Archive for the ‘ Live Reports ’ Category

Débouler à mi-parcours d’un festival, ce n’est pas très agréable. C’est comparable à cette sensation que l’on ressent lorsqu’on arrive au milieu d’un repas. On a raté les hors d’œuvres, on se greffe aux conversations, on se sent un peu perdu. C’est ce bref ressenti, vite estompé, qui m’étreint alors que j’entre dans le Warehouse. Par bonheur, l’ambiance est bon enfant. La salle bouillonne en attendant Bat.

C’est avec un esprit conquérant que le trio déboule sur la scène. Ryan Waste (Municipal Waste) et ses acolytes sont au taquet. Metal jusqu’au bout des ongles : dans l’attitude et dans la musique. Bat ferraille un heavy-speed old school du plus bel effet. On pense logiquement à Motörhead et à toute cette scène graisseuse qui a enchanté les 80’s. Les tempos sont vifs, les refrains alertes ; le boulot est bien fait. Même s’il n’est pas un modèle d’originalité, Bat remporte la mise par sa sincérité communicative.

Après un changement de plateau net et sans bavure, c’est au tour des Finlandais de Rotten Sound de secouer le public du Nantes Deathfist. Abrupte, le groupe de Keijo Niinimaa privilégie l’attaque frontale. Rotten Sound suinte le grindcore par tous les pores. Ces gamins sales et mal élevés jouent à une vitesse supersonique, violentent une assistance consentante ; ils ressortent la tête haute de ces trente minutes d’agression pure et dure. Bravo !

Depuis sa création, Misery Index est une vraie machine de guerre. Composé d’ex-membres de Dying Fetus, Pig Destroyer, le quatuor ne fait pas de prisonnier. Il le prouve encore avec une prestation fiévreuse qui laisse bouche bée. En puisant dans quasiment l’ensemble de sa discographie, le groupe nous donne une leçon de brutalité musicale exemplaire. « The carrion call », « New Salem », « The great depression » sont de sacrées baffes. Le quatuor nous achève avec un « Traitors » définitif. Misery Index est en grande forme et prouve encore une fois son statut d’incontournable du death-metal.

Eyehategod est un groupe unique. Fer de lance du mouvement sludge, il est le seul à réellement suinter l’humidité du bayou, la bigoterie des White Trash et l’aliénation de la Louisiane. Mike Williams, clochard même pas céleste, et Jimmy Bower, fashion victim en jogging et crocs, tiennent leur baraque depuis 1989. Autant dire que ces deux légendes étaient attendues de pied ferme. Tant mieux car Eyehategod n’a pas déçu. Williams, déglingué à souhait, éructe sa rage à coup de vin blanc tandis que Bower assomme le Warehouse avec ses riffs ultra plombés. Les « tubes » giclent à la figure (« Sister fucker part.1 », l’effarant « New Orleans is the new viet-nam »…) et l’on ressort rincé de cette heure de pure folie.

Un concert de Napalm Death est une valeur refuge. On s’y sent bien. Si on connaît ses codes et habitudes. C’est bien simple, ce sont les mêmes depuis des années. Le quatuor envoie la sauce ; Barney vocifère, fait son footing quotidien et parle beaucoup entre les morceaux ; Shane Embury souffle mais martèle sa basse ; Danny Herrera blaste tandis que l’intérimaire (définitif ?) John Cooke riffe et fait bouger ses dreads. Et pourtant, ce soir, Napalm Death, sûrement galvanisé par les concerts précédents, est touché par la grâce. Le groupe va au charbon. Les musiciens sont au taquet et déroulent une set-list presque parfaite (« The wolf I feed », « Cleanse impure », « Mass appeal madness »…). A partir de « Suffer the children », le public pète littéralement les plombs. Les slams ne s’arrêtent plus. Un quidam se vautre sur la batterie. Les sourires sont légion dans le public. Nous passons un vrai bon moment avec les quatre de Birmingham. Le set se termine sur le classique « Nazi punks fuck off » et sur, plus surprenant, une excellente reprise de Sonic Youth, « White Kross ». Une preuve de plus que Napalm Death ne reste pas sur ses acquis et possède toujours une longueur d’avance sur ses concurrents. Les patrons, c’est eux.

Le Nantes Deathfist continue jusqu’au bout de la nuit au Ferrailleur, mais se finit ici pour moi. Bravo à l’organisation irréprochable et Paws pour leur délicieux hot-dogs.

Nico.

La galerie photo est à venir.

Retour chronologique sur cette soirée dédiée au metal qui a animé le Stéreolux le 22 janvier dernier. Au programme, trois groupes en hors d’œuvres avant d’accueillir Abbath en plat principal.

Sur cette tournée, Nuclear a tout à gagner. Programmés à la dernière minute, les Chiliens bénéficient d’une visibilité maximum sur une affiche attractive. Même devant un Stereolux clairsemé, ils jouent le tout pour le tout. Leur thrash-metal vintage évoque le Sodom et le Sepultura des débuts. Un programme alléchant. Pourtant, il n’y aura pas grand chose à en tirer…

Vltimas est un « All star band ». Blasphemer (Aura Noir, ex Mayhem), Flo Mounier (Cryptopsy) et David Vincent (ex Morbid Angel) se sont retrouvés pour accoucher d’un album (Something wicked marches in) assez bien fichu. Restait à valider cette formule sur scène.

Niveau musical, il n’y a rien à redire. Il n’y a pas d’hymne absolu, mais les riffs de Rune Eriksen tiennent la route. Mounier assure l’assise rythmique mais il a l’air de s’ennuyer. Les deux exécutants (Ype Terwisscha van Scheltinga à la basse et João Duarte aux rythmiques) sont besogneux.

Le problème vient essentiellement de David Vincent. Affublé d’une gabardine et d’un chapeau, le chanteur propose une prestation assez risible. Vocalement, s’il n’est pas trop à la ramasse, il joue la facilité en plaçant des « oh oh ooooh » un peu partout.

Par bonheur, le ridicule n’a jamais encore tué.

Avec 1349, nous entrons enfin dans le vif du sujet. Les Norvégiens représentent le black-metal sous sa forme la plus pure. C’est cru, abrupte et sans concession. Le quatuor a la bave aux lèvres ; il délivre une prestation impeccable. Ravn (chant) suinte la haine par tous les pores ; Seidemann (basse) et Archaon (guitare) font le job et riffent à tout va ; Frost (Satyricon) est une usine à blasts.

La set list est solide. Les neufs titres joués ne sont que malveillance et désolation. The infernal pathway est mis en exergue avec quatre titres qui passent aisément l’épreuve du live. Nous regretterons juste l’absence de morceaux de Liberation et de Beyond the apocalypse.

Avec son nouvel album et cette nouvelle tournée, 1349 effectue un vrai retour gagnant.

Après une intro grandiloquente, Abbath et ses sbires débarquent sur scène. Quelques secondes suffisent pour comprendre que Olve Eikemo est en grande forme. Depuis le désastreux (et alcoolisé) concert de Buenos Aires, on sent qu’un nécessaire resserrage de boulons a été effectué. C’est une initiative bienvenue.

Le bonhomme harangue donc la foule et va droit au but ! Abbath fait le show. Il le fait bien. Poses héroïques, grimaces et autres tirages de langue sont au rendez-vous. C’est une marque de fabrique qui a fait ses preuves. Mais le principal reste la musique. Accompagné d’un backing band compétent, Abbath assure. Outstrider et le premier album sont à l’honneur (« Count the dead », « To war ! »), mais le Norvégien joue aussi des morceaux de son ancienne formation (« Mountain of might », dantesque). Les deux époques se mélangent sans que l’on puisse faire la différence. Tant mieux. Au final, alors que nous craignions le pire, Abbath nous délivre une de ses meilleures prestations.

Comme quoi, sans alcool, la fête est plus folle.

Nico

Souvenez-vous. Sepultura dans les années 90. Le groupe était au top. La communauté thrash avait mis la formation brésilienne sur un piédestal. Roots était un chef d’œuvre absolu au succès indiscutable. Max Cavalera avait le monde à ses pieds.

La suite est moins avenante : dysfonctionnement, split, formation de Soulfly, deux bons albums puis… La déchéance. Plus rien. Jusqu’aux retrouvailles avec son frère, lui aussi démissionnaire du groupe qu’ils avaient créé. Résultat : trois albums corrects et une vraie renaissance en 2017 avec Psychosis. Mais il faut quand même bouffer. Alors les frangins prennent sur eux ; ils organisent des tournées commémoratives : en 2016 pour célébrer Roots ; en 2019, pour Beneath the remains et Arise, deux pierres angulaires du thrash/death. C’était le programme du concert organisé au VIP de Saint-Nazaire.

La salle est bondée. Un public de quadras aux cheveux et aux barbes poivre et sel attendent de pied ferme les deux frères. Max et Iggor arrivent sous les hourras, prêts à en découdre. Le tour de piste commence avec l’efficace « Beneath the remains ». Si l’assistance est d’emblée conquise, je ne rentre pas tout de suite dans le concert, décontenancé par l’apparence du chanteur.

Pourtant, à la fin du morceau et à l’entame de « Inner Self », le gros Max se tourne vers son batteur de frère et son regard brille. Un coup d’œil suffit. Max Cavalera, celui que nous adulions, possède encore la foi. Ce feu qui le fait continuer envers et contre tous. La drogue, l’alcool, les déceptions, les albums médiocres n’ont plus d’importance. A l’instar de Mickey Rourke dans le film The Wrestler, nous sommes en face d’un type sincère qui ne lâchera rien. Chose précieuse à notre époque où le superficiel est roi.

Plus rien ne peut arrêter les Cavalera. Les classiques s’enchaînent : « Arise », « Desperate cry » ou « Mass hypnosis » sont toujours aussi mordants. Si tout n’est pas parfait (« Altered Sate » incluant une reprise ratée du « War Pigs » de Black Sabbath), l’enthousiasme est prégnant. Le public enchaîne pogos et slams pour le plus grand plaisir de Max. En fin de concert, le quartet dégaine l’artillerie lourde : « Orgasmatron » de Motorhead, le cultissime « Troops of doom » et le tubesque « Roots, bloody roots ».

L’affaire se conclue avec un medley « Beneath/Arise/Dead Embryonic Cells ». Les frangins saluent et claquent même quelques mains. Ça sourit des deux cotés. Que demander de plus ?

Nico