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L’année passée, le Fortarock avait été une franche réussite. Affiche indécente, organisation efficace (mis à part quelques couacs au niveau de la vente de tickets boissons et des files à l’entrée), ambiance agréable, localisation parfaite. On pouvait difficilement rêver mieux. Jusqu’à l’annonce du Fortarock XL (plus grand, plus beau, plus génial) et d’un headliner de rêve, Rammstein.

Too big, too small, size does matter after all

Soyons honnêtes : l’arrivée sur le site, pour les chanceux comme moi (1), s’est déroulée dans des conditions optimales. Dès la descente du train, il suffisait de suivre le troupeau vers les navettes (5 EUR le ticket aller-retour) qui partaient à un rythme soutenu. 5 minutes d’attente, 15 de bus, arrivée devant l’entrée à 12h25, on scanne le ticket en deux temps-trois mouvements et voilà, l’affaire est dans le sac ! Pour les tickets boissons, le constat est identique : outre les caisses à l’entrée, plusieurs distributeurs ont été installés aux quatre coins du site, histoire de réduire les délais d’attente. Sur ces deux points, l’orga a tiré les leçons du passé. Amenra va commencer son set et j’ai déjà mes tickets boissons et un verre à la main, en étant entré cinq minutes avant : un exploit !

Amenra vs Audrey Horne

Premier d’une longue série de conflits au niveau des horaires, la haine d’Amenra contre la joie d’Audrey Horne. Je retiendrai d’Amenra un set radical sur un plan musical, les décibels s’abattent sur une foule encore un peu paralysée par la fraîcheur du temps. Par contre, je ne comprendrai jamais pourquoi le chanteur s’obstine à tourner le dos à la foule, alors qu’on le voit à peine (la faute à un jeu de lumières très intimiste). Histoire de ne pas mourir idiot, je passe voir Audrey Horne de loin, le groupe a la patate, « Young Blood » passe bien en live mais il est impossible de se rapprocher de la petite scène. Ha, cette Jägermeister stage, très mal placée en haut d’une faible pente : si vous ne faites pas 2 mètres 20 (la taille moyenne du Metalleux hollandais), vous ne voyez pas grand-chose. « On s’en fout du moment que le son est bon », me direz-vous… mais le son était très aléatoire pour couronner le tout. Bref, cette troisième scène s’est avérée d’un intérêt tout relatif, si ce n’est celui de pourrir la vie des fans tiraillés entre deux groupes passant au même moment. Il fait couvert, le temps se rafraîchit… 

Il est temps de mettre un petit pull Delain (2)

C’est nul. Désolé pour les fans, mais que faisait ce groupe sur la Mainstage, alors que des monstres comme Amon Amarth ou Kreator étaient relégués sur les petites scènes ? Enfin, il fallait bien du temps pour grailler ou pour boire un coup. Tiens, à ce sujet : putain mais c’était quoi, cette bière de merde ? J’ai dû boire du Jäger-coke et du Long Island Iced Tea toute la journée ! Et dire que nous avions eu de la Jupiler au Fortarock l’année passée…

Enslaved vs Hacktivist

Black progressif ou gangsta Djent ? Match nul. Pas moyen d’entrer dans le set d’Enslaved (la faute à ces nouveaux morceaux) et Hacktivist… Mouais, on aurait dit les Harlem Globe Trotters qui feraient une chorégraphie sur du Meshuggah du pauvre. On passe par le merch, on graille un coup, on laisse filer Textures qui remplace in extremis Five Finger Death Punch et qui livre un set assez bon sur une Mainstage bien trop grande pour le groupe, et on se place pour Entombed.

Heaven Shall Burn vs Entombed

Les teutons revenant en novembre en tournée headliner avec Hypocrisy, il est hors de question de laisser passer la bande à Petrov. Le son est un peu dégueu (la balance du micro étant approximative, on ratera quelques parties de chant), mais le groupe s’en bat les burnes. Du groove, du riff, de l’énergie à revendre, Petrov a beau être beurré comme un coing, il assurera encore le show avec le sourire et de nombreuses grimaces. Les nuques s’échauffent, il est 16h20, Entombed vient de finir son set et je tiens enfin mon premier bon concert de la journée !

A(C/DC)irbourne

Oh regarde, il monte sur le pylône pour faire son solo ! Oh regarde, il s’éclate une cannette de bière sur la tête, trop rock’n’roll ! Pour la 4e fois, j’aurai assisté au même show d’Airbourne. Seule la setlist a changé, accueillant quelques nouveaux morceaux. De loin, en fermant les yeux, on se croirait à un concert d’AC/DC… Mais on garde les yeux bien ouverts, au cas où il se vautrerait pendant ses séances d’escalade. Remarquez, s’il meurt en plein show en tombant du haut de la scène, ça aura plus de gueule que de passer l’arme à gauche étouffé par son propre vomi… N’est-ce pas, Bon Scott ?

Mastodon vs Finntroll

Une nouvelle fois, impossible de s’approcher suffisamment de la Jägermeister stage pour voir les Trolls à l’œuvre. Oreilles pointues, corpsepaint, énergie à revendre, Finntroll semblait pourtant en mesure de jouer un bon rôle aujourd’hui mais, de loin, il est plus difficile de véritablement entrer dans leur set. Bien, mais pas top, donc, on passe rapidement voir Mastodon qui peine à atteindre le niveau qu’ils nous avaient proposé au Werchter Boutique. Le chant clair est très approximatif, le son pas vraiment bon. Retour au bar avant la séquence « on achève bien les chevaux »

Motörhead

Non, Lemmy, on n’est pas à Eindhoven. On est à Nimègue. C’est moche, de vieillir… et encore plus moche de ne pas savoir s’arrêter. La prochaine fois que Motörhead sera à l’affiche d’un festival auquel j’assisterai, je veillerai à rester bien loin de la scène où il joue et me contenterai des bons souvenirs de leurs concerts d’il y a quelques années, quand Lemmy ne donnait pas l’impression d’être aussi usé…

Amon Amarth vs Kreator

« Je regarde trois titres des Vikings, puis je vais voir Kreator ». Ouais, ouais, on dit tous ça. Amon Amarth est une machine de guerre bien huilée dont le frontman est passé maître dans l’art de jouer avec son public. Setlist au poil, un nouveau titre pour faire passer le tout, le public reprend les refrains en chœur… Certainement un des meilleurs sets de la journée. Je verrai tout de même la fin de Kreator, dont le son est loin d’être aussi bon que celui d’Amon Amarth… Et puis, ça ne faisait pas longtemps que je les avais vus.

Volbeat : « il faut souffrir pour avoir une belle place »

Eh oui, pour s’assurer une bonne place pour voir Rammstein, j’aurai donc subi tout le set de Volbeat et zappé Hatebreed. Que voulez-vous : mettez 50.000 personnes dans un parc, assez d’alcool pour mettre le Luxembourg en état d’ébriété et vous obtenez immanquablement un beau bordel. Le contraste avec l’année passée est d’ailleurs saisissant : l’ambiance bon enfant de 2012 a laissé la place à un sentiment d’oppression, de cohue continue. Volbeat, donc… Ce groupe ne doit sa place aussi haut sur l’affiche qu’à son côté bankable. Au final, sur l’heure de set, j’aurai apprécié trente secondes, quand ils ont fait une petite cover de Slayer en hommage à Jeff. Et le reste ? Un gros bof. Je me demande quel mouche a pu piquer Caggiano pour qu’il quitte Anthrax et rejoigne Volbeat…

Rammstein

Et au final, ce sont 6 Allemands avec un amour illimité pour les flammes et les explosions qui auront sauvé une journée plutôt morose jusqu’alors. Les temps changent, mine de rien. Dans les années 40, à moins d’être collabo, personne n’aimait les Allemands adeptes de flammes et d’explosions… 

A l’instar d’un Airbourne, le set de Rammstein est millimétré, programmé comme sur du papier à musique, mais là où les Australiens se contentent d’une boîte de bière et d’un pylône, les Allemands ont de la suite dans les idées et un coffre plein de jouets qui font BOUM. « Ich tu dir weh » commence sur un petit feu d’artifice, Till arpente la scène avec un manteau de vieille prostituée et le public reprend en chœur chaque phrase du refrain (on voit que l’Allemagne n’est pas loin de Nimègue). La fosse est déchaînée dès les premières notes et l’ambiance monte encore d’un cran avec « Wollt Ihr… ». Plongeon des années en arrière, on retrouve la chorégraphie « Live Aus Berlin », les feux d’artifice sur le passage « Sex ist eine Schlacht, Liebe ist Krieg », le groupe en met plein les yeux et plein les oreilles avant d’enchaîner sur une setlist délibérément rentre-dedans. « Keine Lust », « Sehnsucht »… La tension monte et explose sur un « Feuer Frei! » où les flammes montent au ciel et un « Mein Teil » encore plus pyrotechnique, encore plus enflammé. Le lance-flammes n’est pas assez gros ? Pas grave, on a plus gros en stock ! Explosions, flammes, jeux de lumière éclatants, pyrotechnie ahurissante (la pluie d’étincelles sur « Ohne Dich » et l’aller-retour sur « Du Hast »), faux pénis et litre de sperme sur « Bück Dich »… Michael Bay peut aller se rhabiller ! Les lumières se rallument, certains partent déjà avant le rappel (les derniers trains étaient prévus à minuit, il fallait 30 minutes pour rejoindre la gare et le set de Rammstein se terminait à 23h45… Cherchez l’erreur d’organisation n° 1443), mais le plus beau reste à venir. Un piano, une lumière rouge, Rammstein apparaît ici dépouillé et nous propose un « Mein Herz Brennt » acoustique de toute beauté, histoire de rappeler à tout le monde que Rammstein n’est pas qu’un grand cirque pyrotechnique, mais avant tout un groupe doué. Les musiciens reviennent pour un dernier baroud d’honneur, à savoir un « Sonne » écrasant au possible et un « Pussy » tout à fait débridé, Till chevauchant un canon à mousse géant en forme de pénis et transformant les premiers rangs en mousse party dantesque. Danke schön, Rammstein, es war geil! 

Setlist
Ich tu dir weh
Wollt ihr das Bett in Flammen sehen?
Keine Lust
Sehnsucht
Asche zu Asche
Feuer frei!
Mein Teil
Ohne dich
Wiener Blut
Du riechst so gut
Benzin
Links 2-3-4
Du hast
Bück dich (Rammstein-Intro)
Ich will

Mein Herz brennt (Piano Version)
Sonne
Pussy

Conclusion

À vouloir en faire trop, le Fortarock nous a clairement montré ses limites. Organisation parfois limite sur certains points, public beaucoup trop nombreux, programmation plus qu’hasardeuse : ce Fortarock XL était un fameux pas en arrière par rapport à une édition 2012 qui avait fait l’unanimité. La solution aurait peut-être été de supprimer une scène et quelques groupes (histoire d’éviter ces foutus chevauchements) et, surtout, de revoir la jauge du site du festival à la baisse. Jouer devant un public nombreux est certainement génial pour les groupes, mais passer deux heures serrés comme des sardines en dehors du « pit des chanceux » (le pit placé juste devant la Mainstage) pour espérer voir le headliner dans des conditions correctes était loin d’être agréable pour les fans… Le Fortarock a déjà annoncé qu’il serait de retour à cet emplacement pour l’année prochaine, espérons tout de même que l’orga tiendra compte des dysfonctionnements de cette année et reviendra un peu les pieds sur terre pour nous proposer un festival de l’envergure de l’édition 2013 avec le confort et la qualité de l’édition 2012.

 

 

(1) les moins chanceux sont venus en voiture jusqu’à Nimègue et ont perdu un temps fou dans les embouteillages. Voilà pour la petite histoire.

(2) il fait froid, le petit pull Delain… HUMOUR