Il est des associations a priori improbables. Pensez : comment associer les laboureurs du hard roots et seventies que sont les Great White avec le franco-espagnol Terry Ilous, chanteur et leader du groupe des années 80' XYZ ? On pouvait s'interroger sur la manière dont pouvait se combiner la voix plutôt mélodique et haut perchée de Terry Ilous avec le hard assez rugueux et dépouillé de Great White, gorgé de blues, d'ambiance enfumée… et de Jack Daniels. Jack Daniels qui est un peu la cause de l'intégration d'Ilous tant il a eu des effets délétères sur la santé du chanteur et fondateur du groupe Jack Russel enfoncé dans la bouteille jusqu'au goulot. Il s'agit d'un désastre personnel ayant entraîné trop d'annulations de concerts et d'hospitalisation en urgence pour que le groupe continue avec Russel. À ce jour, le chanteur, qui prétend être sobre depuis quelques mois, officie dans son propre combo : Jack Russel's Great White. Entretemps, Terry Ilous avait déjà dépanné le groupe en mal d'un chanteur en bon santé et l'idée s'est imposée naturellement de le conserver à temps plein au sein de Great White.

Si les prestations live de Great White avec Terry Ilous ont recueilli de bons échos, on pouvait évidemment s'interroger sur le résultat de l'association sur disque. N'allons pas par quatre chemins : le résultat est excellent. Et ce jugement ne m'est pas uniquement inspiré par ma profonde sympathie pour Terry Ilous et mon penchant pour sa voix et son savoir-faire : avec la meilleure volonté du monde, on peut facilement arriver au pire. Non, c'est parce que Elation est un excellent disque de Great White sur lequel la prestation de Terry Ilous est très bonne. Le groupe semble avoir retrouvé un allant certain et enquille les bonnes compositions comme Lemmy les verres de Bourbon. Entre les « Love Train », « Heart Of A Man » et son refrain plus lyrique que de coutume, et « Resolution », il n'y a que du bon. Le seul titre un peu plus faible, « Lowdown », n'est qu'un bonus malencontreusement placé au milieu du disque et non à la fin comme il se devrait. Manifestement le recrutement de Terry Ilous a relancé l'inspiration du groupe, une inspiration qui cette fois pioche autant du côté du Zeppelin plombé, que des Pierres qui roulent ou du Courant alternatif et continu. Mais évidemment, comme généralement chez Great White, on parle d'« inspiration » et non de « clonage ». C'est l'essentiel.

Revenons à Terry Ilous. Quel est le rôle qu'il a joué dans le succès musical de l'album ? À mon avis, il est indéniable. On s'en rend compte instantanément à l'écoute du premier morceau, « (I've Got) Something For You » : sa voix se montre parfaitement adaptée, ne s'éloignant pas tant que cela de celle de Jack Russel, malgré une technicité bien supérieure. C'est cette maîtrise technique qui lui permet de proposer autre chose dans une veine plus mélodique (écouter le très beau « Promised Land » et notamment son refrain) et d'apporter en fait plus de variété que de coutume aux vocaux chez Great White. 

Une intégration à l'image de ce nouveau disque : totalement réussie.

Baptiste (7,5/10)

 

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Frontiers / 2012

Tracklist (61:01) : 01. (I’ve Got) Something For You 02. Feelin’ So Much Better 03. Love Train 04. Heart Of A Man 05. Hard To Say Goodbye 06. Resolution 07. Shotgun Willie’s 08. Promise Land 09. Lowdown (bonus track) 10. Just For Tonight 11. Love Is Enough 12. Complicated