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Dyscarnate – With All Their Might

Make Way For The King.

Si je devais résumer mon ressenti envers cet album en une seule phrase, je prendrais cette phrase, tirée des paroles du morceau « Traitors In The Palace ». Dans un univers Death Metal où se bousculent anciennes gloires sur le retour, jeunots qui tiennent à les détrôner à grands coups d’albums qui ne sont que de pâles calques des efforts de leurs idoles, sans même parler de toute cette branche Death technique qui tient plus de la course aux armements que du feeling, Dyscarnate fait figure de bulldozer, et ce troisième album maîtrisé de bout en bout est du genre à mettre pas mal de monde d’accord.

Tout d’abord, il y a ce son. Clair, massif. Une production moderne qui rend justice aux instruments. La section rythmique pilonne sans relâche, avec en bonus une basse bien audible, qui ajoute une touche de groove au Death moderne du trio. Ajoutez à cela deux chanteurs, deux voix distinctes, l’une grave, l’autre criarde, qui se répondent, se complètent. À l’instar d’un Dying Fetus, les Anglais ont compris qu’il ne faut pas forcément être nombreux pour être bruyamment efficace, mais la comparaison s’arrête là.

Parce que Dyscarnate parvient à proposer un Death résolument violent, mais tout en restant intelligible et digeste. Un peu moins de 40 minutes, une bonne alternance entre brûlots groovy et morceaux plus mid-tempo (« Traitors In The Palace » qui coupe parfaitement l’album en deux avec une petite touche épique), quelques touches Deathcore, une influence de Meshuggah au niveau du riffing et de l’audace pour clôturer sur un morceau atypique : le groupe a su canaliser son énergie pour la délivrer de manière diaboliquement efficace. Aucun morceau ne semble dénoter dans cet album au niveau de qualité constant et très élevé.

Dyscarnate fait partie de ces groupes qui ne bénéficient pas de l’attention qu’ils méritent. Là où tellement de formations talentueuses s’embourbent dans le passé, le trio britannique fait le choix de regarder de l’avant. Et si d’autres groupes suivaient cet exemple, l’avenir du Death serait radieux.

Mister Patate (9/10)

Facebook officiel 

Unique Leader Records – 2017
Tracklist (39:05) 1. Of Mice and Mountains 2. This Is Fire! 3. Iron Strengthens Iron 4. Traitors in the Palace 5. To End All Flesh Before Me 6. Backbreaker 7. All the Devils Are Here 8. Nothing Seems Right

Behemoth – I Loved You At Your Darkest

I shall not forget

Je n’oublierai pas “mon” Behemoth. Ce groupe (enfin, peut-on parler de groupe, ou devons-nous plutôt parler de Nergal qui, au fil des années, s’est entouré de musiciens pour nous partager sa vision du Metal et a conservé, depuis quelques albums déjà, un line-up stable ?) qui a commencé par un Black Metal « pur » avant, petit à petit, de faire des infidélités à ses premiers amours pour y ajouter une touche Morbid Angelienne et aligner des albums de Black-Death toujours plus violents, toujours plus asphyxiants. Demigod, The Apostasy, Evangelion : chaque album repoussait les limites.

Puis vint la maladie de Nergal, sa guérison, et The Satanist. L’album de la rupture. Des années après sa sortie, il reste à mes yeux un soufflé qui serait trop vite retombé et, mis à part quelques détails, mon avis est inchangé. The Satanist était un pas en arrière, et Behemoth donnait l’impression de vouloir tisser des ambiances avec un métier à tisser faussé. Je ne donnais pas cher de la peau du groupe, à plus forte raison lorsque Nergal a ouvert la parenthèse Me And That Man (et espérons qu’elle soit refermée à jamais). Et pourtant, voilà un nouvel album de Behemoth. Et je ne sais pas quoi en penser.

I shall not forgive

Enfin, si, je vois où le bât blesse. Nergal a voulu transformer Behemoth en une « expérience totale », à l’instar d’un Rammstein. Behemoth n’est plus uniquement un groupe de musique : il mise également sur divers artifices (au niveau de l’imagerie, des shows, de la provoc’ plus ou moins facile, voire du merchandising à la con avec notamment son propre café et ses croquettes pour chien) pour faire parler de lui. Cependant, le propos musical semble être passé au second plan. Piochant ici des plans qui sonnent étrangement familiers (« Wolves Ov Siberia » à partir de 1:30, c’est presque de l’auto-plagiat), proposant là des morceaux plutôt expérimentaux selon les normes de Behemoth mais hors-sujet (« Bartzabel » avec le cul coincé entre deux chaises), Nergal brouille les pistes, se disperse allègrement en « artiste libre ». Prenez « God = Dog » : des accoutrements pseudo-religieux, des chœurs un poil mystiques… Sans l’ajout des enfants de chœur en fin de morceau, on avait presque un morceau de Batushka à la sauce Behemoth !

Nergal se moque de notre avis. Nergal se moque de ce que diront les chroniqueurs. Tant qu’on parle de son groupe, il existe. Je me réjouis certes de cette liberté d’un artiste en mesure de faire ce qu’il lui plait, mais cela ne signifie pas pour autant que je dois aimer cette évolution à mes yeux mal maîtrisée. Sans parvenir à s’affranchir de ses origines, Behemoth livre un album plutôt décousu et faussement brutal. Evangelion exsudait la violence, I Loved You At Your Darkest sonne creux, parfois faux même. Espérons que le groupe parviendra un jour à vraiment franchir le pas et à redevenir une entité cohérente…

Mister Patate (3,5/10)

Facebook officiel 

Nuclear Blast Records / 2018
Tracklist (46:32) 1. Solve 2. Wolves ov Siberia 3. God = Dog 4. Ecclesia Diabolica Catholica 5. Bartzabel 6. If Crucifixion Was Not Enough… 7. Angelvs XIII 8. Sabbath Mater 9. Havohej Pantocrator 10. Rom 5:8 11. We Are the Next 1000 Years 12. Coagvla

Obscura – Diluvium

Annoncé comme la conclusion d’un cycle entamé sur l’album Cosmogenesis, Diluvium a la lourde tâche de mettre un point final à une série qui, à mes yeux, avait perdu de son charme avec un Akróasis qui soufflait le chaud et le froid, où des redites cohabitaient avec quelques passages largement au-dessus du lot. En surfant sur Facebook, j’avais vu passer une chronique qui estimait que Diluvium est l’équivalent, dans la discographie d’Obscura, de Koloss, l’album le plus accessible et malgré tout reconnaissable de Meshuggah. Une telle annonce n’était pas forcément une bonne chose, car elle aurait signifié, pour Obscura, une simplification des compos, voire un appauvrissement du propos.

Mais au final, il n’en est rien. Certes, on peut le trouver plus direct et plus accrocheur que son prédécesseur, et il contient quelques morceaux aussi efficaces qu’un « Anticosmic Overload » pour ne citer que lui, mais il n’est pas pour autant facile d’accès. Que ce soit au niveau de la section rythmique (et surtout la basse, habituellement reléguée aux seconds rôles dans le monde du Metal et ici très présente et mise en valeur par une production très claire) ou des plans de guitare, Obscura ne propose pas un album facile, loin de là. Mais Obscura parvient malgré tout, et c’est une prouesse, à proposer un album qui soit supérieur sur le plan technique tout en restant facilement écoutable. Pas de plans incohérents, pas de course à la rapidité ou d’avalanche de notes. Diluvium reste avant tout un album agréable à écouter.

Diluvium a su clôturer en beauté cette série d’albums. Et sans l’utilisation « abusive » du vocoder sur certains morceaux, mon verdict final aurait pu être encore plus positif. Après de nombreux changements de line-up, Obscura semble tenir aujourd’hui son line-up le plus efficace. Après cette tétralogie sur l’Espace, je suis très curieux de voir ce que la bande à Steffen Kummerer nous réserve pour la suite.

Mister Patate (8,5/10)

Facebook officiel

Relapse Records / 2018
Tracklist (53:58) 1. Clandestine Stars 2. Emergent Evolution 3. Diluvium 4. Mortification of the Vulgar Sun 5. Ethereal Skies 6. Convergence 7. Ekpyrosis 8. The Seventh Aeon 9. The Conjuration 10. An Epilogue to Infinity 11. A Last Farewell*