Archive for janvier, 2019

Kriegsmaschine – Apocalypticists

Ces derniers temps, si l’on évoquait la scène Black Metal polonaise, deux noms monopolisaient l’attention d’une large frange du public. Enfin, non, trois noms, mais associer Behemoth au Black Metal en 2019 est aussi pertinent que de passer une boule de neige au micro-ondes en espérant ainsi la faire durcir. Ces deux épouvantails, donc, étaient Mgla et Batushka (qui se fait désormais plus remarquer par ses dissensions que par son talent musical)… et ce tapage m’avait quelque peu refroidi et poussé vers d’autres horizons.

C’est ainsi que je suis passé à côté d’Apocalypticists, le nouvel effort des Polonais de Kriegsmaschine. Enfin, il était simple de passer à côté de cette perle tant la promo autour de cet album a été inexistante. Un beau jour d’octobre, le groupe a posté l’album sur Facebook, après trois ans sans le moindre signe de vie. Funeral Mist avait annoncé son album Hekatomb 15 jours avant sa sortie, Kriegsmaschine a fait encore mieux en mettant tout le monde devant le fait accompli.

Pour ceux qui l’ignorent, Kriegsmaschine est le frère de Mgla, avec qui il partage son line-up… Mais mis à part ce point, les deux formations opèrent dans un registre différent. Là où Mgla opte pour un Black « direct » sans pour autant verser dans l’écueil du blast continu, Kriegsmaschine propose un Black nettement plus posé, ambiancé. Et cette ambiance repose principalement sur la capacité du groupe à hypnotiser son auditeur par des rythmiques complexes et pourtant fascinantes. J’ai beau me creuser les méninges, je ne me souviens pas avoir déjà été tellement scotché par la performance d’un batteur aussi versatile en Black Metal.

Mais se focaliser sur la batterie serait tellement réducteur… Les mélodies et patterns de guitare, ainsi que ce chant râpeux qui viennent se greffer à ce squelette rythmique ajoutent une aura sombre. Prenez l’opener « Residual Blight » : les lignes de guitare sont discrètes, hypnotiques… Sans une telle section rythmique, elles tomberaient à l’eau. Et ce constat s’applique aussi au chant. Sans des compos solides, un registre aussi limité serait-il aussi efficace ?

Apocalypticists est un cas singulier. Habituellement, les albums sont portés par le chant de leur frontman, ou par les lignes de guitare. Ici, c’est la batterie qui s’installe sous les feux de la rampe. 50 minutes, pas un blast. Kriegsmaschine vient de nous proposer une leçon magistrale de Black Metal tout en prenant soin de laisser le « Guide du petit BM illustré » bien rangé dans son étagère. Kriegsmaschine colorie en dehors du cadre. Et c’est tellement excitant.

Mister Patate (9/10)

Facebook officiel 

No Solace – 2018
Tracklist (50:14) 1. Residual Blight 2. The Pallid Scourge 3. Lost in Liminal 4. Apocalypticists 5. The Other Death 6. On the Essence of Transformation

Anaal Nathrakh – A New Kind Of Horror

Une Lyric Video… « Le début de la normalisation, le signe d’un groupe qui succomberait aux modes et tendances, qui rentrerait dans le rang ». Voilà quel était mon ressenti lorsque le groupe a proposé son premier single, « Forward! ». Le duo ayant jusqu’alors toujours pris soin de donner un minimum d’informations sur ces textes, cette nouveauté avait éveillé en moi une petite crainte. Et si Anaal Nathrakh devenait un groupe comme les autres ?

Au final, cette crainte n’aura duré qu’un instant, vite balayée par une déferlante de haine que seuls Mick et Dave sont capables de déchainer. Avec ce concept album sur la Première Guerre Mondiale, Anaal Nathrakh fait à nouveau parler la poudre. Les hurlements semblent encore plus perçants, les morceaux encore plus agressifs (avec une mention spéciale aux samples de tirs d’armes qui viennent se superposer au rythme de la musique), le chant clair encore plus démentiel.

Et pourtant, A New Kind Of Horror ne perd pas en cohérence. Le talent du groupe réside dans sa capacité à canaliser toute cette énergie pour obtenir un résultat à l’impact maximal. Si je ne devais émettre qu’un seul regret, c’est celui de l’absence d’une petite touche de folie, comme le groupe a su le proposer par le passé avec des morceaux tels que « Tod Huetet Uebel » ou « Extravaganza! ».

Avec ce dixième album, Anaal Nathrakh ne se réinvente pas vraiment, certes, mais son identité sonore est tellement unique que tout changement radical n’est pas nécessaire. Les quelques petites évolutions parsemées au fil des albums précédents, alliées à cette capacité à proposer des albums cathartiques, font d’Anaal Nathrakh un groupe à part.

Mister Patate (9/10)

Facebook officiel

Metal Blade Records / 2018
Tracklist (32:55) 1. The Road to… 2. Obscene as Cancer 3. The Reek of Fear 4. Forward! 5. New Bethlehem / Mass Death Futures 6. The Apocalypse Is About You! 7. Vi Coactus 8. Mother of Satan 9. The Horrid Strife 10. Are We Fit for Glory Yet? (The War to End Nothing)

Bloodbath – The Arrow Of Satan is Drawn

On se souvient de ma perplexité quant au choix de Nick Holmes en guise de frontman de Bloodbath au moment de la sortie de Grand Morbid Funeral. Entre-temps, de l’eau a coulé sous les ponts, l’album s’est avéré une bonne surprise, Nick a su tenir la baraque en live (du moins lorsque je l’ai vu à Tilburg)… Les voyants étaient dans le vert, et l’annonce de cette nouvelle offrande de Death suédois m’a réjoui. Bon, on était pas dans l’euphorie totale, certes, mais j’étais impatient de voir si le groupe parviendrait à poursuivre sur sa lancée.

Eh bien, pour une surprise…

Est-ce dû à l’ajout d’un deuxième guitariste (officiant habituellement au sein de Craft) ? Ou à ce bon vieux Papy Holmes qui revient de mieux en moins dans son rôle de growleur ? Ou tout simplement au fait que ce n’est pas aux vieux singes de Bloodbath qu’il faut apprendre à faire des grimaces ? Toujours est-il que ce nouvel opus confirme le retour gagnant du groupe. Dès l’opener « Fleischmann », Bloodbath déverse un Death Metal gras et putride qui colle parfaitement avec l’imagerie des derniers shootings promotionnels du groupe. Loin des prods aseptisées de certains concurrents, Bloodbath a su trouver l’équilibre pour que le son soit à la fois « sale » (dans le sens gras… cette basse sur « Bloodicide » !) et « propre » (dans le sens où chaque instrument reste audible).

Mais pour qu’un album soit séduisant, il faut non seulement un bon son, mais aussi de bonnes compos, et là aussi, Bloodbath propose quelques morceaux très efficaces : « Bloodicide », le pachydermique « Levitator » et l’efficace « Chainsaw Lullaby » sortent du lot d’un album déjà très relevé.

De tous les comebacks des dernières années, celui de Bloodbath était celui auquel j’accordais le moins de chances de réussite. Et pourtant, en l’espace de deux albums, le groupe a su revenir de manière convaincante. Sans surenchère de moyens. Bloodbath a beau rester classique, il n’en est pas moins très efficace.

Mister Patate (8,5/10)

Facebook officiel

Peaceville Records / 2018
Tracklist (41:07) 1. Fleischmann 2. Bloodicide 3. Wayward Samaritan 4. Levitator 5. Deader 6. Marc Of The Crucifiers 7. Morbid Antichrist 8. Warhead Ritual 9. Only The Dead Survive 10. Chainsaw Lullaby