Mass Hysteria (interview de Mouss Kelai – chant – à Paris, mars 2013)
Posted by OshyryaAvr 1
Quelques jours avant le concert événement de MASS HYSTERIA à l'Olympia pour fêter dignement les vingt ans du groupe, nous avons eu l'occasion de discuter de ces deux dernières décennies avec Mouss Kelai, le leader/chanteur de la formation française:
01. Vingt ans de carrière et un concert à l’Olympia. Est-ce une consécration pour vous ?
Oui je pense que l’on peut parler après 20 ans de carrière et un Olympia à venir de consécration. Sans se la jouer ni paraître trop pompeux, quand on fait un bilan nous n’avons pas à rougir et cet anniversaire se doit d’être fêté dignement. Vingt ans de carrière pour un groupe comme MASS HYSTERIA qui ne passe pas sur les gros médias, ni à la TV, ni à la radio. Et c’est une honte qu’un groupe comme nous n’ai pas sa place sur les TV et radios publiques. Je suis comme tout le monde je paye ma redevance TV, je paye mes impôts. Beaucoup de styles sont représentés, le classique, le jazz, le free-jazz, même le Rn’B et ils ont une case dans les Victoires de la Musique ce que le métal et le vrai rock en général n’ont pas. Mais bref, c’est pas grave… Donc vingt ans de carrière sans ce support décisif de nos jours, sans les gros médias et on est encore là. Et on va faire l’Olympia complet à 2200 personnes. J’ai appris il y a 1 mois je crois que Christophe Willem (Nouvelle Star) est passé récemment et a fait 1300 payants… Lui il passe à la TV dix fois par semaine et passe à la radio 150 fois par jour… J’en conclue que les gens sont intelligents, j’ai confiance dans le public français.
Nous avons sept albums sous le bras et le soutien des webzines, des fanzines, des radios libres et de quelques magazines et grâce à tout cela nous restons dans le paysage. Symboliquement ce concert nous plait pour le pas laisser l’exclusivité de l’Olympia à Sylvie Vartan ou Charles Aznavour. Je respecte mais je n’écoute pas. Pour moi cette salle c’est plus Jimmy Hendrix, Nine Inch Nails et d’autres groupes que j’ai parfois pu voir là-bas. Dans l’imaginaire des gens et dans la mémoire collective française cela représente un accomplissement. C’est le cas pour mes parents par exemple. Ils m’ont toujours soutenu et si j’avais fait boulanger c’était pareil mais l’Olympia cela fait quelque chose, c’est mythique.
02. Quelle ambition et quels espoirs aviez-vous en 1993 en lançant l’aventure MASS HYSTERIA ?
Notre premier objectif c’était d’avoir un album dans les bacs et nous n’osions imaginer être encore dans le paysage vingt ans plus tard. Nous voulions avoir un disque et ensuite on se disait avec ce disque nous pourrions avoir une tournée derrière. Donc on a débuté par des maquettes. Nous avions tous déjà un peu d’expérience chacun de notre côté mais rien de très sérieux, le type de groupes que tu fais avec tes potes le samedi et le dimanche pour t’amuser. La semaine tu bosses donc tu fais cela sur ton temps libre. Mais cela a commencé à prendre forme et comme nous avions tous un peu de bouteille cela a fonctionné assez rapidement. L'alchimie a fonctionné assez vite. Avec ces maquettes des gens, des maisons de disque se sont intéressé à nous et nous avons donc commencé à rêver. Mais avec ce premier contrat on était heureux, on s’est dit ça y est, c’est bon c’est signé on aura notre disque. Un deuxième album était prévu via une option. Sous-entendu si les ventes sont bonnes, on enchaine sinon merci beaucoup et au revoir. Et rien n’était écrit dans les étoiles, on a pris les choses petit à petit, un disque puis une tournée, un second disque…
Pas de plan de carrière, on en rêvait pas que ce cela et nous n’étions pas prêt à tout pour cela. On ne trainait pas dans les maisons de disque, pas de copinage avec les gens influents, nous ne connaissions personne, on ne savait pas ou envoyer notre démo, des bras cassés, des branleurs-rockers. Même si tout s’arrêtait le lendemain, nous avions un cd à nous, un truc à montrer à ses enfants ! On aura fait partie de la scène française avec notre petite contribution mais c’était fragile et nous ne savions ou cela pouvait nous emmener.
03. Pourrais-tu-nous résumer chacun de vos albums par un mot et nous expliquer ce mot ?
1997 : Le Bien-être et la Paix
« fraîcheur »
C’était la période de l’insouciance pour nous. On a fait cet album sans réfléchir, on travaillait, on répétait mais tu donnes sans trop faire attention au fond et à la forme. C’est pas ton métier donc tu mets tout sur la table, sans calcul. On était vierge de référence, pas de passé ni d’historique. On était jeunes. C’est très pur.
1999 : Contraddiction
« professionnel »
Tu comprends que c’est un métier, tu commences à réfléchir, tu enchaines avec un deuxième album et une tournée. Que tu le veuilles ou non cela génère de la pression, car tu fais de la promo des interviews… Mais tu te la caches cette pression, tu te dis, je dois faire comme le premier mais ce n’est pas possible, la fraîcheur et l’insouciance se sont envolées. On avait l’expérience du premier, des tensions légitimes avec la maison de disque étaient apparues, tu subis des contraintes d’un contrat.
2001 : De cercle en cercle
« spatial »
C’est l’album spatial pour moi. C’est très bizarre pour moi, en plus la pochette représente un cosmonaute. Je crois que l’on a fait cet album en essayant de se détacher de tout ce que l’on a fait avant. On ne voulait pas être catalogué et il fallait que cela n’ait rien à voir avec Contraddiction, sans trop savoir comment. Donc un truc « spatial », on était un peu perdu dans l’espace. Les contraintes, plaire aux gens, quelles sont les attentes, on réfléchit trop et on se prend la tête. Un album entre deux lunes.
2005 : Mass Hysteria
« noir »
On a pas de mis de nom parce que l’on avait pas trouvé de nom adapté. Pas non plus de pochette car aucune proposition ne nous avait plus et nous sommes très méticuleux. L’album noir car tout nous saoulait. Après de grosses tournées, trois albums chez Sony, un saut vers l’inconnu. On quitte Sony pour Wagram, à l’époque, le plus gros label indépendant européen, on va dire. Et on a lâché prise. Pas de pochette, pas de nom, du dépit. Il fallait que l’on crache ce qui nous restait d’incompréhensions musicale, qu’est-ce que c’est ce métier, pourquoi on le fait… C’est un album que l’on aime pas de tout, entre guillemets. Tout ce que l’on a mis sur c’est album c’est ce que l’on ne verra plus jamais chez MASS HYSTERIA, c’est pas le pire, pas le meilleur c’est à part.
Cela ne reste que la musique. On était détaché de tout, une page se tournait, on savait pas de quoi sera fait notre avenir. Manque de motivation… Cela aurait pu être le dernier opus de MASS, on a touché le fond. Un album nécessaire à posteriori. Mais paradoxalement l’enregistrement qui s’est déroulé dans Manoir près de Dax, région de l’Armagnac, a été mortel : cuistot, bref la totale…
2007 : Une somme de détails
« renouveau »
La fraîcheur, rien qu’au niveau de la pochette cette belle femme, seins nus, une espèce d’ange, cette couleur bleu. Yann (Heurtaux) avait retrouvé la guitare et des riffs de malade… Pour le précédent c’était notre ancien guitariste, le mec d’Aaron (Olivier Coursier), qui avait beaucoup composé pour un résultat plus pop rock que métal rock. Là, Yann reprend les choses en main et on amalgame tout ce que nous avons vécu, ce que nous sommes. On avait la flamme, le feu sacré des riffs taillés pour la scène.
2009 : Failles
« introspection »
Sans tomber dans le nihilisme ou le no-future, c’était un constat. La société a vécu le début de la crise. Autour de nous beaucoup de choses commençaient à se déliter et nous nous allions bien sans être encore impacté. Cela a représenté beaucoup de travail. La crise du disque était là et on a vu pleins de groupes mettre la clé sous la porte. C’était devenu trop difficile de faire du rock en France à cause du téléchargement. Certains groupes vendaient encore 10 000 albums et avec cela tu pouvais vivre, faire une tournée et avoir un petit job à côté. Tu jonglais un peu mais tu pouvais avoir une vie rock n’roll. Nous jusqu’à l’album noir on vendait entre 25 et 40 000 exemplaires. Notre plus gros carton c’est Contraddiction et on doit être à 60 000. Aujourd’hui, nous serions disque d’or.
Failles c’est la triste réalité qu’il faut surmonter. On a évité le naufrage pour MASS HYSTERIA. L’album rend compte de cela et se projette dans l’avenir. Il faut voir la pochette avec le visage de ce vieil homme. Ce sera peut-être nous dans vingt ans… Nous n’étions à l’abri de rien. Et si c’était le dernier album ?
2012 : L'Armée des ombres
« le réveil »
L’album montre notre société, sachez dans quoi vous vivez, informez-vous ! Il ne faut pas être témoin de la catastrophe sociale mais qu’est-ce que l’on fait concrètement. L’armée des ombres c’est nous tous, les citoyens. Mais il faut faire des efforts pour ne pas être un mouton et suivre un chemin tracé par les autres. On voit tous des clochards dans la rue, il y a en de plus en plus, paupérisation de la société. Et pas qu’en France, aux USA aussi, les inégalités sont abyssales. Prenez conscience du pays dans lequel nous vivons : il est magnifique pour les paysages, la gastronomie. Le génie français n’est plus mise en avant. Nous sommes bernés par cette classe politique, tous les mêmes. Gauche, droite c’est une vaste fumisterie… Nous sommes 99% contre 1 %.
04. Quels sont tes espoirs et tes attentes pour MASS HYSTERIA ? 20 ans de plus ?
Je suis réaliste et j’ai quitté le fantasme et le rêve que j’avais à 24 ans quand tout a commencé. Avant nous vivions tous de la musique mais désormais depuis 4-5 ans, nous avons tous un boulot à côté à cause du téléchargement illégal et la crise. Cela nous rend humbles et naturels. Nous sommes des artistes bourgeois, nous sommes tous des locataires, des rockers, nous vivons notre passion. C’est pas grave, nous avons des compensations comme le bruit de la foule avant de monter sur scène, cette adrénaline ne s’achète pas. Et pour le vivre encore, il faut que nous bossions à côté.
Il n’y a que très peu de choses qui me ferait arrêter MASS HYSTERIA. Si l’économie de la musique ne nous permettait plis de tournée, je pense que nous continuerions à nous amuser à sortir des albums. Pas de vrai tournée, à la BERURIER NOIR pour faire une comparaison. Respect. Pour garder nos intégrité, nous ferions notre truc de notre côté, même sans maison de disque. On continuera à exister. Moi personnellement, j’arrêterai si tu me censures, si je ne peux plus dire ce que je pense. Et Dieu sait que dans MASS HYSTERIA ils ne sont toujours d’accord avec ce que je dis, mais il le respecte. Ils n’ont pas poussé leur réflexion politique, leurs connaissances assez loin pour ne pas voir l’évidence. Il faut avoir la substance. Et j’étais berné par le politiquement correct des lobbys. Tout cela c’est pensé, par exemple le 11 septembre et cette vaste mascarade. J’y crois pas 2 secondes ; c’est un inside job. Mais je suis pour le débat, la contradiction. Je suis sûr de ce que j’avance, prouvez-moi le contraire !
Et enfin "Le Quizz De Metal Chroniques Quizz" pour terminer cette interview:
1. Quelle est la musique à prendre sur une ile déserte ?
Une symphonie de Mozart, un titre classique. Beaucoup de variations, un truc long pour ne pas m’ennuyer et que je ne connais pas. J’aurais le temps d’essayer de comprendre…
2. Premier album acheté ?
THE CURE Seventeen Seconds (1980). Le déclic rock est venu par les BAD BRAINS et le titre « Positive Mental Attitude ». Cela m’a retourné le cerveau.
3. Dernier album acheté ?
Le dernier HATEBREED (The Divinity Of Purpose)
4. Quel son ou bruit aimes-tu ?
Le joyeux bordel chez moi avec mes enfants.
5. Quel son ou bruit détestes-tu ?
La circulation dans Paris.
Tous nos remerciements à Sabrina COHEN-AIELLO (Verycords / Veryshow)
Chronique de l'album ici
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