Shane Embury (Napalm Death) et Kevin Sharp (ex Brutal Truth) sont comme deux larrons en foire : ils sortent encore un album ensemble. Ces amis de longue date, vieux tauliers de la musique extrême, sont quasiment inséparables. A un tel point que l’on soupçonne Venomous Concept de n’être qu’une excuse pour que les deux compères passent un peu de temps ensemble ; en plus de rameuter de vieux copains (Dan Lilker, Danny Herrera, John Cooke) pour faire la fête. Bref, Venomous Concept nous offre son quatrième effort : Politics versus the erection.
Ici, nous n’avons pas affaire à un diesel chevrotant mais plutôt à une 103 SP avec un pot ninja trafiqué à la nitroglycérine. Venomous Concept est remonté comme une pendule et enchaîne les pains comme jamais. « Simian fly » annonce la couleur : Politics versus the erection est sec, vif, sans gras. Un uppercut de trente-trois minutes et quarante-trois secondes. Une glorification du hardcore/punk. Un hommage permanent à Poison Idea dont le groupe se réclame depuis toujours. Contrairement à son, quand même très bon, prédécesseur, les morceaux sont plus structurés (« Promise »), plus aboutis, plus efficaces. Si le chant de Sharp se fait plus nuancé, il prouve une fois de plus que l’ex Brutal Truth reste l’un des meilleurs du genre. L’orchestre, quant à lui, fait le job avec l’assurance de ceux qui savent. On navigue donc entre urgence ultra punk (« Dementia degeneration »), réminiscences à la Napalm Death (« Carrion ») et une efficacité de haute volée à vous péter les dents (« Broken teeth »).
Venomous Concept réussit encore une fois son coup. En plus de nous proposer une pochette hilarante, mais tellement d’actualité, le quatuor nous livre avec Politics versus the erection l’album extrême de l’année. Celui qui nous enthousiasme. Celui vers lequel on reviendra régulièrement. Un bonheur de chaque instant.
Mercyless n’est pas né de la dernière pluie. Connu pour avoir sorti le meilleur premier album de death français (Abject offerings), le groupe de Max Otero partait sur de bonnes bases. État de grâce prolongé le temps d’un Coloured funeral, suivi de deux albums malheureusement en deçà des espérances. Après un silence radio de onze ans, Otero reprend la route, resserre les boulons et accouche de deux opus renouant avec la belle époque. Et en 2020, année de la covid-19, les death-metalleux sortent ce bien nommé The mother of all plagues.
Si Unholy black splendor et Pathetic divinity rassuraient, The mother of all plagues ne fait qu’enfoncer un peu plus le clou. Mercyless est là pour régner ! Après l’intro d’ambiance « Infection », le quartet passe aux choses sérieuses. « Rival the nazarene » s’impose d’emblée comme un classique : incandescent et rageux. La suite est du même acabit. « Banished from heaven » et « Bring me his head » déboulent à toute vitesse et laissent bouche bée. Les riffs secouent, les refrains se greffent dans la tête avec une préférence pour le dantesque « All souls are mine ».
Ces onze titres imposent un constat clair et net : les années passent et n’ont aucune prise sur Mercyless. Le groupe ne renie en rien la haine et la violence de ses débuts. Il offre une proposition musicale qui se solidifie au fil des ans. De fait, The mother of all plagues est un pur album de death-metal qui balaye une grande partie de la concurrence. Preuve irréfutable que Mercyless est, si vous ne le saviez pas encore, un géant du genre.
01. Infection 02. Rival of the Nazarene 03. Banished from Heaven 04. Bring Me His Head 05. Contagion 06. Laqueum Diaboli 07. Descending to Conquer 08. Inherit the Kingdom of Horus 09. The Mother of All Plagues 10. All Souls Are Mine 11. Litany of Supplication
FM n’a sans doute plus rien à prouver : après 30 ans de carrière, Steve Overland et les siens arpentent les sentiers du rock mélodique avec une classe et une maitrise indéniables. En outre, le groupe a su avec intelligence saisir un certain « air du temps » pour éviter de sombrer dans la ringardise. Faire de l’AOR qui ne paraisse pas trop datée sans pour autant sombrer dans la surenchère du « rentre-dedans » par une modernisation outrée, ce n’est pas si simple. De telle sorte que FM reste tout à fait crédible et a réussi à enchainer depuis sa reformation les bons albums comme par exemple avec le diptyque Rockville I et II.
Parlons franchement : Synchronized s’inscrit grosso modo dans la même optique. Rien de nouveau sous le soleil des Britanniques puisque ce Synchronized aurait tout à fait pu prendre la place de Heroes and Villains par exemple. Les mélodies sont toujours aussi chaleureuses et l’élégance naturelle de Steve Overland fait que l’on évite toujours le racoleur. Ainsi un « Broken » ou un « Best Of Times » auraient pu être pénibles de mièvrerie mais ce n’est pas le cas ; tout juste reprochera-t-on des claviers quelque peu datés.
Et le titre éponyme de l’album permet de ressusciter avec bonheur l’inspiration de Tough It Out : un rock hard qui sait se faire parfaitement fédérateur. « Superstar » sait lui emprunter une voie plus mélancolique pour atteindre son but mais reste du même standard de qualité notamment par une construction à tiroir à laquelle FM ne vous avait pas franchement habitués jusqu’alors. À vrai dire, la première entame du disque est de très bonne tenue.
La seconde partie du disque ne démérite pas mais on perçoit une certaine baisse de régime : « Pray » malgré ses bonnes intentions méritait sans doute un refrain plus inspiré et « Hell of High Water » apparait comme trop convenu. Plus généralement, on peut constater certaines limites dans le jeu de Jim Kirkpatrick qui manque de folie et de vélocité et ce alors que les claviers restent assez minimalistes. « Angels Cried » est une ballade que n’aurait pas désavouée le dernier Michael Bolton : c’est dire. De la sorte que la fin du disque donne quelque peu l’impression d’un groupe ne quittant pas trop sa zone de confort. Certes, la soixantaine atteinte, on peut difficilement se renouveler, mais l’impression de convenue est un peu trop présente. Peut-être le groupe devrait-il espacer un peu plus ses productions ? FM avait trop souvent atteint l’excellence pour que l’on soit totalement satisfait.
Baptiste (7/10)
Frontiers / 2020
Tracklist : 1. Synchronized 2. Superstar 3. Best of Times 4. Ghost of You and I 5. Broken 6. Change For The Better 7. End Of Days 8. Pray 9. Walk Through Fire 10. Hell Or High Water 11. Angels Cried 12. Ready For Me