16215-outsiderLe sort a été bien injuste envers Uriah Heep : alors que les apports musicaux du groupe de Mick Box au heavy metal sont indéniables, ces derniers sont peu reconnus. Si on ne peut dire qu’Uriah Heep a inventé les tempos échevelés, les chœurs majestueux et emphatiques, les claviers grandiloquents, les influences symphoniques et les références ésotériques, c’est sans doute le groupe qui les combina le plus systématiquement. Il est d’ailleurs significatif que Kai Hansen voue un véritable culte à Uriah Heep dont il a reprise l’excellent « Look At Yourself » sur le premier disque de Gamma Ray. Hélas : Uriah Heep n’a jamais supplanté Deep Purple ou Rainbow et consorts dans les années 70. De nos jours il mène une carrière assez tranquille, structuré qu’il est autour du guitariste et seul membre originel, Mick Box. Les deux autres piliers du groupe, le légendaire Ken Hensley, et le chanteur historique, David Byron ne sont plus de la partie, le dernier étant décédé et le premier se consacrant à sa carrière solo. Par ailleurs, le groupe a perdu il y a quelques années son bassiste émérite, présent depuis 1976 en son sein, Trevor Bolder. 

Dans ma chronique d’Into The Wild, le disque précédent du groupe, je m’interrogeais sur la pertinence de conserver en vie Uriah Heep alors que Mick Box n’était pas le principal compositeur du combo et que le remplaçant de David Byron, Bernie Shawn lui était bien inférieur malgré son professionnalisme évident. Or, si Into The Wild tenait déjà bien la route, Outsider prouvera sans aucun doute que la formation actuelle d’Uriah Heep est totalement légitime d’un point de vue musical.

C’est très simple à constater : il n’y a rien à jeter sur Outsider. Les compositions se succèdent, les solos s’enchaînent, les riffs se répètent et l’on ne trouve rien à redire. Outsider est tout simplement excellent. Certes, on repérera quelques titres plus saillants comme l’hymne qu’est « Jessie » doté d’un riff à réveiller un mort et d’un refrain à le faire jaillir de sa tombe. Ou bien l’ultraefficace « One Minute », qui après une bienheureuse introduction mélodique sur laquelle Bernie Shaw est impérial, se lance dans un mid-tempo majestueux puis de déboucher sur un refrain à l’avenant. L’esprit de Demons And Wizards (1972) est ici totalement présent et c’est une excellente nouvelle. Manifestement la paire de compositeurs que forment Phil Lanzon et Mick Box fonctionne parfaitement.

Cherchons quelque sombres au tableau : l’artwork d’Outsider est élégant et intéressant mais quand même déprimant ; les durées des morceaux sont un peu trop ramassées et on aurait apprécié quelques pièces plus ambitieuses, dépassant donc les six minutes. On aurait aimé plus de nuances et de variété donc, même si le propos aurait été moins « hard rock ». Disons-le clairement : un peu plus de « progressif » n’aurait pas été pour déplaire. On remarque en outre parfois du plus quelconque comme ce « Rock The Foundation », agréable mais trop évident. Sinon le reste est bon, tout bon. Si ce disque pouvait permettre au groupe de revenir au premier plan, il accomplirait totalement toutes ses promesses. Il en a le potentiel.

Baptiste (8/10)

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Frontiers / 2014

Tracklist : (45:00) 1. Speed Of Sound 2. One Minute 3. The Law 4. The Outsider 5. Rock The Foundation 6. Is Anybody Gonna Help Me ? 7. Looking At You 8. Can’t Take That Away, 9. Jesse 10. Kiss The Rainbow 11. Say Goodbye