Archive for septembre, 2024

Doodseskader- Year Two

En l’espace de 4 ans et d’un feu nourri de sorties dont le dénominateur commun est la qualité, Doodseskader – le duo le plus abrasif du Royaume – a su lentement mais sûrement se forger une solide réputation. Mélangeant habilement les genres, mariant le sludge, le post metal, une touche de rap et ici et là quelques beats agressifs (sur son énorme « FLF » sorti l’année passée), Tim (Amenra et bien d’autres projets) et Sigfried (Kapitan Korsakov pour ne citer que ce projet) ont gravi quatre à quatre les échelons et livrent avec Year Two un des albums les plus excitants de l’année.

Le succès de cette formule s’explique par un mot : la sincérité. Tout au long des 9 titres de cet album et sur scène, le groupe se livre, se met à nu dans un torrent d’émotions brutes qui traverse l’auditeur. J’ai eu la chance d’assister à leur release show à domicile à Gand et chaque titre de ce Year Two joué ce soir-là a fait mouche. Year Two fait vibrer, frissonner. Que ce soit dans un barrage de rancœur (« Bone Pipe » ou l’énorme single « I Ask With My Mouth, I’ll Take With My Fist ») ou tout en finesse et mélancolie (« Future Perfect (A Promise) » ou « People Have Poisoned My Mind… » et sa ligne de piano fantomatique avant un dernier déchainement), Doodseskader nous prend par la main et nous entraine dans son passé, ses traumas et nous maintient les yeux et les oreilles grand ouverts pour qu’on n’en rate pas une miette.

Year Two fait partie de ces albums qui se vivent, qui se subissent. Pour moi, il est difficile de ne retenir qu’un ou deux titres, tant l’ensemble est cohérent et monolithique. Un album sans compromis.

4+5/10

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(Autoproduction – 2024)
Tracklist (38:03) 1. Pastel Prison 2. The Sheer Horror of the Human Condition 3. Innocence (An Offering) 4. Bone Pipe 5. Peine 6. Future Perfect (A Promise) 7. Secrets Make Lonely 8. I Ask With My Mouth, I’ll Take With My Fist 9. People Have Poisoned My Mind to a Point Where I Can No Longer Function

Nails – Every Bridge Burning

Malgré mon âge, je n’ai toujours pas saisi le concept de modération. Pourquoi se modérer ? Pourquoi ne pas vivre à 200 %, quitte à souffrir le lendemain ? Pourquoi ne pas se plonger tête première dans l’aventure ? Dans un monde où tant de personnes marchent sur des œufs, pourquoi ne pas avancer avec la délicatesse d’un bulldozer ?

Je suis persuadé que notre brave Todd (ex-Terror et maintenant frontman de Nails) est animé par le même questionnement. Et que sa réponse est la même que la mienne : s’il faut faire quelque chose, autant le faire à fond, en poussant tous les potards dans le rouge, en ignorant tout à fait les limites, en les repoussant allègrement et, SURTOUT, en faisant « tout à sa mode et le reste à sa guise ». Sinon, comment expliquer ce nouvel « album » (17 minutes et des poussières après 8 ans sans activité notable, si ce n’est quelques titres ici et là et une hécatombe dans le line-up) qui a tout d’une grenade auditive ? Étroitement coincé entre deux groupes de Metal sympho dans le roster de Nuclear Blast, Nails accouche ici d’un successeur parfait à You’ll Never Be One Of Us qui, à l’époque, avait déjà une furieuse tendance à déchausser des chicots.

Hardcore ? Grind ? Peu importe l’étiquette, pourvu que le flacon puisse contenir suffisamment d’essence pour mettre le feu à tout ce qui se met dans votre chemin. Que ce soit pied au plancher (quasiment tout le temps, donc) ou dans les quelques rares passages plus lents de la galette (« Lacking The Ability To Process Empathy » et le lourd « No More Rivers To Cross » en clôture d’album), Every Bridge Burning est une leçon de violence, fidèle au son du groupe et lorgnant ici et là vers un Trap Them qu’on aurait gavé à la whey et au café (« Give Me The Painkiller » et « Made Up In Your Mind » qui n’auraient pas fait tache sur Darker Handcraft).

Every Bridge Burning ne décrochera pas le titre d’album de l’année. Trop court, pas vraiment raffiné, il se classera plutôt dans l’étagère des « défouloirs sonores », rangé derrière une vitre à briser en cas d’urgence et de besoin impérieux de cracher sa bile à la face d’un monde qui vous marche sur les kiwis.

9/10

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(Nuclear Blast Entertainment – 2024)

Tracklist (17:47) 1. Imposing Will 2. Punishment Map 3. Every Bridge Burning 4. Give Me the Painkiller 5. Lacking the Ability to Process Empathy 6. Trapped 7. Made Up in Your Mind 8. Dehumanized 9. I Can’t Turn It Off 10. No More Rivers to Cross

Wintersun – Time II

Dire que la perspective de la sortie de cet album créait une immense excitation chez votre serviteur relève du doux euphémisme. Tout était en place pour nous donner un pied monstrueux, douze ans d’attente, un premier opus qui reste année après année au sommet de mon panthéon personnel (chronique ICI), un disque intermédiaire d’excellent niveau (chronique ICI), tous les feux affichaient un beau vert. Jari Mäenpää, leader du groupe, précisait dans toutes les interviews que les compositions avaient été bouclées au sein du même tourbillon créatif que le volume I mais qu’il attendait de trouver le bon son, la bonne production afin de donner le plein potentiel à ces compositions.

Alors joie et félicité ? Et bien non, malheureusement. Time II reste un album solide, avec de bons moments mais l’apothéose n’aura pas lieu. Nous sommes ici deux crans en dessous de premier opus et même un cran en dessous du précédent, The Forest Seasons. L’impression générale reste décevante et la chute est d’autant plus douloureuse après une si longue attente. Difficile de ne pas avoir le sentiment que Mäenpää contemplait ces dix chansons en 2011/12 et a mis les meilleures dans le volume I. Les autres ne déméritent pas mais ne parviennent à créer le même enthousiasme.

Et pourtant tout commençait bien avec un « Fields Of Snow », ouverture instrumentale très réussie, une ambiance musicale venue d’Asie dans la continuité de « When Time Fades Away » du Time I. Les choses sérieuses débutent pied au plancher avec un « The Way Of The Fire » rapide, tranchant et accrocheur. Le moral est au beau fixe, on se dit que les quarante minutes à venir vont être enchanteresses et que les finlandais n’ont rien perdus de leur magie. Mais plus le disque avance plus le banal domine. « One with the Shadows » s’avère agréable sans plus et « Ominous Clouds » possède toutes les caractéristiques de l’interlude instrumental inutile.

Enfin, les deux gros morceaux, « Storm » et « Silver Leaves » ne provoquent que peu d’émotion. C’est bien fait mais sans âme et surtout sans la patte virevoltante de WINTERSUN. Mäenpää semble en pilote automatique, cela joue vite mais aucune mélodie n’imprime vraiment le cerveau, aussitôt écoutée, aussitôt oubliée. Ou sont les mélodies imparables, les chœurs puissants et cette envie irrésistible de relancer l’écoute du disque ? Une semaine après sa sortie, l’auditeur est déjà lassé. Time II déploie des merveilles pendant quinze minutes puis abandonne toute ambition. Cela fait peu, surtout face à notre niveau d’excitation originelle.

Le fond déçoit, contrairement à la forme. Le son est clair et puissant, rien à redire du côté de la production. Cependant difficile de savoir pourquoi cela a nécessité 12 ans d’attente. La pochette est réussie, œuvre de Cameron Gray, tandis que le livret a été conçu par l’artiste hongrois Gyula Havancsák. Dommage que l’album ne sorte qu’au format cristal pour le cd (hors éditions vinyles), pas de cd bonus, pas de coffret, cela fait un peu chiche. A force de tergiverser ou de faire des choix discutables au niveau de l’image et du business, on peut légitimement se demander si WINTERSUN n’a pas tapé sur le système de son label Nuclear Blast.

De quoi sera fait l’avenir des finlandais ? Bien malin serait celui qui oserait faire des prédictions. La balle est, comme toujours, dans le camp de Mäenpää, espérons qu’il ne mette pas à nouveau cinq ans pour proposer de nouvelles compositions. D’autant que les autres membres de l’attendent pas et s’avèrent être déjà bien occupés avec Kai Hahto & Jukka Koskinen chez NIGHTWISH ou encore Teemu Mäntysaari chez MEGADETH. Pas sûr qu’ils patientent encore très longtemps ans de se désintéresser le l’aventure WINTERSUN. Croisons les doigts pour que la muse créatrice se penche rapidement à nouveau sur le berceau du groupe. Il serait triste et dommage de terminer sur cette note tout juste honorable.

 

Oshyrya (6,5/10)
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Nuclear Blast / 2024
Tracklist (48:40 mn) 01. Fields Of Snow 02. The Way Of The Fire 03. One With The Shadows 04. Ominous Clouds 05. Storm 06. Silver Leaves