2018, quelque part dans les montagnes françaises…

« – Sinon, t’as des nouvelles de Famine ?

– Aux dernières nouvelles, il est toujours en Ukraine, à tiser de l’antigel avec la maison-mère du Metal militant. D’ailleurs, il prépare son nouveau disque, et il parait même qu’il va, je cite, « dropper du gros peura, sisi, DJ Nocide ».

– DU RAP ? Mais… Vu qu’on a toujours fait du KPN light, on va devoir aussi en faire ?

– Mmmm. C’est pas très compatible avec notre image, tout ça, il faut quelqu’un qui ait de l’expérience en rap mais qui soit pas trop… enfin, tu vois ce que je veux dire hein ?

– Et si on demandait à Hreidmarr ? Askip, c’est lui qui chantait sur Suprême MRAP avec Pierpoljak. Et dans MRAP, y’a RAP. Tu te souviens qu’on zoukait dans les alpages en écoutant « Indianadolf » tout en chassant les moutons noirs ?

– Ouais, cohérent. Et à choisir entre Rose et Pierpoljak, je préfère prendre un chanteur de black qu’un rastaboy qui sent la chèvre. Même si ça colle avec notre terroir, ce fumet de bouc… »

Et c’est ainsi que Rose Hreidmarr a rejoint Baise Ma Hache. Ou pas, en fait, j’en ai aucune idée.

Baise Ma Hache, donc, le petit frère montagnard de KPN, est de retour avec un nouvel album et, je dois l’avouer, l’élève dépasse cette fois le maître. Mais pour cela, il aura donc fallu que KPN crame tous ses fusibles, s’exile en Ukraine, fasse un auto-split avec lui-même et se mette au rap. Rien que ça. Un peu comme si Usain Bolt faisait un 100 mètres contre moi mais décidait, après 30 mètres, de s’immoler par le feu tout en courant en moonwalk.

F.E.R.T. donne l’impression d’un album composé et écrit sur la base de la checklist « je fais du black et je suis fier de mes racines » : l’imagerie guerrière (avec une pochette en mode « Blood Fire Death » du pauvre), les textes qui suent l’honneur et la supériorité, l’interlude mélancolico-bucolico-nostalgique avec bruits de bataille, l’interlude menaçant avec cuivres (avec Arditi)… Tout semble pesé, mesuré, réglé au millimètre pour caresser dans le sens de la mèche une certaine frange du public BM.

Et pourtant, F.E.R.T. peine à convaincre. Prenons l’opener, « Le Crépuscule des Gueux ». Il y a de bonnes idées, de bons riffs, mais tout cela se perd dans un patchwork décousu de 12 minutes, avec un sample de Seul Contre Tous à la valeur ajoutée nulle et deux ruptures qui viennent casser la dynamique du morceau. Et ce constat s’applique à l’ensemble de l’album. Trop long, avec ici et là quelques fulgurances, quelques idées pas assez exploitées ou, au contraire, surexploitées, traînées en longueur. Peste Noire avait prouvé avec La Chaise-Dyable  (et ses albums précédents) que l’on peut s’affranchir de toute limite sur le plan musical. BMH n’est qu’un pâle reflet de KPN, la folle maestria en moins.

Mister Patate (1,4/88)

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Hammerbolt Productions – 2018
Durée (51:88) 1. Le crépuscule des gueux 2. F​.​E​.​R​.​T 3. Traité du rebelle 4. Insociabile regnum 5. Furia francese 6. B.L.M.I 7. Aux modernes 8. Délivrance