Au risque d’en surprendre plus d’un parmi vous, sous mes dehors de brute épaisse, je suis fan d’Opeth. Bon, certainement pas autant que notre très peu regretté confrère qui, à l’heure actuelle, doit être en train de se masturber frénétiquement dans la région de St-Ulrich en susurrant Mikael, Mikaeeeeeeel, mais tout de même, Opeth était un de ces groupes plus « softs » – avec Tiamat et Anathema – qui avaient su me séduire. Son plus grand atout, à mes yeux, était justement ce bon vieux Mikael Åkerfeldt, et plus particulièrement sa capacité à me coller des frissons quand il prenait place derrière un micro. Raah, ses oppositions chant clair/growl ! « The Drapery Falls », putain, 10 minutes qui frôlent la perfection ! Deliverance, les 62 minutes les plus emballantes que le groupe ait pondues !

Il fut un temps où Opeth savait combiner le meilleur de deux mondes, où la mélancolie et la brutalité vivaient main dans la main. Une époque où Opeth n’avait pas banni ses influences Death de son répertoire. Parfois, je réécoute Deliverance et je me pose invariablement une seule question : What happened ?

En 12 ans et une poignée d’albums, Opeth s’est radicalement détourné de ses influences les plus extrêmes, adoucissant le propos au fil des années, le diluant de plus en plus pour nous laisser, au final, avec un mix de hard rock et de prog des 70’s qui, s’il est très bien exécuté, s’avère aussi bien moins passionnant que les premiers efforts du groupe. Sur Pale Communion, l’approche est résolument passéiste, à croire que le groupe avait établi un cahier des charges à suivre à la lettre. J’imagine presque Mikael, une checklist à la main, cocher petit à petit les éléments à intégrer : « Orgue Hammond ? Check ! Et faut que ça sonne seventies, bordel ! ». Le pire dans tout ça : le groupe a beau aligner des compos complexes, le tout semble malgré tout convenu, presque prévisible. Alors oui, c’est beau, c’est très bien exécuté (cela aurait été un comble si ce n’avait pas été le cas), mais pour ce qui est de l’émotion, on repassera. Là où Deliverance (oui, je sais, j’insiste sur cet album) me collait la chair de poule, Pale Communion ne m’accroche pas un instant. C’est lisse, et les quelques rares moments plus convaincants (j’aurais envie de mettre en avant « Cusp Of Eternity ») sont contrecarrés par d’autres passages franchement inutiles (l’interlude « Goblin » à la valeur ajoutée nulle).

Les fans du groupe me reprocheront certainement d’être un vieux con passéiste, accroché à Deliverance comme un coquillage à un rocher. Ce serait assez ironique, tant leur groupe favori a lui aussi opté pour la nostalgie (des 70’s, eux). Je n’ai rien contre les groupes qui, en cours de route, font évoluer leur son, leur identité, mais ce que nous propose Opeth depuis deux albums n’est pas une évolution. C’est une régression. Certaines formations ont un plan de carrière clair (à savoir se trouver un style et ne plus le lâcher, et les exemples sont nombreux), d’autres abordent leur reconversion avec plus ou moins de bonheur, mais Opeth a fait un choix curieux… et ceux qui nous invitent à oublier tout ce qu’Opeth a pu sortir avant Heritage pour pouvoir mieux cerner cet album, pour pouvoir mieux l’apprécier, démontrent justement que l’Opeth d’aujourd’hui n’a plus rien à voir avec l’Opeth qui me faisait vibrer. Pale Communion n’est pas un album d’Opeth. Opeth est mort.

Mister Patate (4,5/10)

 

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Roadrunner Records / 2014

Tracklist (55:53) : 1. Eternal Rains Will Come 2. Cusp of Eternity 3. Moon Above, Sun Below 4. Elysian Woes 5. Goblin 6. River 7. Voice of Treason 8. Faith in Others