Voici bel et bien un OVNI. Musical s'entend. Pourtant H.e.a.t. était déjà connu pour être un des gros calibres du hard rock mélodique contemporain, d'abord grâce son morceau « 1000 Miles » candidatant pour l'Eurovision, puis grâce à deux disques d'excellentes tenues, l'éponyme H.E.A.T. (2008), et surtout Freedom Rock (2010). Ces deux disques avaient permis au groupe de démontrer des qualités de compositions indéniables, allant au-delà d'une réussite ponctuelle.

Toutefois, l'ascension du combo suédois avait été stoppée par le départ du chanteur Kenny Leckremo, peu de temps après la sortie de Freedom Rock. Étant donné le rôle du chant dans la musique du groupe et la personnalité de Leckremo qui apportait un cachet original à un hard FM somme toute très classique, il y avait lieu d'être inquiet. Surtout lorsqu'on apprit le recrutement rapide par le groupe du jeune Erik Grönwall. Vainqueur en 2009 du télé-crochet suédois Swedish Idol, Grönwall semblait bien éloigné des sentiers musicaux de Heat. même si les observateurs avisés avaient déjà remarqué qu'il brillait particulièrement sur des reprises qu'on n'imagine jamais entendre à la télévision française. 

Un nouveau venu brillantissime

À l'écoute de ce Address The Nation, on constatera que rarement choix fut aussi judicieux : Erik Grönwall y est tout simplement exceptionnel. Sorte de croisement entre Sebastian Bach, Terry Brock et Joey Tempest, le jeune chanteur affiche une technique impeccable alliée à une grande puissance vocale et à une versatilité à toute épreuve qui lui permet de passer du hard rock épique (« Breaking The Silence ») à la ballade raffinée (« The One And Only ») jusqu'à la pop rock intelligente (« Downtown »), et à chaque fois en se montrant brillantissime.

Transcendé par son nouveau chanteur, le groupe a composé un album plutôt court, de 42 minutes – soit le format des disques des années 80 – mais contenant dix titres totalement incontournables. Parlons franchement : sorti au milieu des années 80, Address The Nation, se serait logé sans aucun problème entre Slippery When Wet de Bon Jovi, Everybody's Crazy de Michael Bolton et The Final Countdown de Europe. Il n'y aucun temps mort sur le disque de Heat du fait de morceaux qui ont quasiment tous la potentialité d'être des hits. À vrai dire, on peut imaginer qu'il dut être bien difficile pour le groupe de choisir « Living On The Run » comme single plutôt que le formidable « Breaking The Silence », que le  groovy « I Need Her » ou que la ballade « defleppardienne » au possible qu'est « The One And Only », sur laquelle plane évidemment l'ombre de « Love Bites ».

Totalement maîtrisé

On aurait même pu imaginer aussi d'utiliser un titre plus AOR comme « In And Out Of Troube » sur lequel l'utisation d'un saxophone, se mêlant intellilgement avec les guitares pour des parties solo de haut vol, rappellera aux connaisseurs le meilleur Eddie Money. Les sonorités plus synthétiques et atmosphériques de la dernière chanson, renvoyant sur certains points à Alan Parsons Project, permettent de clore le disque sur une teinte musicale légèrement différente, sans non plus rompre avec la qualité globale. En effet,  « Downtown » est assurément extrêmement réussi, notamment en proposant des paroles moins légères que sur les titres précédents. La versalité de Heat sur ce disque apparaît donc totalement maîtrisée et laisse en outre entrapercevoir des possibilités d'évolution réelles pour la suite. Comme la concision du propos s'associe à la variété et à l'inspiration, il n'y a rien à redire sur ces 42 minutes.

Cette versalité ne signifie par pour autant l'éclectisme : le hard rock mélodique de Heat est typiquement issu des années 80 et se refuse obstinément à toute influence autre, ce qui fera grincer des dents les suiveurs de mode musicale. Mais on ne peut que tomber admiratif devant cette fidélité revendiquée à un héritage musical très décrié de nos jours. Et quand cette fidélité s'allie avec une inspiration et une fougue totalement juvénile, avec la volonté de ceux qui ont tout à montrer sans aucune vergogne, on tient finalement un OVNI musical totalement jouissiff. Heat vient sans doute de produire un des tout premiers chefs d'œuvre du Hard mélodique depuis vingt ans. Enfin ! 

Baptiste (10/10)

 

Site Officiel

Ear music – Sony Music / 2012

Tracklist (42:24) : 01. Breaking The Silence (04:50) 02. Living On The Run (04:55) 03. Falling Down (03:33) 04. The One And Only (05:07) 05. Better Off Alone (04:00) 06. In And Out Of Trouble (4:55) 07. Need Her (03:56) 08. Heartbreaker (03:05) 09. It's All About Tonight  (03:34) 10. Downtown (4:h33)