Avant de commencer cette chronique, remercions le label de Pryapisme, qui m’a récemment contacté pour que je me penche sur le cas de Futurologie, leur nouvel EP. Apparemment, deux articles ne suffisent pas pour leur faire comprendre que Pryapisme, à mes yeux, n’est qu’un projet sans queue ni tête, d’une incohérence crasse et tout à fait imbuvable. Non, je ne parlerai pas de Pryapisme. Je préfère me concentrer sur un autre groupe de « Nawak », cette appellation générique stupide, une formation qui en vaut la peine, j’ai nommé Igorrr.
Et en fait, le postulat de départ des deux groupes est le même, à mes yeux : abattre les frontières, repousser les limites des genres, expérimenter, oser. Mais là où Pryapisme se contente d’une déstructuration bête, Igorrr se construit un univers cohérent, son univers, à mi-chemin entre le baroque et l’électro, et cet univers déjà dévoilé sur le génialissime Hallelujah est ici encore magnifié sur cet EP réalisé en collaboration avec Ruby My Dear. Une fois de plus, les éléments symphoniques baroques côtoient le breakcore, les riffs de guitare acérés viennent danser une gigue improbable avec un accordéon franchouillard… Sur le papier, cela sonne tellement faux, tellement dingue (un peu comme Pryapisme, me direz-vous), mais Igorrr a su canaliser son pouvoir créatif. Igorrr ne part pas d’un point A sans savoir où il arrivera à la fin. Son chemin est tortueux mais précis.
Entre génie et folie, il n’y a qu’un pas, une mince frontière. Igorrr a su rester du « bon » côté, mettre à profit son talent pour nous prouver qu’un tel projet peut tenir la route et subjuguer son auditeur. Du grand art.
L’histoire entourant la création du groupe THE MIDNIGHT GHOST TRAIN est loin d’être commune. Tout a commencé le 1er août 2007 alors qu’un certain John Goff était déclaré mort. Comme l’effet papillon si connu, cet événement enclencha une série d’évènements qui finirent par déboucher sur la création d’un nouveau groupe par Steve Moss, le meilleur ami de Goff. A travers sa musique, Moss tente de laisser une trace et de maintenir vivante la mémoire de son ami. Et l’aventure continue depuis ce temps-là et sept ans plus tard voici le power trio de retour avec un troisième album sous le bras, Cold Was The Ground.
Des débuts, Moss reste le seul rescapé et le seul capitaine de ce train fou lancé sur les routes principalement américaines. Ils n’auront pas ménagés leur peine toutes ces années, enchainant les tournées et les concerts partout où c’était possible. Il faut bien dire que par leur approche directe et sans concession, THE MIDNIGHT GHOST TRAIN a de solides arguments à faire valoir. Ce nouvel opus démarre de la meilleure façon, par une petite bombe stoner rock du titre de « Gladstone ». Toute la magie et la puissance séductrice des américains se voient ici résumées en presque quatre minutes. Prenez un riff pachydermique, lourd et épais, ajoutez lui une belle batterie, une basse groovante à souhait et le timbre de voix ultra masculin de Moss et vous obtenez un cocktail à la fois épicé et capiteux du meilleur effet. Ces bases rock classiques seront finement enrichies de touches sudistes, d’une pincette de blues et d’un son gras à en décorner les bœufs. Les différentes chansons évitent tout le superflu en allant directement à l’essentiel. Ne cherchez pas midi à quatorze heure, seul le heavy rock le plus pur vous sera ici proposé. Les mandales s’enchainent et l’auditeur en redemande. Le trio parvient à tisser un panorama subtil, entre lourdeur, ténèbres et colère sourde. L’intensité de ce Cold Was The Ground risque de filer la chair de poule à plus d’entre nous.
Chapeau bas pour la production ultra massive de ce disque qui colle parfaitement à la démarche et l’esprit des américains. THE MIDNIGHT GHOST TRAIN s’apparente à un rouleau-compresseur lancé à tout allure. Cachez les femmes et les enfants, les américains ne feront pas de quartier. Tous aux abris !
Tracklist (39:38 mn) 01. Along The Chasm 02. Gladstone 03. BC Trucker 04. Arvonia 05. One Last Shelter 06. The Canfield 07. Straight To The North 08. No. 227 09. The Little Sparrow 10. Twin Souls 11. Mantis
Jusqu’à présent, mon seul contact avec Nasty avait été sous une des tentes du Hellfest en 2011, vite fait, bien fait, quelques morceaux (le temps de les shooter) qui ne m’avaient pas forcément laissé un souvenir impérissable. En même temps, au Hellfest, après 3 jours, trop de bières et 20 kilomètres parcourus entre les scènes pour shooter un max de groupes, les souvenirs sont souvent assez vagues. Et finalement, si nos chemins se recroisent, c’est un peu grâce au hasard et à un ancien confrère qui vantait les qualités du nouveau clip du groupe sur Facebook. Il n’en aura donc pas fallu plus pour attiser ma curiosité (ce jeune homme ayant bon goût en Metal) et me voilà donc avec un album qui, sur le papier, risque pourtant d’avoir du mal à me convaincre.
Et pourtant, Shokka est au final une bonne petite surprise comme je les aime. J’ai beau avoir souvent du mal avec le genre pratiqué (hardcore beatdown méchant), Nasty tire son épingle du jeu avec une hargne en béton armé. Chaque morceau est un uppercut en pleine gueule, les moshparts donnent une envie irrésistible de coller des pains à la ronde, et le tout dégage une énergie furieuse (mention spéciale à « Phönix » et « Politessenhass » et leur chant en allemand). Avec ses riffs de bûcheron et ses gangs vocals en furie, Shokka frise certes la caricature, mais le tout reste cohérent et efficace. Et pour ceux qui auraient envie de réduire Nasty à une bande de brutes sans talent, qu’ils écoutent leur outro digne de ce que Heaven Shall Burn peut faire de mieux.
Shokka vaut clairement le détour, et rares sont les galettes de hardcore qui me plaisent autant, grâce à cette hargne constante. On regrettera peut-être juste que l’édition limitée propose trois titres live au son plutôt discutable, mais la partie studio se suffit à elle-même.
BDHW / 2015
Tracklist (xx:xx) 1. Shokka 2. No 3. Phönix 4. Lying When They Love Us 5. The Heat 6. Real Talk 7. Skit 8. Fantasia 9. Rebel With A Cause 10. Skit 11. Politessenhass 12. Interlude 13. Irreversible 14. Fire 15. Outro 16. Fire On The People (Bonus – Live) 17. Hell On Earth (Bonus – Live) 18. Slaves To The Rich (Bonus – Live)