parce que c'est lui qui parle le mieux anglais de nous tous. Surtout, il a un côté assez poète: il pourra créer de belles métaphores, ce dont je suis totalement incapable. Je me contente de dire les choses au fur et à mesure que je les réalise. Je peux dire: « il y a une voiture en bas », Andi dirait… je ne sais pas, je ne peux pas le faire! En plus ses paroles ont toujours un côté ironique, nous adorons ça. Ca aussi ça fait partie de Kissin Dynamite, nous ne sommes pas un groupe sérieux-jusqu'à-la-mort. Notre porte est toujours grande ouverte à quelques blagues ici et là, et nous utilisons souvent l'ironie. Or Andi est brillant dans ce genre d'exercice: je lui ai complètement laissé cette partie du travail! Sur l'album précédent nous nous étions partagé l'écriture, j'avais fait certaines chansons et lui les autres, mais il n'était pas encore aussi bon qu'aujourd'hui à ce moment-là. Il a beaucoup développé son niveau d'écriture. Si bien qu'aujourd'hui je suis vraiment mauvais comparé à lui: je le laisse écrire! Et puis j'ai plus de temps comme ça.
J. M.: Il fait vraiment du bon travail.

M.: Est-ce que c'est moi ou… vous avez tendance à répéter le refrain (et parfois le pre-refrain) dans toutes les deuxièmes moitié de chanson sur cet album? N'avez-vous pas peur de lasser ceux qui écouteront l'album?
J. B.: Je ne pense pas, parce que cette musique doit être accrocheuse [« catchy » en vo]. Et répéter quelque chose permet de créer un dialogue, ça rend la chanson accrocheuse. Toujours apporter quelque chose de nouveau à une chanson, avoir 5, 6 ou 7 parties différentes, ça n'aide pas vraiment celui qui écoute à se souvenir du morceau, ou même à l'aimer à la première écoute!
J. M.: Il faut que ça dégage une impression de fête.
J. B.: Oui, exactement. Nous faisons du divertissement, nous ne sommes pas sérieux… Enfin, comprenons-nous bien: nous prenons la musique au sérieux, mais nous ne nous prenons pas au sérieux, c'est pour ça que nous faisons souvent de l'ironie. Nous ne faisons pas trop de parties différentes dans une chanson parce qu'elles sont plus accrocheuses comme ça: vous pouvez les apprécier dès la première écoute, inutile de se pencher dessus dix fois ou plus. Or c'est important pour nous que les gens aiment nos chansons dès la première écoute… parce que nous voulons qu'ils achètent l'album!

M.: On a aussi l'impression que la plupart de ces chansons ont été faites dans le but d'être jouées en concert?
J. B.: Oui, tu as raison, absolument. Nous sommes un « groupe à concerts », alors évidemment nous voulions faire des chansons qui passent bien en concert, comme « Sleaze Deluxe »: c'est simple, mais ça marche! N'importe qui en concert peut la reprendre en choeur dès que le refrain revient. C'est comme ça que l'on marche oui, d'ailleurs c'est un peu le concept derrière cet album.
J. M.: C'est ce qu'il y a de mieux avec ça [l’album ou la musique en général, au choix]:
J. M. et B. [en choeur]: Jouer en concert.

M.: En tant que jeune groupe qui a commencé -et- vécu son adolescence pendant l'essor d'Internet, et de « la musique (ou le piratage…) sur Internet »: quel est votre point de vue sur la musique, le téléchargement, Internet, et toute cette sorte de choses?
J. B.: Eh bien, heureusement nous appartenons à la scène metal, où ça n'est pas si terrible que ça. Les gens dans le metal veulent avoir un véritable CD en main.
J. M.: Ca a une valeur spéciale.
J. B.: Oui, ils ont une valeur spéciale entre les mains, pas des données qu'on oublie après deux semaines, quand on considère qu'on l'a écouté suffisamment. Ils aiment aussi avoir des petits plus spéciaux, c'est pour ça qu'on en propose cette malette à poker cette fois-ci [et pas avec 2 ou 3 jetons qui se battent en duel dans un tout petit truc: http://www.bravewords.com/news/180068 et lancez la vidéo]. Tu en as entendu parler?
M.: Non?
J. B.: Alors c'est une version limitée, à 666 exemplaires.
M.: Forcément!
J. B.: Il y a un cd dédicacé à l'intérieur, des jetons de poker, des cartes de poker américain, un tanga aussi pour le sexe.
J. M.: Utilisé avant!
M.: Ben voyons!
J. B.: Et voilà, les fans de metal adorent ça, ils veulent tenir quelque chose dans leurs mains. Pouvoir l'ouvrir et apprécier cet objet.
M.: [vers Jim] Je suppose que tu as grosso modo la même opinion?
J. M.: Oui, enfin je n'achète pas forcément beaucoup de disques physiques mais j'utilise beaucoup iTunes. Par contre s'il y a une boîte, une édition limité, je l'achète!

M.: Qu'est-ce qui est prévu à l'avenir viennent pour Kissin Dynamite?
J. B.: Devenir le plus gros groupe dans l'histoire du rock!
M.: Oui, mais ça c'est pour dans… longtemps, même si pour vous on peut espérer pas trop longtemps!
J. B.: Ah, tu veux parler de quelque chose qui puisse se réaliser! Alors, sérieusement: devenir un groupe international est l'objectif principal de Kissin Dynamite dans les années à venir. En Allemagne nous sommes plutôt connus maintenant [ils sont allemands], nous allons faire une tournée en tête d'affiche là-bas en avril-mai: nous avons une bonne base de fans là-bas. Mais dans le reste du monde, personne ne nous connaît, il faut faire monter le groupe. C'est pour ça que Money, Sex & Power sort dans plusieurs pays, et que nous sommes assis ici aujourd'hui pour cette interview, et que nous allons partout dans le monde ces jours-ci pour parler de l'album! Nous étions à Stockholm et à Londres ces derniers jours. Parce que ça aussi c'est très important pour un groupe de metal: tu ne peux pas vivre de ton groupe quand tu te limites à un seul pays, il faut passer à l'international. C'est ce que nous voulons et c'est ce que nous allons faire. Dans ce but, nous allons aussi faire une tournée européenne cet automne… avec un groupe dont je ne peux pas te parler immédiatement parce que ça n'est pas encore officiellement confirmé, mais ça va être énorme. Et nous passerons aussi en France! En fait nous irons partout en Europe, peut-être même au Japon et là ça deviendrait une tournée mondiale… nous verrons.

M.: Un dernier mot pour les lecteurs, ou quelque chose que voulez dire mais je ne l'ai pas demandé?
J. B.: Oui! Je veux jouer au Hellfest, s'il-vous-plaît! Alors à tous les fans de metal en France, s'il vous plaît, achetez notre nouveau CD Money, Sex & Power parce que nous avons besoin de vendre beaucoup d'albums pour que les promotteurs s'intéressent à nous! Et à ce moment-là nous pourrons aller au Hellfest!
J. M.: Et faire un p***** [censure powered] de concert!
J. B.: Exactement. Et n'oubliez pas aussi de nous donner vos « J'aime » sur Facebook: ça aussi c'est toujours important!

-Propos recueillis par Polochon en mars 2012.
Photo studio officielle + photos live piquées sur leur site officiel.
Chronique de Money, Sex & Power (Kissin Dynamite).-

Money, Sex & Power est déjà le troisième album des jeunes allemands, nés au début des années 90: oui, ce sont de petits gamins. A peine nés alors que les groupes de glam-metal/sleaze se mourraient, et pourtant ils ont décidé d'officier dans ce genre! Leurs albums précédents avaient plus de morceaux ou passages « heavy-metal », tout ce qu'ils en gardent sur Money, Sex & Power est un côté « oomphesque », aussi appelé hargneux-direct-dans-ta-face. Ca joue bien, le chanteur est très bon pour son âge, pas de note sur-aiguë pour vous tapper sur les nerfs: quand il fait une note c'est qu'il sait la faire, ça change dans un groupe de jeunes!

En soit, cet album a à peu près tout pour plaire: des riffs accrocheurs et efficaces (un peu kitschouilles parfois, mais je pense que ça fait partie de leur style, de ce qu'ils ont choisi de faire), de bons musiciens et une ambiance générale qui vous ferait sautiller un comateux. Mais, car je suis sure que vous sentiez venir le « mais » fatal, toutes les chansons sont construites suivant ce schéma, à peu près: une bonne intro, une bonne première moitié avec ce qu'il faut d'évolution etc., et la répétition du refrain + pre-refrain (et ses environs) dans la deuxième moitié, toute la deuxième moitié. D'où un côté assez répétitif qui gâche pas mal les choses, et c'est dommage: au lieu d'accrocher de bout en bout, on finit par lutter pour ne pas appuyer sur le bouton « suivante », tellement on a fini par comprendre de quoi ils parlent dans ce refrain à la noix… Une recherche d'efficacité peut-être, ou d'accroche facile en concert, parce qu'il est évident que tous ces titres ont avant tout été faits pour « balancer la sauce » sur scène… ou simplement mauvaise habitude germanique du « la musique de toute manière c'est surtout un bruit de fond pendant que l'on boit des coups avec les potes » (ahem). En tout cas ça gâche beaucoup le plaisir de l'écoute à la maison: dommage, il n'en fallait pas beaucoup plus pour faire de cet album un très bon album.

Site officiel: http://www.kissin-dynamite.de/
MySpace officiel: http://www.myspace.com/kissindynamiterocks

[07/10] Polochon

AFM Records – 2012
Tracklist (39:39) : 01. Money, Sex & Power 02. I Will Be King 03. Operation Supernova 04. Sex Is War 05. Club 27 06. Dinosaurs Are Still Alive 07. She's A Killer 08. Sleaze Deluxe 09. Ego-Shooter 10. Six Feet Under
Entretien avec Johannes Braun et Jim Müller.

Koritni – Lex Koritni (2012)

Entretien avec Lex Koritni (Koritni)

Koritni, c'est un peu l'exception qui confirme la règle. Parce que la France est censée être un pays où il ne fait pas bon être musicien, ou sinon il ne faut pas espérer en vivre. -Surtout- quand on fait autre chose que la sacro-sainte « pop française ». Mais voilà des australiens qui signent avec une maison de disques françaises… et tournent très régulièrement partout en France, vraiment partout. Enfin, il y a bien un infiltré-guitariste français parmi eux, certes. Leur troisième album sort ces jours-ci, avec quelques invités de marque, toujours le même hard-rock festif mais efficace: les critiques ont l'air d'être généralement positives et ça n'est pas pour rien! Il est donc temps de faire les présentations avec Lex, le chanteur/fondateur/leader/prêteur de nom du groupe…

 

MetalChroniques: Comme c'est la première fois que quelqu'un du webzine a une interview avec Koritni [le groupe], est-ce que tu peux te présenter ou présenter le groupe en quelques mots?
Lex Koritni: Eh bien nous sommes un groupe de hard-rock, nous venons d'Australie…
M.: …et un peu de France [ils sont tous australiens, sauf un des deux guitaristes, qui est français.]
L. K.: Et un peu de la France oui. A vrai dire, cette tournée est encore plus « issue de la France », parce que je vis en France maintenant. J'ai une maison à Jarnac, près de Cognac, et notre deuxième guitariste, Luke [Cuerden], ne pouvait pas être là pour cette tournée à cause d'un autre engagement [il tourne apparemment avec Shannon Noll, gagnant d’Australian Idol en 2003 me dit Wikipedia], donc nous avons demandé à Manu Livertout de nous rejoindre sur ces concerts. C'est un guitariste français, nous avons beaucoup de chance d'avoir trouvé quelqu'un d'aussi capable que lui. Eddy [Santacreu], qui est français, vit maintenant en Australie: nous avons échangé!
Quoi qu'il en soit: mes racines viennent du groupe Green Dollar Colour, nous avions sorti un album il y a longtemps… en 2004 ou 2005 je crois. Ce projet n'a pas duré très longtemps, nous avons fait un seul album pour lequel nous n'avons pas fait la moindre tournée. Et Koritni s'est développé à partir de là.

M.: Et pourquoi est-ce que le groupe a été baptisé à partir de -ton- nom?
L. K.: Parce que je suis le meilleur! Non, sérieusement: dans la tradition de groupes comme Van Hallen, Bon Jovi… je pense que c'était une progression naturelle? Parce qu'il y avait eu une petite couverture médiatique pour Green Dollar Colour, si bien que mon nom avait été cité ici et là. Et puis pour des raisons légales, quand Green Dollar Colour s'est séparé je ne pouvais plus utiliser ce nom, donc autant continuer avec quelque chose que légalement personne ne pourrait m'enlever… à savoir mon nom!

M.: Si je ne me trompe pas, sur votre premier album, une personne était chargée du mixage, sur le deuxième album, ils étaient deux… et sur le troisième ils sont trois? Est-ce que vous en prendrez quatre pour le quatrième album?
L. K.: Peut-être! Non, sérieusement, ça n'avait rien d'intentionnel, les choses ont juste tourné comme ça. Dan Leffler a mixé quelques chansons du deuxième album [Game Of Fools], et le résultat était très bon donc il n'était pas nécessaire de demander à Mike [Fraser, qui avait déjà mixé le premier album, et une partie du deuxième] de remixer. Pour le nouvel album nous avons voulu essayer Dean Maher, qui avait déjà travaillé sur Lady Luck comme assistant: Mike Fraser mixait et Dean était son assistant. Nous avons voulu voir ce qu'il ferait pour nous, parce qu'entre-temps il avait fait des mixages pour Nickelback, Bryan Adams… et des groupes plus heavy dont j'ai oublié le nom: nous nous sommes dit qu'il serait bien pour les chansons les plus heavy de l'album, et nous avions raison! Parce que mixer est quelque chose de très personnel, certaines chansons conviennent mieux à certains types: dans le fond nous avons juste confié les chansons appropriées aux personnes appropriées. Mon ami Dan Leffler a enregistré la batterie, il a aussi été chargé des mixages les plus compliqués, parce que je pouvais aller chez lui pendant qu'il travaillait, alors que les autres ont été envoyés à Vancouver… et je me vois mal prendre l'avion pour Vancouver juste pour une histoire de mixage!

M.: Vous avez également trois musiciens invités sur cet album, alors pourquoi s'embêter à inviter qui que ce soit, et pourquoi ces trois-là?
L. K.: J'ai toujours voulu avoir des invités, même sur les albums précédents, mais nous n'avions pas le temps. Les albums précédents ont été enregistrés en studio, et en général quand on travaille en studio on regarde son projet et on en déduit: « il me faut… deux mois en studio ». Et au final, il te faudra trois mois, c'est garanti. Parce que tu as réservé pour deux mois, très bien, mais tout à coup tu manques affreusement de temps, et tu dois demander plus de temps, plus de temps… plus d'argent, plus d'argent! Ca s'est passé comme ça pour Game Of Fools: nous avons passé beaucoup de temps en studio, et il n'était plus possible de faire quoi que ce soit avec des invités. Parce que quand tout le planning a été bouclé et qu'il ne reste plus que trois semaines, si l'invité n'est pas disponible dans ces trois semaines… tant pis, raté! C'est le premier problème. Pour ce nouvel album, j'ai installé un studio chez moi pour l'enregistrer. Grâce à ça, nous n'avons eu aucune limite de temps pour le faire, parce que ma maison est toujours ouverte! C'est donc beaucoup plus facile de travailler avec des invités comme ça.
Et pourquoi ces invités en particulier? Eh bien, il y a d'abord Rusty Brown, parce que nous le connaissons, c'est un copain qui joue dans Electric Mary [autre groupe australien]. Nous sommes amis avec le groupe, et c'est un type sympa, en plus il a une très bonne voix alors j'ai pensé que ça serait bien de l'avoir sur l'album. Pour Jeff Scott Soto c'est un peu la même chose, nous nous sommes rencontrés il y a 5 ou 6 ans. J'ai toujours été un de ses fans, il est une grande source d'inspiration pour moi, c'est un chanteur incroyable. Je lui ai simplement chanté la chanson et demandé s'il accepterait de chanter sur le disque, et il a accepté! Tout simplement. Je lui ai envoyé le titre, il l'a enregistré chez lui à L.A. [pour Los Angeles] et il me l'a renvoyé. Jeff Waters par contre je ne l'ai jamais rencontré, j'y suis simplement allé au culot. Mike Fraser m'avait donné son adresse email et je lui ai envoyé le titre, en disant: « j'adore Annihilator, King Of The Kill est un de mes albums préférés de tous les temps, j'adorerais que tu fasses un solo sur notre chanson. » Et nous avons eu la chance qu'il nous réponde: « Ouais, bien sûr mon pote, ça sera génial! » [dit en anglais, forcément, mais avec un Australien imitant l’accent américain en bonus] A l'avenir j'aimerais avoir encore plus d'invités sur nos albums. Ca n'est plus aussi habituel que ça a pu l'être, je ne sais pas pourquoi, mais j'aime vraiment participer à des collaborations, c'est toujours intéressant.

M.: C'est peut-être la même idée, mais vous jouez aussi très souvent des reprises en concert. Alors peut-être que ça fait juste partie de votre mentalité, rendre hommage etc.?
L. K.: Oui, nous faisons souvent des reprises parce que ça rend les choses intéressantes pour nous. Elles représentent quelque chose de nouveau pour nous, en tant que groupe, nous pouvons expérimenter avec, jouer avec. Nos propres chansons, nous les avons répétées, enregistrées… nous les connaissons! Alors qu'avec quelque chose de nouveau et de frais pour la tournée, nous pouvons faire des concert géniaux.

M.: Si je me souviens bien, tu as composé la majorité de Lady Luck, puis d'autres membres du groupe ont participé à la composition de Game Of Fools: comment ça s'est passé cette fois?
L. K.: Sur Lady Luck c'était déjà 50-50. Luke et moi avions fait 4 chansons peut-être, j'ai fait 3 chansons avec Eddy, et pour les 5 autres c'était moi tout seul. Sur Game Of Fools il y en a 3 de Luke et moi, 4 d'Eddy et moi et 3 de moi uniquement. Pour Welcome To The Crossroads, il y a 4 chansons que j'ai écrit seul, 5 ou 6 d'Eddy et moi, et une de Luke.
M.: Justement, vous participez au moins à la composition de la grande majorité des chansons: est-ce que ça n'est pas compliqué parfois, maintenant que vous avez changé de pays, et même échangé avec Eddy?
L. K.: Non, parce que quand j'écris avec Eddy, ou n'importe qui d'autre, nous ne nous asseyons jamais ensemble à essayer quelques trucs puis écrire. Ce système ne marche pas avec moi, à chaque fois que j'ai essayé de faire ça avec quelqu'un, ça ne ressemble à rien d'autre: ça ressemble à des types qui se sont assis et essaient des trucs ensemble. Ca peut aller, mais ça n'a rien d'exceptionnel. Je préfère prendre mon temps, y réfléchir, rester patient, laisser les choses évoluer comme elles le devraient. Eddy aussi est comme ça. En général quand il travaille sur une chanson, il me l'envoie, j'en fais quelque chose que je lui renvoie, etc. Et de nos jours, avec Internet, vous pouvez vivre dans deux pays différents et avoir l'impression que vous êtes voisins. Il y a Skype, les limites d'envoi et de réception [« upload » et « download » en anglais, mais les anglicismes me donnent de l’urticaire] sont tellement élevées que je peux lui envoyer un giga de fichiers musicaux et il les récupère en cinq minutes, pendant que je lui explique sur Skype que tel titre est comme ça, tel autre comme ça. Il n'y a plus réellement de barrière par rapport aux frontières entre les pays aujourd'hui.

M.: Qu'est-ce que vous avez voulu faire avec « Now A Word From Our Sponsors » [chanson de Welcome To The Crossroads, littéralement « et maintenant un mot de nos sponsors »]? Un délire pour inspirer des questions à des rédacteurs peu inspirés?
L. K.: En fait c'est marrant que tu parles de ça, parce que tu es la première personne aujourd'hui à le mentionner! A la base, c'est juste l'introduction à « TV's Just A Medium », qui décrit à quelque point la télé est une machine débile et stupide, qui anesthésie le cerveau en médusant les gens. C'est la même chanson en fait, en un sens, nous les avons séparées en deux pistes pour que quand vous allumez votre [balladeur numérique] vous puissiez passer les 36 premières secondes: c'est marrant à entendre une fois, mais pas sans arrêt! Ce sont des publicités télé, sérieuses, que j'ai inventé, pour prouver à quel point la télévision est stupide.

M.: Comment décririez-vous l'évolution entre Game Of Fools et Welcome To The Crossroads?
L. K.: Je dirais -la patience-. Il y a beaucoup plus de travail sur le nouvel album que sur le précédent. Comme je l'ai dit, nous avons enregistré le précédent en studio, et quand j'ai commencé à le produire j'avais un rêve comme ça [grand mouvement des bras]. J'avais des idées en tête et je voulais qu'elles soient retranscrites sur l'album. Mais quand l'horloge a commencé à tourner, le rêve a commencer à devenir de plus en plus petit. C'est là que l'on réalise que tous les rêves doivent être laissés à la porte et il ne reste que les os du squelette. Le temps que vous avez ne vous permet pas d'en faire plus. Et pourtant c'était un squelette plutôt cher!
Donc ce nouvel album est beaucoup plus satisfaisant pour moi, j'ai pu beaucoup plus m'impliquer dans cet album… parce que nous avions le temps! J'ai pu le faire comme je le voulais, plutôt que le produire faute de mieux.
M.: Là tu me décris une évolution dans votre manière de travailler, mais musicalement est-ce qu'il y a une évolution selon toi?
L. K.: Je ne suis pas sûr? Je ne suis pas dans la position la plus objective pour en parler. Je ne pense pas écrire des chansons de manière différente que ce que j'avais l'habitude de faire après tout, et pourtant quand je réécoute les chansons de Lady Luck et que je les compare au dernier album… il y a une grosse différence! Disons que dans mon esprit, les choses n'ont pas changé, il n'y a pas de différence. Mais quand de manière évidente, quand on compare, il y a une grande différence. La seule réponse que je puisse donner c'est l'expérience, la maturité… je ne sais pas, le contrôle? C'est le premier album où j'ai fait les choses exactement comme je veux les faire, et je pense que ça marche mieux?
M.: Est-ce que tu serais d'accord si je disais que, d'une certaine manière, Welcome To The Crossroads est plus « bluesy »?
L. K.: Oui, je pense. C'était intentionnel sur certains titres, parce que nous voulions des « parfums » différents sur cet album. Maintenant il y a des groupes comme Airbourne, de nouveaux groupes qui font dans le hard-rock, et je voulais faire quelque chose qui soit un peu éloigné de tout ça. Evidemment nous sonnons toujours comme les fans peuvent s'y attendre, si vous m'écoutez chanter une chanson ma voix ne va pas ressembler à celle de Céline Dion. C'est une des choses bien avec ma voix d'ailleurs, ma manière de chanter: je peux changer de style. Nous pouvons faire une chanson un peu plus « ballade », et il y aura toujours ce côté agressif. Nous avons acquis une certaine liberté de mouvement en fait, je pense, par rapport à beaucoup d'autres groupes. Alors pourquoi pas l'explorer, pourquoi pas l'utiliser? Ca nous permet de faire quelque chose qui reste intéressant pour nous.

M.: Vous jouez souvent dans… les endroits les plus improbables pour un groupe comme le votre: est-ce que le public n'est pas un peu surpris parfois?
L. K.: Non, je pense que ça vient plutôt comme une bouffée d'air frais bienvenue, en général? Je ne sais pas pour toi, mais quand je vais dans des festivals metal et qu'il n'y a rien d'autre que ce constant « BAM BAM BAM BAM » [puis bruit d’avion en train de décoller avec la bouche, très fort… dans les deux sens du terme] qui sort des enceintes pendant des heures entières… On a l'impression d'être dans le coma, ça finit vraiment par créer un malaise. Et tout à coup, un groupe de rock'n'roll arrive sur scène, et on entend des « tac-tac-boum tac-tac-tchin », ça vous fait un peu: « Ah! Ah! Attendez! C'est sympa! » Je pense que c'est un des trucs sympa quand des groupes de rock'n'roll ou de hard-rock à des festivals de heavy. Au final, ces groupes apportent quelque chose d'un peu plus organique, de rafraîchissant. Un peu comme le verre d'eau après un shot énorme.
M.: Oui, je vois ce que tu veux dire, mais là tu parles de festival [où justement j’estime qu’ils ont tout à fait leur place], mais je parlais plutôt des petites villes [/trous paumés]. Par exemple vous allez commencer votre tournée par Fontenay-le-Comte, où j'ai vécu 4 ans, et même si c'est la ville où j'ai le plus évolué musicalement parlant… c'est bien la dernière ville où je m'attendais à voir jouer un groupe de ce style!
L. K.: Oui, je vois… mais je ne sais pas, nous allons là où nous sommes engagés? S'il y a l'argent pour poser nos amplis, nous poser à l'hôtel, alors on ira certainement! Parfois c'est dans les petites villes que l'on retrouve le plus de monde, et les meilleurs publics. Il nous est déjà arriver de débarquer dans une ville et d'avoir l'impression d'être en plein western: personne autour, l'herbe sauvage qui pousse à travers la route etc. On se demandait vraiment ce que l'on faisait là! C'était vraiment le trou-du-cul du monde. Et on arrive sur scène, dans une petite salle pourrie, avec un bar qui n'a qu'une seule bière pression… et le soir, à 11h30, 400 ou 500 personnes débarquent: mais d'où est-ce qu'elles viennent? Tu regardes dehors, et il n'y a pas de voiture! Comme si elles étaient apparues du néant! Parfois ça arrive, et c'est génial. C'est ce qu'il y a de mystique dans les tournées.

M.: Mais même en général, les concerts semblent importants pour vous, dans la manière avec laquelle vous considérez la musique?
L. K.: Bien sûr. Je pense que tous les groupes de nos jours devraient prendre les concerts au sérieux. Les tournées, le moment où tu es sur scène. Puisque plus personne ne gagne autant qu'avant avec les ventes de disques, il faut regarder du côté de ce que l'on donne sur scène pour récupérer de l'argent. Traditionnellement, beaucoup d'argent était mis dans les enregistrement, les albums: beaucoup d'argent était dépensé pour qu'un album sonne bien. Mais maintenant, les artistes doivent faire attention à être dans les bonnes conditions pour se donner sur scène. Je ne pense pas que les groupes puissent encore se permettre de s'enfiler drogues et bières à longueur de journée: peu importe que les gens trouvent ça très rock'n'roll, ou à quel point l'artiste se sent bien grâce à ça, tu ne peux pas te donner au mieux sur scène si tu es défoncé, c'est un fait! Et réaliser une performance musicale, spécialement pour un chanteur ou un batteur, c'est comme un sport: tu ne peux pas courir un 1000 mètres ou un 800 mètres si tu es énervé! Tu peux trébucher et te rattraper, mais il y a plus de chances pour que tu te fasses mal et que tu ne sois plus capable de courir le soir suivant. Je pense qu'il est important que les groupes le réalisent. Par exemple, à l'époque, ça n'était pas important si Mötley Crüe ratait un concert, de toute manière ils vendaient 8 millions d'albums. Mais ça n'est plus le cas: si tu ne peux pas faire un concert correct, tu vas énerver les gens dans le public, et ils ne reviendront plus te voir. Donc oui, je pense que le concert est quelque chose d'important pour les groupes actuels.

M.: Il y a quelques temps, tu as dit que « Stab In The Back » [chanson de Game Of Fools] est, entre autres, une chanson au sujet d'un ancien ami devenu accroc aux drogues et que tu as rayé de ta vie depuis. Tu avais fini en disant: « Les drogués, c'est nul. » Pourtant, on te voit régulièrement avec une bière, et tu ne caches pas ton affection pour l'alcool?
L. K.: Oh oui, j'adore boire! Mais je ne suis pas un alcoolique, même si je plaisante ou mens souvent en disant que c'est le cas. Mais je ne le suis définitivement pas. D'un autre côté, évidemment, j'adore l'alcool. Ca fait partie de notre culture, je n'ai pas grandi en Turquie mais en Australie après tout. Une partie de la culture australienne est de boire, regarder du sport et s'amuser! Malgré tout, je ne vais pas boire au point où j'irai voler de l'argent à mon meilleur ami. Je ne bois pas au point où je vais entrer par effraction chez quelqu'un ou poignarder un enfant juste pour récupérer son sac à dos. Je pense qu'il y a un lien très ténu entre l'alcool et l'héroïne, mais ça reste deux choses très différentes. Je pense que tout est bon tant que l'on reste dans la modération, et pour moi l'alcool est quelque chose de relaxant: on en boit avec des amis, ça va définitivement bien avec la nourriture…
M.: Oh, pas tous les alcools, c'est surtout le vin!
L. K.: Oui, mais si c'est du vin, tout ira bien! S'il y a bien une chose que j'ai apprise en France, c'est que… s'il y a bien une chose que l'immigration en France va me demander, c'est:
« Avec du rumsteak, vous prenez du vin de quelle couleur? » [avec un poil d’accent français dans son anglais]
– « Euh, quel vin… »
– « Sortez de ce pays! »
M.: D'ailleurs, est-ce que ça fait partie des raisons pour lesquelles tu as emménagé près de Cognac? [on mange et on boit trop bien dans cette région… j’ai faim rien qu’en y pensant! Et puis Cognac… inutile de vous dire quel alcool est la spécialité locale.]
L. K.: Oui! Pour moi, la Charente est ma région préférée pour la nourriture et l'alcool. Entre le confit de canard, le foie gras… [en fait tout ça c’est périgourdin, le premier qui me dit que c’est charentais je lui en colle trois avec bonus aller-retour, mais Cognac est dans le Périgord historique, c’est juste que c’est rattaché à la Charente aujourd’hui, administrativement… et puis il est australien, alors pardonnons-lui!]

M.: Dans une des chansons du dernier album, « Better Off Dead », on a l'impression que tu imagines être traqué [/suivi à la trace, « stalk » en anglais] par une fille sur Internet… et le moins que l'on puisse dire, c'est que tu réagis plutôt négativement envers elle!
L. K.: Oui, au fil des ans j'ai eu quelques expériences intéressantes avec des gens sur Internet, qui me traquaient comme ça. Et même en dehors du net! C'est quelque chose qui n'est pas agréable, pour moi ou pour qui que ce soit d'autre. C'est une chanson vraiment directe, évidente. Dire à quelqu'un « you're better off dead » [dans le refrain de la chanson, littéralement: « tu serais mieux crevée/morte », une adaptation possible étant « mais vas crever! »] est… plutôt direct! Mais ça n'est pas vraiment que c'était un problème pour moi, mais hélas beaucoup de tout ça a rejailli sur ma femme aussi. Quand ma vie publique a des conséquences sur quelqu'un qui n'a aucun choix dans toutes ces histoires, ça me met en colère. Mais je pense que tu as très bien compris le sens de cette chanson.
M.: Ah ça, entre les paroles et l'atmosphère, je crois que c'est facile à comprendre!
L. K.: C'est vrai, c'est vrai.

M.: Tu trouveras peut-être que c'est une question stupide, mais tu sembles être un grand fan d'Axl Rose…
L. K.: Comment ne pas l'être? [Ah, moi je sais très bien ça!] Je trouve ce type fantastique, et même aujourd'hui! Quand j'ai vu Guns'n'Roses il y a quelques années en Australie, c'était… électrisant. Un des meilleurs concerts que j'ai jamais vu. Donc oui, je trouve que c'est quelqu'un d'incroyable, tout comme je trouve que Chinese Democracy est fabuleux. Les gens se plaignent que ça ne soit pas Guns'n'Roses, et… oui, ça n'est pas Guns'n'Roses en un sens. De la même manière, si tu écoutes The Razor's Edge d'AC/DC et leur premier album High Voltage, ça n'est pas la même chose non plus! Réveillez-vous les gars, l'album Chinese Democracy est sorti après 20 ans, il sera différent, c'est évident! Prenez-le pour ce qu'il est, et si vous ne l'aimez pas vous pouvez le jeter, ou mieux: comme sous-verre!

M.: Un dernier mot pour nos lecteurs, ou quelque chose que tu veux dire mais que je n'ai pas demandé?
L. K.: Je ne sais pas, venez voir un concert de Koritni, ou venez voir un concert de rock. C'est une des raisons pour lesquelles j'aime venir en France, vous avez un public qui aime la musique [sous-entendu (en anglais): et s’amuse dessus], vous aimez sortir.
M.: C'est plutôt rare d'entendre dire ça sur les français!
L. K.: Mais c'est vrai, réellement! Je discutais avec Joel d'Airbourne juste avant de quitter l'Australie, et il disait la même chose, qu'ils reçoivent le meilleur accueil en France par rapport aux autres pays.
M.: Ma foi, peut-être parce que c'est parce que tu as l'habitude de tourner un peu partout en France, donc tu connais mieux le public français que beaucoup d'autres.
L. K.: Oui, c'est vrai.

-Propos recueillis par Polochon en mars 2012.
Photos piquées sur le site officiel.
Chronique de Welcome To The Crossroads (Koritni).-